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nosh
Inscrit le: 01 Aug 2008 Messages: 35
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écrit le Thursday 05 Nov 09, 11:19 |
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Quelqu'un peut-il éclairer ma lanterne ?
Dans les noms arabes je vois souvent les termes bin, ben ou ibn pour signaler une filiation ("fils de") dans des formules de types XXX bin YYY.
Mais quand utilise-t-on l'un ou l'autre ? Par ailleurs j'ai en tête des personnages historiques simplement désignés comme ibn YYY sans prénom individuel associé, un peut comme s'ils ne s'identifiaient que comme le fils de leur père, sans se distinguer de leur frères et soeurs.
Alors comment ça marche ? |
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Abdüssalâm
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 909 Lieu: Aiguillon
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écrit le Thursday 05 Nov 09, 21:36 |
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il n'existe, traditionnellement, en arabe qu'un seul terme : ibn ابن dont le pluriel est banû au cas sujet بنو et banî au cas régime بني. Mais, comme toujours, en arabe, les choses ne sont pas si simples!
Le (i) de ibn est dit "instable", c'est à dire qu'il disparait s'il est précédé d'un mot: ʿabdu-llâhi-bnu-ʿabdi-l-muṭṭalib.
En dialectal, le i a complêtement disparu et a pris à la place, une voyelle atone (e). Les flexions casuelles n'existant pas en dialectal, il serait difficle de dire "bn".
Les Français ,surtout présents au Maghreb, l'ont transcrit ben, les Anglo-Saxons ont peut-être entendu chez les Arabes orientaux : bin car c'est la transcription anglo-saxonne.
De manière traditionnelle, si un nom commence par ibn, c'est soit qu'il appartient à une très importante tribu, soit qu'il est lui même un personnage important.
Mais, au Maghreb, ben + nom a souvent servi de nom patronymique, lorsque l'administration coloniale a établi les Etats-civils. Curieusement, même en arabe, on accole ben et le nom: بنجلون : benjelloun. On trouve le même procédé patronymique chez les berbères avec "aït": aït Mokhtar |
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nosh
Inscrit le: 01 Aug 2008 Messages: 35
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écrit le Friday 06 Nov 09, 13:06 |
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Merci beaucoup. Cela m'éclaire vraiment.
Ainsi il n'y a que ibn les autres formes étant des conséquences de transcriptions.
Et lorsque ibn début le nom c'est que la personne est assez importante pour qu'il ne puisse y avoir confusion (un peu comme lorsqu'on parle du roi Louis par exemple). L'héritier légitime d'une grande dynastie (dont le fondateur serait "Majid" par exemple) pourrait donc se faire appeler simplement Ibn Majid sans préciser son propre prénom ou celui de son père.
J'ai bon ? |
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Abdüssalâm
Inscrit le: 02 Jan 2007 Messages: 909 Lieu: Aiguillon
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écrit le Saturday 07 Nov 09, 2:15 |
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oui, on a ibn khaldûn, ibn al-ʿarabî, ibn majah, ibn ḥanbal, ibn saʿûd. Par contre, si on parle de l'ensemble de la famille, on dit les "banî saʿûd". Quant à ibn(u) âdam (le fils d'Adam), c'est l'être humain en général (pl.: banû/î âdam). En dialectal: bnî âdam: l'humanité. |
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shlomoavital
Inscrit le: 19 Apr 2008 Messages: 129
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écrit le Wednesday 20 Jan 10, 22:25 |
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J'aime beaucoup les ressemblances avec l'hébreu :
- בן (ben) = fils (singulier)
- בנים (banim) = fils (pluriel)
- בן (ben) = fils de (état construit)
- בני (bney) = fils de (état construit, fils au pluriel)
- בן אדם (ben adam) = être humain, homme
- בני אדם (bney adam) = êtres humains, hommes
- בן האדם (ben ha'Adam) = l'homme, la personne
...
Il y a aussi le mot "בר" (bar), qui veut aussi dire fils, et qui vient de l'araméen je crois. On le retrouve dans des noms de famille, et aussi dans l'expression "bar mitsva" par exemple.
Pour le féminin on dit :
- בת (bat) = fille
- בנות (banot) = filles |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11195 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 09 Dec 10, 16:21 |
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Pas grand chose à ajouter sinon qu'on retrouve ce mot en toponymie espagnole (par ex. Benidorm) et dans les mots français benjamin et béni-oui-oui, où l'élément béni- n'a rien à voir avec le verbe bénir comme on pourrait le croire à première vue. |
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la creme nta3 la creme
Inscrit le: 26 Apr 2008 Messages: 218 Lieu: Paris
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écrit le Thursday 09 Dec 10, 16:25 |
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par contre Benidorm, ça vient du latin ----> là où on dort bien |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11195 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 09 Dec 10, 17:07 |
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C'est bien trouvé ! "Bien y dorment" les touristes ... mais ça reste encore à prouver !
Plus sérieusement, je crois que les Bani Dorm, une tribu berbère, s'installa dans cette région au Moyen Âge, et y a laissé son nom. |
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Azwaw
Inscrit le: 30 Aug 2010 Messages: 975 Lieu: Le Havre
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écrit le Thursday 09 Dec 10, 20:50 |
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Abdüsseläm a écrit: | On trouve le même procédé patronymique chez les berbères avec "aït": aït Mokhtar |
En berbère, on a ag/aw (pl.) ait = fils. Ainsi, on trouve : agma(en zénète, awma)/aitma = fils + mère (fils de ma mère) = mon frère/mes frères. Par extension, ait à pris le sens de "ceux", ex. : ait uxxam = ceux de la maison... On le trouve souvent dans la formation des noms de tribu: Ait Iraten, Ait Mengallet...
Cependant, pour parler de son fils/ses enfants, on dit mmi (pl.) arraw ; ex. : memmi = mon fils, arraw-inu = mes enfants. |
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Adel514
Inscrit le: 11 Jun 2010 Messages: 89 Lieu: Montréal Canada
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écrit le Tuesday 14 Dec 10, 16:29 |
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Les hommes de lettres arabes de la période classique avaient souvent pour nom complet une longue série de prénoms :
père de (abu) + le prénom du fils aîné de l'individu (s'il existe) + le prénom de l'individu lui-même + fils de (ibn ou bin) + prénom de son père + ibn + prénom du grand-père ou du fondateur de la tribu + qualificatif relatif à sa région de naissance ou sa tribu ou bien encore désignant un trait caractéristique de sa personnalité ou de son physique.
Ainsi ibn khaldûn s'appelait :
abu zeid `abd ur-rahman ibn muhamad ibn khaldûn al-hadrami
Le prénom d'ibn khaldûn est `abd ur-rahman
Le grand poète al-mutanabbi s'appelait :
abū l-t̩ayyib ah̩mad ibn al-h̩usayn al-mutanabbī
La dernière partie, al-mutanabbi, a été accolée à son nom car il se prenait pour un prophète (nabiyy).
Le maître de la prose arabe classique al-jâhiz s'appelait:
abu ʿuthmân ʿamrû ibn baḥr mahbûn al-kinânî al-lîthî al-baṣrî
On l'appelait al-jahiz car il avait les yeux globuleux. Selon Wikipedia, « Le calife al-ma'mun envisageait de faire d'al-jahiz le tuteur de ses enfants, mais changea d'avis, effrayé par ses « yeux protubérants »(جاحظ العينين, jâḥiz al-ʿaînîn) qui lui vaudront son surnom. »
Il était né à Basra, d'où al-basri. al-kinâni et al-lîthi font probablement référence à sa tribu. |
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beauceronyx
Inscrit le: 19 Aug 2011 Messages: 87 Lieu: Ile-de-France
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écrit le Saturday 20 Aug 11, 12:56 |
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Adel514 a écrit: | Les hommes de lettres arabes de la période classique avaient souvent pour nom complet une longue série de prénoms |
Vous confondez arabe, arabophone et d'expression écrite arabe - fait fréquent en français.
Alors qu'en anglais on distingue arabian (=ethniquement arabe), arabic-speaker (=arabophone) et arabic-writer (=qui écrit en arabe).
Ainsi, Ibn Khaldoun a écrit en arabe mais était berbère : il a clairement exprimé cette appartenance ethnique dans son ouvrage Histoire des Berbères. |
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Azwaw
Inscrit le: 30 Aug 2010 Messages: 975 Lieu: Le Havre
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écrit le Saturday 20 Aug 11, 14:11 |
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Dans son ouvrage, que j'ai lu partiellement, Ibn Khaldoun fait remonter les origines de sa famille au Yémen.
Cependant, il n'est pas impossible, voire fort probable, que ses ancêtres, en supposant qu'ils viennent réellement du Yémen, aient contracté mariage avec des Berbères.
Enfin, je ne pense pas qu'Ibn Khaldoun se vivait berbère si l'on peut oser cet anachronisme. La situation "ethnique" ou plutôt linguistique de l'Afrique du Nord médiévale était fort différente de celle que l'on connait aujourd'hui! |
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beauceronyx
Inscrit le: 19 Aug 2011 Messages: 87 Lieu: Ile-de-France
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écrit le Sunday 21 Aug 11, 11:43 |
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D'autant plus que la revendication d'une ascendance mahométane était courante car valorisante...
... jusqu'aux travaux de Mercier et Lucotte sur les invariants du chromosome Y à l'origine de la théorie des haplogroupes, une théorie qui a établi l'impossibilité d'une telle fréquence. |
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