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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Saturday 01 Jun 19, 5:20 |
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Ce fil laisse pour le moment dans l'ombre un petit nombre d'autres mots latins en host- (hostia, hostus, hostire...). J'espère qu'un latiniste pourra nous éclairer un jour sur les liens éventuels de ce petit groupe avec les mots évoqués ici.
Deux indices, pour démarrer :
1. Outis nous a dit plus haut : la notion primitive signifiée par hostis est celle d'égalité par compensation. Voilà qui permettrait de rattacher hostia (compensation) et hostire 1 (compenser) aux mots de ce fil.
2. La récolte des olives se fait par gaulage des oliviers. Voilà qui permettrait de rapprocher hostus (récolte des olives) et hostire 2 (frapper). |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 02 Jun 19, 5:19 |
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Un troisième indice, c'est l'espagnol hostia. C'est un mot très fréquemment employé, non seulement au sens d'"hostie" dans les très catholiques églises espagnoles, mais aussi au sens de "coup, gifle, taloche". C'est aussi une simple exclamation ou un juron très courant, employé seul ou dans diverses locutions qu'on trouvera dans le DRAE à la suite des trois définitions suivantes .
Del lat. hostia 'víctima de un sacrificio'.
1. f. Hoja redonda y delgada de pan ácimo, que se consagra en la misa y con la que se comulga. (= hostie)
2. f. Cosa que se ofrece en sacrificio. (= chose offerte en sacrifice)
3. f. malson. Golpe, trastazo, bofetada. (= coup asséné)
La question est : d'où vient le sens de "coup", de hostire 2 ou de hostire 1 ? Faut-il vraiment considérer qu'il y a deux verbes hostire homonymes ou un seul ? Et si le sens de "victime" était directement dérivé de celui du coup donné pour sacrifier la dite victime ? En diachronie, les trois sens du hostia espagnol donnés par le DRAE pourraient bien être à lire dans le sens inverse : 1. coup, 2. victime, 3. hostie (victime symbolique, comme elle consommée). |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3865 Lieu: Paris
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 02 Jun 19, 9:35 |
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Et oui, c'est ce que croit forcément toute personne ignorant l'existence de hostire "frapper". Finalement, l'usage supposé blasphématoire de hostia n'est en fait qu'une survivance d'un vieux mot latin disparu. Probablement un même mot à l'origine, dont les siècles ont fini par faire deux homonymes. Le cas n'est pas rare. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3865 Lieu: Paris
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3865 Lieu: Paris
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écrit le Sunday 02 Jun 19, 10:25 |
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Papou JC a écrit: | Et oui, c'est ce que croit forcément toute personne ignorant l'existence de hostire "frapper". Finalement, l'usage supposé blasphématoire de hostia n'est en fait qu'une survivance d'un vieux mot latin disparu. Probablement un même mot à l'origine, dont les siècles ont fini par faire deux homonymes. Le cas n'est pas rare. |
Wikcionario ne s'embarrasse pas de scrupules et place toutes les acceptions dans la dépendance de ce verbe frapper.
https://es.wiktionary.org/wiki/hostia
Citation: | Del latín hostia, "ofrenda, víctima sacrificial", de hostire, "golpear", del protoindoeuropeo *gʰos-. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 02 Jun 19, 10:26 |
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Oui, tu as raison, il ne faut pas mélanger le juron et le sens de "coup", bien que, dans certains cas, il ne soit pas toujours facile de savoir auquel on a à faire.
(J'avais écrit cette phrase avant que tu aies fini de rédiger ton post.)
En ce qui concerne le Wikcionario, je crois qu'il résume en une phrase toute la question. C'est la conclusion à laquelle j'arrive moi aussi, comme tu as pu le lire. Tout part du coup.
Reste à voir le sens de *gʰos-... |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 03 Jun 19, 8:36 |
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Papou JC a écrit: | Reste à voir le sens de *gʰos-... |
Mais avant le sens, l'existence... Je n'ai pas trouvé une telle racine chez les Texans pokorniens. Il y a bien une racine *gʰō̆s- mais avec le sens de "manger"...
En fait, chez les gens sérieux, on ne trouve que *gʰos-ti-, qui est un thème, et non une racine. Il peut paraître étonnant que personne ne semble avoir été curieux de trouver la racine de ce thème.
Je vais sans doute encore dire une grosse sottise mais bon, je me jette à l'eau. Nous sommes entre amis, sur un forum sympathique, n'est-ce pas ?
En prenant modèle sur *por-st-i d'où est issu le latin postis, mon idée est d'analyser *gʰos-ti- en *gʰo-st-i-, "celui qui est situé derrière". Derrière le fleuve, derrière les montagnes, sous-entendu. L'étranger, en somme. L'autre.
Le problème, c'est la longueur du o de gʰo- car s'il semble bien exister une racine qui ait le sens de "derrière, après", elle s'écrit *gʰō-.
Et je ne suis pas sûr que ce ō long puisse s'abréger sous l'effet de l'adjonction de -st-i-. On verra bien ce qu'en pensent les spécialistes.
En attendant, les histoires de coups et de victimes sont, de ce point de vue, difficiles à envisager conjointement avec celles d'étranger, d'hôte et d'ennemi. On voit que la question étymologique est loin d'être réglée. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3511 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 03 Jun 19, 9:34 |
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La racine eurindienne *gʰos- n'est guère connu que dans un seul groupe, l'indo-iranien :
• skr. GHAS- ghasti « il mange, consomme, dévore » un verbe qui supplée à AD- atti (< *h₁ed-, lat. edō, to eat) à l'aoriste et au désidératif ;
• avest. gah- « essen, fressen » [manger, dévorer].
De nombreuses tentatives ont été faites pour la rapprocher d'autres mots à consonances plus ou moins voisines et à domaines sémantiques proches : lat. hostia « victime », gustus « goût », gr. γαστήρ [gastêr] « ventre, panse », toch.A kaṣt, B kest « faim », lett. gōste « festin ».
Toutes sont douteuses ou pire ; le thème *gus- signifie « éprouver » (Ernout et Maillet, DELL), le grec γαστήρ < *gras-ter (Chantraine, DELG), le mot letton semble ne pas exister (scheint nicht zu existieren, Mayrhofer, KEWA) et hostia demeure lointain (bleibt fern, KEWA).
Dans le dernier message de Papou, la longueur du o n'est pas un problème mais tout le reste l'est … |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 28 Jul 19, 7:03 |
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Papou JC a écrit: | En attendant, les histoires de coups et de victimes sont, de ce point de vue, difficiles à envisager conjointement avec celles d'étranger, d'hôte et d'ennemi. On voit que la question étymologique est loin d'être réglée. |
On trouvera un prolongement de ce fil dans victima et hostia : quelle différence ?
Sur victima, voir aussi le fil vincere (latin). |
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