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éléphant (français) - Le mot du jour - Forum Babel
éléphant (français)
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gilou



Inscrit le: 02 Jan 2007
Messages: 1528
Lieu: Paris et Rambouillet

Messageécrit le Friday 12 Aug 11, 2:05 Répondre en citant ce message   

Ça m'étonnerait qu'Hannibal ait importé ses éléphants d'Asie.
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Skipp



Inscrit le: 01 Dec 2006
Messages: 739
Lieu: Durocortorum

Messageécrit le Friday 12 Aug 11, 9:33 Répondre en citant ce message   

Je viens de faire une petite recherche sur le sujet et... effectivement, l'éléphant d'Afrique est beaucoup plus difficile à domestiquer que celui d'Asie... mais il semblerait que cela soit des éléphants de l'Atlas qui aient été domestiqués durant l'antiquité.

http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/27289/RFF_1957_3_204.pdf?sequence=1
Citation:
Louis Lavauden, qui, dans son remarquable ouvrage, « Les Grands Animaux de Chasse de l'Afrique Française », auquel sont empruntés beaucoup des renseignements consignés ci-dessus, écrit ce qui suit en 1934 :
« On sait que les anciens avaient utilisé l'éléphant d'Afrique à la guerre. On a longtemps supposé qu'ils n'avaient eu que des éléphants d'Asie, alors qu'un simple examen des monuments, des médailles, des mosaïques, montrant les énormes oreilles de ces animaux aurait suffi à éclairer la question ».
Il faut cependant s'adresser à un autre auteur, le Professeur E.-F. Gauthier, de l'Université d'Alger, grand spécialiste de l'histoire ancienne du Maghreb, pour connaître tout le fond de la question. Dans « Le Passé de l'Afrique du Nord », il nous révèle que Polybe parle des éléphants de Carthage, originaires de l'Atlas, et de leurs conducteurs hindous. Ainsi, si Hannibal se servait bien d'éléphants africains, il faisait appel à des cornacs asiatiques.

Il semblerait également que dans les années 50 les belges ont lancés des tentatives de domestication de l'éléphant africain avec l'aide de cornac indien... mais il y'eu peu de résultat probant et l'expérience fut abandonnée avec l'indépendance du Congo belge.
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11171
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Wednesday 28 Dec 16, 15:36 Répondre en citant ce message   

Quelques ajouts à ce fil à partir de mes glanures çà et là, commentées.

Pour Ali Nourai (dictionnaire étymologique du persan), on remonte à deux mots de l’ancien égyptien qui semblent être formellement associés :

yb ou âbu « éléphant, ivoire »
elu, elu-ephas « éléphant »

Les mots désignant l’éléphant ou l’ivoire dans les langues indiennes sont sans rapport. Il semble donc bien que le vocabulaire sémitique et européen sur ce sujet soit effectivement venu d’Afrique par l’Égypte.
Quant à l’association morphologique des mots ci-dessus, Chantraine (p. 338) n’y croit pas beaucoup. Il faudrait avoir l’avis d’un spécialiste de l’égyptien antique.

À partir de là, on obtient

1. le vieux perse piru « ivoire ». Pas de mot pehlevi chez Nourai mais chez Mackenzie pīl a le sens d’« éléphant ». Aucune mention de l’ivoire, ni de l’origine de pīl.

2. Nourai n'en parle pas mais j’ajouterais ici les mots akkadiens pīru, pēru, pīlu « éléphant ». Dans la même langue, l’ivoire se dit littéralement « dent d’éléphant ».

3. J'ajouterais aussi le phénicien pl "ivoire" (Rajki).

4. l’araméen p-ila, pulâ, pīla « éléphant », d’où l'emprunt par le persan de pīl « éléphant », dérivé pīl-âs « ivoire », littéralement « os d’éléphant ».

5. les mots hébreux el-eph « boeuf, éléphant », pīl « éléphant » et yeb « éléphant » (À vérifier)

6. le mycénien erepa "éléphant" signalé par Outis

7. le grec ἐλέφας [elephas] « éléphant » (mais on sait que le mot signifie aussi « ivoire »), d’où le latin elephantus, id., à propos duquel Ernout et Meillet disent notamment ceci :
En pénétrant dans les langues germaniques, elephantus a changé de sens et a servi à désigner le chameau ! Gotique ulbandus, vieux haut allemand olbanta, vieil anglais olfend, etc. Il est curieux cependant que toutes ces formes présentent un o qui est conforme aux exigences de la phonétique latine mais qui n’est pas attesté dans la langue écrite.

8. le latin ebur « ivoire ». E-M : La forme la plus proche qu’on connaisse est égyptien āb, ābu, copte ebou, ebu. On ne connaît ni l’origine du mot ni la voie par où il a passé en latin.

On voit que dans leur ensemble – et quoi que pensent Chantraine, Ernout et Meillet des différences entre le latin ebur et le grec elephas – la plupart des mots rencontrés ci-dessus reposent sur une stable et incontestable matrice phonique {labiale, approximant} aux réalisations diverses : PR / RP, PL, FL (en comptant l’arabe fīl que Nourai a oublié ou n’a pas su où placer), BR, VR. La réalisation LF en hébreu et en grec apparaît dès lors comme une métathèse de FL ou comme un cas de plus de non ordonnancement des radicales, phénomène maintes fois relevé aussi bien en sémitique qu’en indo-européen. Idem pour PR / RP (mycénien).
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José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 10945
Lieu: Lyon

Messageécrit le Wednesday 06 Jun 18, 9:04 Répondre en citant ce message   

Extrait du Fil Les noms du porc en arabe et berbère :
Amjahad a écrit:
En berbère le porc/sanglier/cochon se dit ilef.
Cependant chez les Touaregs, le mot désigne aussi un éléphant.
Je pense qu'il y a un lien entre l'éléphant : al-fil en arabe et ilef en berbère.
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11171
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Monday 20 May 19, 8:42 Répondre en citant ce message   

Je me suis amusé à écrire une petite histoire à partir de (presque) toutes les informations données dans ce fil.

Histoire d’éléphants

Avertissement : ce petit texte s’intitule « histoire », comme il aurait pu s’appeler « conte » ou « légende ». Il ne faudra donc pas lui accorder une importance scientifique, malgré les apparences.

Il y a, comme on sait, deux grands types d’éléphants : l’éléphant d’Asie, que nous appellerons EB, et l’éléphant d’Afrique, aux oreilles notoirement plus grandes, que nous appellerons EL. Le bel animal eut la malencontreuse idée de se doter de superbes défenses en ivoire, une matière convoitée par l’homme au même titre que les pierres précieuses pour la confection de bijoux en tous genres. Si bien que c’est souvent un même mot qui, dans plusieurs langues, a désigné l’éléphant et l’ivoire.

Les indices dont nous disposons pour pouvoir parler ainsi d’EB et d’EL sont bien faibles, mais tout de même il y a d’une part le sanskrit ibhah qui signifie aussi bien éléphant que ivoire, et d’autre part le tamazight ilou qui signifie éléphant.

Venons-en à l’Égypte du temps des pharaons. C’est un pays d’Afrique qui n’a eu aucune peine à avoir EL dans sa faune ou à l’accueillir sur son territoire, à juger par le mot elu, un des mots qui le désignaient alors. Nous ne savons pas si EB – ou seulement son ivoire – a voyagé en chair et en os d’Asie en Égypte ; c’est bien possible, en longeant la côte de l’Océan Indien puis d’un bout à l’autre du Moyen Orient jusqu’au Nil ; mais que son nom au moins y soit parvenu, on peut en être quasiment sûr à juger par le fait que l’hébreu yeb signifiait éléphant et qu’en égyptien des mots comme āb, ābu, yb signifiaient aussi bien éléphant que ivoire. D’où le copte ebou, ebu ivoire. Ajoutons que si les éléphants auxquels Hannibal fit traverser les Alpes étaient bien africains, comme le prouve la taille de leurs oreilles sur des inscriptions, ces mêmes éléphants étaient cornaqués par des Indiens venus tout spécialement de leur lointaine contrée. En cela Hannibal ne faisait probablement qu’imiter les pharaons.

Puis les choses se compliquent un peu : apparaît, aussi bien dans l’hébreu el-eph bœuf, éléphant que dans l’égyptien elu-ephas éléphant, un mot composé d’un premier élément reprenant apparemment le nom de EL, et d’un deuxième élément reprenant peut-être le nom de EB au prix d’une altération transformant la labiale sonore en une labiale sourde flanquée d’une aspiration. L’éléphant d’Asie et l’éléphant d’Afrique seraient ainsi réunis sous une même appellation. C’est à cet égyptien elu-ephas que le grec doit probablement son ἐλέφᾱς [eléphās] éléphant, ivoire, qui deviendra elephantus en latin.

En pénétrant dans les langues germaniques, elephantus a curieusement changé de sens et a servi à désigner le chameau ! Gothique ulbandus, vieux haut allemand olbanta, vieil anglais olfend, etc. Mais le célèbre olifant que Roland fit résonner à Roncevaux était plus probablement en ivoire que taillé dans la bosse d’un chameau.

Les choses seraient trop simples si elles en étaient restées là. On ne peut en effet passer sous silence un troisième personnage, originaire du Moyen Orient et lui aussi très ancien, d’abord appelé PIR, à juger par l’akkadien pīru, pēru éléphant et le vieux perse piru ivoire, puis PIL, à juger par le phénicien pl ivoire, et tous ces mots ne désignant que l’éléphant : l’akkadien pīlu, l’hébreu pīl, l’araméen p-ila, pulâ, pīla, le syriaque pila, le pehlevi pīl, le persan pīl et, bien sûr, l’arabe فيل fīl que l’on retrouve dans les mots espagnols marfil ivoire (litt. « os de l’éléphant ») et alfil le fou du jeu d’échecs. Où l’on apprend, par la même occasion, que la case du fou français et du bishop anglais sur ce jeu venu d’Orient a d’abord été occupée par un éléphant.

Nous ne nous prononcerons pas sur la place linguistique de PIR (ou PIL) géographiquement situé entre EB et EL. Nous la constatons, sans pouvoir émettre la moindre hypothèse. Ce sera la part mystérieuse de l’origine des noms de l’éléphant. Peut-être le mystère sera-t-il un jour levé par quelque talentueux et patient chercheur. Tout ce que l’on peut dire, c’est que le latin ebur, étymon du français ivoire et de l’anglais ivory, est probablement apparenté au copte ebu vu plus haut et a visiblement conservé comme lui une trace du EB asiatique.
Fin.
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Moutik
Animateur


Inscrit le: 06 Apr 2008
Messages: 1236

Messageécrit le Monday 20 May 19, 10:26 Répondre en citant ce message   

Sans oublier les éléphants de Chypre, de Crète, des Cyclades.
Les derniers ont dû être contemporains des hommes du mésolithique...
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Jeannotin
Animateur


Inscrit le: 09 Mar 2014
Messages: 879
Lieu: Cléden-Poher

Messageécrit le Monday 20 May 19, 10:34 Répondre en citant ce message   

Papou JC a écrit:
Nous ne savons pas si EB – ou seulement son ivoire – a voyagé en chair et en os d’Asie en Égypte ; c’est bien possible, en longeant la côte de l’Océan Indien puis d’un bout à l’autre du Moyen Orient jusqu’au Nil ;

N'oublions pas que jusqu'au premier siècle avant Jésus Christ, existait une sous-espèce moyenne-orientale de l'éléphant d'Asie : Elephas maximus asurus, de plus haute stature que l'éléphant d'Asie que nous connaissons. Tu parlais d'histoire au sens du conte, et je trouve justement une grande force d'évocation littéraire aux textes qui nous rappellent que la mégafaune, que nous voyons comme exclusivement africaine ou extrême-orientale, avait autrefois une bien plus grande extension géographique. Je pense par exemple à ce passage du Livre d'Isaïe que j'ai découvert à l'occasion d'une messe de carême diffusée par France Culture et qui évoque l'autruche syrienne Struthio camelus syriacus.
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