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Identification linguistique de la plante soma - Cours & Documents - Forum Babel
Identification linguistique de la plante soma

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Outis
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Messageécrit le Saturday 14 Jun 08, 11:14 Répondre en citant ce message   

Un des plus importants rituels de l'Inde védique est la préparation et la consommation d'une boisson faite à partir d'une plante, plante et boisson portant le même nom, soma, autant dire « jus » puisque ce mot est un nom neutre en -ma (désignant le résultat d'une action) formé sur le verbe su-, sunoti « presser, pressurer ».

Et le même nom est donné au dieu Soma qui a apporté la plante et qui est invoqué lors du pressurage. La mythologie de Soma est relativement pauvre mais son rôle cosmologique est essentiel puisqu'il forme avec Agni le couple de l'eau contenant le feu et du feu issu de l'eau, les deux s'articulant dans le cycle fondamental de la vie. Pour résumer, si le bois brûle c'est qu'il contient un feu qui lui a été apporté par l'eau qui l'a fait croître et celle-ci le contenait parce qu'elle était tombée du nuage crevé par la foudre. Toute l'énergie vitale apportée par la consommation des plantes (ou des animaux les ayant consommées) est donc de la double nature de l'eau et du feu. Le sacrifice du soma apporte aux dieux l'essence de cette énergie, particulièrement aux dieux guerriers en charge de vaincre les démons, Vāyu, premier à boire, et Indra, plus gros buveur.

Il semble que la préparation du soma ait été assez complexe, commençant par un pressurage au moyen de pierres, suivi d'un filtrage dans une toison et d'une adjonction finale d'eau et de lait.

L’identification de la plante soma, longtemps considéré comme d’un intérêt vulgaire, a fait l’objet de débats récents et bien documentés à partir du moment où il a été proposé de la reconnaître dans l’Ammanita muscaria, un champignon psychotrope consommé par des chamanes sibériens et un certain mouvement mystico-mycologique s’est développé autour de cette thèse.
Un contre-courant, appuyé par des trouvailles archéologiques, a proposé au contraire des plantes du genre Ephedra. Mais, bien sûr, rien n'assure que les traces organiques découvertes soient liées spécifiquement à ce rituel, les psychotropes consommés par l'humanité étant souvent de types variés.
Pour le détail de ces hypothèses, voir le dossier constitué par Vincent Blondel.

Soyons plus simples et examinons le texte même des hymnes védiques. Si l’on se dégage des descriptions métaphoriques du soma, en particulier de celles qui l’assimilent au soleil et qui, prises à la lettre ont conduit au chapeau de champignon, on ne trouve que fort peu de descriptions précises de la plante elle-même.
Deux seuls passages sont suffisamment explicites et d’une lecture claire pour se faire une idée ; il s’agit dans les deux cas d’hymnes à Soma.

Kakṣīvān (ṚV IX.74.2) a écrit:
divo yaḥ skambho dharuṇaḥ svātata āpūrṇo aṃśuḥ paryeti viśvataḥ
lui qui, du ciel, est le ferme pilier, bien étiré, baie pleine, il entoure de tous côtés

- skambhas, du verbe skabhnāti « étayer, supporter », est ici l'arbre qui soutient le ciel, l'axis mundi, équivalent du frêne Yggdrasill de la mythologie nordique ;
- svātatas (< *su-ā-tn-to-) est un participe fondé sur la racine *ten- « tendre, étirer » (cp. lat. tentus, gr. τατός « tendu ») ;
- aṃśus est une des désignations usuelles de la plante soma ; les lexiques donnent aussi les sens de « filament, rayon » mais il s'agit là d'une métaphore quand la plante est assimilée au soleil et il est plus raisonnable de rapprocher ce mot du grec ὄγκος (< *h₁on-k-) « poids, masse », d'une racine qui s'emploie pour tout ce qui est gonflement (ἐνεγκεῖν « porter (être enceinte) », fr. médical onco- « tumeur ») ; on le comprendra donc ici au sens de « baie, fruit », ce qui légitime le qualificatif ā-pūrṇas « très-plein » ;
- paryeti (< *peri-ei-ti) « aller autour », forme identique au grec περί-ειμι de même sens.

Vatsapri (ṚV IX.68.6) a écrit:
mandrasya rūpaṃ vividur manīṣiṇaḥ śyeno yad andho abharat parāvataḥ
taṃ marjayanta suvṛdhaṃ nadīṣv āṃ uśantam aṃśuṃ pariyantam ṛgmiyam

les sages savaient la forme de l'enivrant, cette plante que l'aigle apporta de loin,
ils purifièrent ce bien gonflé dans les rivières, charmant fruit, entourant, honoré

- mandras, nom d'agent sur le verbe mandati « réjouir, enivrer, griser » ;
- andhas, un autre nom courant de la plante soma, ce neutre sigmatique correspond exactement au grec ἄνθος « fleur » (voir aussi les Anthestéries, « la fin des fleurs », la grande fête de Dionysos en février-mars) ;
- su-vṛdha- est formé sur la racine vṛdh-, vardhati « croître, gonfler » ;
- uśanta-, participe présent de vaś-, vaṣṭi « vouloir, avoir envie » a pris le sens affaibli de « charmant, gracieux »
- pariyanta- est le participe présent du même pari-I- « aller autour ».

On peut être étonné de cet arbre droit, porteur de baies, qui s'étirerait et entourerait, mais d'autres étrangetés sont aussi présentes dans la description du frêne Yggdrasill dont on dit qu'il se dresse « toujours vert » au-dessus de la source d'Urð (stendr æ yfir grœnn Urðar brunni, Völuspá, 19) et que quatre cerfs courent dans les branches du frêne et y mordent le « grain » (en fjórir hirtir renna í limum asksins ok bíta barr, Gylfaginning XVI, § 23). On a pu tenter de résoudre le problème en supposant que l'arbre aurait été primitivement un if (donc toujours vert) et que barr ne signifie pas ici « grain » (angl. bar-ley, scot bear) mais « aiguille de conifère ». Malheureusement, toutes les sources sont unanimes, Yggdrasill est bel et bien un frêne (pour la discussion, voir les notes de F.-X. Dillmann dans son édition de L'Edda de Snorri Sturluson chez Gallimard).

En fait, c'est la comparaison entre ces étrangetés de l'Inde et de la Scandinavie qui peuvent donner l'idée d'une solution simple, à savoir qu'il s'agisse de la cohabitation d'un arbre support et d'une liane (à feuilles persistantes et porteuse se baies) qui s'enroulerait autour de lui comme la guirlande du sapin de Noël. D'autres passages permettent même d'avancer plus loin dans l'identification d'une telle liane qui devrait être commune à l'Inde et à l'Europe :

Vasu (ṚV IX.82.3) a écrit:
parjanyaḥ pitā mahiṣasya parṇino nābhā pṛthivyā giriṣu kṣayaṃ dadhe
Parjanya est le père du puissant feuillu, au nombril de la terre, dans les montagnes, il a établi sa demeure

- parjanya est le « nuage de pluie » ou le dieu fécondateur Parjanya qui y préside, souvent identifié à Indra, dieu de l'orage ; il y a identité de conception théologique entre la filiation divine (de même, Dionysos est fils de Zeus) et le fait que les plantes naissent et croissent de la pluie fécondante ;
- nābhā (loc.) pṛthivyās (gén.) « nombril de la terre » est certainement ici le mythique Mont Meru, l'axis mundi de la cosmologie indienne.

C'est chez Arrien que j'irai alors chercher la clef, dans une fable qu'il rapporte sans l'avoir vraiment comprise. Il s'agit de l'expédition d'Alexandre le Grand vers l'Inde où il aurait conquis une ville de Nysa qui se serait vantée d'avoir été fondée par Dionysos :

Arrien (Expéditions d'Alexandre, V.I passim) a écrit:
Ce Dieu appela notre ville Nysa, en mémoire de sa nourrice ; ce nom s'étend à toute la contrée : cette montagne, qui domine nos murs, porte celui de Méros, et rappelle l'origine de notre fondateur. […]. Le Dieu nous a laissé un témoignage de sa faveur : ce n'est que dans notre contrée que croît le lierre, inconnu dans tout le reste de l'Inde.
[…]
Alexandre, curieux de visiter les monuments en la gloire de Dionysos dont le pays des Nyséens est peuplé, monte sur le Méros, […] : le lierre et le laurier y croissaient en abondance : on y trouve des bois sombres et peuplés de fauves. Les Macédoniens reconnurent avec transport le lierre qu'ils n'avaient pas vu depuis longtemps. En effet, il n'en croît pas dans l'Inde, même aux lieux où l'on trouve la vigne ; ils en forment des guirlandes et des couronnes, et entonnent les hymnes de Bakkhos, qu'ils appellent par tous ses noms. […]. On rapporte qu'alors les premiers des Macédoniens couronnés de lierre dans cette orgie, et comme saisis des fureurs dionysiaques, coururent en bacchants ivres et frénétiques. Ce fait, je ne puis ni le certifier ni le rejeter.

En même temps qu'une grande invraisemblance des faits (Arrien écrit plus de 450 ans après ceux-ci !), le passage témoigne de corrélations inattendues :

- la correspondance faite entre le nom de Nysa (Νῦσα < *nūtieh₂) et la nourrice (latin nūtrix) qui évoque le thème *(s)neu- « couler goutte à goutte, allaiter, nourrir » présent dans le sanskrit snauti « goutter, sourdre » ;
- le nom de la montagne qui joue entre le Meru indien (le e du sanskrit, ancienne diphtongue, est toujours long) et le rappel de l'accouchement de Dionysos hors de la cuisse (grec μηρός [mērós]) de Zeus ;
- la connaissance de ce qu'en Inde le lierre est exclusivement montagneux : l'espèce locale, Hedera nepalensis, pousse entre 1000 et 3000 mètres ;
- la liaison bien faite entre une pratique rituelle du lierre et l'ivresse frénétique de l'orgie dionysiaque.

Il est vrai qu'Arrien parle de couronnes, non de consommation, mais il faut peut-être accepter que, soit par ignorance, soit par crainte religieuse, il taise certains aspects du rituel. En Grèce comme en Inde, son exécution avait probablement disparu depuis fort longtemps, remplacé par des usages moins dangereux (le lierre est aussi un poison, pas la vigne), et on ne peut guère s'attendre à en trouver que de faibles traces dans le mythe et/ou le vocabulaire où elles ne sont pas toujours aisées à délimiter. Par exemple :

- on a déjà proposé un rapprochement entre le théonyme Bakkhos (Βάκχος) (d'où le verbe βακχάω « être déchaîné comme un(e) bacchant(e) ») et le latin bāca « baie » ; au moins les difficultés sémantiques pourraient être levées ;
- le védique stambha « pilier, soutien », vu plus haut, et les grecs σταφυλή « grappe de raisin », στέφανος « couronne », στέμμα « bandelette, chapelet enroulé autour d'une branche », pourraient être des glissements divergents à partir d'un thème *ste(m)bʰ- dont le sens primitif resterait à délimiter ;
- le théonyme Dionysos (Διόνυσος) pourrait être compris *diwo-snu-t-io- « celui qui nourrit/allaite Zeus » en comparant son rôle à celui de l'indien Soma et en voyant ainsi en lui la plante-lierre qui donne sa vigueur et son énergie au dieu de l'orage dont il est le fils ;
- le frêne Yggdrasill est parcouru verticalement par un écureuil nommé Ratatosk (Íkorni sá, er heitir Ratatoskr, renn upp ok niðr eftir askinum, Gylfaginning XVI) qui assure les liaisons entre la cime et les racines. Son nom, qu'il soit compris « dent de rongeur » (Dillmann) ou « dent qui court » (rata (part.) < renna (inf.)) fait peut-être allusion aux rangées de petites dents qui accrochent le lierre à son arbre support.

Il y a dans tout cela beaucoup d'indices qui forment un réseau suffisamment serré pour être vraisemblable mais trop lâche pour être démontrable. Il y a une voie qui pourrait peut-être apporter un indice supplémentaire, ce serait une analyse chimique et toxicologique précise des baies de lierre.

Bien que les oiseaux s'en régalent, celles-ci sont un poison pour l'homme en raison de la présence de saponines. Mais il n'est pas impossible qu'elles contiennent également des alcaloïdes psychotropes et que les recettes, hélas perdues, de préparation de la liqueur aient réussi à éliminer, au moins en grande partie, les molécules pernicieuses. Retrouver les recettes nécessiterait de savoir précisément où sont les saponines (cuticule, pulpe, jus ?) et si elles peuvent être dégradées par des techniques culinaires. De savoir aussi si les autres substances éventuellement présentes peuvent avoir des effets (excitation, vigueur) cohérents avec les indices que donnent les textes aussi bien grecs qu'indiens.

Autant que j'aie pu savoir, des études en ce sens n'ont jamais été faites et il est à craindre qu'elles ne le soient jamais, compte tenu de la banalité qu'aurait alors une drogue excitante mais d'emploi très dangereux.
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JLM



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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 0:37 Répondre en citant ce message   

Il reste quelques traces de l'intoxication au "lierre".

§

You need not hang up the ivy branch over the wine that will sell. Publilius Syrus, 1st century B.C. (after the Roman custom of hanging an ivy branch over the door of an open pub).

http://franiccolo.home.mindspring.com/knaves/beer3.htm


"bon vin se passe de lierre" proverbe anglais.

§

L'ivy beer est rituelle à Oxford

"Despite this, Lincoln still managed to serve the traditional ivy beer. There are several little corners to this custom. The first is that the "ivy" is not wall ivy (which is poisonous), but ground ivy (a relative of mint, sage, and similar herbs). This is what we used to flavour beer with before hops arrived from Europe. Lincoln’s beer was once "brewed to a secret recipe known only to Alf the kitchenman" – dark-green, slightly sweet, and not at all bitter - perhaps dating from when, like most colleges, Lincoln had its own brewery. Now, though, it’s made by steeping a teabag full of herbs in a barrel of Morlands bitter, and tastes like Old Speckled Hen that’s been kept in the sun too long.

The second is that the beer is served only once a year, on Ascension Day. Everyone who beats the bounds gets it with lunch; in addition, all Brasenose members are invited to partake, entering via a little passage called the Needle’s Eye which connect the backs of the two colleges, and is opened only on this one morning. I once made an American tourist very happy by leading her twice through the Needle’s Eye and telling her she’d had a unique experience that she could tell all her friends about when she got home.

And why is the beer served anyway? The story goes that, many hundreds of years ago, a mob of townies was stoning a group of students outside Lincoln College. The porter let in all the Lincoln students, but refused sanctuary to a Brasenose man who was with them. The mob stoned him to death; and ever since, Lincoln has had to make penance by brewing the beer and offering it to Brasenose. Town-versus-gown violence, now found mainly on the 1 and 7A buses after midnight, was once more common: look up the 1355 St Scholastica’s Day Massacre, when a number of chaplains were scalped, several scholars were buried up to their necks in dung (a custom worth reviving for certain reviewers and members of funding agencies, I feel), and over sixty students were killed while most of the rest ran away."

http://www.j-paine.org/bb.html

§



L'affaire "Soma" est plus complexe qu'il n'y parait, vous trouverez un document PDF résumant l'état de la question sur mon site, www.much-room.net , à l'onglet documents à télécharger.

A propos du panmycisme de Wasson.pdf

Pouvons-nous discuter de votre traduction de "divo yaḥ skambho dharuṇaḥ svātata āpūrṇo aṃśuḥ paryeti viśvataḥ"; je ne connais pas un mot de sanscrit, mais je voudrais comparer avec la traduction donnée par Wasson.
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semensat



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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 10:08 Répondre en citant ce message   

Merci de traduire les passages en anglais !
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Outis
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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 11:29 Répondre en citant ce message   

Grand merci pour ces indications sur le lierre. Mais je n'arrive pas à ouvrir ton site www.much-room.net et ne peux donc connaître ton sentiment sur le sujet. Le mien est aussi « plus complexe qu'il n'y paraît » mais je ne pouvais tout mettre dans cette brève note.

Je ne sais pas non plus exactement ce que tu entends par « discuter » une traduction alors que tu n'es pas védisant. J'ai déjà donné plus haut des indications assez précises concernant mon interprétation du vocabulaire, voici à présent une analyse grammaticale faite sur le texte (sandhi défait) :

divas (gén.sg. de dyu- « ciel ») yas (nom.sg.) skambhas (nom.sg.) dharuṇas (nom.sg.) svātatas (nom. sg. du part. passé de su-ā-TAN-) āpūrṇas (nom.sg.) aṃśus (nom.sg.) paryeti (ind. prés. sg3 de pari-I-) viśvatas (adv. « de toute part »)

La syntaxe est assez simple.
Le génitif « du ciel » se rapporte clairement à « pilier », tout comme l'adjectif dharuṇa- « porteur » (que j'ai traduit « ferme » par jeu de mot étymologique, le latin fīrmus ayant probablement la même origine *dʰer- « poser »).
Il n'y a qu'un seul syntagme verbal, « entoure de toute part », dont le sujet est yas « celui qui » et, tous les autres mots étant au nominatif singulier, ils ne peuvent être que des appositions à ce sujet (j'ai ajouté pour le rythme une copule « est » mais elle n'est pas nécessaire).
Tout le problème réside dans le regroupement que l'on fait entre adjectifs et substantifs mais « bien rempli » ne peut se rapporter qu'à « soma, baie ».

Voici la traduction que choisit Karl Geldner, Der Rig-Veda (1923, rééd. Harvard University Press 2001) :

Der die tragende schöngerichtete Säule des Himmels ist, und als vollgesogener Stengel rings umkreist

Les principales différences avec la mienne :

- il rattache svātatas à skambhas (Säule) en lui donnant le sens « bien dirigé » (schöngerichtete) ; mais, si ā-TAN- peut avoir secondairement le sens « se diriger vers, to seek to reach », le sens premier est bien « étendre, to extend or stretch over » (sources : Stchoupak-Nitti-Renou et Monnier-Williams).

- il rend aṃśu- par Stengel « queue » (en parlant d'un fruit) ; c'est bien un sens donné par les lexiques mais le plus courant reste « plante soma ». Je pense que le sens « queue » est un de ces filages de métaphores comme les Indiens les affectionnent :
« plante soma » --> « issue de Agni ou Soma »
--> « émis par le Soleil ou par la Lune »
--> « rayon [lumineux] » (sens de aṃśu- également attesté)
--> « émanation d'une rondeur »
--> « queue [d'un fruit] »
Je crois qu'il est dangereux de prendre de telles métaphores au pied de la lettre. Il est vrai par exemple qu'en d'autres passages la plante soma est comparée au soleil mais, dans les hymnes védiques, à peu près tout ce qui est bon et positif est à un moment ou un autre comparé au soleil …

- il traduit étrangement ā-pūrṇa- par un voll-gesogen, part. passé de saugen « sucer, aspirer, têter » qui me laisse pantois. Je compte sur les germanistes pour trouver à l'ensemble un sens plus convenable que « comme une queue sucée à fond » …
Mais sur ā-pūrṇa- il n'y a aucun doute, c'est bien le part. passé de ā-PṚ- « remplir, to fill up, fulfil ».

J'ignore quelle est la traduction proposée par Wasson.

PS @ semensat : Nous sommes ici dans « Cours et documents », un sous-forum qui était primitivement destiné à préparer d'ultérieurs articles du projet. Je ne crois pas que le niveau de spécialisation requis pour une discussion préalable des points-clefs de ce sujet soit compatible avec une ignorance de l'anglais.
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JLM



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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 11:33 Répondre en citant ce message   

La première citation va ainsi :

« Il ne faut pas mettre une branche de lierre au-dessus du vin à vendre »


Je résumerai l’argument de la seconde citation.

« Une tradition du Lincoln College à Oxford est de servir la « bière de lierre » le jour de l’Ascension. Il s’agit du lierre terrestre, peu dangereux et aromatisant. Anciennement les collèges oxfordiens disposaient de leur propre brasserie, chaque recette était entourée de secret. Aujourd’hui la bière de lierre se prépare par simple infusion dans une bière courante

Cette bière n’est préparée qu’une fois par an et s’accompagne d’un rituel « passer dans le chat de l’aiguille » -une porte entre deux collèges-.

Le troisième paragraphe justifie le rituel comme ayant été établi en mémoire d’un étudiant décédé lors d’un combat entre deux collèges. Les affrontements entre collèges étant par le passé violents et coutumiers. »



§

En ce qui concerne le folklore oxfordien, le sens résulte d’une sorte de syncrétisme entre le combat du houx et du lierre que l’on trouve dans les textes médiévaux, et le rituel agraire lié à la dernière gerbe de la moisson, laquelle était liée par une branche de lierre, et pour cette raison appelée « la fille du lierre ». (Robert Graves – White Goddess, traduct française, 1979, page 211) interprétait cette gerbe comme un combat des sexes, mais Graves interprétait beaucoup…)

§


En résumé : jusqu’à une date récente, le lierre est lié à un « rite de passage » - la porte – et à une boisson rituelle au « parfum de secret ». La tradition du lierre dionysiaque est accolée au thème celtique du « combat des arbres ».

§

Votre thèse est intéressante par le fait qu’elle attire l’attention sur le texte d’Arrien ; nous sommes d’accord, elle n’est pas plus démontrée que toutes les autres thèses, mais votre volonté de réexaminer le contexte sémantique est intéressante et devrait être poursuivie. Je voudrais pour ma part réexaminer notamment le sens de « skambhas ».
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JLM



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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 12:09 Répondre en citant ce message   

Merci.

Mon site semble s’ouvrir normalement, voici l’URL en entier.

http://www.much-room.net


Je pense qu’il faut examiner chaque problème sous deux angles, le risque d’accepter une hypothèse alors qu’elle est fausse et le risque de la rejeter alors qu’elle est vraie. Votre hypothèse comme celle de Wasson et comme l’ensemble des autres identifications de la « plante soma » mérite ce traitement.

C’est pourquoi je pensais utile d’apporter les éléments dont je dispose pour conforter votre approche. Par ailleurs, mon domaine de recherche est très éclectique et donc, je n’ai d’autre choix que de m’aventurer en bonne compagnie dans des domaines qui me sont étrangers.


Plusieurs hymnes utilisent « skambha ». La philologie de « skambas » conduit à « scamellum » et à l’anglais scammel (petite échelle) ou au nom vernaculaire du tabouret à traire « skabel à traith » en Jerriais). L’idée d’ascencion éventuellement liée à l’arbre chamanique est présente. Symétriquement, elle ramène à des expression « champignonesques ». Les travaux de l’école formaliste soviétique ont largement montré le rôle des champignons comme descripteurs universels, ainsi, à titre d’exemple, il conviendrait de mieux comprendre comment le sanscrit skambha, au sens de pilier, mais aussi articulé par l’opposition concavité convexité de « champignon » ou de « pot » en indo-arien. ks.umpa toadstool, mushroom (RV.Nir.); khum.pa_ cover made of grass to keep off rain (umbrellashaped?)
/Prakrit; khumbhi_ mushroom /Sindhi_; khumbh, khumbi_, khumbhi_ /Lahnda_; khumb, khu~b,
khu~bh /Punja_bi_; khu~pr.o large screen for keeping rain off /Gujara_ti_ [sk].


La reformulation de cette problématique n’aurait pas pour but de prouver que la cérémonie du "Kumbhabishekam" serait originellement « à base de champignons », mais de tracer les affects inconsciemment attachés aux mots depuis le (ou les) protolangages et dont les résurgences incontrolées font sporadiquement les beaux jours des efflorescences panmycistes, çà et là, au cours de l’histoire.
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giòrss



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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 12:47 Répondre en citant ce message   

Italien "sgabello" en www.etimo.it

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Outis
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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 12:48 Répondre en citant ce message   

Restons sérieux. Vous écrivez vous-même dans votre site :

Citation:
… la réfutation des récits imaginés par Allegro Wasson devrait venir après le simple examen des sources et cette critique des sources n'a toujours pas eu lieu !

Je fais justement cet examen des sources, pourquoi ne le discutez-vous pas ? Suis-je obligé de lire toute l'œuvre de ce Wasson pour y trouver moi-même la traduction qu'il donne du védique ? Pourquoi ne la donnez-vous pas ? J'ai de gros doutes sur sa pertinence, d'autant plus que nombre de traductions existent qui sont fort loin de la philologie ! En voici deux exemples :

par A. Langlois, seule traduction française complète mais qui, en 1872, avait encore quelques flottements dans la compréhension du védique :
Étendu et ferme, Soma soutient le ciel ; et le voilà qui remplit [nos coupes], et circule dans notre sacrifice.

par Svami Satya Prakash Sarasvati et Satyakam Vidyalankar dans une édition indienne (1983) dont le but est de donner un texte fondateur de la religion actuelle :
This elixir of divine love is the supporter of heaven, and the prop of the earth ; it spreads widely and fills the vessels and flows in all directions.

J'ai donné plus haut le mot à mot complet et l'analyse grammaticale, chacun peut s'amuser à retrouver le texte original dans ces deux traductions …
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JLM



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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 13:55 Répondre en citant ce message   

Je suis à la fois heureux et surpris par la réactivité « babélienne ».

Je cherchais simplement à situer ma demande. Il n’entrait pas dans mes intentions de vous laisser "tirer votre plan" pour retrouver la traduction utilisée par Wasson, je voulais présenter les trois des hymnes utisants « scambha » avec bien entendu leur traduction ; les quelques minutes d’intervalle entre nos échanges ne le permettaient pas.

Si vous arriver à télécharger le document PDF par lequel je rappelle que montrant que les apports complémentaires àl a thèse initiale n’ont pas été pris en compte, vous verrez, je crois, que si la thèse de Wasson n’est pas assurée, les « avancées » des autres thèses ne sont pas suffisantes que pour l’invalider : la question reste ouverte, les points non encore examinés devraient l’être.

cf. A propos du panmycisme de Wasson.pdf (à la rubrique "documents à télécharger" de mon site)
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Outis
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Messageécrit le Tuesday 26 Aug 08, 17:33 Répondre en citant ce message   

J'attends mais, pour l'instant, il faut bien avouer que je reste sceptique sur la méthodologie, regrettant en particulier l'usage des citations tronquées. Vous avez écrit dans le document auquel vous vous référez :

JLM a écrit:
Prenons l’hymne IX 86 44c
IX 86 44c “(Soma) like a serpent, he creeps out of his old skin”
« (Soma) comme un serpent, il se glisse hors de sa vieille peau »

La métaphore décrit la sortie du champignon hors de sa volve. Pour cette image, le métaphorisé est le
champignon tandis que le serpent sert de métaphorisant. Le transfert de signification associe les
connotations maléfiques du serpent au champignon.


Très bien, mais voyons en entier la strophe 44 de cet hymne :

Citation:
vipaścite pavamānāya gāyata mahi na dhārāty andho arṣati |
ahir na jurṇam ati sarpati tvacam atyo na krīḷann asarad vṛṣā hariḥ || 44 ||
Pour le sage qui a été purifié, chantons !
Comme un puissant flot le jus du soma s'écoule,
Comme un serpent il rampe au delà de la vieille peau,
Comme un coursier joueur il a couru, mâle alezan.

Il semblerait bien que l'aspect maléfique du serpent se soit évanoui …

N'est-il pas plus simple de voir dans ces images un fruit que l'on presse et dont le jus s'écoule en abondance à travers les débris de sa peau ? La couleur de ce jus est aussi donnée avec hari-, une robe de cheval, sorte de jaune-brun clair, bai ou alezan (Geldner traduit par le rare Falbe « cheval isabelle ») …

Et presse-t-on vraiment les champignons ? Il ne faudrait quand même pas oublier que le mot soma lui-même est un neutre en -ma (résultat de l'action) formé sur le verbe SU- « presser » ; au sens étymologique strict, soma signifie « jus » !

Notons que je n'ai strictement rien contre les théories mettant en évidence l'importance symbolique (entre autres) des champignons dans un grand nombre de civilisations. C'est sûrement une étude riche et passionnante. Mais pourquoi vouloir à tout prix que tout soit champignon ?

Surtout, pourquoi le vouloir au prix de manipulations des textes ? Ce n'est guère une bonne façon d'être pris au sérieux …
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JLM



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Messageécrit le Thursday 28 Aug 08, 11:09 Répondre en citant ce message   

Nous partageons le même avis et je crois être mesure de vous le montrer. Ensuite, dans un second « post », je me permettrai d’enchaîner sur une question devant laquelle mes compétences tant en sanscrit qu’en linguistique me laissent sans armes, mais pour laquelle, des communautés comme « le projet Babel » peuvent faire avancer la réflexion.


Vous écrivez

« J'attends mais, pour l'instant, il faut bien avouer que je reste sceptique sur la méthodologie, regrettant en particulier l'usage des citations tronquées. Vous avez écrit dans le document auquel vous vous référez : »

Je citais, en effet, trois traductions utilisées par Wasson pour les hymnes :

IX 86 44c “(Soma) like a serpent, he creeps out of his old skin” ( Soma, p.41) ..

IX 97 9c “Soma with sharpened horns, attains his full reach “ (Soma, p.42)

IX 70 7ab “Soma terrifying bull” (Soma P. 42)

J’avais rassemblé ces trois traductions, non pas pour les défendre, mais bien pour mettre en évidence la faiblesse méthodologique du panmycisme en général et dans la foulée, de montrer la légèreté relative de la démarche de Wasson comme des ses successeurs.

Revenez à mon texte. Juste avant d’enchaîner les trois traductions j’écris ceci :

« Pour montrer le principe de ces dérives, à défaut de reproduire ici les illustrations de Wasson, je choisis
quelques hymnes qui ne les demandent pas. En nous appuyant sur un raccourci un peu forcé, voyons
d'abord comment le panmycisme en arrive aujourd’hui à dire n'importe quoi. Parmi l’échantillon
d’hymnes analysé par Wasson, nous n’en retiendrons que trois : le but est d'avertir des risques liés aux
démonstrations par métaphore. Par ailleurs, une analyse sérieuse ne pourrait être effectuée que sur une
base critique des textes sanscrits et avec la précision et la profondeur philologique adaptées à l'enjeu. »

De plus, exactement à la fin de la séquence dont vous soulignez la légèreté, j’insite sur le péril et place un renvoi en note de bas de page qui va ainsi « cette assertion est superficielle, l’analyse devrait être effectuée directement en sanscrit. »

Par la suite, à titre d’exemple des débordements du panmycime, j’ajoute :

« À propos du veau d'or des Hébreux, Clark Heinrich n'hésite pas à en revenir à l'Amanite védique et au taureau ! « The worship of God as a bull was happening at the time in several places, including Canaan, Syria, and of course India, where the « bull» was the red mushroom that turns to gold when it dries.»
(Cf. C.Heinrich, Magic mushrooms in religionand alchemy, p. 85.)

Je concluais alors de la façon suivante :

« Ce rappel, narquois, des propriétés « autocatalytiques » de la métaphore peut néanmoins nous éclairer sur les mécanismes du panmycisme, et par là nous éviter de délirer à propos d’autres problèmes
ethnomycologiques. »

Nous sommes donc à propos de méthode sur la nécessité de « serrer les boulons », et donc je crois, sur la même longueur d’onde. Dans votre seconde intervention, vous écrivez à mon propos

« Mais pourquoi vouloir à tout prix que tout soit champignon ?

Surtout, pourquoi le vouloir au prix de manipulations des textes ? Ce n'est guère une bonne façon d'être pris au sérieux … »


J’écris en effet « à propos de champignon », cette focalisation peut fausser la perspective, mais j’écris justement pour tenter de retrouver une approche équilibrée, afin d’éviter d’en voir partout ou ils ne sont pas (comme en atteste chaque jour davantage l’accumulation des dévergondages panmycistes etnéoshamniques), mais aussi de garder, sans préjugé, un œil ouvert sur leur rôle éventuel dans la culture. Je partage donc également vos préventions « contre la sauce tout champignon».

Si je me suis permis de rééquilibrer les balances dès le départ, c’est que j’attends beaucoup de vos suggestion et remarques, et que le temps passé à "accorder les violons" ne sera pas perdu.
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JLM



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Messageécrit le Thursday 28 Aug 08, 11:14 Répondre en citant ce message   

Le terme « skambho » est utilisé à maintes reprises dans le RG.VEDA, occupait-il, à l’époque de la fixation (orale) des hymnes une place significative dans un réseau sémantique relatif aux champignons ?

Cette question aborde un point de détail, mais elle est difficile et sa solution rationnelle requerrait de multiples compétences. Je ne peux donc trancher cette question, mais il est permis d’espérer que les nouvelles formes d’organisation de savoir collectif mise en place à l’exemple de ce réseau de Babélien rendront un jour possible sa solution possible. Mon objectif est donc seulement de convaincre de la pertinence de la question posée.

Remarque,: la question de savoir si le langage poétique du RG Veda utilisait des métaphores perçues par les l"ocuteurs d'origine" comme comportant des images mentales attachées aux champignons est toute différente de l’identification de la plante « soma ».

§

Je me dois, je crois d’expliciter d’avantage.

Nous connaissons tous la forme « siège de crapaud » « toadstool » « paddestoel », etc. Dans la nature, le crapaud ne s’assoit pas sur les chapeaux de champignon (sauf si un photographe de Life les y dépose à dessein), l’origine de l’expression est donc culturelle. L’explication de cette forme est aujourd’hui assez claire. L’image d’un tabouret vient aisément à propos d’un champignon et l’assemblage du « chapeau » et du « champignon » vient du savoir vernaculaire associant la toxicité particulière de certains champignons à la toxicité de la peau de certains crapauds en raison de la présence de substance chimiquement comparable et dont les effets psychosdysleptiques sont identiques. Tout ceci ne cause aucun problème.

La question de l’éventuelle présence de métaphores « champignonesque » sous-jacente au terme « skambho » m’est arrivée à l’esprit lorsque j’ai pris connaissance du fait qu’en Jèrriais, un tabouret à traire se dit « la scabelle à traithe » (à partir de « escabelle ») et, qu’en en breton, champignon se dit skabell tousec/ tabouret de grenouille, aussi bien que kabel tousec/chapeau de grenouille. Les deux étymologies convergent sur l’image finale : skabbel /escabelle/scamellum et « kabell », du bas latin cappa (chapeau). Accessoirement dans la lignée de « skabell », ma grand-mère originaire du Nord de la France appelait un tabouret à traire un « sham », expression qui se retrouve dans le « hâme » du wallon liégeois pour désigner le même ustensile. Je me suis alors tourné vers l’origine sanscrite du latin scamellum, pour laquelle le Webster propose le sanscrit « skambha » au sens de pilier, lequel s’offre comme axis mundi et comme support de au chaman aussi bien comme vous le rappeliez plaisamment à l’écureuil Ratatosk.

§

Arrivé à ce point je me suis interrogé sur l’origine du sens de « pilier » dans « skambas ». En consultant de multiples dictionnaire sur internet, j’ai repéré une liste de convergence entre les notions de « chaise » et de « champignon » dans divers langages.

Ainsi, à l’url suivante :

http://member.melbpc.org.au/~tmajlath/magyar9.html

Monsieur Fred Hamory propose les référence suivantes pour « champignon », que croyez-vous qu’il faille en penser ?


Indo-Aryan
ks.umpa toadstool, mushroom (RV.Nir.); khum.pa_ cover made of grass to keep off rain (umbrella-shaped?) /Prakrit; khumbhi_ mushroom /Sindhi_; khumbh, khumbi_, khumbhi_ /Lahnda_; khumb, khu~b, khu~bh /Punja_bi_; khu~pr.o large screen for keeping rain off /Gujara_ti_ [sk]


Par ailleurs, monsieur Amory a réuni un matériel très riche qui pourrait permettrait de tracer encore davantage l’aire de diffusion d’une proto forme.

Sur le fond, il n’y aurait à cela rien d’extraordinaire que le proto-sino-tibétain, *gŭm, signifie pillow, bed. Et participe du mot désignant champignon en protokiranti.

Par contre, la question de la reconstruction de proto langage est complexe, parfois contestée, parfois poussée à l’extrême. Que pouvons-nous raisonnablement penser d’une éventuelle composante


Birman khum block bench, stool, table, raised brick or stone foundation of a building or pillar, base

Kachin : lǝkhum4 a chair, a stool (H) duŋkhum a pillow.

Lushai : khum a bed, KC *m-khum.

Lepcha : kám, a-kám a block of wood or stone used as a seat ; thjak-kam, tăkám a pillow
Kiranti: »

ou bien encore en Proto-Kiranti : *blèŋkum désigne une espèce de champignon

Tulung : blɛŋkuma white mushroom

Kaling : bleŋgam an inedible fungus


Vous comprendrez mon extrême perplexité devant tant de technicité sous-jacente, la difficulté de l’évaluation de ce qui est proposé, mais aussi l’intérêt du dialogue et du partage du savoir comme des questions…
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Messageécrit le Friday 29 Aug 08, 2:12 Répondre en citant ce message   

Commençant par la fin de ton dernier message pour régler (à mon sens) ce type de démonstrations, je ne crois pas que l'accumulation de mots dans des langues qui ne sont connues que d'un nombre de savants extrêmement réduit puisse apporter quoi que ce soit de fiable et sérieux.

Pour tout dire, je partage largement tes doutes sur la pertinence que peuvent avoir tous ces proto-langages. C'est un domaine qui intéresse, je crois, quelques Babéliens. Pas moi.

Revenons au principal. Tu demandes :

Citation:
Le terme « skambho » est utilisé à maintes reprises dans le RG.VEDA, occupait-il, à l’époque de la fixation (orale) des hymnes une place significative dans un réseau sémantique relatif aux champignons ?

C'est bien joli mais sur la vingtaine de mots qu'on peut trouver en sanskrit qui désignent un champignon (pour la plupart des mots de lexique) aucun n'est attesté dans les textes védiques !

Ces textes sont, pour l'essentiel des textes religieux, on n'y parle pas plus de champignons que dans la Bible ou le Coran. Alors, évoquer un réseau sémantique relatif aux champignons …

Quid du mot skambha- (c'est le radical), nom. sg. skambhas qui prend in pausa la forme skambhaḥ et, seulement si le mot suivant commence par une sonore, la forme skambho ?
(la tradition érudite utilise selon époques et auteurs une des trois premières formes, jamais la quatrième)

Le mot n'est pas fréquent, uniquement védique, il a disparu du sanskrit classique et n'a d'ailleurs que quelques occurrences dans le RV (seize en comptant aussi son synonyme skambhana-).
J'ai bien sûr autre chose à faire que d'aller examiner chacune mais, sur un si petit corpus, on peut estimer que les dictionnaires ont une bonne fiabilité :
Monier-Williams : prop, support, pillar, buttress, fulcrum, the Fulcrum of the Universe
Mayrhofer : Stütze, Strebepfeiler
en français : support, pilier, contrefort, arc-boutant

On le rattache au verbe SKABH-, prés. skabhnāti ou skabāyati, « stützt, befestigt / supports, fixes »

Un rapprochement avec le latin scamnum « escabeau » est possible mais, dans tout cela, il n'y a aucun champignon, ni pour la forme, ni pour la fonction …

Je vais arrêter là avec Wasson, cela me paraît sans intérêt.
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