Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
Xavier Animateur
Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 4087 Lieu: Μασσαλία, Prouvènço
|
écrit le Saturday 21 Mar 20, 18:41 |
|
|
Une noria est une machine hydraulique utilisée pour l'irrigation
Voir Wikipédia
Voir la vidéo d'une noria découverte à Marseille et exposée dans le nouveau parc de la Jarre
Selon le TLF, de l'ancien espagnol anora, nora, de l'arabe nāūra, dérivé de naara «gronder»)
probablement par contamination de acequia « petit canal d'irrigation » (lui aussi d'origine arabe).
Je trouve étrange cette influence de ce terme.
En espagnol : noria
Wikipédia (anglais) : de l'arabe ناعورة, nā‘ūra, du syriaque : ܢܥܘܪܐ, nā‘orā.
Ce serait donc l'idée de "grogner" (le bruit de cette machine) qui est à l'origine du terme.
Cependant, en provençal, je ne vois pas de terme apparenté à ce mot d'origine arabe.
Il existe un terme : posaraca
voir étymologie-occitane
Chez Mistral :
Pouso-raco, pouseraco : roue hydraulique, noria, puits à roue, machine dont on se sert dans le Midi pour les irrigations.
rena coume uno pouso-raco : crier comme une poulie mal graissée.
Il détaille et précise quelques termes techniques :
rodo ou luno : grande roue qui porte les godets
traio : chaîne qui les enlace, chapelet |
|
|
|
|
Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11173 Lieu: Meaux (F)
|
écrit le Saturday 21 Mar 20, 19:38 |
|
|
Citation: | de l'arabe nāūra, dérivé de naara «gronder») |
C'est loin d'être le seul sens de ce verbe, et ce n'est pas celui qu'il faut donner pour comprendre celui de nā'ūra.
En effet, le sens premier du verbe est lié à la respiration des narines et aux jets par bouffées qui parfois en résultent, comme c'est le cas bien connu des baleines. Le bruit provoqué est secondaire, une conséquence du jaillissement saccadé. La noria, on le voit, est porteuse d'abord et avant tout, du sens premier : c'est elle qui provoque le jaillissement de l'eau. Même si elle fonctionnait en silence, elle n'en serait pas moins noria. Tout le reste est littérature.
Le mot racine, c'est نعرة nu'ara "narines". Il a aussi le sens figuré de "bouffées d'orgueil".
NB : la phrase du TLF probablement par contamination de acequia « petit canal d'irrigation » (lui aussi d'origine arabe) est pour moi incompréhensible. Je ne vois pas où est la contamination.
Quant à "l'origine syriaque" proposée par Wikipedia, elle est tout aussi absurde. Les deux mots ont la même origine, sont des cognats issus d'une même racine sémitique et formés sur un même schème, c'est tout. |
|
|
|
|
embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3862 Lieu: Paris
|
écrit le Sunday 22 Mar 20, 9:53 |
|
|
Papou JC a écrit: | Citation: | de l'arabe nāūra, dérivé de naara «gronder») |
En effet, le sens premier du verbe est lié à la respiration des narines et aux jets par bouffées qui parfois en résultent, comme c'est le cas bien connu des baleines. |
Simple question que je me pose : les Arabes connaissaient-ils les évents de baleines ? Connaissaient-ils même vraiment les baleines que nous connaissons ou parlaient-ils seulement de très gros poissons plus ou moins mythiques.
J'ai vu des éléments de réflexion intéressants dans le fil sur la baleine
http://projetbabel.org/forum/viewtopic.php?t=22376&start=15
mais rien de concluant sur la connaissance par les Arabes des baleines à évent. |
|
|
|
|
Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11173 Lieu: Meaux (F)
|
écrit le Sunday 22 Mar 20, 11:17 |
|
|
J'ai pris la baleine comme exemple. J'aurais pu prendre celui du cheval. Je ne connais pas assez bien les animaux mais il y en a certainement beaucoup qui respirent, aspirent et expirent bruyamment par leurs narines ou naseaux en rejetant des sécrétions liquides sous forme de jets ou de postillons. C'est cette opération un peu bruyante que décrit le verbe نعر na'ara, quelle qu'en soit l'origine. |
|
|
|
|
Xavier Animateur
Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 4087 Lieu: Μασσαλία, Prouvènço
|
écrit le Sunday 22 Mar 20, 12:16 |
|
|
En hébreu biblique, deux codes Strong correspondent à cette racine.
Ils seraient apparentés.
נָעַר avec le sens de to growl (grogner), qu'on trouve dans le cri du lion.
Attesté seulement dans Jérémie, 51, 38
נָעַר : the idea of the rustling of mane, which usually accompanies the lion's roar, to tumble about:—shake (off, out, self), overthrow, toss up and down.
Cela évoque l'idée de bruissement de la crinière (qui accompagne le rugissement du lion), d'où l'idée de secouer.
cf https://www.blueletterbible.org/lang/lexicon/lexicon.cfm?strongs=H5287&t=KJV
En français, on a dans la Bible, en traduction : frémir ; on m'a secoué comme la sauterelle (Psaume 109) ; Yahvé culbuta les Égyptiens au milieu de la mer (Exode 14, 27)
C'est quand même deux sens différents, même s'ils ont (peut-être ? certainement ?) la même origine.
Autre terme intéressant :
נַעַר : garçon, et aussi dans le sens de boy, serviteur
Ce terme serait rattaché à la même racine : voir https://www.blueletterbible.org/lang/lexicon/lexicon.cfm?t=kjv&strongs=h5288
L'enfant parce qu'il s'agite ? étrange...
Gesenius (dictionnaire du XIXe) le compare au sanscrit nara (homme) au persan نار , au grec ἀνήρ.
Ces trois derniers termes sont certainement apparentés. Mais avec l'hébreu : a priori, j'en doute.
Ce serait d'ailleurs intéressant de savoir combien de termes sont apparentés aux langues indo-européennes chez Gesenius.
Dernière édition par Xavier le Thursday 16 Mar 23, 10:39; édité 1 fois |
|
|
|
|
Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11173 Lieu: Meaux (F)
|
écrit le Sunday 22 Mar 20, 12:21 |
|
|
L'homonymie existe aussi dans les langues sémitiques, on l'oublie trop souvent.
Quant aux rapprochements faits ici par Gesenius, oui, tu doutes à juste titre !
En revanche, pas d'homonymie dans notre verbe arabe, quoi qu'en dise Rajki :
na‘ara : shout, cry [Sem n-‘-r, Akk na‘aru (roar), Heb na‘ar (growl), JNA n‘r (bray), Ara ne‘ar (roar), Hrs en‘eror (snore = ronfler)]
na‘ara : jar, shake, rattle [Sem n-‘-r, Heb na‘r (shake), JNA na’ora (water-wheel)]
C'est bien la même racine. On a un cas similaire en français où, à partir de gueule, on forme gueuler et dégueuler.
Le côté amusant de la présentation à la fois méli-mélo et sommaire de Rajki, c'est la présence de la noria dans le sémantisme du bruit, comme si c'était sa fonction première ! Et après on s'étonne que le TLF fasse la même chose...
Le sens de secouer, secousse (shake) s'explique par les saccades du jaillissement.
Quant à celui d'enfant, c'est peut-être parce que c'est un morveux qui crie ou grogne beaucoup... |
|
|
|
|
Xavier Animateur
Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 4087 Lieu: Μασσαλία, Prouvènço
|
écrit le Thursday 02 Mar 23, 17:31 |
|
|
Sur ce sujet, voir aussi :
Patrimoine du Sud : les norias de Castelnau-le-Lez
Les auteurs citent ces noms occitans :
potz rodièr : puits qui tourne, puits à roue
senha d'où : seigne
posaraca d'où : pousaraque (système qui puise et crache l'eau), pousarenque
balandran
cigonha
"De l'espagnol noria, de l’arabe na’ura lui-même dérivé de na’ara, qui signifie lancer, faire jaillir." |
|
|
|
|
Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11173 Lieu: Meaux (F)
|
écrit le Monday 06 Mar 23, 20:54 |
|
|
Citation: | Gesenius (dictionnaire du XIXe) le compare au sanscrit nara (homme) au persan نار , au grec ἀνήρ.
Ces trois derniers termes sont certainement apparentés. Mais avec l'hébreu : a priori, j'en doute. |
Et tu as bien raison. En hébreu et en arabe, le r n'est pas radical, comme le plus souvent la troisième consonne. Et du point de vue sémantique, le sens "enfant" est clairement un sens dérivé.
NB : nār désigne la grenade en persan. Je ne vois pas le rapport avec le sanskrit nara ou le grec ἀνήρ...
Tu peux donner la page du dico de Gesenius où tu as trouvé ça ? Merci d'avance. |
|
|
|
|
|