Alcotest

 

 

             Pendant la Féria de Pentecôte 1993 nous avons pu disposer de cinquante ballons, afin de tester le degré d’alcoolémie. Un achat en gros suivi d’une petite opération commerciale de revente des excédents aux élèves du lycée, a permis l’autofinancement de cette activité.

            Ainsi, le samedi de Pentecôte entre 21 heures et 22 heures, nous nous postons à proximité d’une zone de stationnement et à bonne distance du dernier bistrot. Nous proposons de souffler dans les ballons aux conducteurs qui s’apprêtent à prendre leur voiture. Il est clair que nous ne sommes pas de la police, et rares sont les personnes qui refusent. Sur 25 personnes qui s’apprêtaient à quitter la Féria au volant de leur automobile, 6 ont fait virer le test : 4 dépassant à peine la limite impartie et 2 la dépassant largement (le test affiche une couleur verte sur toute la longueur).

 

Dessin Eddie Pons

 

             Mais à cette heure-là, la Féria ne bat pas son plein. C’est pourquoi nous retournons dans le même secteur au milieu de la nuit, entre 2 heures et 3 heures du matin. Cette fois notre professeur nous accompagne, inquiet des rencontres que nous pourrions faire. Il s’est sans doute inquiété en vain, car tout le monde s’est montré très coopératif. L’ambiance était au rendez-vous, notre groupe constituant un véritable pôle d’attraction : chacun voulait se tester, et les plus imprégnés d’alcool tenaient souvent à garder le test en souvenir. Sans parler des femmes qui contraignaient leur mari à passer le test et, au vu des résultats, décrétaient que c’étaient elles qui prendraient le volant. Nul doute qu’avec un peu plus de sens du commerce nous aurions pu vendre nos tests trois fois leur prix.

            Comme on pouvait l’imaginer, les résultats indiquent un plus fort taux d’alcoolémie qu’auparavant. Sur 25 personnes testées à ce moment-là, 8 tests seulement ne virent pas, 3 atteignent la limite prescrite, 7 dépassent significativement celle-ci, et 6 sont saturés. A noter que nous avons testé deux chauffeurs femmes, et que leurs résultats montraient qu’elles ne s’étaient pas contentées de soda !

            Signalons toutefois que nous nous posons des questions sur la fiabilité des tests. Une personne, ayant bu seulement deux pastis tout en mangeant un sandwich, voit le test se colorer au-delà de la limite prescrite lorsqu’elle souffle un quart d’heure plus tard, comme le préconise la notice. Alors qu’une autre personne atteignait à peine la limite, quand elle avait bu en l’espace de deux heures trente les quantités d’alcool suivantes : 2 sangrias, 2 whiskies, 2 pastis et une canette de bière et qu’elle était visiblement hors d’état de conduire un véhicule. Par ailleurs nous avons constaté à plusieurs reprises que des tests qui se trouvaient colorés en vert aux environs du trait marquant la limite, devenaient totalement verts au bout d’un certain temps, parfois au bout de quelques minutes seulement. Nous avons signalé cela à la société “ agréée ” qui produit les tests. La réponse n’a pas été de nature à nous convaincre. On nous explique entre autres que des mies de pain “ interdentaires ” fonctionneraient comme éponge et fausseraient le résultat... La notice n’indiquait pas qu’il fallait aussi se munir de brosses à dents.

 

       Sandrine Berthézène et  Sonia Clément, avec l’assistance nocturne de Laure Pradal.

 

Source : La Féria de Nîmes, tome 1, éd. AL2, 1994. Sous la direction de R Domergue

 

 

 

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