Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
|
écrit le Tuesday 06 May 14, 18:31 |
|
|
le Berton a écrit: | Le milieu populaire de Paris, devait parler différemment. |
C'est une certitude, le "patois de Paris" existe encore chez des personnes très âgées issues des classes populaires. Je ne parle pas de l'argot, qui n'est qu'un jeu linguistique, mais de traits phonétiques que l'on rencontre dans d'autres patois d'oïl. Mon grand-père est né en 1929 à Villemomble (14 km à l'est de Paris) et il y a vécu jusqu'à 18 ans avec deux ans d'interruption pendant la guerre où il était réfugié en Bretagne. Même quand il pense parler un français formel, il y a des particularités qu'il ne peut faire disparaître :
- "alle est lâ"
- "j'vas choisi' !"
- "viens à tab' don' !"
- "un chual"
le Berton a écrit: | je peux te certifier que -eau se prononce dans tous les cas "iaw" |
J'seu-ti beìte ! J'avins oublië les patoeys d'l'ess de la Bërteìgne ! (Suis-je bête ! J'avais oublié les patois de l'est de la Bretagne !) Je me suis même trompé en décrivant la prononciation de Saint-Gilles-Vieux-Marché. Il fallait lire : [Ɛ] au singulier et [iaw] au pluriel :
un caütè, des caütiaùx : un couteau, des couteaux
Mais ceci n'est valable que pour les patois très archaïsants du fin fond de la Bretagne gallèse. À Cancale, mon père entendait : un coutiaù, des coutiaùx. Le gallo de l'est a connu la même évolution que le français : confusion entre le singulier et le pluriel au profit de la prononciation du pluriel.
le Berton a écrit: | -an se prononce "anw" |
Encore du gallo de l'est !
À Cancale :
bl.laùnc (l géminé suivi de ta diphtongue) : blanc
À Saint-Gilles :
blanc : blanc
le Berton a écrit: | le son [e], il est remplacé par [ə].
Je pense que pour ce dernier, c'est vraiment un spécificité du gallo |
C'est juste. À partir de la carte 230-changer de l'ALF, le chanoine Falc'hun a fait de ses p'tites mains une carte interprétée qui nous le montre. Cette transformation n'existe qu'en Bretagne (sans la Loire-Atlantique) et dans le Maine. Il y a aussi deux points en Lorraine et quatre points en Bourgogne mais ils ne forment pas des aires cohérentes. C'est donc l'une des rares innovations à isoler le gallo des patois qui l'entourent.
Dernière édition par Jeannotin le Tuesday 06 May 14, 20:07; édité 1 fois |
|
|
|
|
Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
|
écrit le Tuesday 06 May 14, 19:12 |
|
|
le Berton a écrit: | Queuton: j'imagine que c'est une déformation de "content" |
Le problème de ta proposition c'est qu'elle ne cadre pas avec la phonétique du gallo de Saint-Gilles-Vieux-Marché. Je ne connais ni dénasalisation de [õ] en [œ] ni passage de [ã] à [õ].
J'ai une hypothèse légèrement moins mauvaise : une déformation du français "coton", avec une métaphore sur la douceur de cette matière. J'avoue que je ne connais pas non plus de passage de [o] à [œ], mais ce genre de transformation me semble plus vraisemblable que celle que tu proposes. De plus je n'ai besoin de ne changer qu'une seule voyelle. |
|
|
|
|
Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
|
écrit le Tuesday 06 May 14, 19:38 |
|
|
Le Berton, si tu as envie de présenter d'autres formes issues de ton parler, je te propose de créer un poste intitulé "comparaison de deux patois gallos". Sinon, nous allons nous éloigner du sujet initial. |
|
|
|
|
Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
|
écrit le Wednesday 07 May 14, 0:23 |
|
|
Breizhadig a écrit: | le démonstratif "ilë", n'[a] jamais existé en français... |
Je viens de tomber, par hasard, sur la preuve que c'était faux.
On lit dans le Roman de la Rose écrit entre 1230 et 1235 par Guillaume de Lorris, natif du Loiret :
Citation: | D'ung petit mont d'illec derriere
Descendoit l'eau courant et royde
|
|
|
|
|
|
Breizhadig
Inscrit le: 12 Nov 2004 Messages: 860 Lieu: Penn ar Bed / Finistère
|
écrit le Wednesday 07 May 14, 1:05 |
|
|
Bien vu! |
|
|
|
|
dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1887 Lieu: Ardenne (belge)
|
écrit le Wednesday 07 May 14, 14:58 |
|
|
Jeannotin a écrit: |
un caütè, des caütiaùx : un couteau, des couteaux
| En wallon namurois, il donne, comme tu l'as dit coûtia. En wallon liégeois: coûtê.
Ce cousinage a d'ailleurs donné lieu à la création de l'écriture wallonne dite "r'fondou", coutea, je crois.
De même, w.N. on via, w. Lg on vê, un veau, etc... |
|
|
|
|
Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
|
écrit le Wednesday 07 May 14, 15:37 |
|
|
Merci, dawance, tu viens de me faire penser qu'il faut signaler que l'alternance entre -è et -iaùx n'existait pas pour les monosyllabes :
- un biaù viaù, des biaùx viaùx : un beaux veau, des beaux veaux
- tu veuils-ti beire un p'tit d'iaù ? : veux-tu boire un peu d'eau ?
Si j'ai bien compris, le singulier et le pluriel sont homophones chez vous et l'alternance -ê/-ia est dialectale et non grammaticale.
La graphie -oû- note quel son ?
Je profite de cette discussion pour rappeler que tout ces mots en -eau sont issu d'un des suffixes diminutifs du latin : -ELLum.
Dernière édition par Jeannotin le Wednesday 07 May 14, 16:22; édité 1 fois |
|
|
|
|
dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1887 Lieu: Ardenne (belge)
|
écrit le Wednesday 07 May 14, 16:04 |
|
|
Citation: | l'alternance -ê/-ia est dialectal et non grammaticale. | Tout à fait.
Ma mère: "Louk on pô qué bê p'tit vê !" (Rotheux) "Regarde un peu quel beau p'tit veau !"
Sa cousine de Huy: "Awè, qué bia ptit via !" , "Oui, quel beau p'tit veau !".
La graphie ou , dans w. coûtê est celle du français, soit [u].
Pour eau, gallo iau, c'est bien sûr un autre étymon qu' -ellu !
wallon Lg: èwe, où l'on retrouve le w de aqua , (esp. agua) |
|
|
|
|
Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6525 Lieu: Etats-Unis et France
|
écrit le Wednesday 07 May 14, 17:19 |
|
|
Citation: | "Louk on pô qué bê p'tit vê !" (Rotheux) "Regarde un peu quel beau p'tit veau !" | D'où vient ce louk, qui ressemble étrangement à l'anglais look (regarde) ? |
|
|
|
|
Cesar B.
Inscrit le: 20 Jul 2014 Messages: 1 Lieu: Picardie
|
écrit le Sunday 20 Jul 14, 17:46 |
|
|
Jeannotin a écrit: | Je suis d'accord avec le Berton, le gallo c'est du français avec quelques évolutions phonétiques divergentes. Le Berton a aussi raison pour le sentiment des patoisant sur la question. Durant son enfance, mon père travaillait à la ferme à Cancale pendant ses vacances et il y avait encore des gallésants presque monolingues. Ils disaient : "maï, j'caùse françeìs ! " | J'explore un peu tardivement ce fil, et en effet, c'est ce terme "Gallo" qui m'intrigue.
Les Poitevins s'accordent à parler "poetevin", ceux de l'Anjou "l'angevin", et les habitants de la haute-Bretagne auraient été chercher sans barguigner un mot d'une langue voisine bien que différente, pour nommer leur "parler" et leur contrée, étonnant non ?
Je n'ai jamais entendu un Québecois dire qu'il parlait "frenchy" ni un Genevoix s'affirmer "françouz".
Pour ce qui concerne l'ancienneté du terme "gallo", bien que j'aie vécu à Nantes de 1937 à 1957, je n'y ai jamais jamais entendu dire qu'on y parlait ni qu'on y avait parlé le gallo.
Maintenant, c'est peut-être çà la principale spécificité du parler haut-Breton. |
|
|
|
|
dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1887 Lieu: Ardenne (belge)
|
écrit le Tuesday 22 Jul 14, 11:27 |
|
|
Jacques a écrit: | Citation: | "Louk on pô qué bê p'tit vê !" "Regarde un peu quel beau p'tit veau !" | D'où vient ce louk, qui ressemble étrangement à l'anglais look (regarde) ? | Juste deux mots pour ce petit hors-sujet.
Etymonline, au mot look: Citation: | from West Germanic *lokjan | et Scheller, au wallon loukî, regarder: de l'ags locian, a.b. sax. locon, bav. souab. luegen , etc. (Cfr fr. reluquer pour lequel une origine wallonne n'est pas à exclure: riloukî) |
|
|
|
|
le Berton
Inscrit le: 11 Jan 2008 Messages: 133 Lieu: Bretagne
|
écrit le Tuesday 22 Jul 14, 16:21 |
|
|
Cesar B. a écrit: | Les Poitevins s'accordent à parler "poetevin", ceux de l'Anjou "l'angevin", et les habitants de la haute-Bretagne auraient été chercher sans barguigner un mot d'une langue voisine bien que différente, pour nommer leur "parler" et leur contrée, étonnant non ?
Je n'ai jamais entendu un Québecois dire qu'il parlait "frenchy" ni un Genevoix s'affirmer "françouz".
Pour ce qui concerne l'ancienneté du terme "gallo", bien que j'aie vécu à Nantes de 1937 à 1957, je n'y ai jamais jamais entendu dire qu'on y parlait ni qu'on y avait parlé le gallo.
Maintenant, c'est peut-être çà la principale spécificité du parler haut-Breton. |
Il ne vous aura pas échappé qu'on donne le nom d'un parler local en fonction du nom de la région...
Même si les frontières ne sont que sur les cartes, et que dans les faits, il n'y a pas de différence de dialectes de chaque coté d'une frontière.
Pour la Haute Bretagne, il n'y a pas de nom pour la région. On n'allait pas dénommer le parler "le breton", alors que c'est une langue qui existe déjà et qui très à part des parlers français. Il fallait bien trouver un nom...
Du moins, jusqu'au XXème siècle, personne ne s'interressait à donner un nom à leur patois, surtout que c'était pour eux du français.
Mais la période "régionnalisme" est passé par là, et il fallait trouver une originalité à cette partie de la Bretagne qui n'a jamais parlé le breton!
On a donc créé le gallo...C'est la façon dont les bas-bretons appellaient les français, et donc était un mot inconnu des hauts-bretons! |
|
|
|
|
Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
|
écrit le Sunday 27 Jul 14, 18:31 |
|
|
En fait, la façon dont le gallo a été nommé représente un cas de figure plus rependu que ne le pense Cesar B. Beaucoup de dialectes parlés aux frontières du domaine d'oïl ont reçu un nom emprunté à la langue immédiatement voisine. On a ainsi les mots wallon et welche (langue d'oïl d'Alsace), qui sont tirés de la racine dont se servent les Germains pour nommer les populations celtes, même romanisées. On peut aussi citer le gavache, variété la plus méridionale du poitevin-saintongeais, dont la dénomination provient du sobriquet donné par les Gascons aux peuples plus septentrionaux (gens d'oïl, Limousins, Auvergnats).
Tous ces termes sont, à l'origine, des noms plutôt péjoratifs désignant des populations senties comme étrangères et dont on a ensuite étendu le sens pour nommer d'une façon commode les variétés linguistiques qu'elles parlaient. Un autre choix aurait pu être fait. Au XIXème siècle, on disait très souvent le bas-breton pour parler du breton et, sporadiquement, le haut-breton pour parler du gallo. |
|
|
|
|
|