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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 1:06 |
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felyrops a écrit: | … en Grec ancien ça doit être μοσται … |
Ce μοσται m'intrigue. Il n'est dans aucun de mes dictionnaires et a une forme bien étrange …
Personnellement, j'aurais traduit « courage » par θυμός [thūmós] bien que le sens de ce mot soit beaucoup plus riche. |
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felyrops
Inscrit le: 04 May 2007 Messages: 1143 Lieu: Sint-Niklaas (Belgique)
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 2:10 |
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Et pourquoi pas, θυμός , le Téméraire. Les ducs de Bourgogne connaissaient certainement les racines grecques, quoique les éponymes ne sont données qu'après leurs mort. Je n'aurais pas dû m'aventurer dans la langue Grecque, qui n'était pas language de Cour. N'empèche que Charles le Téméraire fut notrre souverain, et il y a toute raison d'en être fière, n'en déplaise aux Helvètes! |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 9:07 |
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En grec ancien et moderne pour dire courage on a les termes: θάρρος, τόλμη, γενναιότης qui dans la forme moderne se dit γενναιότητα, μεγαλοψυχία, μεγαθυμία etc…
Le terme θυμός a en grec moderne surtout le sens de colère. |
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Jean-Charles
Inscrit le: 15 Mar 2005 Messages: 3124 Lieu: Helvétie
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 9:41 |
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felyrops a écrit: | Et pourquoi pas, θυμός , le Téméraire. Les ducs de Bourgogne connaissaient certainement les racines grecques, quoique les éponymes ne sont données qu'après leurs mort. Je n'aurais pas dû m'aventurer dans la langue Grecque, qui n'était pas language de Cour. N'empèche que Charles le Téméraire fut notrre souverain, et il y a toute raison d'en être fière, n'en déplaise aux Helvètes! |
Ça dépend desquels 8)
Les Romands sont très fiers de l'héritage burgonde et de sa manière décomplexée de prendre la vie du bon côté et ne craignent pas de ripailler haut et fort, et qui rotent et pètent à table, dit on ( et c'est pas tout faux ^^ ). C'est d'ailleurs en Valais que se trouve la Royale Abbaye de St-Maurice d'Agaune, là où sont conservés des documents qui sont une partie de la mémoire burgonde.
L'erreur du Duc Charles a été d'attaquer des alliés des Suisses, alors qu'ils étaient alliés à la France. Dans son cas, la témérité était de s'attaquer aux Suisses plutôt que de s'affirmer face à la France.
On eut préféré Charles le Courageux plutôt que Charles le Téméraire. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 13:26 |
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C'est toute la différence entre courage et témérité qui m'a conduit à faire le choix de θυμός pour rendre le premier en grec ancien.
On a une relative ambiguïté dans τόλμη. Le mot appartient à la racine du verbe ταλάσσαι « prendre sur soi », d'où « supporter » mais aussi « avoir confiance en soi, prendre la responsabilité de ». Il y a là un sens de la mesure (soulever, soupeser) que l'on retrouve dans d'autres évolutions du thème eurindien *tel-h₂-/*tl-eh₂- :
lat. tollō « porter » et surtout tolerō « supporter, endurer » (fr. tolérance)
skr. tulā « balance, équilibre »
Le dérivé τόλμη ne signifierait ainsi que « action de prendre sur soi, d'oser » mais tout dépend du contexte : en bonne part on aurait « courage, hardiesse » mais en mauvaise part « audace, excès ».
Un phénomène analogue se retrouve dans le thème eurindien *dhṛ-s-.
En sanskrit, le verbe dhṛṣ-, dhṛṣṇoti, adj. verb. dhṛṣṭa- a le sens général « oser, hasarder, risquer » mais prendra, selon le contexte, les sens positifs de « avoir de l'audace, du courage » ou négatifs de « être téméraire, insolent, présomptueux ».
En grec, une relative distinction s'est faite tardivement entre ses dérivés, selon que le ṛ voyelle aboutit à αρ ou ρα. Pour Homère, le sens général est la bravoure mais, en attique, on distingue le plus souvent :
θάρρος (< hom. θάρσος) [thárros, thársos] « audace, courage, confiance, assurance »
θρασύς [thrasús] « audacieux (en mauvaise part), téméraire, arrogant »
En français, le courage, lié étymologiquement au cœur, est essentiellement la faculté de résister à des sentiments négatifs. Pour le combattant il s'oppose classiquement à la peur, mais on dit aussi « ayez du courage » avant d'annoncer à quelqu'un la mort d'un proche, ou encore « avoir le courage de suivre un entraînement, d'arrêter de boire, etc. ».
Cela correspond assez bien à la conception ancienne de θυμός où cette partie de l'âme, issue du cœur, est le siège de la volonté, de l'intelligence, des sentiments et des passions. Pour Platon, elle est le siège des passions nobles.
Cette généralité conduit, dès Homère, à une grande variété d'emplois :
οἱ θυμὸς ἐβούλετο « son cœur voulait » (Il. 15.596)
θυμὸς ἐφορμᾶται πολεμίζειν « mon cœur est impatient de combattre » (Il. 13.73)
ἤιδεε γὰρ κατὰ θυμόν « il savait dans son cœur » (Il. 2.409)
ἔνα θυμὸν ἔχειν « être animé du même sentiment » (= avoir un seul θυμός, Il. 15.710)
θυμὸς μέγας « grande colère » (Il. 2.196)
θυμὸν λαμβάνειν « prendre courage » (Od. 10.461)
Bien qu'on puisse le contester, j'espère avoir rendu clair le choix que j'ai fait, m'appuyant sur ce qui, en français, distingue le courage de la hardiesse ou de la bravoure. D'autres choix sont possibles, j'écarterai dependant le γενναιότης [gennaiótēs] proposé par Hélène qui, comme sa formation sur la racine γεν- l'indique bien, signifie surtout « qualité d'une âme bien née, générosité, noblesse ». |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 13:45 |
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Tu as tord d’écarter γενναίος malgré que le signification de base est celle de bien né, le sens est plus élargi.. Tu peux vérifier dans n’importe quel dictionnaire grec, tu verras qu’il est synonyme de courage. Je suis en ce moment avec un très vieux PC car l’autre est en réparation je ne peux rien scanner, je ferai cependant dès que possible. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 15:42 |
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Désolé, Hélène, mais je ne prends pas « n’importe quel dictionnaire » quand il s'agit de déterminer les champs sémantiques en français d'un mot !
On sait très bien les effets pervers des traductions en cascade (même quand elles ne sont pas automatisées). J'utilise celui d'Anatole Bailly (que les hellénistes français connaissent bien) qui a été révisé par Louis Séchan.
Une colonne entière y est consacrée à γενναῖος et, si l'on y trouve bien tous les emplois de bonne naissance, de bonne famille, de noble race (y compris pour les animaux et les plantes), voire de naissance libre, ainsi que les usages moraux de noblesse d'âme et de générosité ou les emplois métaphoriques comme ceux de la solidité d'un mur « bien bâti », on n'y trouve pas la moindre allusion au courage !
On donne effectivement un équivalent « mon brave ! mon bon ! » pour rendre l'adresse ὦ γενναῖε [ō gennaíe] (Platon, Tragiques) mais, ici, le français « brave » n'a aucun rapport avec le courage …
Le dictionnaire de Bailly couvre la période qui s'étend d'Homère jusqu'au début du VIIe siècle de notre ère (principaux Pères de l'Église), ce qu'on est plus ou moins convenu d'appeler le « grec ancien ». Si, par l'intermédiaire d'un « valeureux », on a pu passer plus tard du sens de « noble » à celui de « brave », c'est une autre histoire. |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Tuesday 14 Aug 07, 15:45 |
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Ce terme s’étant jusqu’à nos jours cher Outis et là c’est moi qui suis désolée. Lorsqu’en Grèce on parle aujourd’hui de quelqu’un de γενναίος le sens attribué est celui de courageux. |
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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Monday 10 Mar 08, 22:09 |
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Stinus a écrit: | meuuh a écrit: | En Norvégien, courage se dit:
mot
Je ne sais pas comment c'est en néerlandais, mais en norvégien contre se dit aussi mot...
C'est pour ca que je trouve que dans le courage norvégien, il y aune idée de résistance... | les danois sont des courageux résistants aussi alors. "courage" se dit mod et on utilise effectivement le même mot pour dire "contre" | En suédois aussi. Mais on retrouve aussi le terme kurage.
mod, kurage
rohkeus, uskallus
sự can đảm, (sự | lòng) dũng cảm, dũng khí, nhiệt tình, nản lòng, hăng hái
Il y a une expression anglaise Dutch courage (courage hollandais) qui désigne la mesure de courage additionnelle que provoque l'état d'ébriété.. |
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felyrops
Inscrit le: 04 May 2007 Messages: 1143 Lieu: Sint-Niklaas (Belgique)
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écrit le Tuesday 11 Mar 08, 0:18 |
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En flamand/néerlandais le courage, c'est moed, et courageux moedig.
Charles le Téméraire, au 15e siècle, se disait 'Karel de Stoute'. (ça n'a rien à voir avec la bière, stout signifie maintenant méchant). |
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giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
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écrit le Tuesday 11 Mar 08, 1:27 |
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En piémontais, on dit:
- corage (lire: "couradje")... it. "coraggio" (coradjdjo)
- cheur (lire "coeur", mais avec r roulé).
Corage et cheur pouvaient être des synonimes, jusqu'au XVIIIe siècle.
Maintenant, l'utilisation figurée de cheur a changé en direction de l'italienne: cheur comme "sensibilité vers les personnes qui souffrent".
Dernière édition par giòrss le Sunday 25 Sep 11, 9:44; édité 3 fois |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11172 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 25 Sep 11, 8:29 |
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courage a été synonyme de cœur dans tous ses emplois figurés jusqu’au XVIIe s. (Voir plus haut la célèbre citation du Cid). À cette époque-là, il jouissait même de la vogue du suffixe -age qui le faisait préférer à cœur, tout comme on préférait herbage à herbe et ombrage à ombre.
L'étymon de coeur est le latin cor, cordis, même sens, dont l'équivalent grec est καρδια [kardia]. La racine IE est *kerd-, même sens.
Il y a deux faits intéressants à noter à propos de cette petite famille :
1. Les mots à base -cord- issus du latin comme accord, concorde, discorde etc. ont subi la contamination du gréco-latin chorda, « corde d’instrument de musique », si bien que le sens moral et premier de « concorde - discorde » a finalement été ressenti comme second et métaphorique par rapport au sens musical, technique, de « accord - désaccord ».
2. Certains étymologistes font l’hypothèse que pourraient bien se rattacher à cette racine les mots de la famille du latin credere, lequel viendrait d’une extension *kred-dʰə-, « placer son cœur, sa foi ». (Voir le MDJ hongrois kredenc). Mais Ernout et Meillet considèrent qu'il s'agit d'une étymologie populaire. |
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