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ElieDeLeuze
Inscrit le: 14 Jun 2006 Messages: 1622 Lieu: Allemagne
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écrit le Sunday 18 Apr 21, 14:46 |
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Oui, mais c'est la perspective néerlandaise. Le suffixe est général dans toutes les langues germaniques occidentales. On ne sait pas trop si c'était aussi du germanique commun car le nordique a perdu ce genre de suffixe relativement tôt. Il se peut que ce soit avant tout un suffixe des tribus saxonnes et des tribus franques [= de langue francique]. Ce n'est en tout cas ni alémanique, ni bavarois.
Donc on a historiquement à égalité toutes les formes du suffixe /-kîn/
Haut-allemand = chen
bas-allemand = ken
néerlandais = ke, tje/je (palatalisation très courante) mais aussi -ken (surtout en flamand)
frison = tsje (mais aussi sous influence des parlers hollandais -je, tje et des parlers bas-saxons -ke)
Le Yiddish est un cas qui demande un peu de réflexion...
- C'est (issu) du haut allemand, donc on devrait avoir le changement de K à CH
- c'est (issu) du rhénan avec influence alémanique, donc on devrait trouver aussi LE pour le diminutif.
- c'est peu influencé par le bas-allemand mais dans les régions de l'est, les germanophones du coins parlaient du bas-allemand, donc une forme en KE(N) est possible si les contacts sont considérés comme importants.
- le K du diminutif correspond aussi à des diminutifs slaves... or, le slave, c'était les voisins, la ville et l'administration. Donc pourquoi pas...
- le fait que le KE yiddish soit plus une question de féminin que de diminutif, cela en fait un avatar du suffixe slave.
Donc si le finnois a emprunté un suffixe germanique, c'était il y a très longtemps à une époque où on n'a pas la preuve de son existence (puisque l'islandais, même ancien, ne l'a pas). De plus, la voyelle de cet emprunt aurait été I... ce qui rend assez exotique de partir de KIN pour arriver à KO.
Le suffixe slave a peut-être été emprunté à une version balte, ce qui rendrait la voyelle plus fragile et on peut arriver à un résultat assez imprévisible. Le SISKO finnois serait alors possible. Sauf si vous voulez partir d'un KA slave qui devient KO en finnois, parce ce qu'il le vaut bien.
[AdM : Coquille corrigée. Merci resjl.] |
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rejsl Animatrice
Inscrit le: 14 Nov 2007 Messages: 3664 Lieu: Massalia
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écrit le Sunday 18 Apr 21, 16:17 |
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ElieDeLeuze a écrit: |
Le Yiddish est un cas qui demande un peu de réflexion...
- C'est (issu) du haut allemand, donc on devrait avoir le changement de K à CH
- c'est (issu) du rhénan avec influence alémanique, donc on devrait trouver aussi LE pour le diminutif.
- c'est peu influencé par le bas-allemand mais dans les régions de l'est, les germanophones du coins parlaient du bas-allemand, donc une forme en KE(N) est possible si les contacts sont considérés comme importants.
- le K du diminutif correspond aussi à des diminutifs slaves... or, le slave, c'était les voisins, la ville et l'administration. Donc pourquoi pas...
- le fait que le KE yiddish soit plus une question de féminin que de diminutif, cela en fait un avatar du suffixe slave.....
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Entièrement d'accord !
J'avais développé un peu la formation des diminutifs en yiddish. Suivre le lien.
Et le -ke, c'est exactement cela, un calque " aménagé , on passe de -ka à - ke ) du suffixe slave. |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Sunday 18 Apr 21, 17:39 |
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Oui, merci beaucoup, Adm. Je n'avais pas encore pu prendre connaissance de votre recherche. |
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AdM Animateur
Inscrit le: 13 Dec 2006 Messages: 896 Lieu: L-l-N (Belgique)
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écrit le Monday 19 Apr 21, 1:39 |
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Avec plaisir, mais en tenant bien compte des remarques formulées par ElieDeLeuze.
Mon second message visait juste à préciser le rapport entre le suffixe néerlandais -ke et l'allemand -chen. |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Monday 19 Apr 21, 8:55 |
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Je n'avais pas vu le message très documenté d'EliedeLeuze. Merci à lui. |
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András Animateur
Inscrit le: 20 Nov 2006 Messages: 1487 Lieu: Timişoara, Roumanie
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écrit le Monday 19 Apr 21, 9:40 |
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Un cas de coïncidence à propos de -ke. En hongrois aussi il y a un suffixe diminutif -ke, avec la variante -ka pour l'harmonie vocalique, ex. egérke « petite souris », madárka « petit oiseau ». Selon le dico étymologique hongrois, ce suffixe s'est formé à l'époque de l'ancien hongrois de deux autres suffixes diminutifs disparus par la suite, -k + -a/-e. |
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Picardicus
Inscrit le: 08 Oct 2010 Messages: 98
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écrit le Monday 26 Apr 21, 11:23 |
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"...Il se peut que ce soit avant tout un suffixe des tribus saxonnes et des tribus francisques. "
Les tribus francisques sont-elles apparentées aux tribus franques ? Si non, où se situent-elles géographiquement ? |
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rejsl Animatrice
Inscrit le: 14 Nov 2007 Messages: 3664 Lieu: Massalia
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écrit le Monday 26 Apr 21, 15:06 |
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Pour la langue on dit plutôt " francique " et, oui, langue parlée par les Francs. |
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ElieDeLeuze
Inscrit le: 14 Jun 2006 Messages: 1622 Lieu: Allemagne
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écrit le Monday 26 Apr 21, 16:33 |
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Ah oui, pardon, le S n’a rien à faire dans le francique. Mon inconscient doit être français.
Si on dit franque pour le peuple, je suis désolé de ma méprise. Merci.
Tout ça c’est fränkisch en allemand. |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Sunday 03 Oct 21, 22:12 |
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PEILI, qui signifie "miroir, est un emprunt au suédois spegel.
Comment passe-ton de spegel à peili ?
S'il s'agissait d'un emprunt plus récent, il serait plus littéral, mais le finnois traditionnel :
- ne supporte pas le groupe sp- à l'initiale ;
- ne possède pas le phonème /g/ ; dans les mots du fonds ancien, le son [g] apparaît seulement comme lénition du [k] derrière [n] (kenkä, "chaussure", mais kengät, "chaussures") ;
- ne peut adjoindre de morphème qu'à un radical (ici un mot-radical) terminé par une voyelle ; dans les mots étrangers, cette voyelle est généralement /i/ qui persiste dans toute la "déclinaison" : peilillä, "sur le miroir".
Un petit rappel :
http://projetbabel.org/forum/viewtopic.php?t=13957 |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Tuesday 02 Nov 21, 19:57 |
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KANIINI, "lapin" est un emprunt au français qui a transité par le suédois si l'on en croit la petite notice de Wikisanakirja (dictionnaire WIKI). On retrouve dans ce mot les termes anciens de conin ou conil. |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Tuesday 28 Jun 22, 18:22 |
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LES JOURS DE LA SEMAINE
Dans leur majorité, ces noms ont été empruntés au vieux-norrois par l’intermédiaire de l’ancien suédois aux alentours de l’an 1000. Les étymons germaniques sont eux-mêmes presque tous la transposition des dénominations latines. On ne sait quels étaient les noms antérieurs, ni même s’ils existaient. Peut-être un simple ordinal suffisait-il, comme en grec ancien et partiellement en grec moderne.
De nos jours, la semaine commence le lundi en Europe (norme ISO 8601 depuis 1988), mais cela n’a pas toujours été le cas. Ainsi, avant 1973, la semaine commençait le dimanche en Finlande, comme c’est le cas aujourd’hui encore aux États-Unis, en Chine ou en Inde. Nous verrons l’incidence que cette situation a créée sur la dénomination du mercredi.
1. Lundi se dit maanantai et remonte à *manadagh(er) (suédois moderne måndag).
Le mot scandinave est un calque du latin Lunae dies, « jour de la lune ».
L’adaptation d’un mot à la langue finnoise est toujours délicate du fait que la langue traditionnelle est pauvre en consonnes et qu’elle ne tolère qu’un petit nombre de leurs combinaisons.
Je me contenterai de donner un aperçu de cette adaptation pour la seconde partie du nom des jours, -tai < *dagh(er).
- Le d, uniquement utilisé comme variante lénifiée du t, ne pouvait se maintenir, la syllabe où il se trouve étant ouverte ; il est donc passé automatiquement à t.
- le gh final ne pouvait non plus se maintenir vu que la langue ignore les fricatives vélaires ; il a donc évolué vers yod (cf. grec mod. γεια [ja]) ; ce yod, connu du finnois mais ne pouvant occuper la position finale, s’est donc sonorisé et a formé une diphtongue avec le a.
Du fait qu’il se termine par une voyelle, le nominatif de tous les noms de jour équivaut au radical ; ils sont donc prêts à être « déclinés » : maanantain, maanantaihan, manaantaisin, etc…
2. Mardi se dit tiistai et vient de < *tywsdagh(er) (suédois mod. tisdag) ; c’est le jour de Tyw, ou Tyr, calque de Martis dies. Dans la mythologie germanique, Tyr, fils d’Odin, est en effet le dieu de la guerre (juste), de la justice et de la victoire.
Le –w de l’étymon, inconnu des finnois, s’est amuï.
3. A mercredi correspond keskiviikko. Les finnois n’ont pas emprunté le nom qui correspond au suédois onsdag ou à l’anglais wednesday « jour de Woden (Odin) », formations calquées sur le latin Mercurii dies (fr. mercredi), mais ils ont calqué le mot allemand Mittwoch, littéralement « milieu de semaine ». En effet, quand le dimanche commençait la semaine, le mercredi en occupait le milieu. Le russe, avec среда (r. mod. середина = « milieu », посреди(не), « au milieu ») présente une situation semblable. A-t-il existé un mot plus ancien pour désigner le mercredi ? Je n’ai pu l’établir.
Le « préfixe » keski- remonte au pr. finnois *keske, « centre, milieu ». Il ne constitue plus un mot autonome dans la langue moderne qui ne connaît que les mots keskus ou keskusta « centre ». En revanche, keski- entre dans la composition d’un grand nombre de mots (ex : keskiaika, « Moyen Age » ; Keski-Amerikka, « Amérique Centrale », etc…). Quant à viikko, c’est un emprunt au haut-allemand *vikon plutôt qu’à l’ancien suédois ou au vieux norrois.
4. Jeudi a pour correspondant torstai. Ce mot nous fait renouer avec les étymons scandinaves, puisqu’il provient de *torsdagh(er) (suédois torsdag), « jour de Thor », le dieu du ciel et du tonnerre, fils d’Odin, ayant été logiquement rapproché du Jupiter latin (jeudi < Jovis dies, Jovis étant le génitif de Juppiter). Le groupe –rst a pu se maintenir en finnois du fait qu’il comporte un –s central.
5. Vendredi, c’est le jour de Freyja, ou Frigg (certains y voient deux divinités proches), un des avatars de la déesse-mère des anciens Germains, épouse d’Odin, rapprochée de la Vénus des Latins. L’étymon scandinave est *freadagh(er) (suédois fredag), qui aboutit à perjantai en finnois. Le f, inconnu de la langue ancienne, soit disparaît, comme dans le mot Ranska, « France », soit se transforme en occlusive, comme ici. Il faut supposer d’autre part une métathèse du yod pour expliquer –rj.
6. Avec le mot < *laugardagh(er), d'où provient lauantai, les anciens Scandinaves, pour nommer le samedi, n’ont convoqué ni le sabbat des Hébreux, comme le français, l’allemand ou le russe, ni le Saturne des Romains, comme l’anglais ou le néerlandais ; si l’on en croit une chronique anglaise du début du XIIIème siècle, attribuée à John of Wallingford (1), le samedi était pour les Vikings le jour du bain et de la lessive. Mais peut-être n’y a-t-il là qu’un simple justificationnisme étymologique ; toujours est-il que dans *laugardagh(er) (suédois moderne lördag), on reconnaît aisément la racine indo-européenne *le/ow présente dans le grec λούω, le latin lavo (avec un vocalisme différent), le russe лить (verser), l’allemand laugen (lessiver), etc… On avance également un rite de purification à la veille du jour du Seigneur, mais vu la christianisation tardive des Nordiques (encore imparfaite en l’an 1000) et le nom même donné au dimanche, cette hypothèse est peu probable.
(1) Cité dans un travail d’étudiant publié sur le site QUORA.
7° Avec le nom du dimanche, nous restons en effet dans le paganisme. Ce nom est sunnuntai, directement issu du vieux-norrois *sunnudagh(er) (suédois moderne söndag). Comme le Soleil ne semble pas particulièrement figurer dans le panthéon germanique, il faut sans doute voir dans le terme originel un simple calque de l’expression latine Solis dies. Les langues germaniques ont conservé cette filiation, à l’inverse de toutes (?) les autres langues européennes (« jour du Seigneur » dans les langues latines et en grec moderne, « jour des foires » en estonien.
Contrairement à ce que nous avons vu pour le nom des mois, les finnois n’ont pas innové ; il faut dire que le concept de « semaine » ou de décade n’est pas aussi prégnant que celui de mois. Les repères de l’année sont bien plus les fêtes que les jours en eux-mêmes. On notera d’autre part la parfaite « fennisation » des termes germaniques ; elle s'opère si bien qu'il est parfois difficile de reconnaître un emprunt ancien. Seuls les plus récents restent imparfaitement assimilés et comportent des phonèmes allophones (b, f, ou des chuintantes). |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Saturday 02 Jul 22, 14:47 |
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En voici l'illustration :
Si l'on ignore le sens du mot POMMI, par exemple, il sera difficile d'y découvrir un emprunt au suédois bomba, "bombe" (par ailleurs emprunté au français).
C'est que le [b] est inconnu du finnois traditionnel ; le premier s'est automatiquement assourdi, le second s'est assimilé au m], bien que [mp] eût été viable, la formation des comparatifs en témoigne.
De même PANKKI, "banque", PALLO, "ballon", PORATA, "forer", etc...
En revanche, de nombreux mots empruntés plus récemment ont conservé le son [b]
Citons BAARI, "bar" (la réalité est ancienne chez nous, mais pas dans les pays scandinaves ni en Finlande, où vous verrez surtout des bars dans les grandes villes cosmopolites du Sud, surtout Turku, la plus "parisienne" des villes de Finlande (avis subjectif !), BALLADI "ballade", BARBAARI, "barbare (dans tous les sens du français), BIOLOGIA, etc...
D'une manière générale, les noms géographiques et historiques conservent le [b] : BALTIA, "ensemble des pays baltes", BRASILIA, "Brésil" ou "Brasilia", BERMUDA(SAARET), "(Îles) Bermudes", BAABEL, "Babel"...
Le mot BOMBA est intéressant : il désigne le tag (il y en a beaucoup en Finlande !) et a bien sûr la même origine que POMMI, mais avec le sens moderne de "bombe de peinture". Cette fois, plus de changement phonétique.
Muut ajat, muut tavat ! |
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Skipp
Inscrit le: 01 Dec 2006 Messages: 739 Lieu: Durocortorum
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écrit le Friday 18 Nov 22, 17:23 |
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Il me semble que les linguistes ont bien démontrés qu'il existe de nombreux emprunts entre les langues indoeuropéennes et finno-ougriennes.
Le miel et l'amanite:
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00009925/document
Citation: | On trouve un état de cette question complexe dans le Fenno-Ugric Vocabulary de Bjorn Collinder12 : y figurent comme étant d'origine indo-européenne des mots comme « or », « grain », « laine », « poison », « hameçon », « alêne », « bœuf », « route », « porc », « sel », et aussi « miel » et « abeille » |
Des noms de l'abeille et de la ruche en indo-européen et finno-ougrien:
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k432917v/
https://fr.wikipedia.org/wiki/Langues_finno-ougriennes
Citation: | Une reconstruction possible pour les nombres 8 et 9 est *kak+teksa, soit « dix moins deux » et *yk+teksa « dix moins un », où *teksa (cf. deka) serait un emprunt indo-européen |
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Cligès
Inscrit le: 18 Jul 2019 Messages: 889 Lieu: Pays de Loire
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écrit le Tuesday 06 Dec 22, 19:35 |
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Merci de votre contribution, que je n'avais pas encore vue !
HAMMAS
Ce nom, qui signifie « dent » dans tous les sens du français (dent de la mâchoire, dent du peigne…) cache assez bien son origine, comme tout emprunt ancien.
Il faut d’abord dire que son radical est hampaa- (« dents », par exemple, se dit hampaat). Dans beaucoup de noms en effet, le nominatif singulier ne représente pas le radical, or c’est exclusivement ce dernier qu’il faut prendre en compte en étymologie. L’estonien a lui aussi la forme hammas, mais son radical est hamba-, dont le [b] est plus proche de l’emprunt, le finnois ayant systématiquement assourdi les occlusives sonores depuis quelques siècles.
Hammas a été emprunté à l’ancien balte žemb-, radical d’un verbe qui signifiait « déchirer ». On constate immédiatement les parentés phonique et sémantique entre les deux formations. Le [h] initial vient de la transformation du [ž], le finnois ignorant les chuintantes ; le [p] vient du [b ], comme nous l'avons dit. Au nominatif, le second m représente une lénition particulière de ce [p] quand il suit [m] et qu'il se trouve dans une syllabe fermée (cf. parempi, "meilleur", mais paremmin au génitif).
Or žemb est cognat du vieux-slave zǫbъ, « dent » (russe mod. зуб), mot dans lequel la nasale représente la combinaison d’un [o] et de la consonne nasale [m]. On remonte par là sans peine à la racine indo-européenne *ĝe/om-bh à laquelle Pokorny donne le sens de « to bite, tooth » (N° 369), avec le vocalisme [o] habituel dans les formations nominales. Le sanskrit jámbhaṣ, « dent » dérive évidemment de la même racine, avec un vocalisme [a] normal en sanskrit.
En grec, « dent » se dit ὀδούς (rad. ὀδόντ-) ; ce nom, comme le latin dens (rad. dent-), dérive d’une autre racine, *H1e/od- qui signifie « manger » (cf. lat. edere, gr. ἐσθίω, r. есть). En revanche, γόμφος est très proche de *ĝe/om-bh ; le phonème [bh] étant normalement passé à [φ], variante sourde de la fricative bilabiale [β] (notée bh), que le grec n’a pas conservée. Mais le sens de γόμφος a de quoi surprendre, puisqu’il signifie « cheville » (d’assemblage) chez Homère, « gros clou » chez Eschyle et Platon, « articulation » par extension et, tardivement « stylet pour écrire » ; la relation est pourtant évidente, surtout si l’on considère l’adjectif γομφίος qui, associé à ὀδούς sous-entendu, signifie « (dent) molaire » à l’époque classique, chez Xénophon ou Platon, par exemple.
Et le français, dans tout cela ? Eh bien, il a « gond », issu du lat. gomphus, lui même calque du grec. Le d est purement graphique et indu (en AF, on a gon). |
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