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coq (francais) / cock (anglais) - Le mot du jour - Forum Babel
coq (francais) / cock (anglais)

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Moutik
Animateur


Inscrit le: 06 Apr 2008
Messages: 1236

Messageécrit le Friday 27 Mar 09, 1:50 Répondre en citant ce message   

Ce message fait suite au sujet initié par Xavier à partir de limoger et à mes propres messages à propos de shanghaïer : lire ICI

Mais comme il s’éloigne sensiblement du sujet initial, j’ai préféré créer un nouveau fil.

Glossophile a écrit :
Citation:
Un cock ? Pourquoi ce mot anglais dans un texte français ?
Mieux vaut lire coq, du latin coquus, , cuisinier du bord.

Bien vu, l’anomalie m’avait échappé. Aucun des dictionnaires consultés ne donne d’autre graphie que coq. Pour résumer :

Coq, du néerlandais kok, du latin tardif cocus, du latin cŏquus ou cŏcus « cuisinier », de cŏquĕre « cuire, brûler, fondre, mûrir, digérer, préparer mûrement, tourmenter »*. « Nom et titre donné au cuisinier de l’équipage » (Bonnefoux et Pâris).

Pour les Anglais c’est le cook, quoique dans leur langue le mot ne soit pas spécialement lié à la mer. Un cook peut aussi officier à terre. Le Merriam Webster precise “akin to Old English āfigen fried, Greek pessein to cook”. Comprenne qui pourra ?

Mais pour en avoir le cœur net j’ai poussé jusqu’à la bibliothèque consulter une édition papier. Et là, surprise, le texte donne bien cock :

Un cock shanghaïé, un soir de folie
A pris mon av’nir comme un beau cadeau.
Il m’a dit : « Petit’, il faut qu’on s’ marie
Tu seras la fleur d’un joli bistrot. »
De tels boniments démoliss’nt un’ femme.
Je vivais déjà derrièr’ mon comptoir
Les flics de couleur me disaient « Madame ».
Bref, je gambergeais du matin au soir.

Pierre Mac Orlan
La Chanson de Margaret, Chansons pour accordéon,
in Œuvres complètes, Le Cercle du Bibliophile, Edito-Service S.A., Genève, 1969
[Édition originale de Chansons pour accordéon, Gallimard, 1953]

À partir de là, plusieurs possibilités :

1 – Ou Mac Orlan s’est trompé, ce qui est toujours possible mais curieux de la part de ce dénicheur de mots, de mots rares, de mots étrangers, de mots de la langue d’argot, de la langue des rabouins, et du parler matelot.

2 – Ou il s’agit d’une coquille de l’éditeur, cette coquille étant copiée collée à l’envi par les multiples versions accessibles sur le ouaibe. Remarquez, qu’un coq ou qu’un cock naisse d’une coquille, quoi de plus normal ? Pour la poule on ne sait toujours pas.

3 – Ou il ne s’agit pas d’un cuisinier, mais bien d’un cock, à l’anglaise. L’anglais cock, de l’ancien français coq, c’est notre Chanteclerc, notre gallinacé emblème paradoxal. Mais “Cock is also a term of address used by men to one another when they are talking in an informal and friendly way. EG Hello, cock, how are you? ” (COBUILD**) Bien entendu, le cock c’est aussi le membre des garçons. “A very rude word” prend soin de préciser le même dictionnaire.

Le recueil incline pour la piste anglaise. Chansons pour accordéon ne compile pas seulement des chansons, mais inclut aussi quelques petits textes en prose, entre autre sept textes associant un couplet, une ville, un lieu :

Rouen, Nelly
Le Havre, La Chanson de Margaret
Naples, La Chanson de Catari’ de Chiara
Londres, La Fille de Londres
Brest, Fanny de Lanninon
Le Rhin (Mayence, Coblence, Francfort, et même le Hambourg des Spartakistes), Chanson Rhénane
Paris, Chanson de la route de Bapaume

Ces « morceaux en prose » remémorent le contexte, l’ambiance, l’époque qui inspirent les chansons et donnent quelques clefs de compréhension, Mac Orlan étant bien conscient de l’hermétisme de son vocabulaire***. Mais pour La Chanson de Margaret, si Mac Orlan explique ce qu’était un star au Havre juste avant la Grande guerre et pourquoi il évoque Tampico, il ne dit rien ni de cock ni de shanghaïé. Il écrit néanmoins :

« Le Havre était un faubourg de la vie britannique, dont la personnalité ne pouvait que séduire un homme comme Lautrec, épris jusqu’à la passion de tous les détails de cette vie anglaise dont il a laissé de nombreux témoignages. »

Ce mec shanghaïé pouvait donc bien être un cock…


________________________________________________________________
* Il est amusant de constater que plusieurs des acceptions de coquere se sont maintenues jusque cuisiner :« Les bœufs carottes l’avaient cuisiné jusqu’à l’aube, mitonné avec gourmandise, il était à point pour croquer le morceau. » A. Simone-Neins, Le graves et le rosbif, Paris, 1965.

** COBUILD, The Collins Birmingham University International Language Database, un excellent dictionnaire papier spécialement conçu pour les non-native speakers. Par ailleurs l’un des tous premiers dictionnaires entièrement généré à partir d’une base de données lexicographique électronique.

*** « Un certain hermétisme convient parfaitement à des œuvres lyriques spécialisées, c’est-à-dire évocatrices de spectacles dont les professions et sociétés exceptionnelles dressent les décors. C’est pourquoi je me suis servi de mots agréables dont le sens secret est assez bien protégé. » Pierre Mac Orlan, Poésies documentaires complètes.
ICI
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Xavier
Animateur


Inscrit le: 10 Nov 2004
Messages: 4088
Lieu: Μασσαλία, Prouvènço

Messageécrit le Friday 27 Mar 09, 10:52 Répondre en citant ce message   

En français, on utilise deux termes, issu de la même origine latine.
Coq est un emprunt au néerlandais, mais le terme français provenant du latin est queux, de coquus (cuisinier).

On le trouve surtout dans l'expression maître-queux.
En fait, l'emploi de coq est réservé à la marine (on dit aussi maître-coq)

à noter aussi :
Grand queux de France : officier de la maison du roi chargé du service de la bouche.

Je constate que ce substantif n'a pas, a priori, de féminin
un queux, une queuse !
comme on a un gueux, une gueuse.
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giòrss



Inscrit le: 02 Aug 2007
Messages: 2778
Lieu: Barge - Piemont

Messageécrit le Friday 27 Mar 09, 11:12 Répondre en citant ce message   

Le latin coquere a donné l'italien cuocere et le mots cuoco= cuisinier, cucina=cuisine
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Moutik
Animateur


Inscrit le: 06 Apr 2008
Messages: 1236

Messageécrit le Tuesday 31 Mar 09, 3:22 Répondre en citant ce message   

Littré donne, non sous queux, s. m, mais sous louche, s. f., une citation assez savoureuse :

« Le duc a trois queux pour sa bouche »

« Le duc a trois queux pour sa bouche, chascun compté par quatre moys ; et doibt le queux en sa cuisine commander, ordonner, et estre obey, et doibt avoir une chaiere en tel lieu, qu'il puist veoir et congnoistre tout ce que l'on faict en la dicte cuisine, et doibt avoir en sa main une grande louche de bois qui luy sert à deux fins, l'une pour assayer potaige et brouet, et l'autre pour chasser les enfans hors de la cuisine et ferir si besoing est, DE LABORDE, Émaux, p. 369. »
Le Littré

La référence « De Laborde, Émaux » renvoie à l’ouvrage suivant :
Léon de Laborde
Notice des émaux, bijoux et objets divers exposés dans les galeries du Musée du Louvre
Vinchon, Paris, 1853

Pourtant, curieusement, on ne trouve trace de cette phrase dans la Notice de de Laborde. Elle provient en réalité d’une description très détaillée de la maison du duc de Bourgogne, Charles dit le Hardi, depuis son « esveque pour […] confesseur » jusqu’aux « hommes de pied armez, arbalestriers, colevriniers et picquenaires… » :
Olivier de La Marche [1426?-1502]
Estat particulier de la maison du duc Charles le Hardy
Édité, en autres, in
Jean Alexandre Buchon
Le Panthéon littéraire, Choix de chroniques et mémoires sur l'histoire de France
A. Desrez, Paris, 1836
[Accessible sur gallica.fr]

Une autre édition donne la graphie gueux :
Les mémoires de messire Olivier de La Marche: augmentés d'un estat particulier de la Maison du duc Charles le Hardy composé du mesme auteur
M. Petitot
Foucault, Paris,1825


Dernière édition par Moutik le Tuesday 16 Jun 09, 17:38; édité 1 fois
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Glossophile
Animateur


Inscrit le: 21 May 2005
Messages: 2283

Messageécrit le Tuesday 31 Mar 09, 21:52 Répondre en citant ce message   

Deux remarques :
Charles le Hardy figure dans les livres d'Histoire sous le nom de Charles le Téméraire, mais tout le monde l'aura reconnu.

Coq ou cock, l'auditeur de la chanson comprend ce qu'il veut, d'autant plus qu'en français un jeune coq est un jeune homme batailleur, et le coq du village le séducteur des filles.
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felyrops



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Messageécrit le Tuesday 31 Mar 09, 23:10 Répondre en citant ce message   

D'accord avec Glossophile pour le surnom 'le Téméraire'. En ce moment une belle exposition lui est consacrée à Bruges, où se trouve son monument funéraire, ainsi que celui de Marie, décédée à l'âge de 25 ans. Elle perd sa mère Isabelle de Bourbon à l'âge de 8 ans, en 1465, et trouvera une nouvelle mère en Marguerite d'York.
J'ai d'Ollivier de la Marche l'édition Foucault de 1820, avec mention d'appartenance au Roi Louis-Philippe. Mais dans quel chapitre faut-il chercher?
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Moutik
Animateur


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Messages: 1236

Messageécrit le Tuesday 16 Jun 09, 18:22 Répondre en citant ce message   

Pour felyrops :

Dans l’édition de Petitot chez Foucault (1825) les Mémoires d’Oliviers de la Marche occupent les volumes IX et X de la Collection complète des Mémoires relatifs à l’Histoire de France. L’Estat particulier de la maison du duc Charles le Hardy se trouve à la fin du volume X p. 479.

Dans l’édition de Buchon l’Estat est inséré à la fin de la notice biographique, soit p. XV.


Dernière édition par Moutik le Monday 15 Feb 10, 3:20; édité 1 fois
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felyrops



Inscrit le: 04 May 2007
Messages: 1143
Lieu: Sint-Niklaas (Belgique)

Messageécrit le Wednesday 17 Jun 09, 13:47 Répondre en citant ce message   

En effet, la pagination des éditions 1820 et 1825 est identique. Le nom "Charles de Bourgogne, dict le Hardy" n'apparaît que dans cet "Etat de la Maison ...", écrit par Olivier de la Marche à Aix-la-Chapelle en novembre 1474.

Interessante est la phrase en haut de la page 498 (éd. 1820): "(...) et, doibt le panetier porter lesdits sausses, et est la cause pourquoi le panetier baille l'assay au saussier et non pas le maistre d'hostel, et si ne baille qu'un assay, et le maistre d'hostel deux, et c'est pour ce que le panetier rend compte seul de ce qu'il livre, et le maistre d'hostel ni le keux ne rendent plus de compte, mais mectent la viande en la charge dudit panetier, et de l'escuyer qui la porte, et pour ce baille le maistre d'hostel deux assays pour chascun mets, ..."

Une note en bas de page dit (keux = cuisinier)
Le dernier message de Jean-Charles sur le fil "queux (féminin)" mentionne la pierre de touche, qui sert aussi à déterminer l'alloy de l'argent ou l'or, donc très proche de l'action du panetier d'essayer (goûter) la viande, en présence du Duc, du maître d'hôtel, du saussier et du keux.
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José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 10946
Lieu: Lyon

Messageécrit le Thursday 20 May 10, 12:48 Répondre en citant ce message   

Glossophile a écrit:
Charles le Hardy figure dans les livres d'Histoire sous le nom de Charles le Téméraire

D'ailleurs, en anglais, ils sont tous les deux "the Bold" :
- Philip the Bold : Philippe le Hardi
- Charles the Bold : Charles le Téméraire
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felyrops



Inscrit le: 04 May 2007
Messages: 1143
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Messageécrit le Thursday 20 May 10, 15:26 Répondre en citant ce message   

Exact, il n'y a que Jean sans Peur qui en anglais prend le nom "the Fearless".
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Thursday 02 May 13, 10:58 Répondre en citant ce message   

Voir la grande famille CUISINE.
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José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 10946
Lieu: Lyon

Messageécrit le Friday 15 Nov 13, 10:20 Répondre en citant ce message   

coquerie
- MAR cuisine aménagée dans un port pour permettre aux coqs de préparer la nourriture nécessaire à l'équipage
P. ext. : cuisine à bord d'un navire

de coq2 peut-être d'apr. l'angl. cookery « lieu où l'on cuisine » [ TLFi ]
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embatérienne
Animateur


Inscrit le: 11 Mar 2011
Messages: 3864
Lieu: Paris

Messageécrit le Friday 07 Feb 14, 12:15 Répondre en citant ce message   

Le TLF note même, à propos de coquerie : Attesté uniquement ds les dict.
Je ne connaissais pas le mot, mais je le rencontre dans la traduction française d'un roman d'Alice Munro, prix Nobel de littérature, Fugitives :
Citation:
« Les œufs n'étaient pas assez cuits. »
« Je sais ». La dame compatit. « J'ai pensé que j’aurais dû faire irruption dans la cuisine pour les préparer moi-même. »
« La coquerie. On dit la coquerie. »
« Je croyais que c'était sur les bateaux. »

Je me suis demandé comment c'était dans l'original anglais. Serait-ce "cookery" ? Probablement non, puisque l'anglais cookery n'a pas vraiment ce sens et en fait d'ailleurs un piètre candidat pour l'origine de coquerie.
Eh bien, voilà, sans vous faire plus longtemps languir :
Citation:
“The eggs were runny.”
“I know.” The woman commiserated. “I was thinking, I should just have barged into the kitchen and done them myself.”
Galley. They call it a galley.”
“I thought that was on a boat.”

Ah oui, galley, bien sûr. Cf. MDJ galère.
De quand date cette coquerie ? Le TLFi mentionne une première attestation de 1831. Mais je trouve sur L'énigme de la Diane l'indication qu'on disait coquerie au XVIIIe siècle, avant que cambuse ne s'imposât vers 1815. Je n'ai pourtant pas trouvé de livres sur Google attestant cet ancien usage.
L'attestation de 1831 est celle du Dictionnaire de Marine de Willaumez :

qu'on peut compléter par celle de 1859 du Dictionnaire de Marine de Bonnefoux :

Il y a peut-être une influence de "cook room" sur "coquerie".
En tout cas, le mot "coquerie" semble gagner du terrain dans les livres contemporains.


Dernière édition par embatérienne le Friday 07 Feb 14, 20:53; édité 1 fois
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José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
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Messageécrit le Friday 07 Feb 14, 19:45 Répondre en citant ce message   

Embatérienne a écrit:
Ah oui, galley, bien sûr. Cf. MDJ galère.

C'est savoureux tout ça !
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