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Piroska
Inscrit le: 13 Sep 2005 Messages: 1067 Lieu: Basse-Marche (France)
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écrit le Monday 14 Apr 08, 9:26 |
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Cette fameuse phrase de résistant de Victor Hugo s'est répétée depuis par des quantités d'hommes se déclarant rester fidèles à une idée, une règle, une coutume etc.
Le jour où j'ai voulu la prendre à mon compte, j'ai dû y renoncer, car il me paraissait impossible de la dire au féminin. Et pourtant, une femme est, j'en suis sûre, aussi capable qu'un homme de rester fidèle à qc., même si tout le monde l'abandonne.
Alors…
Si je disais :
S'il n'en reste qu'un, je serai celle-là n'aurait aucun sens.
Si je disais :
S'il n'en reste qu'une, je serai celle-là voudrait dire qu'il peut en rester deux; l'autre serait un homme.
Que diriez-vous ? |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 14 Apr 08, 9:48 |
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Je pencherais pour « S'il n'en reste qu'un, je serai celle-là » qui ne me choque qu'au premier jet. Deux arguments.
Je crois que « un [homme] » est à prendre au sens englobant de l'humanité (grec ánthropos, all. Mensch) et qu'il ne s'agit donc que d'une inclusion de catégorie, de la même façon que « si un seul mammifère survit à l'apocalypse, ce sera le rat ».
N'oublions pas que la femme est un homme comme les autres …
La rupture d'accord grammatical, par son aspect provocant, met en évidence la singularité de cette femme qui est le seul être à résister alors que tous les hommes se sont résignés.
Je crois que la langue accepte dans ses usages littéraires qu'un signifié surgisse du mépris de la règle. Nombreux sont ceux qui pensent que la loi n'a d'autre fonction que de mettre la transgression en évidence ! |
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semensat
Inscrit le: 20 Aug 2005 Messages: 863 Lieu: vers Toulouse
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écrit le Monday 14 Apr 08, 9:58 |
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L'idée d'Outis n'est pas mauvaise. J'avais pensé dans un premier temps à la formulation s'il n'en reste qu'un, ce sera moi, qui gomme le désaccord grammatical entre les deux côtés de la phrase, puisque "un" et "moi" peuvent être pris comme des neutres. C'est également la formulation que j'utiliserais le plus naturellement. Et si on est à l'oral, on peut utiliser l'artifice de prononcer un -n à la fin de un, sans trop articuler, ce qui permet de laisser le doute sur le genre de la première partie. |
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Piroska
Inscrit le: 13 Sep 2005 Messages: 1067 Lieu: Basse-Marche (France)
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écrit le Monday 14 Apr 08, 10:53 |
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Merci, merci… mais… bon, d'accord…
Hm… bien que convaincue, je ne suis pas parfaitement satisfaite de la solution d'Outis, mais je suppose que c'est parce que, en tant qu'étrangère, je m'attache toujours trop à l'exactitude grammaticale.
Il me paraît curieux quand même que ce soient deux hommes qui aient répondu à ma question.
Qu'aurait dit une Franco-Française francophone spontanément, sans réfléchir ?
Je sais bien aujourd'hui qu'il ne faut pas trop de rigueur académique.
Je l'ignorais quand je suis arrivée à Paris à 21 ans.
Je faisais encore très attention à bien parler français et j'étais parfaitement stupéfaite un jour, où, ayant eu assez d'attendre l'arrêt d'un flot de circulation automobile sur le quai de la Seine, j'ai entrepris à traverser en faufilant entre les véhicules, lorsqu'un agent m'a attrapée par le bras, disant :
Citation: | Mademoiselle, il ne faut pas traverser comme ça… attention, parce que les voitures ne s'arrêtent pas, eux ! |
Les voitures, c'était en fait les automobilistes, et l'agent a fait une synecdoque, tout simplement.
Mais pour moi, ce n'était pas correct. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 14 Apr 08, 14:12 |
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Mon épouse (prof de français), française native (Lyon), interrogée avec contrainte de non-réflexion a immédiatement répondu :
« Et s'il n'en reste qu'une, je serai celle-là »
Discutant ensuite, elle accepte ma suggestion mais préfère sa version où elle considère comme négligeable la possibilité qu'il reste aussi quelques mâles. Finalement, elle n'a pas tort … |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10945 Lieu: Lyon
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écrit le Monday 14 Apr 08, 14:48 |
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En lisant le 1er post de Piroska sans lire le reste, j'ai spontanément pensé :
- s'il n'en reste qu'un (= être humain), ce sera moi
Piroska a écrit: | Je sais bien aujourd'hui qu'il ne faut pas trop de rigueur académique. |
C'est justement aujourd'hui qu'il en faut, plus que jamais ! La rigueur du langage, c'est peut-être en 2008 ce qu'il y a de plus subversif. Et dans ce domaine, s'il n'en reste qu'un...nous serons plusieurs . |
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Piroska
Inscrit le: 13 Sep 2005 Messages: 1067 Lieu: Basse-Marche (France)
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écrit le Monday 14 Apr 08, 16:08 |
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C'est tout à fait amusant, ce qu'a dit votre épouse, Outis, et très encourageant pour moi.
J'y avais pensé aussi : s'il ne reste qu'une femme à faire ceci ou cela, je serai celle-là…, et peu me chaut alors qu'il reste aussi quelques mâles… .
Mais si ces mâles étaient des milliers, c'est mon unicité parmi les femmes qui serait mise en avant, ce qui fausserait les statistiques.
@José, ce que je voulais dire c'est que contrairement à l'époque où j'avais 21 ans, aujourd'hui, je ne crois plus qu'il faille avoir trop de rigueur académique pour être accepté(e) comme vrai(e) francophone. Sinon, je reste subversive, bien sûr, même si nous sommes plusieurs. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 14 Apr 08, 17:27 |
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Je crains que le sentiment de mon épouse n'ait été ici dépassé. Son avis était plus linguistique que sexiste.
Il est bien possible que supposer des mâles restant avec la dame, en prenant la formulation féminine « et s'il n'en reste qu'une, je serai celle-là » au pied de la lettre, en logique rigoureuse, ne vienne pas à l'esprit de tout le monde et qu'un tel sens nécessiterait au contraire une formulation explicite « et s'il ne reste qu'une femme, je serai celle-là ».
Les langues humaines sont par nature ambiguës mais l'usage est de lever les ambiguïtés en considérant, par défaut, le sens le plus naturel, celui impliqué par le contexte.
À la réflexion, d'ailleurs, je pencherais toujours vers mon premier choix, le contexte éclairant bien que « un », comme « dix », n'est pas à accorder :
S'il en demeure dix, je serai la dixième ;
Et s'il n'en reste qu'un, je serai celle-là ! |
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Glossophile Animateur
Inscrit le: 21 May 2005 Messages: 2281
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écrit le Monday 14 Apr 08, 18:15 |
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¨Personnellement, je miserai sur le caractère généralisant du masculin :
S'il n'en reste qu'un, je serai celui-là !
Celui qui reste, et peu importent ses organes génitaux. |
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Sido
Inscrit le: 14 May 2006 Messages: 139 Lieu: Orléans
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écrit le Monday 14 Apr 08, 18:33 |
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Sans réfléchir et sans hésitation :"S'il n'en reste qu'une, je serai celle-là" |
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Piroska
Inscrit le: 13 Sep 2005 Messages: 1067 Lieu: Basse-Marche (France)
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écrit le Monday 14 Apr 08, 19:11 |
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Je suis ravie de voir que ce n'est pas un faux problème que je me suis posé au départ.
J'ai appris, à un de mes premiers cours de français (il y a 55 ans) qu'en cette langue, on n'emploie le pluriel féminin que s'il n'y a que des femmes : dès qu'il y a un seul homme, on emploie le masculin.
Excusez-moi, mais pour les natifs d'une langue comme le hongrois, qui ne connaît pas le genre grammatical, il n'y a que deux façons d'assimiler une telle absurdité.
Si l'on rejette une explication sexiste (= 1 homme compte plus que 100 femmes), il faut considérer le masculin comme neutre.
Cela donnerait raison à Glossophile, même si ici, c'est le singulier… mais comme je suis une femme, j'aurais vraiment du mal à dire que je suis celui-là.
Donc, la solution d'Outis me semble la plus proche d'une logique naturelle et cependant, je suis sûre que le jour où je prononcerai la phrase Et s'il n'en reste qu'un, je serai celle-là !, les Français autour de moi ouvriront de grands yeux. |
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Sido
Inscrit le: 14 May 2006 Messages: 139 Lieu: Orléans
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écrit le Monday 14 Apr 08, 21:32 |
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Cette règle qui consiste à employer le masculin pluriel dès qu'il y a un homme dans une énumération est en effet absurde. Je ne sais pas comment cette règle est expliquée actuellement dans les écoles primaires, mais "à mon époque", nous devions nous satisfaire de la formule lapidaire "c'est le masculin qui l'emporte" ! Et je ne m'en satisfais toujours pas ! |
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Piroska
Inscrit le: 13 Sep 2005 Messages: 1067 Lieu: Basse-Marche (France)
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écrit le Monday 14 Apr 08, 22:38 |
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Bon, je ne m'en offusquerais pas, car loin de moi le féminisme, mais j'ai pu constater en suivant les études de mes enfants que les explications scolaires sont en effet peu satisfaisantes en général et parfois assez ridicules même. Mais c'est une autre question.
J'aurais cru que dans ce cas précis il n'y avait pas besoin d'expliquer… les petits Français semblent employer les genres spontanément comme il faut. Cela m'a toujours émerveillée d'ailleurs.
À moi, il m'arrive encore aujourd'hui — rarement, certes ! — de me tromper de genre pour certains mots. |
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Kova
Inscrit le: 27 Apr 2007 Messages: 140 Lieu: Angoulême
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écrit le Monday 14 Apr 08, 23:11 |
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Sido a écrit: | Cette règle qui consiste à employer le masculin pluriel dès qu'il y a un homme dans une énumération est en effet absurde. Je ne sais pas comment cette règle est expliquée actuellement dans les écoles primaires, mais "à mon époque", nous devions nous satisfaire de la formule lapidaire "c'est le masculin qui l'emporte" ! Et je ne m'en satisfais toujours pas ! |
On peut (peut-être) se contenter de : le masculin et le neutre ont fusionné, ce qui expliquerai (entre autre) la forme impersonnelle de "il pleut". |
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Piroska
Inscrit le: 13 Sep 2005 Messages: 1067 Lieu: Basse-Marche (France)
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écrit le Tuesday 15 Apr 08, 8:02 |
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Bien sûr, et c'est tout à fait accessible aux enfants, même petits.
Il ne faut pas les prendre pour des imbéciles; leur cerveau a une capacité étonnante.
Quand ma fille aînée était en CE1 par exemple, je lui expliquais la raison de l'accent circonflexe avec l'évolution de la langue à partir de l'ancien français : castel —> château, bastun —> bâton, etc., alors que la maîtresse évoquait une histoire de chapeau ou de toit, et de bateau qui sombrerait… je ne sais plus, mais cela m'a paru plutôt débile.
Quand on en a discuté, elle (la maîtresse) soutenait qu'il n'était pas possible de l'enseigner comme je le faisais, à cet âge. (On pourrait parler longuement de la formation, de caractère très dogmatique, des maîtres ! C'est un vrai fléau !)
Or, j'ai pu voir que ma fille était plus réceptive à mon explication qu'à la sienne.
Pardon pour le HS; on pourrait presque ouvrir un fil sur les méthodes de l'enseignement de la grammaire et de l'orthographe à l'école primaire. |
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