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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Tuesday 20 May 14, 23:34 |
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Feintisti a écrit: | "el vegn a chantar" (= il (de)vient à chanter) signifie "il chantera" (comparez avec le frioulan "al cjantarà"), ce qui calque l'allemand "er wird singen". |
Je viens de voir dans une grammaire du ladin que ce dernier utilise le même auxiliaire suivi du participe passé pour créer un passif :
Ex. al vegn ciantà = il est chanté (= il (de)vient chanté)
Je me demande si le romanche fait ça aussi. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10946 Lieu: Lyon
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écrit le Wednesday 21 May 14, 9:54 |
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On a cette forme en italien.
L'auxiliaire venire est utilisé pour exprimer le passif.
- Tutto questo viene fatto dalla gente in laboratorio.
= Tout cela est fait/réalisé par ceux qui travaillent dans les labos. |
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ElieDeLeuze
Inscrit le: 14 Jun 2006 Messages: 1622 Lieu: Allemagne
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écrit le Wednesday 21 May 14, 19:01 |
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En effet, gnir est le verbe aussi pour le passif en romanche. |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Thursday 22 May 14, 21:56 |
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Et en frioulan aussi, c'est même l'unique façon de faire un passif au présent :
Ex. (jo) o ven laudât = (moi,) je suis loué
Pour les temps suivants, on utilise le verbe "être" : passé composé, plus-que-parfait, passé simple...
Je remarque que dans toutes les langues rhéto-romanes, le verbe "venir":
- est utilisé pour le passif
- a aussi valeur de "devenir"
Et c'est aussi une caractéristique retrouvée en allemand et en néerlandais, mais son utilisation comme auxiliaire du futur est uniquement allemande. Je pense que ce développement en romanche est à la fois une grammaticalisation de "(ve)gnir a" et une influence allemande.
Dans la grammaire que j'ai trouvée du ladin, on y parle de deux types de passifs :
1) en "vegnì" = passif d'événement = dynamique
2) en "ester" = passif de condition = statique
Et la même différence se trouve en allemand, où le passif dynamique utilise "werden" et le statique "sein".
Cela dit, je ne sais pas si le verbe "venir" a aussi cette valeur dans des langues gallo-italiennes (dialectes italiens du Nord).
ElieDeLeuze: Tu as une grammaire du romanche à disposition ? Impossible d'en trouver une sur la Toile, mais j'en ai une pour le frioulan et une pour le ladin. Ce serait utile pour comparer. |
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ElieDeLeuze
Inscrit le: 14 Jun 2006 Messages: 1622 Lieu: Allemagne
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écrit le Saturday 24 May 14, 16:07 |
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Pour la version officielle du romanche, la Lia Rumantscha a demandé à l'université de Fribourg de s'attacher à une grammaire normative. Voila le résultat:
http://lettres.unifr.ch/fileadmin/Documentation/Departements/Langues_et_litterature/Plurilinguisme_et_didactique_des_langues_etrangeres/Documents/RR_Documents/Grammatica_RR.pdf
Pour les autres idiomes, il faut faire les bouquinistes suisses ou se déplacer dans les Grisons dans une librairie romanche. C'est en général très régionaliser, vous ne trouverez pas tous les idiomes dans la même librairie, donc grand tour des vallées romanches obligatoire.
Je ne me suis vraiment intéressé qu'au Vallader, donc je possède le super-conjugator des verbes valaders et la grammaire puter/vallader qui répond au doux nom de Grammatica Ladina, de la Lia Rumantscha par Gian Paul Ganzoni. On doit pouvoir la commander sur le site de la Lia. Détail amusant, la table de matières est à la fin, suivant la tradition francophone. Et on dit qu'ils sont germanisés, on est mauvaise langue. |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Sunday 25 May 14, 12:09 |
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Super ! Merci pour le lien !
"Grammatica Ladina" ? Je suis un peu étonné par l'usage de ce mot. Officiellement, "ladin" désigne un groupe de parlers au Nord de l'Italie, spécifiquement les Dolomites, Trentino et Belluno. Mais j'ai aussi vu le frioulan désigné comme "ladin oriental". Pourquoi appelle-t-on les dialectes puter/vallader du "ladin" ? Si ce mot est si général, on pourrait imaginer une désignation "langues ladines" au lieu de "rhéto-romanes", non ?
Concernant la grammaire, je remarque trois choses :
1) pronoms sujets:
- obligatoires en frioulan et ladin
- uniquement en cas d'absence de sujet en romanche (comme en français)
2) déterminants possessifs:
- précédés de l'article défini en frioulan (sauf dans les cas où l'italien ne les utilise pas)
- jamais précédés de l'article défini en romanche et ladin (comme en français)
3) particule négative:
- en deux morceaux en romanche standard et surmiran (na/n' ... betg)
- en un seul morceau en frioulan et ladin: no (mais on peut utiliser "pa" après le verbe en ladin, comme en français)
- les dialectes "ladins" du romanche utilisent juste "nu(n)" avant le verbe
- les dialectes sut/sursilvan du romanche utilisent juste "buc(a)/betg(a)" après le verbe
Je remarque également qu'en romanche, l'ordre des mots a un côté allemand avec l'inversion...
Ex. Damaun vom jau/voma en vacanzas. (Demain je vais en vacances) = Doman o voi in vacancis (en frioulan)
Je suis aussi étonné des finales en -el pour la première personne du singulier au présent dans certains verbes (leger = lire > jau legel = je lis), alors que cette finale est absente dans les autres langues rhéto-romanes.
Dernière édition par Feintisti le Sunday 25 May 14, 15:37; édité 1 fois |
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ElieDeLeuze
Inscrit le: 14 Jun 2006 Messages: 1622 Lieu: Allemagne
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écrit le Sunday 25 May 14, 14:27 |
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Ladin signifie Puter+Vallader+Jauer en romanche, donc la vallée de l'En/Inn et de Müstair.
La terminaison -el est une spécialité du sursilvan (pour tous les verbes), et donc dans la langue normée commune, il a fallu faire des compromis. Et la situation un peu bâtarde est le reflet de cette réflexion très poussée sur l'équilibre entre les idiomes pour ne pas trop avantager l'un sur les autres.
La négation aussi est un compromis, car les ladins on la version antéposée, les sursilvans la version postposée et les autres ont les deux ou bien parlent tous allemand. Donc, le na rappelle le nu ladin et le ne/na surmiran, et le betg est la compromis surmiran/sursilvan. Ceci dit, un sursilvan ne va pas se gêner pour garder buc quand ça lui plait.
Mes possessifs romanches sont comme en français à un détail : la forme singulier masculine a une tête de pluriel parce que la distinction singulier/pluriel a disparu pratiquement partout. Les sursilvans l'ont gardée, je crois.
Le règle de l'inversion est strictement appliquée à l'allemande.
Le passé simple est encore vivace dans les contes et histoires orales du ladin, alors que les sursilvans l'ont perdu depuis longtemps. Du coup, il ne l'ont pas repris dans la langue normée commune. Dommage, ça manque dans les récits, un roman tout au passé composé, c'est moche. Heureusement que l'imparfait a pu être sauvé. Du coup, on a la même chose que dans la langue parlée française. Très exactement, même.
L'usage du subjonctif me semble parfois suivre les règles italiennes, parfois la correspondance subjonctif passé / Konjunktiv 2 allemand. Du coup, les formes en -ss- du subjonctif imparfait ont la fonction du conditionnel. |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Sunday 25 May 14, 14:50 |
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Je me demande si le mot "ladin" utilisé pour les dialectes que tu cites pour le romanche n'est pas utilisé justement parce qu'on les voit comme la continuation des dialectes ladins d'Italie (ex. nu(n) et no, vs le romanche non-ladin avec betg/buc)...
ElieDeLeuze a écrit: | La terminaison -el est une spécialité du sursilvan (pour tous les verbes), et donc dans la langue normée commune, il a fallu faire des compromis. Et la situation un peu bâtarde est le reflet de cette réflexion très poussée sur l'équilibre entre les idiomes pour ne pas trop avantager l'un sur les autres. |
Oui, mais du coup la langue standard est plus compliquée (à cause de tous les "compromis"), il me semble.
Enfin, ça ne répond pas à la question de l'origine de ce -el à la 1re personne du singulier...
Citation: | la forme singulier masculine a une tête de pluriel parce que la distinction singulier/pluriel a disparu pratiquement partout. |
La distinction est gardée en ladin (mi(e) vs miei) et frioulan (gno vs miei). Je me demande aussi pourquoi cette simplification... Cela dit, je crois qu'en ladin on peut aussi utiliser une forme abrégée "mi" valable pour le masculin singulier et pluriel. Mais pour un pronom (avec article défini), il faut la forme entière.
Citation: | Le passé simple est encore vivace dans les contes et histoires orales du ladin, alors que les sursilvans l'ont perdu depuis longtemps. Du coup, il ne l'ont pas repris dans la langue normée commune. |
Dommage, en effet. Tu sais comment on forme le passé simple en ladin (romanche) ?
Citation: | L'usage du subjonctif me semble parfois suivre les règles italiennes, parfois la correspondance subjonctif passé / Konjunktiv 2 allemand. Du coup, les formes en -ss- du subjonctif imparfait ont la fonction du conditionnel. |
Je crois que c'est pareil en ladin (ie ciantasse = (que) je chantasse / je chanterais), mais pas en frioulan (o cjantarès).
J'aurais dit que c'est sans doute parce que le ladin est plus exposé à l'allemand que le frioulan, mais je pense que cette forme en -ss- est un conditionnel dans d'autres langues romanes (à vérifier). |
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ElieDeLeuze
Inscrit le: 14 Jun 2006 Messages: 1622 Lieu: Allemagne
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écrit le Sunday 25 May 14, 19:50 |
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Oui, ce -el embête tout le monde. En pratique, les Sursilvans l'utilisent et les autres l'oublient. S'ils bossent pour la Lia Rumantscha, ils font un effort. La Suisse, quoi.
Le passé simple se forme en -et/-it et est assez régulier comparé aux verbes français. Il y a forcément des surprises mais bon, rien de méchant.
Le verbe jouer : giodar
eu giodet
tü giodettast
el giodet
nus giodettan
vus giodettat
els giodettan
Seuls les verbes en -ir gardent cette voyelle au passé simple. Certains verbes ont des formes super-courtes comme en français:
être : esser - eu füt, nus füttan
dire : dir - et dschet nus dschettan
Autre germanisme en romanche, les accords des participes passés se réduisent à la concordance avec être. Avec avoir et dans les cas complexes (où tout le monde fait faux en français), le romanche a tout perdu et le participe passé reste invariable au masculin singulier. |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Monday 26 May 14, 22:58 |
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Intéressant, ce passé simple. Je me demande pourquoi on ajoute le -et/-it-.
La même chose en frioulan (pas de -et/-it):
jo o giujai
tu tu giujaris
lui al/jê e giujà
nô o giujàrin
vô o giujaris
lôr e giujarin
être : jessi - jo o foi, nô o fòrin
dire : dî - jo o disèrin, nô a diserin
Pour le ladin, je n'ai pas trouvé de forme passé simple dans la grammaire que j'ai... La situation doit être similaire à celle du romanche, je suppose.
Petite liste de mots romanches qui sortent un peu de l'ordinaire et une tentative d'étymologie:
- suenter = après (segonder en ladin gherdëina, et aussi seond/secontri en frioulan)
- nar(ra) = fou (folle) (aucune idée pour celui-là)
- uss = maintenant (un démonstratif ipsus ? en frioulan, cette nuit se dit "usgnot")
- gugent = équivalent romanche de l'allemand "gern" (volontiers) (cfr. gën en ladin gherdëina) (?)
- mintga = tout, chaque (?)
- bler = beaucoup, la plupart (?)
- atgnamain = en fait (?)
- giada = fois (cfr. iede (pl. iedesc) en ladin gherdëina, sans doute du verbe "ir" (aller))
- entschatta= début (?)
- bulieu = champignon (?)
- adina = toujours (cognat avec adun, adöm, etc. qui veulent dire "ensemble", ad+unum)
Dernière édition par Feintisti le Wednesday 15 Oct 14, 21:58; édité 4 fois |
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Itikar
Inscrit le: 05 Feb 2014 Messages: 5 Lieu: Italie, Lombardie
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écrit le Sunday 15 Jun 14, 21:07 |
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Feintisti a écrit: | je pense que cette forme en -ss- est un conditionnel dans d'autres langues romanes (à vérifier). |
Oui, c'est très souvent dans les langues romanes du Nord d'Italie.
Dans mon mantouan: a cantarès = je chanterais |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Monday 16 Jun 14, 0:09 |
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Merci pour l'information, mais ton mantouan utilise une forme différente, identique à celle qu'utilise le frioulan (o cjantarès = je chanterais).
Est-ce que le mantouan utilise aussi "venir" suivi d'un participe passé pour donner un sens passif ? |
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Itikar
Inscrit le: 05 Feb 2014 Messages: 5 Lieu: Italie, Lombardie
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écrit le Tuesday 17 Jun 14, 1:07 |
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Feintisti a écrit: | Merci pour l'information, mais ton mantouan utilise une forme différente, identique à celle qu'utilise le frioulan (o cjantarès = je chanterais). | En effet je parlais de la forme frioulane.
Citation: | Est-ce que le mantouan utilise aussi "venir" suivi d'un participe passé pour donner un sens passif ? | Bien sûr, comme aussi l'italien. On peut utiliser soit venir soit être pour former le passif.
A vegni vardà (mantouan) = vengo guardato (italien) = je suis regardé |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Wednesday 18 Jun 14, 23:35 |
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Ça ressemble beaucoup à du rhéto-roman !
Mais en rhéto-roman, seul le verbe "venir" peut être utilisé pour le passif... |
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Haut-Berrichon
Inscrit le: 27 Feb 2015 Messages: 30 Lieu: Saint-Amand Montrond
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écrit le Sunday 30 Aug 15, 10:03 |
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Cependant dans la réalité de tous les jours, les romanchophones écrivent-ils davantage en dialecte ou en Rumantsch Grischun (la forme standardisée)?
Quelle est la réalité de la diglossie à l'écrit (Et à l'oral? Quand il y a quelques petites incompréhensions, entre dialectophones, le Rumantsch Grischun sert-il de langue-pont?) |
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