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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 19 Jan 11, 11:05 |
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J'ai vu Outis constater dans auberge l'absence d'un MDJ de la famille de hôpital. En voici donc un, le plus basique :
hôte est issu du lat. hospitem, accusatif de hospes, qui avait déjà la double valeur de “celui qui donne ou celui qui reçoit l’hospitalité”. Hos-pes est formé sur hostis, “hôte”, d’un thème *gʰos-ti- (même sens), et sur un élément *pet- supposé être une trace de *poti-, "pouvoir, l’ensemble signifiant quelque chose comme “maître de l’hôte (c.-à-d. de l’étranger)”. Hospes prit le sens de hostis après que ce dernier eut pris celui d’ “étranger, ennemi” (cf. fr. hostile).
Le français hôte a hérité du double sens du lat. hospes, mais la forme féminine hôtesse désigne uniquement “celle qui reçoit”.
L’hôte reçu – forme neutre utilisée indifféremment pour les deux sexes – ne s’emploie guère que dans la locution “être l’hôte de qqn”.
Principaux dérivés :
hospice : Empr. au lat. hospitium « hospitalité ; toit hospitalier, gîte », spéc. en lat. médiév. « gîte, droit de gîte » (865), « hôpital d'un monastère »
hôpital : Empr. au b. lat. hospitalis [domus] subst. « lieu de refuge, d'accueil »
hôtel : Du lat. hospitale [cubiculum], subst. « chambre destinée à recevoir les hôtes » à l'époque class.
otage : Dér. de hôte ; suff. -age (cf. garage). Les otages étant généralement logés chez celui auprès de qui ils étaient envoyés, le mot a été pris comme désignation de la personne, après avoir signifié « logement, demeure » ; le changement de sens a pu se produire notamment dans les expr. comme prendre, laisser, etc. en ostage.
Au thème *gʰos-ti- se rattachent également :
– le germanique *gastiz, d’où sont issus angl. guest, “invité”, all. Gast, (id.) et Gastarbeiter, “travailleur étranger, immigré” (Attention : l’angl. ghost, “fantôme”, est issu de la racine *gheis-.)
– le slave гость, [gost’], d’où sont issus rus. гость, [gost’], “hôte (reçu ou recevant)”, гостеприимство, [gostepriimstvo], “hospitalité”, господин, [gospodin], "monsieur, maître".
- et peut-être le grec ancien ξενος, [xenos], “étranger” (> fr. xénophobe, proxénète, Xénophon) (Voir cependant plus loin ce qu'en pense Outis).
(Sources : grande famille POTENTIEL, TLF, Robert Historique, etc.)
Dernière édition par Papou JC le Thursday 12 Jan 17, 7:30; édité 7 fois |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Wednesday 19 Jan 11, 12:01 |
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J'aimerais bien connaître quelle source récente fait entrer le grec ξένος dans la famille de la racine *gʰes- car, si on a depuis longtemps constaté le rapprochement sémantique entre les deux et si un degré zéro *gʰs- évoluerait bien vers un grec ξ-, la suite du mot ne peut être expliquée (Benveniste, Frisk, Chantraine). |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 19 Jan 11, 12:13 |
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Outis a écrit: | J'aimerais bien connaître quelle source récente fait entrer le grec ξένος dans la famille de la racine *gʰes- |
Pokorny 453, relayé par Calvert Watkins. Je ne sais pas si c'est assez récent pour toi, ou déjà obsolète.
Dernière édition par Papou JC le Thursday 12 Jan 17, 7:31; édité 1 fois |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Wednesday 19 Jan 11, 12:58 |
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Pokorny est vraiment ancien et bien connu pour être trop laxiste. Watkins, c'est très récent et sérieux mais il n'a sûrement pas tout révisé. C'est bien pourquoi, il faudrait une référence postérieure à 1960 (Frisk, Chantraine) qui explicite le raisonnement suivi. Une simple affirmation me paraît insuffisante. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10945 Lieu: Lyon
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écrit le Friday 21 Jan 11, 15:01 |
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syn. : amphytrion (= hôte qui offre à dîner)
amphitryon (TLFi) :
− Fam. [P. allus. à deux vers de l'Amphitryon de Molière] Personne chez laquelle ou aux frais de laquelle on dîne
− Au fig., poét. [En parlant du destin] :
Le sombre amphitryon [le Destin] ne veut pas de plats vides,
Et la profusion lasse les plus avides [convives] ...
V. Hugo, Les Chants du crépuscule, 1835, p. 42.
amphitryon(n)er, (amphitryoner, amphitryonner) verbe trans., néol.
1. Présider ou offrir un repas
2. Plais. [En parlant d'une pers. et par réf. au personnage de Molière] Se conduire à la manière d'Amphitryon; synon. tromper
Étymol. ET HIST.
− 1752 (Trév. : Ce mot, qui est le nom d'un Roi de Mycènes et de Thèbes, est devenu François d'une manière proverbiale, pour exprimer celui qui donne à manger ou qui paye pour plusieurs une certaine dépense. C'est Molière qui, sans y penser, a été l'Auteur de ce mot : car depuis qu'il a fait dire à Sosie que le véritable Amphitryon [des deux intervenant dans la pièce] est celui chez qui l'on dîne, on demande qui est-ce qui est l'Amphitryon? Ou bien on dit : C'est Mr un tel qui est l'Amphitryon, pour dire que c'est lui qui traite ou qui paye).
Du nom propre Amphitryon empr. au gr. Αμφιτρύων, chef thébain, père mortel d'Héraclès (Iliade, 5, 392 ds Bailly), p. allus. à la pièce de Molière Amphitryon. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10945 Lieu: Lyon
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écrit le Saturday 16 Nov 13, 12:19 |
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hostler
- valet d'écurie
- palefrenier
- personne chargée des locomotives dans les roundhouses (= hangars circulaires / rotondes où on change de locomotives)
etymonline a écrit: |
hostler (n.)
late 14c., "one who tends to horses at an inn," also, occasionally, "innkeeper," from Anglo-French hostiler, Old French hostelier "innkeeper, steward" (12c., Modern French hôtelier), from Medieval Latin hostilarius "the monk who entertains guests at a monastery," from hospitale "inn" (see hospital). |
= personne chargée des chevaux dans une auberge (fin XIVème S.)
Lire les Fils suivants :
- Vocabulaire du cheval
- Expressions et mots issus du jargon ferroviaire |
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Fayet
Inscrit le: 03 Jun 2016 Messages: 265 Lieu: Mâcon
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écrit le Friday 06 Jan 17, 20:05 |
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Le mot ost en français médiéval pose un petit problème car il signifie "armée". Or on ne voit pas très bien d'où il pourrait venir s'il ne vient pas de hostis le mot latin qui signifie "l'ennemi". Surtout qu'on trouve le mot écrit host. Cela représenterait un glissement de sens étonnant car jamais en latin le mot hostis n'a désigné que l'armée contre laquelle on se bat. Quelqu'un connaîtrait-il un autre cas ? |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 08 Jan 17, 0:36 |
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Je crois que le glissement de sens a dû être assez simple : on a d'abord eu un syntagme nom + adjectif ayant le sens d'armée ennemie. Puis le nom est tombé car senti comme lourd et inutile, mais son sens a été porté par l'adjectif devenu un substantif ne gardant que le sens du nom qu'il avait jadis qualifié ; ost est plus probablement issu de hostilis que de hostis.
Au Moyen Âge, plus personne, sauf quelques lettrés, ne savait que ost avait jadis signifié "ennemi".
On trouve un cas comparable en espagnol avec le mot jabalí "sanglier" qui est issu de puerco jabalí "porc des montagnes". |
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Fayet
Inscrit le: 03 Jun 2016 Messages: 265 Lieu: Mâcon
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écrit le Wednesday 11 Jan 17, 15:29 |
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J'avais bien songé à un glissement de ce genre mais il me semble difficilement admissible car Hospes a toujours eu en latin un sens plutôt favorable : un étranger avec lequel on a un lien particulier dont la maison me recevra si je voyage dans son pays et que je recevrai chez moi s'il vient à Rome. C'est à tel point qu'un HOSPES désignait aussi un étranger lié à moi par un lien religieux, un étranger qui ne sera pas un ennemi. Le fait se renforce du fait qu'en français, HÔTE désigne encore celui qui reçoit et celui qui est reçu. Toute la descendance de HOSPES a un sens favorable : HÔPITAL, HOSPITALITE. Enfin si hostis et Hospes sont parents ça ne pourrait être que pour une époque très lointaine où le suffixe (?) PE n'avait pas encore été adopté car je ne vois pas comment "OST" aurait pu le perdre. Avez-vous remarqué que je tends souvent à me méfier de rapprochements difficiles à justifier du point de vue sémantique ou phonétique ? |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 12 Jan 17, 7:39 |
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À te lire, j'ai l'impression
1 - que tu doutes qu'il puisse y avoir un lien entre hospes et hostis,
2 - que tu doutes qu'ost soit issu de l'un ou de l'autre.
Je me trompe ?
Que proposes-tu comme autres options ? |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 25 Mar 19, 10:20 |
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Pour un lien surprenant mais probable entre les notions d'armée et d'hospitalité, voir le mot du jour slogan. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 25 Mar 19, 17:02 |
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À la réflexion, et à mon humble avis,
- Une armée ennemie est généralement une armée étrangère.
- Par ailleurs, l'hôte est par définition extérieur au groupe local, sinon il y aurait sa propre maison et n'aurait pas besoin d'être reçu dans une autre. C'est celui "qui n'est pas d'ici", "pas de chez nous".
On voit ainsi comment tous ces sens pourraient se relier entre eux : étranger > 1. hôte. 2. armée étrangère > armée ennemie > 1. ennemi. 2. armée, troupe, grand nombre de personnes.
Avec une dérivation sémantique particulière au celtique : troupe armée du clan > cri de guerre (cf. slogan).
Un petit ajout réservé aux arabisants : les deux principales charges sémantiques de l'étymon {ḍ,f} sont l'hospitalité et la foule. J'ignore (encore) les chainons intermédiaires, mais le cas du thème *gʰos-ti- fournit une piste intéressante. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Tuesday 26 Mar 19, 0:44 |
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Ces développements ont été étudiés depuis bien longtemps. Voici le long sommaire que donne Émile Benveniste en 1969 dans le chap. 7 (l'hospitalité) de son VIIE (tome I, p. 87) :
En latin, « hôte » s'est dit hostis et hospes < *host-pet-. Que signifient les éléments ? que signifie le composé ?
1°) -pet-, qui se présente aussi sous les formes pot- lat. potis (gr. pósis, despótēs, skr. patih) et -pt- (lat. -pte, i-pse ?) signifie originellement l'identité personnelle. Dans le groupe familial, dem-, c'est le maître qui est éminemment lui-même (ipsissimus, chez Plaute, désigne le maître) : ainsi, quoique morphologiquement différent, gr. despótēs désigne, comme dominus, celui qui personnifie éminemment le groupe familial ;
2°) la notion primitive signifiée par hostis est celle d'égalité par compensation : est hostis celui qui compense mon don par un contre-don. Comme son correspondant gotique gasts, hostis a donc, à une époque, désigné l'hôte. Le sens classique d' « ennemi » a dû apparaître lorsqu'aux relations d'échange de clan à clan ont succédé les relations d'exclusion de ciuitas à ciuitas (cf. gr. xénos « hôte » > « étranger ») ;
3°) dès lors le latin se donne un nouveau nom de l'hôte : *hosti-pet-, qui doit peut-être s'interpréter à partir d'un hosti abstrait « hospitalité », et signifier, par conséquent, « celui qui personnifie éminemment l'hospitalité ». |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11166 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 26 Mar 19, 0:59 |
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Loin de moi l'intention de réinventer la roue, mais dans ce sommaire - dont j'avais d'ailleurs dit l'essentiel dès mon post initial - je ne vois aucune allusion à la notion d'armée ou troupe.
Je rappelle la question de Fayet :
Citation: | Le mot ost en français médiéval pose un petit problème car il signifie "armée". Or on ne voit pas très bien d'où il pourrait venir s'il ne vient pas de hostis le mot latin qui signifie "l'ennemi". Surtout qu'on trouve le mot écrit host. Cela représenterait un glissement de sens étonnant car jamais en latin le mot hostis n'a désigné que l'armée contre laquelle on se bat. Quelqu'un connaîtrait-il un autre cas ? |
Nous en étions là. |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Tuesday 26 Mar 19, 12:38 |
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Je ne comprends pas bien les scrupules de Fayet, l'explication du TLF que tu citais hier me paraît très convaincante :
Citation: | Du lat. hostis masc. «ennemi public» qui, à partir de Grégoire de Tours, a pris le sens de «troupe ennemie» puis de «troupe, armée» |
Je suppose qu'elle reprend cette notice du FEW. Ce serait d'ailleurs intéressant de retrouver les attestations de hŏstis avec ce sens chez Grégoire de Tours. Le FEW montre que cette évolution de sens n'est pas propre au gallo-roman puisqu'elle existe également en roumain et dans les domaine gallo-italique et ibéro-roman. Je rentiens en particulier l'asturien hueste "nächtliche prozession der toten" pour ses résonances folkloriques. Le breton avait emprunté le français ost "armée" : le Favereau cite sur ce point le Catholicon (1499) : Oſt tut armou 'oſt de gens darmes'. Ce mot serait toujours attesté par le nom de famille trégorrois Le Nost, avec l'article français et l'article breton an préfixé.
Le FEW nous apprend également que ost existe toujours dans les dialecte d'oïl sous la forme ô /o/ "troupeau". Ce mot est attesté par le Glossaire des patois du Bas-Maine de Dottin ainsi que par la carte 1338 de l'ALF en Pas-de-Calais et en Somme. |
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