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Xavier Animateur
Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 4087 Lieu: Μασσαλία, Prouvènço
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écrit le Tuesday 22 Jan 08, 20:33 |
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Ce terme dru existe en français contemporain
Un des rares mots venant d'un terme gaulois : *druto (fort, vigoureux)
On retrouve ce même sens de fort en ancien français pour dru.
drugier : pousser abondamment, devenir vigoureux.
une druge : abondance, multitude
en français contemporain,
une herbe drue, c'est une herbe qui pousse de façon abondante, fournie, vigoureuse.
on dit aussi une barbe drue, une averse drue (une drache)
un homme dru, c'est un homme vif, alerte, vigoureux.
En ancien français, le dru(e), c'est surtout l'ami(e), l'amant(e)
une druerie peut désigner une amitié mais surtout l'amour, la relation amoureuse (sexuelle)
faire sa druerie : jouir du plaisir de l'amour
Drubert : c'est l'injure d'une femme à son amant impuissant. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10941 Lieu: Lyon
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écrit le Thursday 24 Jan 08, 15:27 |
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"dru" a donné des noms de famille :
- Drut - Ledru - Druon - Beaudru - Maudru - drujon
Autres sens ou nuances de dru en ancien français :
- ami de confiance, féal
- fidèle
- florissant, riche
- adv : en quantité
druement :
- en grand nombre, fort largement
- d'une manière épaisse, serrée
druerie :
- syn. de faire sa druerie : mener sa druerie
- autre sens : cadeau galant
Xavier a écrit: | Drubert : c'est l'injure d'une femme à son amant impuissant. |
A-t-on une idée du sens du suffixe -bert ? Le retrouve-t-on dans d'autres constructions ? |
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gilou
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 1528 Lieu: Paris et Rambouillet
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écrit le Thursday 24 Jan 08, 17:22 |
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Si c'est le même suffixe que dans Robert, cela vient du germanique berht: brillant, fameux, illustre. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10941 Lieu: Lyon
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écrit le Thursday 24 Jan 08, 19:20 |
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Dans ce cas, c'est surprenant et déroutant ou alors il faut le prendre au 2nd degré :
- dru = fort, robuste, vigoureux
- bert (berht) = brillant, fameux, illustre
donc a priori tout le contraire d'un impuissant. Etonnant. |
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Gaillimh
Inscrit le: 12 Nov 2005 Messages: 366 Lieu: Aberdeen (Ecosse)
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écrit le Thursday 24 Jan 08, 20:06 |
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Un lien avec les Drus de la Mer de Glace ? |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3509 Lieu: Nissa
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écrit le Friday 25 Jan 08, 19:45 |
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Ça me semblerait assez probable.
@ José : Je crois qu'il faut prendre drubert par antiphrase : « Ah, le bel amant, le brillant fouteur ! »
À part ça, dru et tous ses dérivés appartiennent à la grande famille du thème eurindien *dr-eu- qui a donné nombre de mots dans le champ sémantique de la solidité (gr. droón « solide »), aussi bien concrète avec le bois (grec déndreon, perse draxt « arbre ») qu'abstraite avec la confiance (all. treu « fidèle », angl. truce « trève », true « vrai »). En énumérer tous les développements prendrait plusieurs pages et finirait par être hors-sujet …
Je remarquerai seulement que plusieurs des mots de l'ancien français cités par Xavier (drugier, druge) et aussi drugon « ami » (donné comme diminutif de dru), peuvent témoigner d'une extension en gutturale, ce qui n'exclut pas un plus ancien *druc (fém. druge) > dru (fém. drue). Le gaulois *druto- n'est attesté que par le nom propre Drutictos qui pourrait être une dissimilation bien naturelle de *Dructictos.
À noter enfin que le sémantisme de tous ces mots d'anciens français (et de leurs équivalents en ancien provençal) est étudié en détail dans un article récent de Martine Guille, "Mais où est la drurie d'antan ? mas ont es la drudaria d'antan", in Romania una et diversa (Gunter Narr Verlag, 2000).
J'en extrairai juste ici les quatres étapes de la fin amor, juste pour montrer que certaines choses ne changent guère :
1. le feignador/fenhedor (l'amant timide et hésitant)
2. le pregador (le supplieur)
3. l'entendedor (celui que la dame consent à entendre)
4. le drutz/drut (l'amant exaucé et comblé) |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10941 Lieu: Lyon
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écrit le Saturday 26 Jan 08, 11:47 |
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Je n'aurais jamais fait le lien avec le grec déndreon (je connais pourtant dendrochronologie), ni avec l'all. treu ou l'angl. truce.
Dernière édition par José le Monday 16 Jan 12, 20:27; édité 1 fois |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3509 Lieu: Nissa
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écrit le Saturday 26 Jan 08, 12:06 |
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déndreon est issu par dissimilation d'une forme à redoublement *der-drew-on (dur, dur !)
PS : j'ai oublié de signaler que l'article de Martine Guille est en ligne [url=http://books.google.com/books'id=Y5M8eXEo8yUC&printsec=frontcover#PPA143,M1]page 143[/url] |
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giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11204 Lieu: Meaux (F)
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11204 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 05 Oct 16, 8:10 |
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Outis a écrit: | Le gaulois *druto- n'est attesté que par le nom propre Drutictos |
Certes, mais il est confirmé par ses cognats dans les autres langues celtiques, à savoir
vieil irlandais drúth (lubrique), gallois drudd (vif, hardi, téméraire), breton druz (gras, fertile, dru) d'où druzañ (graisser, fertiliser).
Les parlers régionaux en Dauphiné, Lyonnais, Maconnais, Savoie conservent druse-drudze-druge (n.f.) qui veut dire : 1) engrais, fumier, 2) pousse abondante, exubérante.
En occitan : drud, drua (dru, fertile, vril), druditge (vigueur, gaillardise). (Source : Pierre Gastal, Nos origines celtiques.) |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11204 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 05 Oct 16, 8:17 |
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gilou a écrit: | Si c'est le même suffixe que dans Robert, cela vient du germanique berht: brillant, fameux, illustre. |
Je pense que ça doit plutôt venir du celtique : gaulois birro court, vieil irlandais et breton berr, idem, gallois byr.
Court, c'est à dire, bref, ou petit.
Enfin, bon, disons que c'est une autre possibilité, qui éviterait le recours à la douteuse "antiphrase" proposée par Outis. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11204 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 21 Mar 18, 9:19 |
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Outis a écrit: | dru et tous ses dérivés appartiennent à la grande famille du thème eurindien *dr-eu- qui a donné nombre de mots dans le champ sémantique de la solidité (gr. droón « solide »), aussi bien concrète avec le bois (grec déndreon, perse draxt « arbre ») qu'abstraite avec la confiance (all. treu « fidèle », angl. truce « trève », true « vrai »). |
C'est la théorie de Benveniste, mais j'ai eu aujourd'hui la surprise de lire qu'Ernout et Meillet (durus, p. 189) la trouvent "peu vraisemblable".
Et, à y bien réfléchir, le plan sémantique laisse lui aussi un peu à désirer, car le sémantisme du gaulois *druto et du français dru qui en vient me semble plutôt faire état d'une vive poussée vers le haut que d'une immobile dureté, et en particulier celle des arbres. Relire le post initial de Xavier et ma citation de Gastal. Pas de dureté là-dedans, mais de la vigueur, ce n'est pas la même chose.
J'en profite pour répéter mon acte de foi : l'abstrait nait du concret. En vertu de quoi je crois que le sentiment de la dureté vient de la consistance du bois, et en particulier du bois de chêne, plutôt que l'inverse. Autrement dit, à mon humble avis, la racine *deru- a fondamentalement le sens de "bois dur" et corollairement celui de "dur comme du bois".
Ce qui, à mon humble avis d'amateur, n'incite guère à voir dans *dr-eu- une variante de *deru-.
D'ailleurs je rapprocherais plutôt *druto de *terə- (grande famille TOURNER). On y tourne, frotte, perce et pousse, avec vigueur.
Mais on va sans doute me dire qu'un t radical à l'initiale ne donne jamais un d gaulois...
J'oubliais : le français n'a pas eu besoin du durus latin pour son dur, le mot existait déjà en gaulois, duro, même sens. Irlandais dur (dur), gallois dir (force). |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3509 Lieu: Nissa
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écrit le Wednesday 21 Mar 18, 11:38 |
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J'ai toujours préféré les actes mêlant la raison à la foi. Et, si l'on s'étonne d'une incohérence sémantique à rapprocher la dureté du bois et la solidité des engagements de tout ce qui est vigueur et croissance, c'est probablement qu'on a oublié le phénomène physiologique de l'érection, phénomène dont l'importance sociale semble évidente. Je passerai sur les multiples métaphores qui y associent vigueur et dureté, me contentant d'un simple « bander comme un manche de pelle ». |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11204 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 21 Mar 18, 11:41 |
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Comme toi, je ne pense qu'à ça mais comment expliques-tu la réaction d'Ernout et Meillet ? |
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