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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6525 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Saturday 08 Mar 08, 14:07 |
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Voir aussi ours.
Ours mal léché : personne mal élevée, rustre, de mauvais caractère.
Je suis sceptique quant à l'origine que l'on donne à cette expression et que même Montaigne aurait indiquée : on pensait que les ourses léchaient leurs oursons pour leur donner leur forme, les éléver. Les gens étaient-il souvent en contact avec des ourses et leurs jeunes pour observer leur comportement ? J'en doute : les ourses avec des petits sont très agressives quand on les approche. Les ours que les gens voyaient étaient principalement ceux des montreurs d'ours. Pour dresser un ours, on prenait un petit que l'on séparait de la mère le plus tôt possible.
Je pencherais plutôt pour la prononciation incorrecte d'une autre expression signifiant "ours mal élévé, mal dressé" ou "ours mal d'humeur" en vieux français. Le mot ours pourrait même être une déformation d'un autre mot.
Approximations phonétiques de l'expression :
ours mal [léché] ?
ours mal [ésé] ?
ours mal [éché] ?
[urs] mal léché ?
[our] mal léché ?
Voici quelques mots d'ancien francais qui pourraient être des pistes :
orce : 12e s. cruche, vase
ors : 11e s. : ours, cf. anc, fr. orsiel (ourson)
ost : 11e. s. ennemi
esce, esse : disposition
eschai : butin ; echaitiver, mettre en captivité
eschaitive : captif, misérable, pitoyable
esche : appât (cf. lat. esca, nourriture)
leche, lesche : lame , tranchant
leiche, lesche : appât
lechois : lieu de plaisir
lecherel : homme qui aime le plaisir. anc. fr. lecheresse (ex.femme lecheresse)
leusse : tromperie
Dernière édition par Jacques le Saturday 08 Mar 08, 19:42; édité 3 fois |
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Liliane
Inscrit le: 20 Mar 2006 Messages: 785 Lieu: Côtes d'Armor
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écrit le Saturday 08 Mar 08, 15:03 |
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L'ost était aussi l'armée à l'époque des croisades, le service militaire que les vassaux devaient à leur seigneur. |
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Tjeri
Inscrit le: 13 Sep 2006 Messages: 996
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écrit le Saturday 08 Mar 08, 21:07 |
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Un ours mal léché est insatisfait donc mécontent...au Canada, du moins ! |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6525 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Saturday 08 Mar 08, 21:35 |
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ATILF.FR a écrit: | La loc. ours mal léché fait allusion à la légende antique (déjà rappelée par Rabelais, Tiers Livre, XLII, éd. M. A. Screech, pp. 285-288 et La Fontaine, Œuvres, éd. H. Régnier, t. 2, pp. 257-258, note 2) selon laquelle les ours naissent informes et que leurs mères les façonnent en les léchant |
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akribik
Inscrit le: 14 Nov 2007 Messages: 164 Lieu: paris
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écrit le Sunday 23 Mar 08, 20:10 |
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L'argument de l'impossibilité d'observer les pratiques "éducatives" des ourses ne me paraît pas convaincant. Car ce ne serait pas le seul exemple, ni un exemple particulièrement absurde, de légende pré-scientifique imaginée sans rapport avec ce qui est observable. On peut penser à la génération spontanée que bien entendu personne n'a jamais pu voir mais qui a fait autorité pendant des siècles. Par ailleurs, l'ours tient une place à part dans les traditions populaires rurales européennes par sa tendance à se dresser sur ses pattes arrière qui l'ont fait comparer à l'homme. On n'aurait pas fait "danser" les ours s'ils étaient des quadrupèdes classiques.
Traiter quelqu'un d'ours mal léché c'est le critiquer doublement: non seulement tu es un ours, un être sauvage et irascible, mais en plus mal léché, mal lavé, mal débarbouillé, donc infréquentable et de mauvaise humeur. Tout façonnage maternel mis à part, mais la légende est intéressante, car les mères humaines (moins les pères) tendent bien à caresser, voire frotter, malaxer les bébés. |
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Pascal Tréguer
Inscrit le: 16 Dec 2012 Messages: 694 Lieu: Lancashire - Angleterre
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écrit le Tuesday 11 Jul 17, 22:01 |
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Jacques a écrit: | Ours mal léché : personne mal élevée, rustre, de mauvais caractère.
Je suis sceptique quant à l'origine que l'on donne à cette expression et que même Montaigne aurait indiquée : on pensait que les ourses léchaient leurs oursons pour leur donner leur forme, les éléver. Les gens étaient-il souvent en contact avec des ourses et leurs jeunes pour observer leur comportement ? J'en doute : les ourses avec des petits sont très agressives quand on les approche. Les ours que les gens voyaient étaient principalement ceux des montreurs d'ours. Pour dresser un ours, on prenait un petit que l'on séparait de la mère le plus tôt possible. |
cf. ici dans expressions / mots dérivés de noms d'animaux :
anglais : to lick into shape: littéralement donner une forme en léchant : former, entraîner, quelqu’un, par exemple un employé, un soldat ; arranger, rendre présentable, quelque chose
Cette expression se réfère à la croyance selon laquelle les oursons naissent informes, rapportée par Pline l’Ancien dans Histoire naturelle (Livre VIII, chapitre 54) :
Citation: | Ce sont d'abord des masses de chair blanche, informes, un peu plus grosses que des rats, et sans yeux, sans poil ; les ongles seuls sont proéminents. C'est en léchant cette masse que la mère lui donne peu à peu une forme. |
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Pascal Tréguer
Inscrit le: 16 Dec 2012 Messages: 694 Lieu: Lancashire - Angleterre
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écrit le Wednesday 12 Jul 17, 23:37 |
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Dans la première édition (1694) du Dictionnaire de L'Académie française, la définition d’ours mal léché se référait à la croyance ancienne :
Citation: | On dit prov. & bass. d'Un enfant qui n'a point de peur, qu'Il a monté sur l'ours. d'Un enfant difforme & mal fait, que C'est un Ours mal leché. d'Un homme fort velu, que C'est un ours. |
Dans la quatrième édition (1762), le sens actuel est ajouté :
Citation: | On dit proverbialement d'Un enfant qui n'a point de peur, qu'Il a monté sur l'ours; D'un enfant difforme & mal-fait, ou d'un homme rustre, brutal, mal élevé, que C'est un ours mal léché; figurément D'un homme qui est fort velu, ou d'un homme qui fuit la société, que C'est un ours. |
Il me semble que le sens homme rustre, brutal, mal élevé d’ours mal léché est dû à l’emploi figuré d'ours au sens de personne qui fuit la société.
En français, la plus ancienne allusion littéraire à la croyance ancienne semble être ce passage de Le Pèlerinage de l’Âme, par Guillaume de Deguileville (1295-circa 1358) :
Citation: | “Se ouis, dist il, onques parler
Comment sont ours imparfais nes
Et comment apres sont fourmes
Par la langue de leur pere
Et le lechier de leur mere.” |
Rabelais y fait une allusion dans le Tiers livre, au chapitre Comment naissent les procés, & comment ilz viennent à perfection :
Citation: | Vn procés à sa naissance premiere me semble, comme à vous aultres messieurs, informe & imperfaict. Comme vn Ours naissant n’a pieds ne mains, peau, poil, ne teste : ce n’est qu’vne piece de chair rude & informe. L’ourse à force de leicher la mect en perfection des membres. |
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