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mansio
Inscrit le: 19 Feb 2005 Messages: 1125
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écrit le Friday 16 Feb 07, 20:54 |
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Dino a écrit: | Le mot arabe قَفا (en Égypte prononcé: âfa) est très commun et populaire. |
Qu'est-ce que j'ai pu me casser le larynx à essayer de prononcer le nom de la forteresse de Marqab en Syrie (r+qaf), pour apprendre des années plus tard sur les forums de langue que le "q" ne se prononçait quasiment pas au Proche-Orient!
merci de confirmer la tendance. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10946 Lieu: Lyon
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écrit le Saturday 17 Feb 07, 12:13 |
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Mansio, je te confirme en tout cas que j'ai eu les mêmes difficultés que toi à le prononcer. En cours d'arabe, on n'y échappe pas. C'est très long à acquérir je pense. J'ai des copains d'origine maghrébine qui ne parlent ni ne lisent l'arabe mais qui possèdent la prononciation à la perfection, pour l'avoir simplement dans les oreilles par l'environnement familial et 2 ou 3 étés au bled. Un peu écoeurant quand on voit les efforts que l'on doit s'imposer... |
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Abdüssalâm
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 909 Lieu: Aiguillon
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écrit le Sunday 25 Feb 07, 1:10 |
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Ibn khaldûn (1332-1406) , qui touchait sa bille en histoire de la langue arabe, écrit dans sa "muqaddima" (introduction à l'histoire universelle) que dès l'origine, le lettre ق [q] connaissait une double prononciation: une, urbaine qui est celle que préconise l'arabe littéral et une autre rurale [g] et il les considère aussi juste l'une que l'autre. Fort de cette autorité, je conseille souvent à mes élèves francophones de prononcer cette lettre [g] tant qu'il ne peuvent pas la prononcer [q] plutôt que [k] ne serait-ce que pour éviter certaines confusions: قلب [qalb] (coeur) > كلب [kalb] (chien); فقير [faqîr] (miséreux) > فاكر [fâkir] (pensant) |
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mansio
Inscrit le: 19 Feb 2005 Messages: 1125
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écrit le Sunday 25 Feb 07, 13:27 |
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Pas plus tard que hier je demandais à un ami sur un forum pourquoi il utilisait le "9" en transcription pour le qâf, alors que tout le monde, hormis les jeunes maghrébins, utilise le "q".
C'est alors que je me suis demandé si ce n'était pas une façon astucieuse de représenter à la fois le "q" et le "g". |
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Abdüssalâm
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 909 Lieu: Aiguillon
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écrit le Saturday 09 Jun 07, 0:36 |
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En réponse à Groultoudix sur le fil "transcription", je donne ici le texte d'ibn Khaldûn (1332-1406) traduit par V. Monteil aux éditions Sindbad. J'en donne ici un résumé. Pour ceux qui voudraient le retrouver en entier, il se trouve aux pages 1270,71,72 et 73, T3:
Ibn khaldûn oppose la prononciation bédouine du qâf [g] à celle des citadins [q]. Il donne ensuite les tribus réputée pour leur arabité qui ont cette prononciation [g] et dit "Comme les Arabes bédoins ne l'ont pas inventée mais qu'il qu'ils en ont hérité depuis des générations, il est évident que c'était la pronociation même du vieux muDar {ancêtre éponyme des Arabes du Nord ou Arabes proprement dits}. C'était même peut-être celle du Prophète. puis il donne l'avis des juristes chiites pour qui le ق dans le Coran doit se prononcer [g]. Il avnce par la suite que les citadins eux aussi n'ont pas dû inventé leur pronociation [q], mais penche en faveur de la manière bédouine moins atteinte, à ces yeux, par les influences étrangères. Il démontre ensuite que les philologues arabes qui ont prôné la prononciation [q], l'ont fait sans preuve "alors qu'elle existe depuis les premiers Arabes et qu'ils l'ont héritée de leurs ancêtres...C'est donc la preuve que les anciens Arabes, et jusqu'au Prophète (prononçaient le qâf [g] ". Certains voient par contre dans le phonème [q] un son d'origine étrangère, mais Ibn Khaldûn finit son châpitre par une synthèse: "Nous croyons cependant qu'il est plus vraisemblable de ne voir, en tout cela, qu'un seul son, mais articulé en des points différents (de la bouche)."
Ce texte, si nous nous appuyons sur l'autorité d'Ibn Khaldûn, tend à prouver que la prononciation [g] est tout à fait légitime, même si le phonème [q] a prévalu en arabe littéral contrairement à la plupart de dialectes qui ont conservé le [g]. Ainsi si un Européen ne peut, provisoirement ou définitivement, prononcer [q], qu'il l'articule [g] (mais surtout pas [k]!), en invoquant le souvenir du grand penseur maghrébin Ibn Khaldûn. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11169 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 18 May 11, 21:48 |
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Je confirme qu'au Caire on ne fait pas de différence entre le qaf et la hamza. A l'oral, bien sûr. |
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Dinga
Inscrit le: 08 Jun 2011 Messages: 2 Lieu: Oran - Alger
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écrit le Thursday 09 Jun 11, 1:00 |
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Le même phénomène existe à Tlemcen à l'Ouest d'Algérie, où on a tendance à prononcer tout ce qui est q/ق comme hamza. |
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iStoiko
Inscrit le: 27 Apr 2008 Messages: 22
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écrit le Friday 10 Jun 11, 1:42 |
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Le "qaf" selon les dialectes peut se prononcer comme un "g" (presque un peu partout de l'Irak, l'AS, jusqu'au Maghreb), un "k" (quelques îlots en Palestine et en Algérie et peut-être ailleurs aussi), une "hamza" (Nord de l'Egypte, Syrie, Liban), un son "dj" (Sud de l'Egypte, aux EAU où le nom de l'émirat de Sharjah s'écrit bien avec un "qaf" en arabe mais se prononce localement tel sa translittération latine officielle) ou tel quel (un peu partout aussi mais plus rarement).
Plus généralement, les sons "g" et "dj" sont plus rudes et/ou virils (valeurs des nomades) alors que la "hamza" et le "k" sont plus doux et/ou efféminé (valeurs des citadins), le son "qaf" serait un compromis entre ses différentes "perception".
En tout état de cause, il serait incongru d'opter pour autre chose que le son "qaf" quand il s'agit de parler en arabe classique et il est même interdit dans la récitation du coran.
En parlant du coran, je ne connais pas quelles sont les méthodes utilisées pour apprendre la prononciation des lettres arabes, mais jeter un coup d’œil sur les bases de la récitation coranique pourrait être très utile vu que c'est en même temps plus intransigeant et plus rodé comme méthodologie pour les non-arabophones (pour qui elles étaient destinés au départ). |
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Dinga
Inscrit le: 08 Jun 2011 Messages: 2 Lieu: Oran - Alger
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écrit le Saturday 11 Jun 11, 3:39 |
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J'avais déjà remarqué que les Emiratis disaient Shardja pour Sharqa mais j'ai complètement oublié cette prononciation.
Donc, en résumé le Qaf peut être prononcé comme: K, hamza, g, q et dj.
à Oran, qui est la deuxième ville d'Algérie, on utilise le plus souvent g.
Tlemcen semble être influencé par l'héritage arabo-judéo-andalou-turc et on y prononce q comme hamza
Jijel et Ghazaouet semblent être influencés par les Andaloux après l'Inquisition et on y prononce le q comme k. |
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beauceronyx
Inscrit le: 19 Aug 2011 Messages: 87 Lieu: Ile-de-France
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écrit le Sunday 28 Aug 11, 8:15 |
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Donc, la variété de prononciation du qaf et du εayn est-elle une illustration de la difficulté articulatoire de ces phonèmes ?
D'aucuns diront mais qu'est-ce que la difficulté articulatoire ? Et comment la caractériser ?
Les pharyngales et l'occlusive uvulaire sont inconnus d'un très grand nombre de langues (argument fréquentiel).
En mandé, par exemple, on ne le trouve à ma connaissance qu'en soninke ; les autres utilisent au mieux la fricative uvulaire x. |
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gilou
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 1528 Lieu: Paris et Rambouillet
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écrit le Sunday 28 Aug 11, 11:15 |
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beauceronyx a écrit: | D'aucuns diront mais qu'est-ce que la difficulté articulatoire ? Et comment la caractériser ? | Peut être par le nombre de muscles dont la tension est nécessaire à l'articulation du phonème, éventuellement modulé par un facteur propre à chaque muscle (facteur de facilité de mise sous tension) [et sans doute un second facteur quand la tension d'un muscle joue sur la tension d'un autre muscle. Je pense par exemple aux articulations ou seule une des deux cordes vocales vibre, comme dans je ne sais plus quelle langue sibérienne]. |
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aboukhaldoun
Inscrit le: 11 Apr 2008 Messages: 441 Lieu: Bruxelles/Tripoli (Liban)/Homs (Syrie)
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écrit le Monday 29 Aug 11, 22:11 |
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En arabe dialectal, il n'existe à ma connaissance que sept variantes pour cette lettre:
1. Réalisé qâf comme en arabe classique. Egalement propre aux parlers qeltu mésopotamiens, parlers druzes et alaouites, parler de l'Algérois, etc.
2. Réalisé gâf. Propre aux parlers nomades d'Orient et du Maghreb, Sa3îd égyptien essentiellement.
3. Réalisé 'âf. Propre aux parlers citadins d'Orient et de certaines villes du Maghreb (Fès, Tétouan, Tlemcen).
4. Réalisé ǧâf. Propre aux parlers de petits nomades d'Orient (šiwâyâ) et résultant de la palatalisation du qâf due à l'environnement d'une voyelle élevée. Ex: quddâm (devant) → ǧiddâm.
5. Réalisé ǵâf. Propre aux parlers de grands nomades d'Orient (essentiellement šammar et 3nizä) et résultant de la palatalisation du qâf due à l'environnement d'une voyelle élevée. Ex: quddâm (devant) → ǵiddâm.
6. Réalisé kâf vélaire. Propre aux parlers paysans de Cisjordanie, certains points de l'Algérie et du Sultanat d'Oman, Chiites du Bahreïn essentiellement.
7. Réalisé čâf. L'unique cas à ma connaissance concerne la racine q-t-l. Le qâf passe à kâf au contact de la coronale tâ' (comme dans les parlers Irakiens lorsqu'ils prononcent waqt (temps) → wakit) et est ensuite palatalisé. Ex: qatla (tuerie, bastonnade) → čatlä.
Il peut exister une huitième prononciation en šâf due au dévoisement du čâf dans l'environnement fermé d'une coronale. Ex: maqtûl (tué) → maštûl. |
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Azwaw
Inscrit le: 30 Aug 2010 Messages: 975 Lieu: Le Havre
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écrit le Tuesday 30 Aug 11, 8:03 |
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C'est très intéressant. Est-ce que la situation est aussi claire aujourd'hui? Est-ce qu'il n 'y a pas une disparition/uniformisation de ces particularités? |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10946 Lieu: Lyon
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écrit le Tuesday 30 Aug 11, 10:32 |
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Bon retour à toi sur le Forum, Aboukhaldoun ! |
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Feintisti
Inscrit le: 09 Oct 2005 Messages: 1591 Lieu: Liège, Belgique
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écrit le Tuesday 30 Aug 11, 20:43 |
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C'est bizarre, mais dans un petit livre sur l'arabe marocain, les mots utilisant le qâf le changeaient simplement en kâf comme dans "qitâr" > "kitâr".
Je pensais que c'était une prononciation locale, mais peut-être est-ce juste un moyen abusif de "simplifier" la prononciation. |
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