Projet Babel forum Babel
Contact - Règles du forum - Index du projet - Babéliens
INSCRIPTION - Connexion - Profil - Messages personnels
Clavier - Dictionnaires

Dictionnaire Babel

recherche sur le forum
cloche (français) - Le mot du jour - Forum Babel
cloche (français)
Aller à la page Précédente  1, 2, 3, 4  Suivante
Créer un nouveau sujet Répondre au sujet Forum Babel Index -> Le mot du jour
Voir le sujet précédent :: Voir le sujet suivant
Auteur Message
u pistùn



Inscrit le: 15 Aug 2011
Messages: 301
Lieu: Liguria

Messageécrit le Tuesday 08 Nov 11, 18:52 Répondre en citant ce message   

En ligurien cloche se dit canpana, mais la cloche sonne se dit a canpana a cioca; sonner se dit ciucà, et ciucà signifie aussi osciller. On a donc pour cloche le type 'italien' campana, mais pour sonner un verbe dérivé de clocca.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
giòrss



Inscrit le: 02 Aug 2007
Messages: 2778
Lieu: Barge - Piemont

Messageécrit le Tuesday 08 Nov 11, 20:15 Répondre en citant ce message   

Par contre, en piémontais:

- la ciòca a bat (la tchòca a batt)
- mais le ciochin (= timbre) a ciochìnia ('l tchouquìn a tchouquìnia).

De toute façon, l'ivre s'appelle cioch (tchouq) parce qu'il oscille en marchant, mais il n'existe pas (ou plus) un verbe cioché= osciller.


Correction :

saoul= SOÛL = qui a bu avec excès une boisson alcoolisée; qui est ivre. Désolé. J'ai corrigé.


Dernière édition par giòrss le Wednesday 09 Nov 11, 15:31; édité 3 fois
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
Jacques



Inscrit le: 25 Oct 2005
Messages: 6525
Lieu: Etats-Unis et France

Messageécrit le Wednesday 09 Nov 11, 18:23 Répondre en citant ce message   

giòrss a écrit:
Par contre, en piémontais: ...

De toute façon, l'ivre s'appelle cioch (tchouq) parce qu'il oscille en marchant, mais il n'existe pas (ou plus) un verbe cioché= osciller.

Attention, clocher, dans le sens de boiter (cf. cloche-pied), a une origine totalement différente de notre cloche d'église.
TLF a écrit:
Prononc. et Orth. : [klɔʃe], (je) cloche [klɔʃ]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Début xiie s. clocier « boiter » (Psautier d'Oxford, XVII, 49, éd. Fr. Michel, p. 21 [claudicaverunt]); ca 1170-75 clochier (Chr. de Troyes, Chevalier lion, éd. M. Roques, 4094); ca 1200-1220 fig. clocher « être défectueux » (R. de Houdenc, Meraugis, 1110 ds T.-L.). Du lat. vulg. *cloppicare « id. », dér. de cloppus « boiteux » (v. clopin-clopant) qui remplaça le lat. claudus; rapproché par étymol. pop. de cloche1* (v. FEW t. 2, p. 794). Fréq. abs. littér. : 16.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
giòrss



Inscrit le: 02 Aug 2007
Messages: 2778
Lieu: Barge - Piemont

Messageécrit le Wednesday 09 Nov 11, 19:20 Répondre en citant ce message   

Ah, oui, tu as raison: sans doute il y a un lien entre le français "clocher<cloppicare" (marcher en boitant) et le piemontais "cioch" (ivre , dans le sens de celui qui marche en boitant).
On dévrait s'attendre un clouche en français...
Et en vieux français j'ai trouvé un cloche/clouche3= celui qui boite

En mon opinion, il y avait deux verbes en latin tardif:
-cloppicare
-tsoppicare
que se sont croisés.

En italien il existe le mot zoppo = boiteux et le verbe "zoppicare"= boiter, qui pourraient deriver de cloppus et cloppicare, mais la dérivation cl->z- me semble un peu drôle.

Si nous considerons le piémontais, boiteux se dit sòp (lire: çopp) et boiter se dit sopijé (pr. soupiller). Donc l'evolution semblerait: sopijé<çopegare.
Je me demande comme s'est formé ce verbe, parce que si l'origine était cloppicare, le piémontais aurait fait ciopijé (pr. tchoupiller).
Le ligurien de cloppicare a abouti de façon regulière à ciupegà.
Donc le piémontais sopijé doit être un emprunt à un different dialecte neolatin d'Italie. Le vénitien a "sopegàr", par exemple. Le lombard "sopegà".

Alors, je me demande s'il y a pas aussi un lien entre le piémontais sopijé et le français sopper>chopper= "trébucher, faire un faux pas en se heurtant contre quelque chose".

Le TLFI donne la suivante solution:

Citation:
Étymol. et Hist. Ca 1175 çoper « trébucher, faire un faux pas » (Chr. de Troyes, Chevalier lion, éd. M. Roques, 3093); 1235 chouper (Huon de Méry, Tournoiement Antéchrist, éd. G. Wimmer, 642) [choper hapax xiiie s. d'apr. FEW t. 13, 2, p. 346a]; 1316-28 choper (Ovide moralisé, éd. Œuvres de Ph. de Vitry par P. Tarbé, 111 ds T.-L.). Issu prob., ainsi que l'ital. zoppo « boiteux » (DEI), l'esp. zopo et le port. zopo, zoupo « estropié, boiteux » (Cor.), d'un rad. onomatopéique tsopp- par imitation du bruit caractéristique de la démarche d'un homme boiteux (FEW t. 13, 2, pp. 345-347); le passage en a. fr. du son initial -s- à -š- est peut-être dû à l'infl. de choquer aussi bien qu'à un souci d'expressivité, l'évolution de -ts- en -s- ayant fait perdre au mot une partie de sa force expressive. Il semble difficile de retenir l'hyp. d'une formation à partir du b. lat. cloppus « estropié, boiteux » (v. clocher « marcher en boitant ») soit par croisement de celui-ci avec le lat. zanca « chaussure des Parthes » (REW3, no 9598) dont l'aire d'extension est trop réduite, soit par formation d'un verbe *zoppare pour cloppare avec une transformation du rad. pour des raisons onomatopéiques (EWFS2) qui nous ramènent à la 1re hyp.; il en serait de même dans l'hyp. d'un rattachement au lat. suppus « tête en bas » (Cor.) qui suppose aussi une altération onomatopéique du rad. pour expliquer les différentes formes romanes (Hubschmid ds R. Ling. rom., t. 27, 1963, p. 417)


Autre problème: le langues germaniques.
L'hollandais schoppen.
L'allemand Schupp.
Le germanique a-t-il influencé le roman?


Dernière édition par giòrss le Wednesday 09 Nov 11, 23:52; édité 17 fois
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
u pistùn



Inscrit le: 15 Aug 2011
Messages: 301
Lieu: Liguria

Messageécrit le Wednesday 09 Nov 11, 20:15 Répondre en citant ce message   

Jacques a écrit:

Attention, clocher, dans le sens de boiter (cf. cloche-pied), a une origine totalement différente de notre cloche d'église.
TLF a écrit:
Prononc. et Orth. : [klɔʃe], (je) cloche [klɔʃ]. Ds Ac. 1694-1932. Étymol. et Hist. Début xiie s. clocier « boiter » (Psautier d'Oxford, XVII, 49, éd. Fr. Michel, p. 21 [claudicaverunt]); ca 1170-75 clochier (Chr. de Troyes, Chevalier lion, éd. M. Roques, 4094); ca 1200-1220 fig. clocher « être défectueux » (R. de Houdenc, Meraugis, 1110 ds T.-L.). Du lat. vulg. *cloppicare « id. », dér. de cloppus « boiteux » (v. clopin-clopant) qui remplaça le lat. claudus; rapproché par étymol. pop. de cloche1* (v. FEW t. 2, p. 794). Fréq. abs. littér. : 16.


En ligurien occidental on a ciupegà 'boiter' < *cloppicare et ciucà 'osciller'. Le TLF dit: rapproché par étymol. populaire de cloche1*; celà peut être valable pour le français, mais en ligurien on n'a pas le type clocca 'cloche'. Un emprunt au français clocher (> ciucà) est difficile, car s'il était ancien (c'est-à-dire avant le passage cl > č en ligurien) donnerait *ciuscià/*ciucià (tchouchà/tchoutchà) et s'il était récent on aurait le maintient du cl- ou passage à cr-: clique > crica.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
giòrss



Inscrit le: 02 Aug 2007
Messages: 2778
Lieu: Barge - Piemont

Messageécrit le Thursday 10 Nov 11, 0:05 Répondre en citant ce message   

Le ligurien ciucà="osciller", pourrait être un emprunt à une forme verbale piémontaise perdue: *cioché (tchouquer)="clocher".
Si nous avons le mot cioch (celui qui boite = l'ivre) on peut bien imaginer un verbe *cioché (= boiter).
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
ramon
Animateur


Inscrit le: 13 Jan 2005
Messages: 1395
Lieu: Barcelone, Espagne

Messageécrit le Thursday 10 Nov 11, 11:41 Répondre en citant ce message   

En catalan, ensopegar (pron. ensoupegà) veut dire trébucher, faire un faux pas, se heurter avec un obstacle.

L’origine reste obscure. Corominas y voit une variation de encepegar, trébucher avec un cep, pied de vigne. Mais en le comparant avec les formes piémontaise et ligurienne, l’origine commune est bien évidente (la même de l’it. zappo et les langues germaniques.), sauf que tout le monde s’entrave avec un pied de vigne…

Mais on s’éloigne de plus en plus du sujet initial. De l’instrument musical on a abouti à boiteux et maladroits !
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11171
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Thursday 10 Nov 11, 12:52 Répondre en citant ce message   

Oui, ça cloche !
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 10945
Lieu: Lyon

Messageécrit le Saturday 19 Apr 14, 13:54 Répondre en citant ce message   

On peut difficilement parler des cloches sans évoquer Pâques.

Citation:

Les cloches de Pâques

Les cloches sont de la fête, de retour de Rome pour annoncer la résurrection de Jésus, où d'après la légende elles sont allées se charger en oeufs de chocolat...
Les cloches sonnent à toutes volées le jour de Pâques.
Dans les campagnes autrefois, les cloches sonnaient chaque jour de l'année, pour inviter les fidèles à assister à la messe.
Sauf au moment de Pâques, où elles restent silencieuses du Jeudi au Samedi saint.
Car Jésus est entré dans une ville en liesse, puis a partagé son dernier repas le Jeudi saint, a été jugé et est mort le Vendredi saint.
Tristesse et recueillement, attente, et il est ressuscité le 3ème jour :
les cloches sonnent pour fêter la résurrection de Jésus, marquant la fin de la veillée pascale !


Lire les Fils suivants :
- Sonner les cloches
- MDJ Pâques
- MDJ tocsin (même champ sémantique)
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
nip



Inscrit le: 29 May 2017
Messages: 2
Lieu: Toulouse

Messageécrit le Tuesday 30 May 17, 10:10 Répondre en citant ce message   

N'ayant rien trouvé qui me satisfasse, je propose et livre à votre sagacité cette :

Histoire et Sémantique des cloches

Dans l'Antiquité

Au moins 4000 ans avant notre ère, les asiatiques utilisent des cloches de petite taille, des plaques de métal martelées et galbées, rivetées et soudées, pour des rites religieux.
Vers -1500, apparaissent les premières cloches fondues.

Dans la Bible, le grand prêtre Aaron porte une tunique ornée de clochettes d'or. Le roi David joue d'un carillon à 4 clochettes.

Au Ier siècle avant J.-C. : Strabon (né vers -64) témoigne de l'usage d'usage d'une cloche signalant le marché au poisson sur l'île d'Iasso, dans la Carie (actuellement Bodrum en Turquie, voir encadré).
Suétone (vers 69-vers 130) raconte qu'Auguste (Premier Empereur de -27 à 14, mort à Nola) fit mettre des sonnettes autour de la couverture du temple de Jupiter Capitolin.
Pline l'Ancien (né vers 23) rapporte qu'il y avait des cloches attachées en haut du tombeau du roi Porsenna, roi de Chiusi (province de Sienne en Italie), « qu'on entendait de fort loin quand elles étaient agitées par les vents ».
Une épigramme du poète Martial (né vers 40) rappelle qu'il y avait à Rome des cloches qui marquaient l'heure de l'ouverture des bains.

Lucien (né vers 120) rapporte que les prêtres de la déesse syrienne avaient des cloches.
Porphyre (234-vers 305) raconte que certains philosophes des Indes s'assemblaient au son d'une cloche, soit pour les heures de la prière, soit pour les heures des repas.

Moyen Age

Avec la fin des persécutions chrétiennes au sein de l'empire romain, décidée par l'empereur Constantin en 312, le IVe siècle voit l'essor de la religion chrétienne : les évangélisateurs parcourent l'empire, et les cloches d'église apparaissent, sans qu'on ait de trace formelle de cette apparition. La légende médiévale a retenu parmi eux l'évêque saint Paulin de Nôle (vers 353 à Bordeaux, 431 à Nôle) en Campanie, région d'Italie, affublé depuis d'une cloche dans ses représentations. Déjà Pline reconnaissait la Campanie comme une région réputée pour ses fondeurs de cloches, fameuse pour sa production de l'airain, dont la qualité sera confirmée cinq siècles plus tard par Isidore de Séville (vers 565-636).

C'est à partir de la fin du IVe siècle, avec le poète latin Rufus Festus Avienus notamment, que l'on utilise le mot nola pour désigner la cloche d'église. Les romains utilisaient tintinnabula, utilisé au Moyen Age pour désigner des cloches de petite taille ; il a donné en français tintinnabuler, toujours utilisé en 1972 par Nana Mouskouri dans la chanson Petit Garçon.

Vers 470, nous avons la première mention d'une cloche tirée à la corde, donc d'un petit clocher, vraisemblablement en bois.

Au VIe siècle, dans les règles de saint Césaire (vers 470-542), archevêque d'Arles, de saint Benoît (vers 485-vers 545) et de saint Aurélien (523-551), évêque d'Arles, les cloches employées pour les offices sont appelées signa (signum au singulier, qui a donné signe et signal en français) ; la cloche s'appelera aussi seing ou saint en français, qui donnera saintier, le fondeur de cloches. Le terme nous reste dans l'usage du tocsin, le signal d'alerte, qui signifie littéralement « toucher la cloche ». Plus rarement, la cloche est appelée index.

Saint Grégoire de Tours (vers 538-594) rapporte aussi l'usage des cloches pour les offices. On attribue au pape Sabinien (604-606) l'institution de la coutume de sonner les cloches aux heures canoniques et lors de la célébration de l’Eucharistie. Des tours de bois sont alors élevées au-dessus du transept des basiliques. En 809 et 817, les conciles d'Aix-la-Chapelle déclarent que la sonnerie des cloches est à considérer comme un acte sacré qui revient aux prêtres. Une ordonnance demande que chaque église paroissiale soit munie de deux cloches et chaque cathédrale d'au moins six cloches.

Le mot cloche, d'origine celtique cloc puis clocca en latin, a pu être introduit par des moines irlandais venus, à la suite de saint Colomban, s'installer en Gaule autour du VIIe siècle, ou avoir une origine germanique. En anglais, l'« horloge avec des cloches » s'est appelée clock par métonymie, tant l'horloge et la cloche sont devenues indissociables (il reste bell, qui vient de l'anglo-saxon). En allemand, glocke.

A partir du VIIIe siècle, on utilise aussi le mot campana puis campane (en italien et en espagnol : campana), qui peut évoquer la région de Campanie, mais aussi, selon François Bernardin de Ferrare (1577-1669), un habile fondeur nommé Campus, exerçant dans cette contrée. Or ce mot existait auparavant : chez Isidore de Séville, il désigne une balance romaine, « machine propre à peser des fardeaux ». Certains pensent qu'il a pu être mal compris par Walafrid Strabon (vers 808-849) qui l'aurait alors appliqué aux cloches.

Dans l'église d'Orient, on a tout d'abord utilisé des bois sacrés, ou tables de bois, instrument appelé en latin : symbolum, qu'on a longtemps employé aussi en Occident les trois derniers jours de la semaine sainte. Frappées par un marteau de bois sur les deux faces et avec virtuosité, elles ressemblent à un instrument rustique slave alors très populaire : le Jerova i Salomo.

Les orientaux commencent à utiliser les cloches en 865, lorsque le doge de Venise, Ursus Patriciacus, fait don des premières cloches à l'empereur Michel III pour l'église Sainte-Sophie de Constantinople. Une fois répandues, les cloches inspirent ainsi Michel Psellus, le précepteur de l'empereur Michel VII Doukas (1067-1078) : « Vous ne serez pas seulement charmé par les yeux et par le spectacle de toutes les choses visibles ; le carillon sacré viendra, pendant la nuit, vous plonger dans des extases divines ».

A Jérusalem, c'est Godefroy de Bouillon qui fait construire le premier clocher en 1099, après avoir pris la ville. Les premières cloches y resteront 88 ans, jusqu'à leur destruction par Saladin.

Dans les régles monastiques, d'autres termes encore qualifient une ou plusieurs cloches dans un lieu précis avec un usage précis : schilla (squilla, esquile), puis au XIIIe siècle, cymbalum (cymbales), nolula (nolule ou cloche double, 2 cloches d'horloge), campanula (campanule). De nos jours, un autre terme est utilisé pour distinguer les très grosses cloches : le bourdon (octave 2, plus de 2 tonnes).

Renaissance

La prise de Constantinople en 1542 par Mahomet II amène la disparition de quasiment toutes les cloches dans l'empire ottoman. L'une des raisons avancées est que « le son des cloches fait peur aux esprits qui errent dans l'air et les privent du repos dont ils jouissent ». Or le Liban est temporairement indépendant sous l’émir druze Fakhr-al-Din II (1590-1613). En 1596 ou 1597, le père Dandini, nonce du pape Clément VIII au Mont Liban, rend visite au patriarche des Maronites : « Je fus conduit au monastère de Cannubin, où je fus reçu avec de grands témoignages de joie et au son de trois cloches considérables, qui sont là par un privilège tout particulier. » Certains auteurs y voient une preuve d'un usage exceptionnel et latin (Maronites, Caloyères) des cloches en Orient.

De fait, le son des cloches, comme instrument d'appel et de rassemblement, était « propre à exciter des séditions dans le peuple » et revêtait alors une dimension politique. En 1628, Laurent Bouchel, dans sa Somme bénéficiale (rubrique Cloches), mentionne ces « troubles et séditions si ordinaires en tout l'empire d'Occident » qui ont inspiré la méfiance et la prudence des « princes d'Orient ». Il précise : « Le son des cloches est propre à merveilles pour mettre en armes un peuple mutin, à la mode qu'on les sonne, mais aussi pour effrayer les esprits doux et paisibles, et mettre les fols en furie, comme fit celui qui sonna le tocsin à Bourdeaux (sic), pour inciter davantage le peuple ; aussi fut-il pendu au battant de la cloche. » Par précaution, les autorités pouvaient faire enlever les cloches. En représailles également, Charles Quint (1519-1558) fit ainsi casser la cloche Roland de Gand qu'il laissa sonner fêlée afin qu'un « son rauque et désagréable [...] rappelle aux habitants la punition de leur révolte ». Elle sera refondue plus d'un siècle après en 1659.

Période moderne

En France, la Révolution française sera fatale, à son tour, à la quasi-totalité des cloches présentes sur le territoire de la toute jeune République, qui débordera des frontières actuelles. D'abord en 1792 pour la monnaie, puis en 1793 pour les canons, une série de lois ordonnent la confiscation du métal sacré devenu inemployé, à l'exception d'une cloche par commune ou paroisse (notre quartier actuel) à l'usage de l'horloge et du tocsin. Certaines cloches ont pu être cachées, d'autres ont été oubliées, d'autres encore ont trouvé in extremis un usage plus utile que le creuset de la fonderie. Les clochers, leurs flèches en premier lieu, fiertés catholiques, sont également visés et voués à la destruction. Les techniques de fonderie de cloche sont délaissées jusqu'en 1802, date à laquelle les nouveaux fondeurs, généralement issus de la fonte de canons, les ont oubliées.

Le XIXe siècle, à la faveur des Restaurations et des périodes de stabilité et de prospérité économique, est donc celui du renouveau des fondeurs de cloches. Ils sont en effet tout naturellement appelés à repeupler les clochers, d'abord de cloches de volée et d'horloge, puis de cloches de carillon, et ce jusqu'au milieu du XXe siècle. Mais il leur faut par eux-mêmes trouver les techniques permettant d'accorder leurs cloches sur une gamme chromatique toujours plus étendue.

Hélas l'électrification des cloches, les deux guerres mondiales, l'exode rural, l'urbanisation galopante ainsi que les changements sociétaux ont entraîné peu à peu la disparition physique puis fonctionnelle des sonneurs et carillonneurs, jetant insensiblement le voile de l'oubli sur la pratique des sonneries des cloches, du carillon, le son des cloches et donc sur les cloches elles-mêmes. Seule la région du Nord de la France, avec ses beffrois civils reconnus comme Patrimoine mondial de l'UNESCO en 1999, avec ceux de la Belgique, a connu une continuité institutionnelle et médiatique, comme en témoigne le film Bienvenue chez les Ch'tis sorti en 2008.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
Glossophile
Animateur


Inscrit le: 21 May 2005
Messages: 2281

Messageécrit le Tuesday 30 May 17, 10:29 Répondre en citant ce message   

ramon a écrit:
En catalan, ensopegar (pron. ensoupegà) veut dire trébucher, faire un faux pas, se heurter avec un obstacle.

L’origine reste obscure. Corominas y voit une variation de encepegar, trébucher avec un cep, pied de vigne. Mais en le comparant avec les formes piémontaise et ligurienne, l’origine commune est bien évidente (la même de l’it. zappo et les langues germaniques.), sauf que tout le monde s’entrave avec un pied de vigne…

Mais on s’éloigne de plus en plus du sujet initial. De l’instrument musical on a abouti à boiteux et maladroits !

C'est plausible si on ne se trompe pas de cep :
Tlfi:

Citation:
CEP2, subst. masc.
A. Vx, plur. Pièce de bois qui servait d'entrave. P. ext. Chaînes destinées à retenir un prisonnier. Avoir les ceps aux pieds et aux mains; rompre les ceps (Ac. 1835-1878). Mettre qqn aux ceps (cf. FARAL, La Vie quotidienne au temps de St Louis, 1942, p. 115).

Sous toutes réserves.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 10945
Lieu: Lyon

Messageécrit le Tuesday 30 May 17, 14:59 Répondre en citant ce message   

Nip a écrit:
N'ayant rien trouvé qui me satisfasse, je propose et livre à votre sagacité cette :

Histoire et Sémantique des cloches

Bonjour Nip, quelle est ta source ? Qui est l'auteur de cette étude ?
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
AdM
Animateur


Inscrit le: 13 Dec 2006
Messages: 896
Lieu: L-l-N (Belgique)

Messageécrit le Tuesday 30 May 17, 15:16 Répondre en citant ce message   

nip a écrit:
C'est à partir de la fin du IVe siècle, avec le poète latin Rufus Festus Avienus notamment, que l'on utilise le mot nola pour désigner la cloche d'église. Les Romains utilisaient tintinnabula, utilisé au Moyen Age pour désigner des cloches de petite taille ; il a donné en français tintinnabuler, toujours utilisé en 1972 par Nana Mouskouri dans la chanson Petit Garçon.

R/ Reprise en 1972 par Nana Mouskouri, la chanson Petit Garçon a été écrite par Graeme Allwright en 1968. C'est la version francophone de Old Toy Trains, écrite en 1967 par Roger Miller.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
Outis
Animateur


Inscrit le: 07 Feb 2007
Messages: 3510
Lieu: Nissa

Messageécrit le Tuesday 30 May 17, 16:03 Répondre en citant ce message   

nip a écrit:
Déjà Pline reconnaissait la Campanie comme une région réputée pour ses fondeurs de cloches

Dans le Dictionnaire Étymologique de la Langue Latine, on lit effectivement:
Ernout ou Meillet a écrit:
campāna -ōrum n. pl. : uāsa aerea (ex aere Campano facta) [vases de bronze (faits de bronze en Campanie], d'où : campāna -ae f. « cloche »


Le nom est passé pratiquement tel quel en italien et de là importé en Grèce avec le même sens :
καμπάνα [kabána] « cloche », sur lequel a été refait un pluriel grec : καμπάνες [kabánes]

L'occasion de citer le très beau poème de Yannis Ritsos mis en musique par Mikis Theodorakis dans le recueil Romiosini (Grécité).
À de très légers détails près, j'ai préféré donner la traduction de Jacques Lacarrière :

Θα σημάνουν οι καμπάνες
Bientôt les cloches sonneront


Με τόσα φύλλα σου γνέφει ο ήλιος καλημέρα
Par tant de feuilles le soleil te dit bonjour,
με τόσα φλάμπουρα λάμπει, λάμπει ο ουρανός
Avec tant de bannières le ciel resplendit,
και τούτοι μες στα σίδερα
Et pourtant voici les uns sous les fers
κι εκείνοι μες στο χώμα.
Et les autres sous terre.


Σώπα όπου να 'ναι θα σημάνουν οι καμπάνες.
Tais-toi, bientôt les cloches sonneront.
Αυτό το χώμα είναι δικό τους και δικό μας.
Ce sol, il est à eux, il est à nous.


Κάτω απ’ το χώμα μες στα σταυρωμένα χέρια τους
Sous terre, entre leurs bras croisés
κρατάνε τις καμπάνας το σχοινί,
Ils tiennent la corde de la cloche,
προσμένουνε την ώρα,
Et ils attendent l’heure,
προσμένουν να σημάνουν την ανάσταση
Ils attendent de sonner la résurrection.
τούτο το χώμα είναι δικό τους και δικό μας
Ce sol, il est à eux, il est à nous.
δεν μπορεί κανείς να μας το πάρει
Nul ne peut nous le prendre.


Σώπα όπου να 'ναι θα σημάνουν οι καμπάνες
Tais-toi, bientôt les cloches sonneront.
Αυτό το χώμα είναι δικό τους και δικό μας
Ce sol, il est à eux, il est à nous.
δεν μπορεί κανείς να μας το πάρει
Nul ne peut nous le prendre.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11171
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Tuesday 30 May 17, 16:35 Répondre en citant ce message   

Citation:
chez Isidore de Séville, il désigne une balance romaine, « machine propre à peser des fardeaux ». Certains pensent qu'il a pu être mal compris par Walafrid Strabon (vers 808-849) qui l'aurait alors appliqué aux cloches.

Peut-être que la Campanie était doublement célèbre : pour ses cloches et pour ses balances ?
Pour le grec καμπανός [kampanós] “peson, balance romaine”, Chantraine date du VIe siècle l'emprunt au latin tardif.
C'est avec le sens de "balance" que l'arabe l'a emprunté au grec, via le syriaque, ce qui donne قبّان qabbān, “balance romaine, bascule”.
Voir le profil du Babélien Envoyer un message personnel
Montrer les messages depuis:   
Créer un nouveau sujet Répondre au sujet Forum Babel Index -> Le mot du jour Aller à la page Précédente  1, 2, 3, 4  Suivante
Page 3 sur 4









phpBB (c) 2001-2008