Etudes de grammaire française
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Introduction - Constructions verbales et pronominalisation
Constructions verbales et pronominalisation







0. Chapitre introductif



Pour les étrangers – et dans une moindre mesure pour les jeunes francophones –, s’il est, en français, un domaine grammatical complexe, c’est bien celui de la “pronominalisation”. Le signifiant est long, lourd, difficile à prononcer, mais il donne d’emblée une bonne idée du signifié. Pourquoi cette question est-elle aussi complexe ? Parce qu’elle met en jeu une demi-douzaine de paramètres qui, tous, ont en quelque sorte “leur mot à dire”. Jugeons-en :

1 – la construction du verbe principal : penser à, dire à ... que, se souvenir de

2 – le genre et 3 – le nombre du nom à pronominaliser

4 – son déterminant : défini ou indéfini ?

5 – sa classe sémantique : humain ou non-humain ?

6 – sa fonction dans la phrase : complément d’objet direct ? indirect ? circonstanciel ?

Chaque paramètre fournirait un mode d’entrée dans le sujet. Après avoir hésité à le traiter à partir des mots qui résultent de la pronominalisation, à savoir les pronoms-adverbes y et en et les pronoms personnels, nous avons finalement opté pour l’entrée par les constructions verbales, à cause du rôle central du verbe dans la phrase.



Il est en effet bien possible qu’une question traditionnellement traitée comme purement grammaticale relève en fait plus du lexique des verbes que de la grammaire des pronoms. Et comme les verbes sont nombreux et leurs constructions diverses, on perçoit la nécessité de mettre un peu d’ordre en la matière en opérant des classements, en regroupant les verbes qui ont des comportements syntaxiques identiques ou comparables. S’il est des domaines où le terme lexique-grammaire – inventé par le regretté Maurice Gross – est de rigueur, c’est donc bien dans celui des constructions verbales et dans celui, qui lui est connexe, de la pronominalisation.



Avant d’entrer dans le vif du sujet, il ne sera pas inutile, si l’on n’est pas très versé dans la codification et le métalangage grammatico-linguistiques généralement admis, de se familiariser avec un certain nombre de termes et de signes dont nous allons user au cours de cet exposé. Les items apparaissent dans l’ordre alphabétique, pour permettre au lecteur de s’y reporter facilement à tout moment en cas de besoin au fil des chapitres qui vont suivre.





Det : déterminant. On distingue deux grandes catégories de déterminants, les déterminants « définis » : articles définis, adjectifs démonstratifs, adjectifs possessifs ; et les déterminants « indéfinis » : articles indéfinis et partitifs, et une longue liste de déterminants adjectivaux et composés qu’il n’y a pas lieu d’énumérer ici1, mais dont voici tout de même, à titre d’exemples, quelques-uns des plus fréquents : certains, plusieurs, divers, quelques, beaucoup de, un peu de, une sorte de, un certain nombre de, un petit bout de, toutes sortes de.



Extraction : procédure transformationnelle, symbolisée par le simple signe « », qui consiste à extraire un élément de la place qu’il occupe normalement dans la phrase pour le mettre au début. Ex. Max a dit ça à Luc → Ça, Max l’a dit à Luc. Dans notre exposé nous utiliserons systématiquement cette procédure, qui présente le double avantage de produire des phrases brèves assez naturelles, et d’y faire apparaître la forme de la pronominalisation.



Inter P : proposition subordonnée interrogative introduite par quand, où, pourquoi, comment, etc. Ex. Max ne comprend pas pourquoi Luc est parti.



LUI-ap = lui, leur. Antéposé, il est placé avant le verbe et sans la préposition ; lui et leur valent pour le féminin aussi bien que pour le masculin.



LUI-pp : = lui, elle, eux, elles. Postposé, il est placé après le verbe et précédé de la préposition.



N0 : groupe nominal sujet du verbe, sans influence sur le choix du substitut de N1 ou de N2. Nous rencontrerons cependant des verbes impersonnels pour lesquels N0 = il (il s’agit de, il faut, etc.). Ex. Il a fallu du courage à Léa.



N1 : groupe nominal objet, qui peut être « direct », à savoir sans préposition entre V et N1, ex. Max aime Léa, ou « indirect », c-à-d. avec préposition entre V et N1, ex. Max parle à Luc.



N2 : certains verbes exigent ou admettent un deuxième groupe nominal objet, celui-ci alors forcément « indirect », le français n’admettant pas deux compléments directs, ex. Max a donné de l’argent à Luc.



Nh : nom d’humain (Max, Luc, Léa, le coiffeur, le facteur, etc.)



N-h : nom de non-humain, concret (table, chaise, voiture, etc.) ou abstrait (politique, musique, etc.).



Prep : toute préposition autre que à et de.

Notes :

1. La préposition de lieu en est une variante de à devant les noms de lieux féminins sans articles (en France, à La Martinique).

2. On verra que l’extraction peut transformer certaines prépositions, sur devenant dessus, dans devenant dedans, etc. La grammaire traditionnelle donne à cette nouvelle forme l’appellation d’ « adverbe ». Ce n’est pas une position infondée mais comme il s’agit de cas particuliers et non du cas général, nous préfèrerons quant à nous parler de « variante de la préposition due à l’extraction », ex. La peine de mort, Max est contre. Votre rapport, je m’assois dessus.



que P(subj) : propositions subordonnées complétives dont le verbe est à l’indicatif (ou au subjonctif). Elles peuvent, selon les verbes principaux, occuper les places de N0, N1 ou N2.



V : verbe, dont la forme peut être simple (aimer), pronominale (se souvenir), ou composée (en vouloir à qqn de qqch).

Notes :

1. On verra que la forme de V n’est pas sans incidence sur le choix du substitut ou même sur la possibilité qu’il y en ait un.

2. Nous préférons, à l’instar de M. Gross, le terme de “verbe composé” à celui de “locution verbale”.



Vinf : infinitif. Peut occuper, selon les constructions du verbe principal, les places de N0, N1 ou N2.



X : mot ou groupe de mots présents ou facultatifs, et sans incidence sur la pronominalisation.



: l’astérisque placé devant une phrase signifie que cette phrase n’est pas possible. Par exemple : * La fin, Max a commencé par.



? : le point d’interrogation placé devant une phrase signifie que cette phrase est douteuse.





Petite bibliographie





– Gross (M.), Méthodes en syntaxe : régime des constructions complétives, Paris, Hermann, 1975.

– Gross (M.), Grammaire transformationnelle du français, 1 - Syntaxe du verbe, Paris, Cantilène, 1986 (réédition).

– Gross (M.), Grammaire transformationnelle du français, 2 - Syntaxe du nom, Paris, Cantilène, 1986 (réédition).

– Le Goffic (P.) et Combe-Mac Bride (N.), Les constructions fondamentales du français, Paris, Hachette-Larousse, 1975.

– Maillard (J.-P.) et Célérier (P.), Dictionnaire des structures fondamentales du français, Paris, Cle international, 1979.

– Réquédat (F.), Les constructions verbales avec l'infinitif, Paris, Hachette, 1980.









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