3.9. LE VERBE 3.9.1. Conjugaison subjective et conjugaison objective En hongrois, la plupart des verbes ont deux conjugaisons : l’une subjective et l’autre objective, marquée chacune par une série de suffixes personnels. La conjugaison subjective est utilisée quand le verbe n’a pas de complément d’objet direct (par exemple, Jól látok. « Je vois bien. ») ou lorsque le COD n’est pas déterminé par un article défini, un adjectif démonstratif, un suffixe possessif, etc. (Két gyereket látok. « Je vois deux enfants. »). La conjugaison objective s’emploie lorsque le verbe ou un verbe à l’infinitif subordonné au premier a un COD de la 3e personne déterminé par un article défini, un adjectif démonstratif, un suffixe possessif, etc. : Látom a gyerekeket. « Je vois les enfants. » ; Látom azokat a gyerekeket. « Je vois ces enfants-là. » ; Látom a gyerekeidet. « Je vois tes enfants. » 3.9.2. Les modes personnels Voici un verbe régulier aux modes personnels et aux deux conjugaisons :
Remarques : a) Les modes impératif et conditionnel se distinguent à l’aide de ce qu’on appelle « marques » : j pour l’impératif, na/ná/né pour le conditionnel. Le passé aussi porte une marque, t. Ces marques, en souligné dans le tableau, se placent avant les suffixes personnels qui, eux, sont en gras. Des voyelles de liaison sont nécessaires pour éviter les associations de consonnes impossibles à prononcer en hongrois. Ces voyelles sont en rouge dans le tableau. Comme dans le cas des autres parties du discours, les suffixes, les marques et les voyelles de liaison s’harmonisent avec la/les voyelle(s) du radical. b) Il y a plusieurs classes de conjugaison, ainsi que de nombreux verbes irréguliers. Une classe importante est celle des verbes au suffixe ik à la 3e personne du singulier. Ceux-ci ont des suffixes personnels spécifiques à l’indicatif présent singulier, mais seulement à la conjugaison subjective : eszem « je mange », eszel « tu manges », eszik « il/elle mange » ; dolgozom « je travaille », dolgozol « tu travailles », dolgozik « il/elle travaille ». c) En hongrois, il n’y a plus qu’une seule forme de passé (au XIXe siècle il y en avait encore plusieurs). Il peut correspondre au passé composé, à l’imparfait, au passé simple ou au plus-que-parfait français, selon le contexte et selon l’existence ou non d’un préverbe (voir 3.9.5. Préverbes). d) Contrairement au franaçais, l’impératif hongrois à toutes les personnes, ayant aussi les valeurs du subjonctif. e) A la conjugaison objective, le suffixe personnel correspond au pronom personnel COD de la 3e personne. Par conséquent, il anticipe ou reprend un nom remplissant la fonction de COD : Kaptam egy csomagot. Hol vehetem át? « J’ai reçu un colis. Où je peux le prendre ? » f) Si le verbe a pour COD un pronom personnel de la 1ère ou de la 2e personne du singulier ou du pluriel, on utilise la conjugaison subjective. Le verbe à la 1ère personne du singulier reçoit un suffixe spécial, lak/lek pour le COD de la 2e personne. Celui-ci rend même possible l’omission du pronom personnel de la 2e personne : Várlak (titeket). « Je vous attends (, vous). », Szeretlek (téged). « Je t’aime (, toi). » Ce n’est pas le cas à la 3e personne du verbe : Vár téged. « Il/Elle t’attend. », Szeretnek titeket. « Ils/Elles vous aiment. » g) L’action effectuée par un sujet indéfini est exprimée à la 3e personne du pluriel : Megláttak minket. « On nous a vus. » 3.9.3. Les modes impersonnels Aux modes impersonnels on ne fait pas la distinction subjectif/objectif. 3.9.3.1. L’infinitif Il se forme du radical du verbe + le suffixe ni. Il n’est pas considéré comme la forme de base du verbe, c’est pourquoi ce n’est pas l’infinitif qui donne le mot vedette dans les dictionnaires, mais la forme de la 3e personne du singulier de l’indicatif présent, qui constitue d’ordinaire le radical du verbe, éventuellement précédé d’un préverbe. Ce mode a souvent les mêmes emplois qu’en français : – action subordonnée effectuée par le même sujet que celui du verbe principal : Nem tudok úszni. « Je ne sais pas nager. » ; – action subordonnée dont le sujet est indéfini : Itt kell maradni. « C’est là qu’il faut rester. » Si le verbe principal est kell « il faut », illik « il convient » ou une construction où le verbe « être » ne peut être utilisé, mais il est sous-entendu (avec des adjectifs tels que szabad « permis », szükséges « nécessaire », felesleges « inutile », fontos « important », etc.), on peut utiliser l’infinitif avec des suffixes personnels. Il devient alors un mode personnel et il entre en concurrence avec l’impératif à valeur de subjonctif : Itt kell maradnom. (avec l’infinitif) = Itt kell, hogy maradjak. (avec l’impératif) « C’est là qu’il faut que je reste. » 3.9.3.2. Le participe présent Ce mode se forme avec le suffixe ó/ő ajouté au radical du verbe. Sa construction est équivalente à la proposition participe ou infinitive française (Nézem a kertben játszó gyerekeket. « Je regarde les enfants jouant/jouer dans le jardin. ») ou à celle de la subordonnée relative introduite par « qui » (Elküldtem lefeküdni a tévét néző fiamat. « J’ai envoyé au lit mon fils qui regardait la télé. ») Le même suffixe forme des noms indiquant la personne qui effectue l’action du verbe correspondant (néző signifie aussi « spectateur »), ou l’endroit où une action a lieu d’habitude (kaszáló « pré », du verbe kaszál « faucher »). 3.9.3.3. Le participe passé En règle générale, il a la forme de la 3e personne du singulier de l’indicatif passé (Két helyet foglalt el. « Il/Elle a occupé deux places. »), ayant un emploi exclusivement adjectival (Ez a hely foglalt. « Cette place est occupée. ») 3.9.3.4. Le gérondif Ce mode se forme en ajoutant le suffixe va/ve au radical du verbe. L’un de ses emplois est similaire à celui du gérondif français (Kalapját levéve üdvözölt. « Il m’a salué en levant son chapeau. »), mais utilisé avec le verbe van « être », il a la valeur du participe passé, formant une construction passive : Az ajtó nyitva van. « La porte est ouverte. » 3.9.4. Catégories de verbes Les verbes actifs hongrois correspondent généralement aux verbes français à la voix active. Il y a aussi des verbes passifs, mais ils sont rarement utilisés. La voix passive du français a pour correspondant hongrois la construction composée du gérondif et du verbe van « être » : Az ajtó nyitva van. « La porte est ouverte. » La voix pronominale du français peut être exprimée de deux façons : a) Il y a des verbes réfléchis, formés avec des suffixes spécifiques : kozik/kezik/közik : Kereskedéssel foglalkozik. « Il/Elle s’occupe de commerce. » kodik/kedikködik : Gondolkodom valamin. « Je pense à quelque chose. » ózik/őzik : Elnyújtózott az ágyon. « Il/Elle s’est allongé(e) sur le lit. » b) La voix réfléchie peut aussi être exprimée avec les pronoms réfléchis, y compris le pronom réciproque, utilisés avec les verbes actifs : Megütöttem magam(at). « Je me suis fait mal. », Szeretjük egymást. « Nous nous aimons. » Outre les verbes actifs, passifs et réfléchis, il y a d’autres catégories de verbes, dont les plus importantes sont : Les verbes factitifs correspondent à la périphrase verbale française avec le verbe « faire » semiauxiliaire. En hongrois ils se forment avec les suffixes tat/tet (Házat építtetek. « Je fais construire une maison.) et at/et : Mosodában mosatom a fehérneműmet. « Je fais laver mon linge au pressing. » Verbes potentiels. Le hongrois possède deux verbes correspondant à « pouvoir ». Bír exprime la puissance donnée par la force physique ou psychique : Nem bírom felemelni ezt a bőröndöt. « Je ne peux pas soulever cette valise. » Tud comporte en plus le sens « réussir, arriver » : Akkor pihenek, amikor tudok. « Je me repose quand je peux. » Pour exprimer d’autres valeurs du verbe français « pouvoir », on utilise le suffixe hat/het qui forme des verbes appelés potentiels : Telefonálhatok az édesapádnak, ha akarod. « Je peux téléphoner à ton père, si tu veux. », Beszélhetsz. « Tu peux parler. » Les adjectifs formés à partir des verbes potentiels avec le suffixe ó/ő correspondent aux adjectifs français terminés en « -ble » : látható « visible », ehető « mangeable ». 3.9.5. Préverbes 3.9.5.1. Fonctions des préverbes Les préverbes sont des mots grammaticaux d’origine adverbiale, qui forment des mots composés avec les verbes. Ils ressemblent en quelque sorte aux préfixes que peuvent avoir les verbes français. L’une des fonctions de la plupart des préverbes est de changer en partie ou entièrement le sens des verbes. Par exemple, le verbe megy « aller » peut devenir avec des préverbes : bemegy « entrer », felmegy « monter », lemegy « descendre » kimegy « sortir », etc. Tous ces sens sont liés au sens du verbe de base, « aller », mais avec le préverbe össze, par exemple, le sens du verbe change totalement : A tej összement. « Le lait a tourné. » Les préverbes, en plus de leur fonction de changement de sens, font exprimer aux verbes le caractère accompli de l’action (en termes grammaticaux, ces verbes prennent l’aspect perfectif). Certains préverbes n’ont que cette dernière fonction, sans changer le sens du verbe. L’opposition perfectif – imperfectif est manifeste surtout au passé : Elgázolta egy kocsi, amikor dolgozni ment. « Il/Elle s’est fait renverser par une voiture quand il/elle allait à son travail. » Ici le verbe megy est dépourvu de préverbe, exprimant une action non accomplie, de la même façon que l’imparfait français. Par contre, dans la phrase Ma bementem dolgozni. « Aujourd’hui je suis allé(e) au travail. », en plus de la nuance de sens « déplacement vers un intérieur » qui, d’ailleurs, n’est pas présente en français, le verbe exprime une action accomplie, de la façon dont le fait par définition le passé composé français. Il y a aussi des verbes qu’on n’utilise pas sans préverbe, par exemple felhatalmaz « autoriser, accréditer ». 3.9.5.2. Les principaux préverbes Les préverbes ont d’ordinaire un sens originel concret, à côté duquel ils ont développé des sens plus ou moins éloignés du premier, en fonction du verbe avec lequel ils sont utilisés. Par exemple, be- exprime le déplacement vers un intérieur, ce qui est très évident dans bemegy « entrer », moins évident dans beiratkozik « s’inscrire » et nullement évident dans bevásárol « faire des achats ». D’autres préverbes :
3.9.5.3. Détachement des préverbes Dans certains cas, il est obligatoire de détacher le préverbe du verbe : a) Le verbe régent d’un infinitif, ainsi que l’auxiliaire du futur, est intercalé entre le préverbe et l’infinitif, à la forme affirmative : Be akarok menni. « Je veux entrer. », Be fogok menni. « Je vais entrer. » b) Le préverbe se détache et se place après le verbe dans les cas suivants : – à l’impératif : Menj be! « Entre ! », Azt mondta, hogy menjek be. « Il/Elle m’a dit d’entrer. » – dans les questions introduites par un mot interrogatif : Ki megy be? « Qui entre ? » – au négatif : Nem megyek be. « Je n’entre pas. » – quand on met en relief une autre partie de la phrase que le verbe : A házba megy be, nem a kertbe. « C’est dans la maison qu’il/elle entre, pas dans le jardin. », Én megyek be, nem ő. « C’est moi qui entre, pas lui/elle. » |
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