grammaire roumain  





4. LEXIQUE


4.1. FORMATION DES MOTS


4.1.1. Dérivation


En roumain, la dérivation est un moyen très productif de formation des mots, tout comme en français.


4.1.1.1. Préfixes


Il y a plus de 80 préfixes lexicaux qui forment :


– des verbes à partir d’autres verbes : dez- + a moşteni « hériter » > a dezmoşteni « déshériter » ;


– des adjectifs à partir d’autres adjectifs : stră- + vechi « ancien » > străvechi « très ancien » ;


– des noms à partir d’autres noms : stră- + moş « vieillard » > strămoş « ancêtre » ;


– des verbes à partir d’adjectifs : în- + dulce « doux, sucré » > a îndulci « rendre doux, sucrer » ;


– des verbes à partir de noms : în- + noapte « nuit » > a înnopta « passer la nuit ».


4.1.1.2. Suffixes


Les suffixes sont beaucoup plus nombreux que les préfixes (500 environ). Ils provoquent souvent des changements phonétiques dans le mot de départ.


Du point de vue du sens des dérivés, il y a des suffixes :


– augmentatifs : băiat « garçon » + -an > băietan « grand garçon », piatră « pierre » + -oi > pietroi « grosse pierre » ;


– diminutifs : copil « enfant » + -aş > copilaş « petit enfant », ramură « branche » + -ea > rămurea « branchette », aripă « aile » + -ioară > aripioară « petite aile », viţel « veau » + -uş > viţeluş « petit veau », casă « maison » + -uţă > căsuţă « maisonnette », urs « ours » + -uleţ > ursuleţ « ourson », brad « sapin » + -uţ > brăduţ « petit sapin » ;


– formateurs de noms d’agents : moară « moulin » + -ar > morar « meunier », căruţă « charrette » + -aş > căruţaş « charretier », camion + -agiu > camionagiu « chauffeur de camion », munci « travailler » + -tor > muncitor « travailleur, ouvrier » ;


– formateurs de noms abstraits : singur « seul » + -ătate > singurătate « solitude », om « homme » + -ie > omenie « humanisme », plictisi « ennuyer » + -eală > plictiseală « ennui », cuteza « oser » + -anţă > cutezanţă « audace », isteţ « perspicace » + -ime > isteţime « perspicacité » ;


– formateurs de noms collectifs : fag « hêtre » + -et > făget « forêt de hêtres », muncitor « ouvrier » + -ime > muncitorime « ensemble des ouvriers », stejar « chêne » + -iş > stejăriş « chênaie », porumb « maïs » + -işte > porumbişte « champ de maïs ».


Suffixes qui changent la catégorie grammaticale des mots :


– formateurs de noms : ajuta « aider » + -tor > ajutor « aide » ;


– formateurs d’adjectifs : părinte « parent » + -esc > părintesc « parental », aur « or » + -iu > auriu « doré », inel « anneau » + -ar > inelar « annulaire », argilă « argile » + -os > argilos « argileux » ;


– formateurs d’adverbes : român « roumain » + -eşte > româneşte « en roumain », a se târî « ramper » + -âş > târâş « en rampant » ;


– formateurs de verbes : brazdă « sillon » + -a > a brăzda « sillonner », prost « bête » + -i > a se prosti « devenir bête », român « roumain » + -iza > româniza « roumaniser », bici « fouet » + -ui > a biciui « fouetter ».


4.1.1.3. Dérivés parasynthétiques


Ce sont des mots formés à la fois avec un préfixe et un suffixe : în- + bătrân « vieux » + -i > a îmbătrâni « vieillir », dez- + onoare « honneur » + -at > dezonorat « déshonoré », ne- + ruşine « honte » + -at > neruşinat « sans gêne ».


4.1.2. Composition


C’est un procédé de formation très peu productif en roumain, tout comme en français. De plus, il diffère de celui des langues germaniques, par exemple, dans la mesure où les mots composés sont des syntagmes à l’origine.


Certains mots composés s’écrivent en un seul mot : cumsecade « brave, bon, honnête » (de cum se cade « comme il convient »), binecunoscut (de bine cunoscut « bien connu »), răuvoitor (traduisible élément par élément par « malveillant »), atotştiutor « omniscient » (de a tot ştiutor « de tout sachant ») niciun « aucun » (de nici un « ni un ») doisprezece « douze » (de doi « deux » spre « vers » zece « dix »).


D’autres mots composés sont assemblés à l’écrit par un trait d’union : floarea-soarelui « tournesol » (littéralement « la fleur du soleil »), du-te-vino « va-et-vient » (litt. « va-t’en viens »), bloc-turn « tour » (litt. « grand immeuble tour »).


Un procédé de formation de mots situé entre la dérivation et la composition est celui avec ce qu’on appelle des « éléments formants ». Ils sont tous empruntés par le roumain et utilisés avec des emprunts ou, parfois, avec des mots roumains anciens : autoapărare « autodéfense », pseudopatriot « faux patriote », microbus « minibus ».


4.2. EMPRUNTS


Le roumain est très perméable aux emprunts et ce depuis toujours. Sont considérés comme des emprunts les mots qui ne sont hérités ni du substrat dace ni du latin. Dans la première période de son histoire, le roumain a pris des mots des langues suivantes :



– du slave ancien : babă « vieille femme », bogat « riche », ceas « heure, montre », milă « pitié », muncă « travail », slab « maigre, faible », vesel « gai », veste « nouvelle » (au sens d’information) ;


– du hongrois : belşug « abondance », chip « visage », gazdă « hôte » (qui reçoit), meşteşug « métier », neam « clan, peuple », oraş « ville », uriaş « géant », vamǎ « douane » ;


– du grec moderne : cais « abricotier », ieftin « bon marché », mătase « soie », folos « utilité, bénéfice », icoană « icône », molipsi « transmettre une maladie », politicos « poli » ;


– du turc : acadea « berlingot », cafea « café », chef « envie, désir », chiftea « boulette de viande », chirie « loyer », ciorbǎ « soupe, potage », iaurt « yaourt ».


À partir du milieu du XVIIIe siècle, le lexique roumain s’est beaucoup enrichi et modernisé surtout par des emprunts des langues occidentales :


– du latin savant : fabulă « fable », familie « famille », jurisdicţie « juridiction », literă « lettre » (au sens de caractère), rege « roi », tezaur « trésor », virtute « vertu » ;


– de l’italien : contabil « comptable », capodoperă « chef-d’œuvre », traumă « traumatisme » (psychique), stagiune « saison théâtrale » ;


– de l’allemand : abţibild « autocollant », crenvurşt « petite saucisse », glaspapir « papier émeri », laimotiv « leitmotiv », rucsac « sac à dos » , şurub « boulon » ;


– de l’anglais : aut « hors du terrain », dribla « dribler », lider « dirigeant », ofsaid « hors jeu » ;


– du russe : exponat « objet exposé dans un musée, une exposition », procuratură « parquet » (les procureurs) ;


Le français occupe la première place parmi les langues dont le roumain a emprunté des mots, puisque ceux-ci représentent 22,12% du lexique roumain : afiş, automobil, infatigabil, metabolism, monolog, restaurant. Il y a non seulement des noms et des adjectifs français en roumain, mais aussi des adverbes (deja, vizavi).


L’influence de l’américain est celle qui se manifeste avec la plus grande vigueur de nos jours, mais elle n’a pas commencé récemment : blugi « blue-jean », cowboy, fair-play, jazz, hobby, management, marketing, mass-media, show, speech, stres, tobogan, week-end.


Le degré d’assimilation des emprunts n’est pas uniforme. La plupart se prononcent et s’écrivent à la roumaine, étant intégrés au système flexionnaire du roumain, mais il y en a aussi qui se prononcent et s’écrivent comme dans la langue d’origine. Tel est le cas de mots américains comme ceux ci-dessus, ou même de quelques mots français. Ainsi, bien que la voyelle [ø] n’existe pas en roumain, le mot bleumarin, il faut le prononcer [blømarin].


Les emprunts ont remplacé des mots, mais les cas où des paires de synonymes plus ou moins partiels se sont créés ne sont pas rares :


a băga de seamăa observa « remarquer, observer » ;


a-i părea rău a regreta (plus soutenu) « regretter » ;


a sfătuia consilia (soutenu) « conseiller » ;


a ţine isonul (emploi devenu péjoratif) – a secunda (soutenu) « seconder » ;


a asupria oprima (soutenu) « opprimer » ;


a linguşia flata (soutenu) « flatter » ;


a năzui (devenu soutenu) – a aspira « aspirer à » ;


a făgădui (devenu soutenu) – a promite « promettre ».


4.3. CALQUE LEXICAL


4.3.1. Calque sémantique


Il consiste à enrichir les sens d’un mot existant dans la langue par un sens nouveau, emprunté à une autre langue. Par exemple, le mot roumain cerc « cercle », a acquis, à côté de son sens premier concret, le sens figuré qu’il a en français, par exemple dans cerc de prieteni « cercle d’amis ».


Il se forme parfois des doublets d’un mot emprunté et d’un mot calqué : extinctorstingător, sentimentsimţământ.


4.3.2. Calque lexical de structure


Ce calque peut être total, lorsqu’il consiste à former un mot nouveau avec des éléments autochtones, mais en imitant la structure interne d’un mot étranger : cal-putere « cheval-vapeur » (de cal « cheval » et putere « puissance »), a întrezări (de între « entre » + zări « apercevoir »), locţiitor « adjoint » (de loc « lieu » + ţiitor « tenant »), nou-născut (de nou « nouveau » + născut « né »), a supraveghea (de supra- « sur- » + veghea « veiller »), dreptunghi « rectangle » (de drept « droit » + unghi « angle »).


Le calque lexical de structure peut aussi être partiel, si l’un des éléments du mot est autochtone et l’autre emprunté. C’est le cas de viitorologie (de viitor « futur » + l’élément formant -logie, emprunté au français), a surprinde (du français « sur- » + prinde « attraper »).













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