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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3511 Lieu: Nissa
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écrit le Sunday 05 Sep 10, 18:55 |
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Pourquoi pas par Jacques Prévert : « Je suis comme je suis, je suis faite comme ça … ». Français pour Français, une poétesse doit peut-être plus à un autre poète qu'à un mathématicien … |
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dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1886 Lieu: Ardenne (belge)
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écrit le Tuesday 07 Sep 10, 10:06 |
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Sur la difficulté de traduire "je", voici une citation de Rimbaud: "Je est un autre", d'une lettre adressée le 13 mai 1871 (16 ans et demi!) à Georges Izambard. (Wikisource)
Hors du contexte, la citation est assez énigmatique. Pour éclairer quelque peu, voici le paragraphe entier: Citation: | Maintenant, je m’encrapule le plus possible. Pourquoi ? je veux être poète, et je travaille à me rendre voyant : vous ne comprendrez pas du tout, et je ne saurais presque vous expliquer. Il s’agit d’arriver à l’inconnu par le dérèglement de tous les sens. Les souffrances sont énormes, mais il faut être fort, être né poète, et je me suis reconnu poète. Ce n’est pas du tout ma faute. C’est faux de dire : je pense : on devrait dire : On me pense. — Pardon du jeu de mots. —
Je est un autre. Tant pis pour le bois qui se trouve violon, et Nargue aux inconscients, qui ergotent sur ce qu’ils ignorent tout à fait ! | Il faudrait sans doute, en plus, aller voir ailleurs. |
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Mrs Dalloway
Inscrit le: 26 May 2012 Messages: 2 Lieu: Marseille
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 0:27 |
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En arabe : أنا أفكر إذن أنا موجود ( anâ ouffakir, idhan anâ mawjûd).
Notons que le verbe être n'existe pas en arabe, on a ici rendu "je suis" par le participe passif (mawjûd) de la racine w-j-d qui traduit l'idée d'existence, de présence. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 4:31 |
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Permettez-moi de vous corriger sur deux points :
- la transcription exacte est : anā ufakkir, iḏan anā mawǧūd.
- en arabe, le présent de l'indicatif du verbe équivalent à être existe théoriquement mais est inusité car automatiquement sous-entendu, implicite, et donc inutile. En revanche le passé du même verbe est lui normalement employé, ainsi que ses subjonctif et impératif. On ne peut donc pas laisser croire que "le verbe être n'existe pas en arabe". |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3864 Lieu: Paris
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 6:12 |
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felyrops a écrit: | Sans doute inspiré par "Je pense, donc je suis", la devise de Wisława Szymborska, poète polonaise, Prix Nobel de 1996: "Je suis qui je suis". |
Une formule aussi banale n'a pas besoin d'être inspirée par Descartes ! De toute façon, la formule est encore plus proche de la vieille formule biblique, ego sum qui sum, je suis celui qui suis, je suis qui je suis. |
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dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1886 Lieu: Ardenne (belge)
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 11:03 |
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En relisant tout le sujet, je suis tombé sur une remarque de Blop le 5 déc 06, restée sans écho.
Wikipedia l'explique très clairement: Citation: | La postérité a souvent retenu la formule : cogito ergo sum (« je pense donc je suis ») contenue dans le Discours de la méthode (1637), détachée de son contexte. Le Discours de la méthode, facilement lisible, parce qu'écrit en français, a véhiculé le concept du cogito au XVIIIe siècle, puis l'enseignement en France l'a popularisé. Les successeurs de Descartes s'imaginèrent alors quelquefois qu'il suffisait de penser scientifiquement pour aboutir à la certitude. | Or, Descartes a modifié cette célèbre formule. En voici les raisons (extraits): Descartes connut un certain Mersenne à partir de 1637. Il échangea une correspondance avec lui, dans le cadre des réseaux de scientifiques de cette époque. En 1641, c'est à Mersenne que Descartes demanda de recueillir les objections sur les Méditations métaphysiques. Citation: | Descartes lui-même a cherché à révoquer cette formulation là du cogito...En effet, la formule peut faire penser à un syllogisme abrégé : Tout ce qui pense existe ; or je pense ; donc j'existe. Néanmoins, pour Descartes, il est clair que mon existence ne se déduit pas, elle est intuitive. À l'expression cogito ergo sum, il a donc fini par préférer dans les Méditations métaphysiques (1641): ego sum, ego existo. | Je suis, j'existe: voilà l'erratum méconnu de Descartes (que je découvre ce matin).
Dernière édition par dawance le Thursday 09 Aug 12, 12:47; édité 1 fois |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 11:16 |
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Si je comprends bien, Descartes a fini par dire Je suis, j'existe, (et donc) je pense...
C'est plus qu'un erratum, c'est un virage à 180 degrés ! |
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Horatius Animateur
Inscrit le: 11 Apr 2008 Messages: 695
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 20:10 |
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Papou a écrit: | Si je comprends bien, Descartes a fini par dire Je suis, j'existe, (et donc) je pense...
C'est plus qu'un erratum, c'est un virage à 180 degrés |
Je crois plutôt que Descartes a reformulé son propos pour bien éviter une ambiguïté. L'expression "Je pense donc je suis" laisse croire qu'il s'agit d'un raisonnement ; or, dans la pratique cartésienne du doute systématique, on pourrait supposer que ce raisonnement serait trompé par un "malin génie" (hypothèse du genium malignum posée dans la 1ère méditation).
Or, il ne s'agit pas d'un raisonnement, mais d'une évidence : il faudrait plutôt dire "cogito, id est, sum" : "je pense, c'est-à-dire je suis" : Dans le moment où je pense, il y a quelque chose qui pense (res cogitans), c'est "je" : ego sum, ego existo quoties a me profertur, vel mente concipitur, necessario esse verum : "je suis, j'existe", est nécessairement vraie toutes les fois que je prononce la proposition ou que je conçois en mon esprit. (2e méditation) |
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Kenel ha Gwerin Non-inscrit
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écrit le Thursday 09 Aug 12, 20:33 |
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Breizhadig a écrit: | Prederiañ a ran, rak-se e vezan. / Prederiañ a ran, rak-se ez on. |
Bof...
Le verbe breton "prederiañ" traduit "réfléchir" ou "méditer" or, en philosophie, notamment cartésienne, on ne confond pas la réflexion -ou la méditation- avec la pensée ! Par ailleurs, votre traduction n'est pas très affirmative, là où Descartes donne une formule qui tranche, qui est vive. Votre traduction donne une impression de banalité, d'habitude.
Dans sa traduction en breton du Discours de la Méthode (Displeg war an hentenn, Preder, Kaier 76-78, Here-Kerzu 1965), le bretonnant de naissance et philosophe Jil Ewan traduit cette affirmation de Descartes par :
Bout e soñjan, rak-se bout ez on.
Là, on retrouve bien le verbe "penser" ("soñjal") et une vive affirmation, accentuée par la forme de conjugaison en "bout + verbe". |
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Andrew
Inscrit le: 14 Aug 2012 Messages: 139 Lieu: Isère rhodanienne
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écrit le Tuesday 14 Aug 12, 14:38 |
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Il semble que la tour de Babel ait semé le désordre bien plus loin que dans les langues.
La devise d'une célèbre faculté américaine se traduit par :
"J'ignore tout. Rien n'est jamais acquis. Je me suis certainement trompé."
Base de toute démarche scientifique.
Faut-il en conclure que le père François nous aurait joué un mauvais tour avec son "ergo." ???
"Je doute. J'existe."
Ou son corollaire "J'existe. Je doute."
C'est par le truchement de "ergo" traduisant une démarche calculée, mathématique, obligatoire et exclusive, le "donc" en conclusion, cette logique traduite comme froide, implacable, que Descartes a été perçu comme le penseur impavide, presque métallique qu'il n'était pas.
Une sorte de CQFD.
"Cogito. Sum."
"Sum. Cogito." |
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dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1886 Lieu: Ardenne (belge)
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écrit le Tuesday 14 Aug 12, 21:38 |
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Soyons moins modeste et disons: Citation: | "J'ignore tout. Rien n'est jamais acquis. Je me suis peut-être trompé." | Voilà une excellente base scientifique.
Citation: | "Je doute. J'existe."
Ou son corollaire "J'existe. Je doute." | Un corollaire, ce n'est pas vraiment ça. Tu veux dire que l'un ne va pas sans l'autre?
Tu traduis cogito par je doute. C'est une piste intéressante.
Je suis assez d'accord de traduire sum par exister, sinon qu'exister n'existe pas en wallon: on dit simplement dji vike, je vis. Vivre ou ne pas vivre. C'est basique, je sais.
Je suis, tout seul, ne se dit pas dans beaucoup de langues, notamment en wallon. Ça n'a pas de sens, sinon si Dieu parle dans la Bible: Je suis celui qui est.
Et encore faudrait-il l'avis de théologiens.
Je retiens seulement de Descartes (père René?) la géométrie analytique et son combat contre la scolastique. Pour le reste..., inutile et incertain comme disait Jean François Revel (1976). |
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