L’arrivée de l’eau dans les maisons

 

 

 

Jusqu'en 1954, on va chercher l'eau aux fontaines. Ici, le griffe, sur la place du village.

Carte postale - coll. Alain Bergogne

 

 

 

Pour s’aparer du cagnard

 

          Afin d’amener l’eau courante dans les maisons, des tranchées sont creusées à une profondeur de un mètre trente environ par des ouvriers, équipés de pics, pelles et marteaux-piqueurs, avec parfois l’assistance d’une pelle mécanique.

         C’est en 1954, je suis enfant et c’est la première fois que je vois actionner des marteaux-piqueurs, ce qui m’impressionne fortement. Je suis estabourdi (stupéfié) de voir ces ouvriers travailler l’après-midi, en plein été, « à la rage de la chaleur ». Certains, comme Ricardo, se mettent torse nu et gardent souvent une bouteille de bière à portée de la main. Les paysans n’ont pas de pareilles habitudes. « Ils tiennent pas à s'escaluder », à étouffer de chaleur sous le soleil, et, à deux ou trois heures de l’après-midi, « ils pénéqègent », ils font la sieste. Lorsqu’ils reprennent le travail, vers quatre ou cinq heures, heure du soleil, « ils enfilent une chemise pour s'aparer du cagnard (se protéger du soleil) ». Ils se désaltèrent avec de l’eau, aromatisée parfois « d’un fond » d’absinthe, d’antésite ou de vin. La bière ne se boit qu’au café. Or, non seulement les ouvriers du chantier survivent, mais encore ils déploient une énergie considérable armés de leurs marteaux-piqueurs. Assurément ce sont des êtres différents.

 

Source : R. Domergue, Des Platanes, on les entendait cascailler, éd.RD, p. 74

(Etude de la vie quotidienne dans un village du pays de Nîmes, Gard)

 

 

 

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