Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant |
Auteur |
Message |
le córór de noetaéy
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 38 Lieu: Breizh - Bertaèyn
|
écrit le Sunday 06 Jan 08, 0:30 |
|
|
Voici une locution adverbiale gallèse d'origine onomatopéique qui existe peut-être dans d'autres langues d'oïl.
Berdi-berdau (prononciation brdibrdao avec deux r syllabiques roulés) a de multiples significations :
- cahin-caha
- clopin-clopant
- couci-couça
- ding ding
- patatras
- tranquillement
- de travers
Exemples :
- il se nalaet berdi-berdau (il s'en allait tranquillement).
- Il avauncit, il esrucit, e berdi-berdau, il cheyit dan la placz (il avança, il glissa et patatras, il tomba par terre). |
|
|
|
|
Xavier Animateur
Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 4087 Lieu: Μασσαλία, Prouvènço
|
écrit le Monday 07 Jan 08, 22:08 |
|
|
À Marseille, on dit (ou certains disent) : tranquilou, tranquilette
Mais j'ai beaucoup de mal à prononcer "brdibrdao"
Même si ce sont de r roulés, on ne peut pas ajouter une petite voyelle ?
C'est intéressant, car cela permet de comprendre pourquoi on dit Bertaèyn et non Bretagne
Est-ce aussi un r roulé ? |
|
|
|
|
Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
|
écrit le Monday 07 Jan 08, 22:53 |
|
|
@ Xavier : Ce n'est pas si difficile, il suffit d'un tout petit poil d'entraînement :
1) s'habituer aux r roulés en chantant quelques chansons de Piaf avec le cœur, les tripes et l'époque …
2) quand c'est bien chaud, faire « brrrrr, j'ai pas chaud » avec plein de battements
3) réduire petit à petit le nombre de battements jusqu'à deux, puis, à peine plus difficile, un
4) on s'aperçoit alors qu'il n'y a plus aucune difficulté à dire « di » ou « do » immédiatement après « br » …
Ce berdi-berdau me semblerait bien correspondre au έτσι κι έτσι [etsikétsi] « ainsi et ainsi » du grec moderne s'il n'y avait pas le sens « patatras » qui s'écarte un peu des autres …
Ne pourrait-on comprendre : « il avança, il glissa et, ainsi vont les choses, il tomba par terre » ?
A-t-on une idée de l'origine de l'expression ? |
|
|
|
|
José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10945 Lieu: Lyon
|
écrit le Monday 07 Jan 08, 23:17 |
|
|
Ton post, le coror, me ramène à mon enfance et à des mots qu'avait ma grand-mère paternelle, originaire de Bretagne via la Sarthe, donc en terre "gallo" si je ne m'abuse. Je réalise en lisant ce fil que ma grand-mère était la seule dans mon entourage bourguignon à user du terme "bardau" (prononcé "bardao") quand un enfant tombait par terre en marchant.
Dernière édition par José le Monday 05 Sep 11, 10:35; édité 1 fois |
|
|
|
|
le córór de noetaéy
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 38 Lieu: Breizh - Bertaèyn
|
écrit le Tuesday 08 Jan 08, 0:21 |
|
|
Outis a écrit: | A-t-on une idée de l'origine de l'expression ? |
Il semble que la première partie du mot dérive du nom gallo berdein désignant un homme lent, un lambin dont le sens se retrouve dans "cahin-caha" ou "tranquillement". La deuxième partie est la répétition du même mot en changeant la voyelle finale.
Il y a aussi d'autres mots très proches :
- BERDAUDAU (prononciation "brdaodao") ou BERDADAU : une interjection signifiant "badaboum", "patatras".
En Loire-Atlantique, une BERDI-BERDA est une femme maniérée, une faiseuse d'embarras.
Cette faculté de former des mots en répétant le même mot en le déformant existe dans d'autres langues et notamment en basque.
On forme en effet en basque des mots qui ont un sens péjoratif en répétant le même mot mais en remplaçant la consonne initiale par un M.
handi (grand) > handi-mandiak : les grands de ce monde (avec nuance péjorative).
itzuli (tourner) > itzuli-mitzuli : arriver à quelque chose par des tours et des détours (par finasserie ou fourberie).
nahas (mélange) > nahas-mahas (sens dessus dessous, pêle-mêle).
On a également en basque des onomatopées formés par répétition en changeant les voyelles :
pinpi-panpa : onomatopée du frappement et de la pétarade.
zirrin-zarran : onomatopée du bruit des souliers.
hirrinbili-harranbala : maladroit.
tipus-tapas : onomatopée qui exprime la soudaineté, l'improvisation.
zirti-zarta : pif-paf.
J'arrête là, il y en a plein. |
|
|
|
|
PatoisantLorrain
Inscrit le: 25 Aug 2006 Messages: 224 Lieu: Bayonnais
|
écrit le Tuesday 08 Jan 08, 0:36 |
|
|
Dans le dictionnaire de Léon Zéliqzon (patois romans de la Moselle, page 60), on a la locution suivante :
beurdi(k)-beurda(k) en messin et patois de la Nied, berdi-berdo en patois de l'Isle et du Pays-Haut, berdik-berdak en patois de la Fentsch, beurdîn-beurdâ dans le Saulnois, et berdin-berdo dans le "Vosgien". Cette expression signifie : à tort et à travers, sans réflexion.
En exemple : I trèveille beurdi-beurda, et pus val d'lè prope ovrêge (il travaille à tort et à travers, et puis voilà de la mauvaise besogne.
On a aussi fâre beurdi-beurda qui signifie boiter.
A rapprocher, je pense, de berdi-berdau. |
|
|
|
|
le córór de noetaéy
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 38 Lieu: Breizh - Bertaèyn
|
écrit le Tuesday 08 Jan 08, 1:09 |
|
|
PatoisantLorrain a écrit: | A rapprocher, je pense, de berdi-berdau. |
ây, t'ès râjon! (oui, tu as raison). Dire que je n'avais pas pensé à regarder dans le Zéliqzon pour voir s'il y avait une correspondance en lorrain. |
|
|
|
|
max-azerty
Inscrit le: 11 Jan 2006 Messages: 796 Lieu: arras
|
écrit le Tuesday 08 Jan 08, 9:39 |
|
|
au-delà de ce genre d'assonance si prisée de la langue populaire, je pense qu'il y a, sous-jacente, l'idée de "lourdeur", de "balourdise".
le verbe français "barder" pouvait jadis avoir le sens de "être lourd à force d'être plein", le "bard" étant une "civière" (l'allemand "Bahre" a le même sens).
je me permets de citer, dans le même registre sémantique, l'allemand "Bürde", la charge, le poids, soit "burden" en anglais, "börda" en suédois etc.
Dernière édition par max-azerty le Sunday 13 Jan 08, 11:18; édité 1 fois |
|
|
|
|
Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
|
écrit le Tuesday 08 Jan 08, 10:35 |
|
|
Dans ce cas, il faudrait partir d'un participe aoriste *bʰr-to- de la racine *bʰer- « porter » :
- sanskrit bhṛta- « porté, transporté »
- grec phórtos « fardeau, charge, cargaison » (avec ṛ > or sous l'influence de la labiale)
- arménien bard « fardeau »
- germ. commun *burþa, fém. *burþī(n) > got. baúrþei, norr. byrðr, angl-sax. byrþen, byrden, vx-haut-all. burdî, burdîn
Si l'origine de berdi-berdau est bien là, il est intéressant de retrouver en gallo le degré zéro étymologique car cela laisserait supposer que les ur du germanique qui correspondent aux ṛ de l'eurindien n'ont été longtemps que des conventions orthographiques … |
|
|
|
|
ramon Animateur
Inscrit le: 13 Jan 2005 Messages: 1395 Lieu: Barcelone, Espagne
|
écrit le Wednesday 09 Jan 08, 10:01 |
|
|
Ce sujet me rappelle l’expression catalane onomatopéique barrim-barram, dont le sens est à rapprocher de celui signalé par PatoisantLorrain :
Fer les coses barrim-barram : Agir n’importe comment, sans soin. |
|
|
|
|
Aiatshimunanu
Inscrit le: 24 Oct 2007 Messages: 307 Lieu: [Québec]
|
écrit le Tuesday 07 Jul 09, 19:16 |
|
|
Outis a écrit: | A-t-on une idée de l'origine de l'expression ? | le córór de noetaéy a écrit: | En Loire-Atlantique, une BERDI-BERDA est une femme maniérée, une faiseuse d'embarras. |
En parcourant un dictionnaire de champenois, on peut lire ceci : |
|
|
|
|
dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1887 Lieu: Ardenne (belge)
|
écrit le Monday 03 Aug 09, 22:53 |
|
|
le córór de noetaéy a écrit: | Voici une locution adverbiale gallèse d'origine onomatopéique qui existe peut-être dans d'autres langues d'oïl.
Berdi-berdau -
|
Le wallon connaît plusieurs onomatopées dans le même sens:
bardi-bardah ou bèrdi-bèrdah ou bardi-bardaf:
-dans tous les sens
-pêle-mêle
-deça-delà
-grosso-modo (syn: rif-raf)
bardaf seul: patatras (peut-être l'influence du flamand pardaf< paard af, litt. :[tomber] bas de cheval)
Synonymes: bardouh, bardouf, berdouf, bourdouh (d'où le nom propre wallon Bourdouxhe, prononcer Bourdouh') |
|
|
|
|
Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
|
écrit le Monday 10 Aug 09, 19:31 |
|
|
À rapprocher du québécois "breda", "berdas", "barda" (attesté en 1831). Signifie :
a.grosse entreprise, en rapport au ménage
jour du grand berda [...], on blanchi, on laves les planche, on les grate (1839)
il faut faire faire le berda apprès que les locater sont partie de la maison (1844)
b.bruit, troubles, agitation, problèmes, désordre
Nous avons encore la question de Riel qui cause ben du bordas (1885)
Il y avait des femmes qui pleuraient et des hommes qui sacraient - un bredas épouvantable! (1872)
Descends les escaliers, avec un barda épouvantable (1916)
Il me semble que le deuxième sens doit venir avant le premier, chronologiquement. Faire son barda, ou son grand barda, selon le premier sens, c'est tout nettoyer et mettre en ordre, donc paradoxalement, éliminer le "barda" du deuxième sens. Pourquoi cet usage antinomique ? Peut-être parce que pour nettoyer, il faut d'abord (et temporairement) tout mettre dans un barda plus grand (déplacer les meubles, sortir les tapis) ?
Je connais surtout le deuxième sens. Le premier n'est pas complètement disparu, bien qu'il me semble rare. Mais je comprends mieux la chanson de Plume Latraverse : Le grand barda (1977) depuis que je connais ce sens.
Je crois qu'on peut rapprocher ce mot aux verbes barder (ça va barder) et bardasser (forme retrouvée au Québec, probablement d'oïl, qui est à barder ce que mouillasser est à mouiller; beaucoup de ces suffixes en -asser semblent avoir eu la vie plus longue au Québec qu'ailleurs). |
|
|
|
|
Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11173 Lieu: Meaux (F)
|
écrit le Sunday 04 Sep 11, 5:18 |
|
|
Outis a écrit: | Dans ce cas, il faudrait partir d'un participe aoriste *bʰr-to- de la racine *bʰer- « porter » :
- sanskrit bhṛta- « porté, transporté »
- grec phórtos « fardeau, charge, cargaison » (avec ṛ > or sous l'influence de la labiale)
- arménien bard « fardeau », etc. |
On dit généralement que le mot familier barda est issu de l'arabe بردعة [bardaʿa], "bât de l'âne". Mais au-delà, ce mot "arabe", quadriconsonantique et isolé au sein du lexique de cette langue, est très certainement lui-même un emprunt. A la lumière de ce fil, je dirais même : un emprunt à une langue eurindienne, persan ou grec, d'un peuple plus agriculteur que nomade. A moins qu'il ne s'agisse du berbère... |
|
|
|
|
rejsl Animatrice
Inscrit le: 14 Nov 2007 Messages: 3664 Lieu: Massalia
|
écrit le Sunday 04 Sep 11, 11:02 |
|
|
En Provence, balin-balan ou plus rarement balalin-balalan , car vieilli et directement hérité du provençal. |
|
|
|
|
|