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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Saturday 08 Sep 07, 19:30 |
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Bain en grec moderne μπάνιο (banio) il s’agit d’un emprunt aller retour par le bais de l’italien bagno car à l’origine ce terme provient du grec ancien βαλανείον (lieu de bain collectif). En latin on retrouve balneum, balineum
Dernière édition par Helene le Saturday 08 Sep 07, 20:32; édité 1 fois |
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Tjeri
Inscrit le: 13 Sep 2006 Messages: 996
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écrit le Saturday 08 Sep 07, 20:20 |
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Y a-t-il un lien avec la région corse de Balagne? |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Saturday 08 Sep 07, 20:55 |
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Je pense plutôt que pour Balagne, il y a un rapport avec le grec βάλανος qui signifie gland |
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guillaume
Inscrit le: 14 Dec 2005 Messages: 669 Lieu: Istanbul, natif du Québec
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écrit le Saturday 08 Sep 07, 22:57 |
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On dit banyo en turc, d'emprunt au grec ou à l'italien.
Sinon il y a aussi bien sûr hamam, hammam.
βάλανος existe en turc sous la forme de palamut, gland. Il viendrait de l'arabe ballūT, chêne et gland de chêne, de l'araméen balūTā (même sens).
Toujours selon le dictionnaire étymologique Sözlerin Soyağacı, les mots arménien palud, et grec ancien bálanos, gland, seraient possiblement des formes dérivées d'une langue moyen-orientale. |
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Kyrillion
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 311 Lieu: Haute-Savoie
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écrit le Saturday 08 Sep 07, 23:13 |
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Je suis à peu près sûr que balanos existe déjà en grec ancien ; mais peut-être sont-ce les Arabes qui l'ont emprunté ? après tout, les chênes ne courent pas les rues chez eux...(enfin, je crois). |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Saturday 08 Sep 07, 23:20 |
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Etymologiquement βαλανείον a plutôt un rapport avec le verbe ancien Βλύω futur βλύσω jaillir, couler, inonder, donc pas de rapport avec le gland βάλανος qui s’utilise toujours en grec moderne |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Sunday 09 Sep 07, 10:26 |
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Ce n'est pas l'avis de tous : βαλανεύς [balaneús] « garçon de bains » et βαλανεῖον [balaneíon] « bain » n'apparaissent dans le grec qu'au Ve siècle (Platon, Aristophane) et en prose (la poésie garde le pluriel λουτρά [loutrá] « bains » qui, lui, est homérique). Ce sont des mots nouveaux qui n'appartiennent qu'à l'attique et qu'on peut donc supposer correspondre à une innovation.
Or, là-dessus, une glose d'Hésychius apporte quelques lumières :
Hésychius a écrit: | βαλανειόμφαλος · οὓτω Κρατῖνος ὠνόμασε τὰς φιάλας τὰς ἐχούσας ὀμφαλοὺς ἄνευ προσώπων, ὁποῖοι οἱ θόλοι ἐν τοῖς βαλανείοις, οἱ δὲ ἀπὸ τῶν ὀμφαλῶν τῶν ἐν τοῖς πυέλοις.
(balaneiómphalos [à nombril de bains] : Kratinos appelle ainsi les coupes qui ont des fonds sans façade, de la même façon que les cuves voutées dans les bains, [elles sont nommées] ainsi d'après les nombrils dans les baignoires.) |
Ici, ὀμφαλός [omphalós] « nombril » désigne aussi bien le fond d'une coupe que la valve d'une baignoire et la glose témoigne donc de l'existence de baignoires ayant des bondes d'écoulement, ce qui est effectivement une innovation technique.
Or le mot βάλανος [bálanos] « gland » désigne couramment toutes sortes de choses en ayant plus ou moins la forme, gland du pénis, suppositoire, certains coquillages et, en particulier, les chevilles, comme celles qui calent les verrous. Chantraine fait donc l'hypothèse que ce mot ait pu désigner la cheville bouchant le trou d'une baignoire et le garçon de bains (βαλανεύς) chargé des remplissages et vidages aurait ainsi été un chevilleur.
Une autre hypothèse serait celle de l'emprunt à une langue égéenne mais aucun élément ne vient la justifier.
Ni Frisk, ni Chantraine n'évoquent de rapport avec βλύζω [blúzō] « bouillonner, déborder ». D'une part le sémantisme correspond mal à la pratique des bains, d'autre part la formation supposerait un *βαλϝανος [balwanos] < *blu-anos (avec réalisation consonantique de u et vocalique de l) dans lequel on ne retrouve pas le d supposé par βλύζω (< *blud-yō). Or le groupe dn est stable en grec.
Une autre hypothèse (non citée par Chantraine, rejetée par Frisk) rapprocherait le sanskrit galati « s'égoutter, distiller » (*gʷel-) mais, là aussi, elle ne convient ni pour le sens, ni pour la phonétique, le vocalisme du grec restant inexpliqué.
Enfin, pour en revenir au gland (βάλανος < *gʷl-h₂no-), c'est un mot qui possède de bons correspondants eurindiens :
arménien kałin, latin glāns, glandis (*gʷl-eh₂n-d-), lituanien gilė. |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Sunday 09 Sep 07, 11:03 |
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Citation: | Ni Frisk, ni Chantraine n'évoquent de rapport avec βλύζω [blúzō] « bouillonner, déborder ». D'une part le sémantisme correspond mal à la pratique des bains, d'autre part la formation supposerait un *βαλϝανος [balwanos] < *blu-anos (avec réalisation consonantique de u et vocalique de l) dans lequel on ne retrouve pas le d supposé par βλύζω (< *blud-yō). Or le groupe dn est stable en grec. |
Ce rapport est évoqué par l’Académicien Stamatakos, personnellement je n’aurai jamais mis cela au hasard sans vérifier auparavant.
A partir de βάλανος on trouve plusieurs dérivés dont le verbe βαλανίζω (ramasser des glands), βαλανηφαγέω (manger des glands), βαλανίνος (de glands), βελονοειδής (en forme de gland) etc... |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Sunday 09 Sep 07, 12:26 |
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S'il faut donner des titres :
Wikipedia a écrit: | Pierre Chantraine est un linguiste français né en 1899 et mort en 1974. Il fut élève d'Antoine Meillet, de Joseph Vendryes et de Paul Mazon, pour ne citer que les plus célèbres, et fut sans doute l'un des plus grands spécialistes de la langue grecque. Il travailla en outre régulièrement comme relecteur pour la Collection des Universités de France, enseigna longtemps à la Sorbonne et à l'EPHE, et figura parmi les premiers savants français à s'intéresser au mycénien, dès que Michel Lejeune l'eut convaincu de la validité du déchiffrement de Chadwick et Ventris, en 1954. |
Wikipedia a écrit: | Hjalmar Frisk (1900 - 1984) was a Swedish linguist in Indo-European studies and rector of Göteborg University 1951-1966. |
Je suis quand même étonné que Stamatakos ne mentionne pas les autres hypothèses. Le rapprochement avec βλύζω, βλύω n'est autrement donné que par Pokorny :
Citation: | gʷel-2, gʷelǝ-, gʷlē-
gr. βαλανεύς `Bademeister', βαλανεῖον `Bad' (> lat. balneum); βλύω, βλύζω `quelle hervor' (Bildung nach φλύω), βλύδιον `feucht' Hes. , und aus der Sippe von βάλλω in ähnlicher Bed. ἀμβολάδην `aufsprudelnd (vom Wasser)', Δέλλοι `Springquell bei Eryke', vgl. auch εἰς ἅλα βάλλειν `münden'; |
qui date de la fin du XIXe siècle …
On notera aussi que la forme βλύω qui faciliterait (?) phonétiquement ce rapprochement est rare et tardive (Lycophron, Nonnos). |
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Helene
Inscrit le: 11 Nov 2004 Messages: 2846 Lieu: Athènes, Grèce
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écrit le Sunday 09 Sep 07, 12:36 |
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Il n’est pas exclu que Pokorny ait raison. Il doit sans doute y avoir aussi d’autres sources, en tout cas à partir du moment il y a plusieurs hypothèses c’est à prendre avec prudence. |
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dubsar
Inscrit le: 07 May 2007 Messages: 448 Lieu: Altkirch (F68)
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écrit le Monday 10 Sep 07, 20:20 |
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En Colombie quand j'allais aux toilettes c'était "voy al baño" |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11171 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 29 Jul 14, 19:34 |
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Par la force des choses on a été amené dans ce fil à parler de deux choses qui n'avaient aucun rapport entre elles, à savoir le gland et le bain, en dépit de l'hypothèse de Chantraine rapportée par Outis.
1. Comme le dit ce dernier, le mot qui désigne le gland en grec c'est βάλανος [bálanos], racine indo-europénne *gʷelǝ-, même sens. On retrouve cette racine dans l'espagnol bellota, même sens, dans le vieux perse balūṭ "chêne, gland", et dans l'arabe بلّوط ballūṭ “chêne”.
2. Juste avant de traiter de βάλανος [bálanos], Chantraine traite de βαλανεύς [balaneús] “garçon de bain”. À ce qu'en dit Outis plus haut j'ajouterai simplement ici que, dans son ouvrage "Du sémitique en grec", p. 242 (Paris, alfAbarre 2013), Michel Masson démontre que ce mot est de la même origine sémitique que la racine arabe بلّ B-L-L “mouiller, être humide”, sous laquelle on trouve le nom d'agent بلّان ballān “garçon de bain”... |
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