giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
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écrit le Thursday 13 Mar 08, 19:57 |
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MASCA (latin médieval) --> "larva" (lat. classique)
LE MASQUE (français)
Selon ATILF:
A) Objet recouvrant et représentant parfois tout ou partie du visage, qui est porté dans diverses occasions de la vie sociale selon les peuples et les époques
B) Modelé, traits (expressifs) du visage.
Citation: | « Le rad. préroman *maska «noir» est à l'orig. de deux groupes de mots: a) un type masca signifiant «masque» en lat. tard., mais surtout «sorcière» ou «spectre, démon» représenté en lat. médiév. (dep. 643, Lois de Rotharis ds NIERM.; cf. 680 en Angleterre, chez l'évêque Adhelm), en Italie (Pise, Piémont et Sicile), en gallo-roman (sous la forme du composé talamasca, att. dès le lat. médiév.) et en a. prov. (…), les notions de «noir» et de «sorcier, démon» étant étroitement associées dans l'imagination populaire; b) un type élargi *maskara, très répandu dans les domaines ibéro-roman (cat. mascara «tache noire, salissure», également vivant en aragonais, navarrais, valencien et à Majorque; port. mascarra «tache» etc.), ital. (maschera «masque» s'expliquant par le fait que les plus anciens déguisements consistaient simplement à se noircir le visage et parfois le corps) et gallo-roman (…) » |
(Moi je ne crois pas à l'explication *maska = "noir", qui me semble une belle invention, mais je suis d'accord que les premières déguisements consistaient à se noircir le visage.
De toute façon, c'est vrai qu'existe un racine IE *sma- = "noir".
LA MASQUE (français)
Selon ATILF:
Désigne une fille, une femme laide ou rusée, effrontée Citation: | "Prononc. et Orth.: [mask]. Att. ds Ac. dep. 1694. Étymol. et Hist. 1. 1640 «maquerelle; sorcière» (OUDIN Curiositez); 2. 1660 «effrontée» (MOLIÈRE, Sganarelle, scène 14, éd. R. Bray, p.312). Empr. à l'a. prov. masca «sorcière» (1396 d'apr. PANSIER) d'orig. préromane (v. masque1). Bbg. SAIN. Sources t. 1 1972 [1925], p.269; t. 2 1972 [1925], p.416." |
MASCOTTE
Selon ATILF: Être ou chose considéré(e) comme portant bonheur. Citation: | Étymol. et Hist. 1867 (E. ZOLA, Les Mystères de Marseille, éd. Charpentier 1909, p.223 cité par G. GOUGENHEIM ds Fr. mod. t. 14, 253). Empr. au prov. mascoto «sortilège, ensorcellement au jeu» (1re moitié du XIXe s. ds MISTRAL); dér. de masco «sorcière, magicienne» (ibid.). Fréq. abs. littér.: 15. Bbg. QUEM. DDL t. 1. |
MASK (anglais)
Selon "The Collaborative International Dictionary of English" v.0.48
http://zebrawords.com/index.php?database=gcide&type=1&q=00-database-info&strategy=exact
Citation: | Mask \Mask\ (m[.a]sk), n. [F. masque, LL. masca, mascha, mascus;
cf. Sp. & Pg. m['a]scara, It. maschera; all fr. Ar. maskharat
buffoon, fool, pleasantry, anything ridiculous or mirthful,
fr. sakhira to ridicule, to laugh at. Cf. Masque,
Masquerade.] |
MASCA (piémontais)
a) sujet (humain ou animal, mais surtout de genre féminin) qui a le don de changer sa forme en êtres differents
b) personne qui a le don de guérir ou de faire du mal
c) être supernatural génerique
d) sorcière diabolique (selon l'église catholique)
e) jeune femme normale, mais qui est très vive, qui bouge toujours (acception positive). jeune femme effrontée (acception negative)
MASCRADA (Piémontais)
Personne deguisée. Le deguisement traditionel était fait en forme de chevre (avec son berger), d'ours ou de porc (tenu par un patron humain). Une autre possibilité etait celle, pour l'homme, de s'habiller comme une femme et , pour la femme, de s'habiller comme un homme.
Dans un jours precis, était permis le deguisement avec du carbon sur la face (magninada).
MASCHERA (italien)
Je n'ai pas trouvé dans les textes italiens une explication satisfaisante de l'origine étymologique du terme "maschera". De toute façon je pense que "maschera" vient d'un originaire "masca".
Cfr. “Masca” e “talamasca” nelle fonti germaniche antiche, contenu en “L’immagine riflessa”, IX, 2000 et BARILLARI S. M., “Il cervulus e le altre maschere medievali”, en GRIMALDI P. (a cura di), Bestie santi, divinità. Maschere animali dell’Europa tradizionale, catalogue de l'exposition du Musée National de la Montagne de Turin (15 février - 27 avril 2003). Dans le dernier texte, se trouvent citées les hypothèses suivantes:
1. dérivation d'un substrat linguistique pre-latin (sans précision ultérieure);
2. dérivation d'un élément alloglotte (prêt de l'arabe más˛hara = "bouffon").
3. dérivation de marsica = femme des "Marsi"; peuple italique dont les femmes furent considérées spécialistes dans les arts magiques, selon les sources classiques et post-classiques, jusqu'à St. Augustin. Comme du lat. persica viendrait l'it. pesca; de marsica viendrait masca.
La deuxième hypothèse est à rejeter clairement, parce que le terme masca est attesté en manuscrits bien antérieurs aux croisades et d'époques quand les Arabes comptaient dans le panorama mondial comme le "due di picche" sur une table de jeu (expression italienne).
La troisième est également è refuser, parce que les masques/masche des traditions fèeriques populaires françaises et italiennes ne peuvent pas être identifiées dans le rôle unique de "femmes sorcieres."
Autres Auters ont voulu, par contre, y voir une origine dans une racine IE * bhask - que nous trouvons dans le fascinum/fascinator/fascino latin et dans le grec baskanoin/baskanion/baskanein. Je trouve cette hypothèse impossible, par-ce-que le groupe IE ancien * bh - ne pourrait jamais avoir développé directement en m -.
Je laisse de côté les étymologies fausses comme celles qui voudraient approcher masca au baccàno et au verbe français rabacher ou, ancore, au verbe espagnol mascar =" mâcher." Ni me semble logique penser à une derivation depuis le latin tardif manducare (= "manger"): C'est vrai que manducus fût utilisé par Plautus, dans le sens de "croquemitain dévorant" ("orco" en italien), mais celui-ci est, plutôt devenu le mecou de certaines zones de l'Occitanie.
Mon personnel hypothèse se positionne, donc, dans le premier group génériquement mentionné par BARILLARI. Je me permet une constatation: les termes masca/masco, piémontais et occitan, comme le français ancien masque équivalent à la "larva" latine et non à "sorcière diabolique" (construction postérieure de l'Église catholique médiévale). La masca, cependant, est plus semblable au mutaforma/shapeshifter irlandais, qu'à chose differentes. Un sujet doué du "don" de voyager entre les univers parallèles des vifs et des morts, en transformant soi-meme, en animal (si sa forme principale - ou préférée? - est celle d'être humain), et en trasformant soi-meme en homme (si sa forme principale - ou préférée? - est animale). Donc, la masca/masco/masque de la tradition féerique populaire peut être très bénéfique, comme très nuisible.
En plus, le mot masca est réuni indissolublement à la masque/maschera, qu'il semble etre un dérivé. En rangeant un masque sur le visage, en effet, cet "antefacciale" (chose qui se met sur la face) a le pouvoir de "transformer la personne"...et ça suffit penser aux masques utilisés par les chamans asiatiques.
Plutôt, je crois que la seule langue vivante qui puisse nous aider à comprendre l'origine du terme masca est le ligure moderne de Genes, dans lequel le mot même signifie encore "joue" et "partie du navire."
Selon DEVOTO, à l'origine, "masca" aurait du etre un terme méditerranéen signifiant "coté", de la face ou du navire,: cfr. DEVOTO G., Dizionario etimologico. Avviamento alla etimologia italiana, Firenze 1968, vox “masca”.
C'est vrai que le premier document qui cite le terme "masca" est un document juridique longobard, écrit en latin. De toute façon, il ne s'agit pas originairement d'un terme germanique latinisé, par-ce qu'en aucune langue de ce groupe existe un terme semblable pour définir une partie du visage.
Plus spécifiquement, en longobard "joue" se disait wankja (cfr. ROHLFS G., Studi e ricerche su lingua e dialetti d’Italia, Firenze 1972, p. 24 e GAMILLSCHEG E., Romania Germanica II, p. 157).
Dans la "loi de Rotaris", 643 D.C., on trouve: "nullus praesumat haldiam alienam aut ancillam quasi strigam, quam dicunt mascam, occidere." Masca fut ensuite, un prêt du substrat qui entra dans les langues allemandes (voir l'ancien allemand "talamaske"), mais il ne s'agit pas de terme allemand originaire.
Par contre, en latin existe maxilla (partie du visage), qui viendrait d'un archaïque et perdu * maxla (à lire màcsla).
Ensuite, masca / maxla sont mots du substrat pre-latin, probablement méditerranéen.
De masca = "joue / partie du visage" est dérivée le verbe roman mascarare (italien), qui signifia originairement "se teindre le visage de carbon". Pensons, alors, aux mascrade des magninade piémontaises et aux verbes flamands maschelen/mascheren = "teindre de noir / tacher / salir", comme nous pouvons penser aussi à l'ancien français mascarel = "tache noire sur le visage", qui passa à signifier, "se couvrir le visage/se mettre un déguisement, partiel ou totale."
En Piémontais, le masque s'appelle mascrada, c'est-à-dire "mascheratura/effect de l'action de se masquer". Le terme actuel italien maschera dérive d'un agrandissement mascra de masca, puis encore agrandi en mascara, procès commun en beaucoup de dialectes romanes: nous pouvons penser au Catalan qui créa platara de plat et au Castillan qui créa cascara de casco.
Il faut se poser la question: "Pourquoi, les masques sont dévenus aussi synonime de "mutaforma/shapeshifter/personne qui change de forme par magie"?
La rèponse ne peut etre que la suivante: les chamans anciens utilisaient des masques pendant les rites de transformation.
J'utilise le néologisme "mutaforma", tiré par les oeuvres de science-fiction contemporaines, parce qu'il semble le plus apte à décrire ces sujets, qu'ils ne sont pas des simples "mutants". Dans la pensée de l'antiquité, n'existait pas une "frontière claire" entre le "soi" et le "tout" (qui comprend le soi, pour notre civilisation actuelle), alors les "mutaforma" sont l'un et le tout fondu ensemble, contemporainement.
Pour comprendre cette manière de penser ancienne (qui correspond encore partiellement à la manière d'entendre la réalité féerique des peuples des Alpes, jusqu'au 1950), il faut se refaire aux sagas celtiques irlandaises, plutot qu'à textes classiques comme le pas de Hérodote, qu'il dit: "Les Scythes et les Grecs qui habitent le Scithyia racontent que tous les ans et pour quelques jours, chaque Neure se transforme en loup, puis il reprend les aspects humains. Quand ils me disent celui-ci, ils ne me convainquent pas, non plus si ils jurent pendant qu'ils le racontent." Cfr. DUMEZIL G., Le problème des Centaures, Paris 1929, p. 49, ou plutot qu'à l'Ane d'or d'Apuleius,
Dans le Poème d'Amairghin, on lit par exemple, que le poète même, en sautant du bateau qu'il l'avait amené sur les bords de l'Irlande, il eût proclamé: "Je suis un estuaire qu'il se jette dans la mer / je suis un flot de l'océan / je suis le mugissement de la mer / je suis un boeuf puissant / je suis un aigle sur un rocher / je suis une goutte de rosée dans le soleil / je suis une plante pour beauté / je suis un sanglier pour prouesse / je suis un saumon dans un miroir d'eau / je suis un lac dans un plaine/je suis la force de l'art" (cfr. Celtic Mithology, London 1968, trad. Proinsias McCana.)
Par contre, dans le Voyage de Bran, fils de Febal, vers la terre des vifs, le sorcier Tuan Mac Cairill célébra ainsi la propre existence proteiforme: "Aujourd'hui un épervier, hier un sanglier / inconstance Merveilleuse! […] / Entre troupeaux de verrats je me trouvais / pendant qu'aujourd'hui ije suis entre vols d'oiseaux / et je sais ce qu'il viendra après / j'aurai encore une forme différente!."
Toutes celles-ci ne sont pas métaphores comme, aujourd'hui, nous pourrions imaginer. Il se traite, par contre, d'expressions claires d'une culture qui croit vraiment dans la transformation, et dans une realité "fluide." Les "mutaforma" sont, enfin, des shape-shifter et pas des warp-spasmer, comme le fameux docteur Jekyll. Pour nous comprendre mieux: dans un poème irlandais, La destruction du refuge de De Derga, Conaire, le héros est fils d'un "homme-oiseau". A' Conaire se présente un autre homme qui proclame d'être "le roi des oiseaux de ton père." Ensuite, en telle vision "merveilleusement fluctuante du monde", tout est "un" et tout est "fluide". L' Au delà et l'Au de-ça, les vifs et les morts, les hommes et les animaux. Pour changer il y n'a pas besoin de boire une potion, comme avaient fait le personnage de l'âne d'or ou le docteur Jekyll. Il y n'a pas des contractions douloureuses. Il se trouve seulement "un glissement naturel en autre forme, avec autres vertus."
Aussi le furor du guerrier germanique dériva d'un glissement de l'humain au bestial, obtenu par rites spéciaux.
Dernière édition par giòrss le Saturday 15 Mar 08, 12:30; édité 4 fois |
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