Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
Maisse Arsouye
Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 2037 Lieu: Djiblou, Waloneye
|
écrit le Thursday 31 Jan 08, 18:51 |
|
|
Je ne suis pas vieux, à peine 31 ans. Et pourtant la vie a beaucoup changé dans les villages de Wallonie depuis mon enfance.
J'ai grandi à Saint-Martin-Balâtre, deux villages si proches l'un de l'autre qu'il faut être du coin pour savoir où passe la limite. Autant dire que c'est un seul village. J'ai eu la chance de grandir dans le même patelin que mon père et mon grand-père. Tout le monde connaissait tout le monde, ou à peu près. Il faut dire qu'avec un peu moins de 1000 habitants au total, ce n'était pas très compliqué. En remontant un peu, on pouvait trouver un lien de parenté entre presque tous les habitants du village. Mais je vous rassure, mon père a épousé une "étrangère", une fille du Hainaut, je ne souffre pas de consanguinité.
Quand j'étais gamin, il y avait deux cafés, une boucherie et une épicerie. Je me rappelle, j'accompagnais mon père au café certains dimanches matin. Les hommes jouaient à la belote pendant que les femmes étaient à la messe. Chaque habitué mettait à la "cagnotte", à savoir un meuble en bois pourvu de petits orifice pour mettre de l'argent. Il suffisait de mettre dans la "cagnotte" et de commander, la patronne tenait les comptes. Le café a fermé avant que je puisse profiter du système.
Je me rappelle des ménagères qui pelaient leurs patates, nettoyaient leurs légumes, tricotaient ou se livraient à une autre tâche assises dehors, devant la maison, sur un banc ou un tabouret. Une voisine venait à passer et elles "berdelaient", elles sortaient la phrase d'usage vos vloz ene jate ? Et les deux comères pouvaient échanger les potins en buvant une tasse de café.
De temps en temps, les hommes organisaient une lutte de balle-pelote. Et en été il y avait la fête du village : musique, bière, frites, fricandelles, beignets et attractions pour les enfants. A cette occasion, on organisait des "jeux inter-villages" avec les patelins des environs. Les bénéfices de la fête servaient à offrir un cadeau à chaque enfant du village pour Saint-Nicolas. C'est lors de ces fêtes villageoises que j'ai eu mes premières "cuites".
Je me souviens que je prenais mon vélo pour aller rendre visite à mes grands-parents, à l'autre bout du village. En chemin, je rencontrait d'office deux ou trois personnes et on se saluaient. J'allais chercher des œufs pour ma grand-mère chez "ptit Louis", ou du beurre à la ferme pour maman.
J'habitais un quartier légèrement à l'écart, au-dessus de la petite vallée, sur l'adret alors que le centre du village était sur l'ubac. Je connaissais tous les voisins. On s'invitait à prendre l'apéro, le dimanche. Et à la belle saison on organisait un grand barbecue, dans une prairie au milieu des maisons. C'était vraiment sympa, sans chichis. La barbecue se faisait pour dîner mais on soupait avec les restes ! Et on s'amusait longtemps, sous les étoiles.
Avec les copains, on allait jouer dans une vieille tour en ruine datant du XIIIe. Les étages s'étaient effondrés mais il restaient des portions d'escaliers, et des caves. On jouait à cache-cache, aux chevaliers, on escaladaient les ruines.
En hiver, je faisais de la luge sur les flancs de la vallée, mais pas en dessous du château : trop raide et trop proche de la rivière. La neige s'est raréfiée avec le temps. Et pourtant elle pouvait tomber en abondance.
Et aujourd'hui, tout a changé. Il ne reste plus de café, mais il y a un restaurant gastronomique. L'épicerie est toujours là mais pas la boucherie. On ne joue plus à la belote, ni à la balle-pelote, il n'y a plus de fête du village. Les ménagères restent chez elles, enfermées, elles ne "berdelent" plus. Il y a plein de nouveaux habitants des navetteurs, qui travaillent à Buxelles et qui vont s'installer toujours plus loin pour fuir la hausse de l'immobilier. Mon village est en passe de devenir un dortoir.
Heureusement que mes grands-parents et mon père ne sont plus là pour voir ça ! |
|
|
|
|
Rémi
Inscrit le: 25 Mar 2005 Messages: 744 Lieu: Paris + Laponie suédoise
|
écrit le Friday 01 Feb 08, 0:37 |
|
|
C'est marrant, j'ai l'impression, dans ta description de ton village il y a 20 ans, de lire celle du bled où j'habite maintenant !
Le plus amusant, c'est qu'ici aussi (comme partout), les choses ont énormément changé ces 20 dernières années. Beaucoup en bien (la vie était extrêmement rude ici dans le temps), mais pas uniquement. Le patoi local, le "Pit'måle'" n'est plus parlé que par les autochtones de plus de 50 ans. Les plus jeunes le comprennent bien sûr sans problème, mais les moins de 30-35 ans ne le parlent absolument pas. Par contre, la plupart parle un anglais (souvent US-english) presque parfait. Il y a 20-30 ans, le suédois était considéré comme une langue étrangère par les locaux. Ce sont les instituteurs, souvent envoyés depuis la capitale ou le Sud du pays, qui l'apprirent à leurs élèves.
Aujourd'hui, ce n'est pas dit que la caissière de l'épicerie parle, ni même comprend le pit'måle'... |
|
|
|
|
giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
|
écrit le Friday 01 Feb 08, 0:38 |
|
|
Moi je suis plus vieux que toi, j'ai 47 ans, mais je t'assûre que chez nous, en Piemont, n'était pas trop different, jusqu'au 1980.
Mon village est plus grand (7000 hab) et on jouait à la belotte, à boules dans les rues, à biliard...il y avait des chaises des comeres...et de fermes où on achetait le lait.
Le problème du changement est general, de l'Europe occidentale... |
|
|
|
|
Joe_Monfarleau
Inscrit le: 19 May 2007 Messages: 56 Lieu: Québec
|
écrit le Sunday 24 Feb 08, 6:44 |
|
|
Le phénomène en tant que tel frappe TOUS les pays occidentaux.. pas seulement l'Europe occidentale |
|
|
|
|
DanielR
Inscrit le: 02 Feb 2008 Messages: 89 Lieu: Bruehl / Allemagne
|
écrit le Sunday 24 Feb 08, 8:27 |
|
|
Moi, j'ai été élevé en Basse-Saxe en Allemagne, mais la description de Maisse Assouye de la vie wallonne dans les années 70/80 me redonnent quand-même les souvenirs de ma propre enfance (bon, à part la balle-pelote, bien sûr). Notre boucherie, c'était le magasin de M. Schmidt. M. Hackmann, c'était notre épicier (son magasin s'appelait "Eulenmarkt", donc le "marché du hibou", parce que notre ville de Peine s'appelle aussi "le nid du hibou" grâce á une vieille légende), et je me rappelle aussi le boulanger Schoppe. Tous ceux ont été remplaçés par des supermarchés oú même des hypermarchés.
Ah oui, la nostalgie ... |
|
|
|
|
Jean-Charles
Inscrit le: 15 Mar 2005 Messages: 3124 Lieu: Helvétie
|
écrit le Sunday 24 Feb 08, 9:53 |
|
|
Nostalgie ... Nostalgie ...
Si tu veux retrouver des cagnottes, viens en Valais: Ça existe toujours.
(Il faut préciser que le Valais compte une des densités de bistrots les plus élevées au monde ...)
Ceci explique peut-être cela. |
|
|
|
|
|