Per nous souvéni
Poème écrit pour être récité par l’auteur à l’occasion de ses retrouvailles avec des amis de jeunesse, de Montpezat et des villages voisins, notamment Combas.
Pour nous souvenir
Pour qu’on ne s’oublie pas, notre bande d’amis
Un jour a décidé de se réunir ici.
Depuis, de temps en temps, ou même une fois par an,
Autour d’un bon repas, tous nous nous retrouvons,
Nous rappelant le temps où dans ce café
On dansait et parfois dé fès on buvait un coup de trop
Ce qui faisait dire à nos vieux parents
Qu’on était des gros noceurs ou des bons à rien.
Il faut comprendre qu’à vingt ans, on avait tous le droit
De boire un petit coup, il s’agit de repartir droit.
Même si c’est un peu tard, je luis dit sans vergogne
Que dans toute la bande on ne trouverait pas un ivrogne.
Si à la fin du repas un des nôtres est content
Ça ne peut que nous rappeler que c’était le bon temps
Et dans cent ans à dater d’aujourd’hui qui se rappellera quaou cé rapélara
Si j’étais à jeun à Pâques et ivre à Noël.
et a Noué banda
Pour ne pas aimer le bon vin, il faut être un imbécile tarnagas
Il n’y a rien de mieux pour guérir un gros rhume. roumas
Pour un jour on laissera le régime à la porte
Tant pis pour le médecin, que le diable l’emporte.
Passer notre vie à boire du bouillon
Pour vivre un jour de plus, il faut être un couillon.
Il en manquera toujours quelques-uns à l’appel.
Peut-être que dans la bande il n’y a pas un seul immortel.
Mais, il ne faut pas penser qu’un jour ça pourrait finir
Même s’il n’en restait qu’un, il faudrait se réunir.
Il dansera, il chantera, il racontera des histoires
Qu’il pourra retrouver au fond de sa mémoire.
Il n’aura qu’à chanter au vent à pleine voix
Les fables qu’on faisait dans notre beau patois.
Personne ne comprendra plus un mot de ce que je dis
Car tout le monde parlera pointu comme au temps des marquises.
Si quelqu’un le voit faire, il dira : Il est pas bien le papet
Mais il y a bien plus de chances que ce soit une mamet.
Il pensera dans sa tête, Mon Dieu quelle misère
quanta débina
Cette pauvre vieille s’est enivrée. a carga sa mounina
Mais ne vous en faites pas, on n’en est pas encore là, pas encara aqui
Ceux qui espèrent l’héritage n’ont pas fini de souffrir. pas fini de pati
Et en fait d’héritage, pourquoi on en laisserait
Ils n’ont pas que suer, comme nous avons fait.
Du travail, dans le temps, on en a fait notre part.
On se levait matin, même si on s’était couché tard.
Dès le lever, c’était le festival
Il fallait nettoyer cura l’étable, étriller le cheval
À peine on avait fini de déjeuner
Qu’il fallait atteler la charrette
atala la bouta (tonneau)
et aller
sulfater.
Ça c’était pénible, à cette époque la machine
la matina
On ne l’avait pas sous le cul, mais bien sur les épaules.
l’esquina
Les jeunes aujourd’hui se promènent en tracteur,
Ils ne sauraient plus rien faire sans un moteur.
Pour aller au travail, il n’y a pas toujours la place
Mais ils trouvent bien un moment pour aller à la chasse.
De parler ainsi mérite une grosse gifle. eun atous
Disons la vérité, d’eux je suis jaloux siei dialous
Car, je pense, au sens propre comme au sens figuré
Qu’il n’y a que les couillons qui aiment de travailler.
Montpezat 1980