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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 13:59 |
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Outis a écrit: | En tout cas, le mot apparaît ici comme spécifiquement canadien | Je crois que tout le monde le sait. Ce dont on parlait, c'est son origine.
L'origine est française, régionale, comme l'indiquent les relations de deux explorateurs que j'ai cités. Outis a écrit: | À défaut donc d'un témoignage nouveau sur l'usage ancien quelque part en France de bleuet pour myrtille | Pas besoin d'un nouveau témoignage : un seul suffit. L'hypothèse n'est pas que bleuet était le mot officiel français au 17e siècle, mais qu'il était utilisé régionalement en France. Outis a écrit: | (peu probable en raison de la concurrence avec le nom de la fleur) | C'est que vous ignorez par exemple le cas de certains mots, comme airelle, qui tantôt désigne un arbrisseau, tantôt une baie. Je n'ai aucune problème à imaginer une dualité (pour ne pas dire multiplicité) de définitions dans un pays comme la France au 17e siècle, alors que les moyens de communication et d'éducation étaient autres que ceux d'aujourd'hui, sans compter que l'idée d'une science botanique avec noms uniques était loin d'être une priorité, du moins à un niveau national. Jacques a écrit: | Trouve-t-on des myrtilles dans les régions de France dont sont issus les premiers colons du Québec ? | Il y a eu des colons de beaucoup de régions, pas uniquement de Picardie, du Poitou ou de Normandie. J'ai un ancêtre, arrivé au 17e siècle et commun à beaucoup d'autres Québecois, qui venait de Fribourg. J'en ai un autre d'Aquitaine... et je ne connais même pas le quart de ma généalogie (sans compter que je ne suis pas le Québec). C'était un mélange. Il y avait aussi beaucoup d'hommes engagés comme soldats qui se sont ensuite fait colons : ils avaient voyagé en Europe avant de partir pour l'Amérique.
Voici un autre témoignage d'un jésuite français, qu'on ne peut pas plus ignorer que ceux déjà cités. Paul Lejeune, en 1634 a écrit: | Ils mangent en outre quelques petits fruicts de la terre, des framboises, des bleuës, des fraises, des noix | Impossible d'ignorer ici que Paul Lejeune connaissait un fruit nommé bleuet et croyait qu'il serait compris en France en utilisant ce nom pour désigner ce fruit. Tout comme Charlevoix (1744) et Louis Franquet (~1745).
Alors, même si vous voulez à tout prix conserver un doute sur l'origine française du mot bleuet, il est impossible de continuer à affirmer que l'hypothèse de l'anglicisme tient la route. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 14:50 |
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Le discours de Zwielicht est presque aussi aigre que le fruit et il semble me prendre pour quelqu'un qui n'aurait pas lu ses messages précédents. Alors, je précise que :
- à aucun moment je n'ai suggéré l'hypothèse d'un emprunt à l'anglais, m'en soupçonner n'est que de la mauvaise foi ;
- le seul témoignage nouveau que j'aurais appelé de mes vœux est une attestation de l'emploi de « bleuet » pour désigner une airelle, dans un contexte français, indépendant du Canada.
Enfin, je ne vois nullement ce qu'il y aurait d'insultant à penser que les Canadiens aient continué à faire vivre la langue française dans leur pays et y aient créé des néologismes. N'ayant plus la concurrence de la fleur, rien ne s'opposait à ce qu'ils nomment « bleuet » un fruit dont la couleur était dans les nuances de bleu. Qui considèrerait ça comme une insulte ne pourrait s'en prendre qu'à lui-même … |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6526 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 15:09 |
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Zwielicht a écrit: | Alors, même si vous voulez à tout prix conserver un doute sur l'origine française du mot bleuet, il est impossible de continuer à affirmer que l'hypothèse de l'anglicisme tient la route. |
Il y a 2 questions distinctes
1) Le mot québécois "bleuet" pour designer les myrtilles vient-il d'un mot français régional ?
Jusqu'ici, je ne vois aucune preuve que le mot "bleuet" existait dans des régions françaises. Je tends à croire, comme Outis, que c'est un néologisme canadien. J'aime d'ailleurs bien ce mot, je le trouve sympathique. On devrait sans doute l'adopter en France pour désigner les hautes espèces de myrtilles d'origine nord-americaine que l'on commence à cultiver en France.
2) Si c'est un néologisme canadien , est-il influencé par l'anglais "blueberry".
Une influence de "blueberry" semble peu probable selon Zwielicht car les colons francais avaient peu de contacts avec les anglophones. |
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rejsl Animatrice
Inscrit le: 14 Nov 2007 Messages: 3664 Lieu: Massalia
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 16:22 |
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Trouvée dans la Base historique du français ( DDL), une citation plus ancienne datant de 1586 de René de Laudonnière :
Citation: | • bleue - ø t. lex. réf. ; absent TLF
1586 - «Il y a [en Floride] une sorte de mesliers, desquels le fruit est meilleur que celuy de Fra[n]ce, & plus gros, aussi y a il des Pruniers qui portent le fruict fort beau, mais non guere bon, des Fra[n]boisiers, une petite graine que nous appellons entre nous bleues, qui sont fort bo[n]s à manger.» R. de Laudonnière, L'Histoire notable de la Floride située ès Indes occidentales, 3 (Lyon, Les Presses de Audin, 1946) - |
Il semble bien que les Français arrivés dans le Nouveau Monde aient inventé ce néologisme, soit qu'ils aient trouvé ces baies différentes par l'aspect ou /et le goût des myrtilles, soit qu'ils n'aient pas connu les myrtilles . |
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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 16:36 |
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Jacques a écrit: | Une influence de "blueberry" semble peu probable selon Zwielicht car les colons francais avaient peu de contacts avec les anglophones. | Relire mon message où je donne plusieurs arguments, y compris celui-ci.
En fait, l'influence de blueberry est définitivement rendue anachronique par les documents que nous avons des jésuites et qui remontent au 17e siècle (1634), alors que Webster date blueberry de 1710. Un minimum de recherches l'indique. Bref, l'hypothèse anglaise vaut autant qu'une hypothèse faisant intervenir le blåbär suédois. Outis a écrit: | - à aucun moment je n'ai suggéré l'hypothèse d'un emprunt à l'anglais, m'en soupçonner n'est que de la mauvaise foi ; | À aucun moment je n'ai suggéré que vous l'aviez suggéré : cette phrase est tirée de la partie s'adressant à Jacques.
Il est toutefois remarquable que vous ayez pris la peine d'écrire un message pour remettre mon hypothèse (jusqu'ici vraisemblable) en doute, tout en omettant de donner votre point de vue sur celle de Jacques (blueberry), qui est pourtant tout à fait invraisemblable. Outis a écrit: | - le seul témoignage nouveau que j'aurais appelé de mes vœux est une attestation de l'emploi de « bleuet » pour désigner une airelle, dans un contexte français, indépendant du Canada. | Les relations d'un père Lejeune sont dans un contexte tout à fait, on ne peut plus, français. Lejeune, né en France, éduqué à Paris d'abord chez les Jésuites, puis au collège de Clermont.. se rend en Amérique alors qu'il est déjà âgé de 41 ans. Compose la relation, de laquelle j'ai cité, l'année suivant son arrivée. Cet homme est encore un Français, au vocabulaire français. On ne détruit pas toute cette culture et érudition en une seule année de contacts avec des Canadiens français et des Amérindiens. Il retourne d'ailleurs mourir en France. J'aimerais savoir comment vous pouvez concevoir que Lejeune ait pu écrire le mot bleuet s'il doutait d'être compris par ses lecteurs en France.
Mais s'il vous faut une preuve d'un ouvrage ayant pour titre Dictionnaire, de surcroît imprimé en France, vous l'aurez à la fin de ce message. Je tiens néanmoins à préciser que ça ne me semble pas du tout nécessaire. Outis a écrit: | Enfin, je ne vois nullement ce qu'il y aurait d'insultant à penser que les Canadiens aient continué à faire vivre la langue française dans leur pays et y aient créé des néologismes. N'ayant plus la concurrence de la fleur, rien ne s'opposait à ce qu'ils nomment « bleuet » un fruit dont la couleur était dans les nuances de bleu. Qui considèrerait ça comme une insulte ne pourrait s'en prendre qu'à lui-même … | Ce n'est pas l'hypothèse en soi qui m'insulte, mais le fait de lire des réfutations aussi peu appuyées alors qu'on a bel et bien touché la solution.
Voici la preuve irréfutable (vu que non-contaminée par le Canada).. vous irez la lire dans l'ouvrage de Marcel Lachiver* intitulé Dictionnaire du monde rural : les mots du passé, publié chez Fayard, à Paris. Sous l'entrée bleuet, parmi d'autres définitions, il écrit que dans l'Eure, on y nomme ainsi la myrtille.
Il est aisément démontrable que beaucoup de colons français provenaient de cette région.
*un Français |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6526 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 17:32 |
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Zwielicht a écrit: | Voici la preuve irréfutable (vu que non-contaminée par le Canada).. vous irez la lire dans l'ouvrage de Marcel Lachiver* intitulé Dictionnaire du monde rural : les mots du passé, publié chez Fayard, à Paris. Sous l'entrée bleuet, parmi d'autres définitions, il écrit que dans l'Eure, on y nomme ainsi la myrtille. |
Merci. Voici un document convaincant qui indique que bleuet est un mot régional français de Normandie et qu'il a pu passer dans le parler du Québec par cette voie. Ceci est appuyé par le fait de nombreux colons étaient d'origine normande.
Sans références comme celle-ci, on ne pouvait qu'avancer des hypothèses.
Si vous relisez mes messages vous noterez que je dis "hypothèse", "je pense que", "il est possible que", "à ma connaissance". Tout ceci n'indique pas des faits, mais des hypothèses et des opinions. |
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Marden
Inscrit le: 16 Nov 2004 Messages: 468 Lieu: Seine-et-Marne, Ardennes
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 18:03 |
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La même information figure sur la page des Noms de plantes dans les parlers gallo-romans, recueil de noms dialectaux parus dans l'ouvrage de Marcel Lachiver (1997. Dictionnaire du monde rural. Fayard, Paris) complété de noms trouvés sur des sites Internet.
Parmi ces derniers, il est signalé un site baptisé "Sorcy-Bauthémont", associé à un auteur ... de Montélimar ! Je peux vous dire, pour le connaître assez intimement, que l'auteur (le rédacteur-transcripteur, tout à la main) de la version Web du document manuscrit ... est une autre personne !!! |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6526 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 18:11 |
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Excellent. On y trouve aussi :
belue, blu Vosges,
blouï Lorraine,
bellui Saint-Claude,
blouï Franche-Comté, |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6526 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 18:17 |
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Par curiosité, j'ai tapé "Blaubeere" (lit. "baie bleue", comme l' angl. blueberry) sur le google allemand.
L' all. Blaubeere signifie myrtille et est synomyme du terme plus commun Heidelbeere. |
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Marden
Inscrit le: 16 Nov 2004 Messages: 468 Lieu: Seine-et-Marne, Ardennes
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 18:36 |
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Le diction LEO (via Lexilogos) donne pour "myrtille" les traductions "Bick-" (norddt), "Blau-", "Heidel-" et "Wald-beere" en précisant, en français : "à baies ... noires" ! |
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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 19:01 |
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Jacques a écrit: | Excellent. On y trouve aussi :
belue, blu Vosges,
blouï Lorraine,
bellui Saint-Claude,
blouï Franche-Comté, | La dualité de la prononciation québecoise bleuet / beluet pourrait provenir d'un mélange de colons (Eure, Saint-Claude, Vosges..) qui avaient des mots différents, mais semblables, pour désigner la même chose. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Thursday 03 Jul 08, 19:12 |
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De mon point de vue, le débat est réglé par les dernières interventions. |
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jacklouis
Inscrit le: 26 Dec 2006 Messages: 259 Lieu: Québec (canada)
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écrit le Wednesday 23 Jul 08, 0:30 |
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Zwielicht a raison, le mot bluet ou bleuet est bien d'origine française.
Il nous serait venu de Normandie, aux dires du Glossaire du Parler Canadien : "où il existe une variété d'airelle nommée bleuet".
Bien sûr en France le nom de bleuet est surtout réservé pour cette magnifique fleur bleue, poussant dans les champs de blé avec les coquelicots au moment des moissons blondes, déjà mures... Ah le joli tableau ! . J'ai eu le plaisir de contempler, enfant, ces trois couleurs de notre drapeau, réunies dans nos champs de blé d'or.
Nous donnons aussi ici ce nom de "bleuet" à une centurée sauvage d'un beau bleu noirâtre, sans rapport avec le bleuet de France.
Bleuet français
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