Chansons

 

 

            Quelles étaient les chansons habituellement chantées par les groupes de jeunes durant les férias du passé ? Quelqu’un nous répond : " Comment voulez-vous qu'on sache ce qu'on chantait ! On était bourré ! " Belle entrée en matière pour notre sujet !

            Combien savent aujourd’hui qu’en reprenant le traditionnel  Olé y olé " ils chantent la messe. En tout cas une messe espagnole dont les paroles sont : Dios te salue Maria, del Rocio Señora. Luna, sol, norte y guia y pastora celestial... " Je vous salue Marie, Dame du Rocio. Lune, soleil, nord et guide céleste.

            Il est vrai qu’en examinant les réponses trouvées dans les questionnaires proposés aux anciens, on a le sentiment que beaucoup ne devaient pas être très lucides, vu le peu de réponses pertinentes à ce sujet. Certes tout le monde évoque Chicuelo, qualifié même le "sempiternel Chicuelo" par un interviewé impitoyable, mais personne n’est en mesure d’en fournir les paroles. Pécaïre, on s'en souvient plus ", répondent en choeur les anciens. De mémoire de nîmois les paroles se sont toujours résumées à la lala lalala lala... ce qui, avouons-le, ne révèle pas un message très ambitieux. Au moins les paroles de Chicuelo n’ont pas été détournées ou même tournées en ridicule, au contraire d’un air encore plus célèbre à l’époque, Valencia, dont la traduction populaire n’a pas été effectuée avec une rigueur d’académicien ! Valencia ! les punaises sont à l’aise dans les trous des matelas... Valencia ! Les cafards sont en retards..." La traduction de l’espagnol donnerait : Valencia, terre des fleurs, de la lumière et de l’amour, Valencia, toutes tes femmes ont la couleur des roses.

            D’autres détournements célèbres ont bouleversé les chastes oreilles. A Nîmes, comme ailleurs, l’air célèbre de Carmen est devenu : Toréador, ton cul n’est pas en or,..." Hymne qui trouvait un écho lors des traditionnels monômes faits par les lycéens tout autour des boulevards lors des grandes occasions, donc lors des férias. Encastrés les uns dans les autres ils scandaient :J’ai ! J’ai ! J’ai quelque chose dans le cul qui m’empêche de marcher ! "

    Aux arènes, dans les années 60, lorsque le spectacle était lamentable ou simplement devenait languissant, résonnait : "Avé, avé, avé lo solex..." Ou, plus blasphématoire encore, "Avé, avé, avé le p'tit doigt !" Au grand dam des âmes bien pensantes !

            A côté de ces airs teintés de lubricité, à chaque époque ont été repris les tubes du moment. Vers 1960 c’était, nous dit-on, Riquita, de Georgette Plana,  Amor, Amor, des Machucambos, La marmite, de Dario Moréno ou encore Cuando calienta el sol d’Aimable. Tout comme aujourd’hui on reprend en coeur  Mets de l’huile, les chansons des Gipsy Kings, ou encore des airs habituels des stades de foot comme Ce soir on vous met le feu !

            Enfin, Féria oblige, des chansons à boire ont toujours été chantées, ou plutôt braillées, en choeur. Toutefois on est passé de La rincette, la rincette, c’est un vin qui nous monte à la tête... ", à 51, je t’aime ! J’en boirais des tonneaux... " Un interlocuteur nous explique qu’il faut voir là " l'expression du passage d'une société encore centrée sur la viticulture et la culture régionale, à une société où les paysans ont disparus et où le vin n'est plus la référence."  Mais ailleurs quelqu’un nous dit : " On chantait la Rincette en buvant des pastis." C’est donc plus compliqué. Rupture culturelle ou continuité ? Le débat est ouvert !

 

                                                Nicolas Albert et Stéphane Bénilsi.

 

Source : La Féria de Nîmes, tome 2, éd. AL2, 1996. Sous la direction de R Domergue

 

 

 

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