Les Pieds-Noirs invisibles

 

 

 

            L’ampleur de la diversité pied-noire échappe totalement aux gens d’ici.

            Un élément de réponse se trouve probablement dans le fait que les Pieds-Noirs qui sortent du stéréotype ne sont généralement pas repérés, donc pas étiquetés comme tels, par les gens d’ici.

            « Vous vous intéressez aux Pieds-Noirs ? On vous en fera connaître, et des bons. » « J’ai un ami Pied-Noir, un vrai, je vous le présenterai. » « Mon amie a une cousine pied-noire, une vraie de vraie. » « Dans l’appartement au-dessus, il y avait un Pied-Noir plus que Pied-Noir. »

 

 

Comment reconnaître un Pied-Noir ?

 

            S’il y a de vrais Pieds-Noirs, des vrais de vrais, c’est donc qu’existent aussi de faux Pieds-Noirs. J’ai fini par en rencontrer. La première fois, c’était dans un lycée gardois. Après une brève discussion avec Madame le Proviseur, elle m’informe qu’elle est pied-noire. Rien dans son accent, dans son apparence ni dans ses manières ne permettait de s’en douter. « Je suis une Pied-Blanche ! » commente-t-elle, en souriant.

            A mon lycée, en vingt ans, j’avais identifié quelques collègues pieds-noirs, notamment du fait de leur accent et de leur gestuelle. En quelques mois, à force d’évoquer le sujet, je découvre cinq autres collègues. Autrement dit, la plupart des Pieds-Noirs enseignant au lycée sont quasi indécelables. Cela suggère que la représentation usuelle du Pied-Noir comme tchatcheur, exubérant, frimeur,... est largement fondée sur notre repérage du Pied-Noir d’après de tels critères. Celui qui n’y correspond pas passe inaperçu. Si par hasard on apprend son origine, il est alors plus ou moins consciemment classé comme ‘atypique’, et il viendra rarement à l’idée de le proposer comme exemple.

 

Source : René Domergue, L'intégration des Pieds-Noirs dans les villages du Midi, éd.L'Harmattan, 2006, pp. 96-97

 

 

 

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