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le Berton
Inscrit le: 11 Jan 2008 Messages: 133 Lieu: Bretagne
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écrit le Thursday 01 Jul 10, 13:34 |
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Expression utilisée dans le nord-ouest de la France (Loire-Atlantique, Vendée, Mayenne et peut-être ailleurs..)
Signifie "mettre à la poubelle".
D'après wiktionnaire: http://fr.wiktionary.org/wiki/jaille
Deux étymologies possibles:
- une abréviation de l'ancien français "jetaille" même si ce mot est introuvable dans des dictionnaires d'ancien français ;
- du jargon des marins travaillant sur les navires sabliers en Loire, le mot désigne du sable de mauvaise qualité. |
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evariste
Inscrit le: 18 Nov 2010 Messages: 3
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écrit le Thursday 18 Nov 10, 18:43 |
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En Haute-Savoie (haut-Chablais):
Mettre au ruclon. |
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Moutik Animateur
Inscrit le: 06 Apr 2008 Messages: 1236
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écrit le Tuesday 14 Dec 10, 3:29 |
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L’explication de mettre à la jaille, par un jetaille, d’un hypothétique jactalia, reprise sur plusieurs pages du ouaibe semble trouver son origine dans un texte d’Henri Barbot :
Le Jaillou
Nom expressif, à Nantes, de ceux qui ramassent la « jaille », par abréviation populaire pour la «jetaille », les choses qu'on jette, jactilia ; mot de bonne origine française qui rend aussitôt pédant et ridicule le mot administratif de « répurgation . »
Henri Barbot
Nantes en Flanant. Souvenirs, scènes et croquis.
Imprimerie de Lajartre, Nantes, 1930
Mis en ligne par Odile Halbert ici :
http://www.odile-halbert.com/Paroisse/Loireat/NantesFlanant/NantesFlanant_35.pdf
Je ne suis pas latiniste mais je n’ai trouvé trace ni de jetaille ni de jactalia (supposément de jăcĕre « jeter »).
Un site québécois note l’expression comme un québécisme et donne cette explication :
« JETER À LA JAILLE: jeter à la poubelle cette expression très populaire, vient du fait que les nantais avaient leur dépot d'ordure sur la commune de Saint marc la jaille, jolie petite commune en bordure de Loire, mais depuis longtemps la ville de NANTES s'est enorgueillie de jolies usines de retraitement plus saines que les tas de naguère. »
http://club.doctissimo.fr/pixelleluciole/blog/dictionnaire-francais-quebecois-4039834.html
En Loire, une jaille est aussi une mare, une flache, un boire [bwεr], c’est-à-dire une dépression dans le lit de la rivière qui demeure en eau même en période d’étiage. Certaine de ces jailles servaient au rouissage du chanvre. Les mêmes jailles ou d’autres ont pu servir de décharges. De là viendrait l’expression. Cette hypothèse pourrait être confortée par une expression synonyme et usitée dans le Finistère : mettre aux joncs, c’est-à-dire jeter sur une rive marécageuse de la rivière, où poussent les joncs, et qui sert de décharge.
Le mot jaille pourrait être rapproché, sous toutes réserves, du mot jas. Dans un marais salant, pouvant être perçu comme une succession de bassins où l’eau se concentre en sel petit à petit par évaporation, le jas est le premier bassin ouvert sur la mer. Le jas sert de réserve entre deux marées de vive eau, moments où le paludier fait le plein.
Godefroy donne :
« Jard, s. m., grand receptacle d’eau de mer construit dans les marais salants de la Saintonge. »
Le TLFi et Alain Rey notent que ce mot viendrait du provençal jas « gîte, bergerie, corral » et spécialement « parc entouré d'une petite muraille de pierres sèches, généralement situé sur un mamelon, où, de juin à octobre, on faisait coucher les troupeaux d'ovins ».
Du latin populaire *jăcium « gîte » « lieu où l’on est couché »
Du latin jăcēre « être couché, être étendu »
Cf. en français gîte, gésir, gésine, ci-gît, gisement, gîter, jas (d’une ancre), sous-jacent, adjacent…
Du latin jăcĕre « jeter »
Cf. le grec ἵημι.
À noter que Ménage donne jar :
Jar. Les Bateliers de la rivière de Loire appellent jar, ou jars, cet amas de sable & de cailloux, qui se forment naturellement, & qui résistant contre la riviere, en rejette le cours de l’autre côté. L’origine de ce mot en cette signification ne m’est pas connue.
Ménage, Dictionnaire étymologique de la langue françoise, Chez Briasson, Paris, 1750
Le mot jar ne désigne non plus ici la jaille mais la levée de sable qui donne naissance à la jaille.
En tous cas l’expression est très courante en Basse-Bretagne aussi . Vers le sud elle est connue au moins jusqu’en Charente-Maritime comme l’atteste le texte ci-dessous :
[Après le passage de Xynthia, la tempête du 28 février 2010]
« les gens regardent toute leur vie partir à la "jaille" et l'on voit à travers leurs yeux tout ce que la tempête a aussi emporté ».
Association de sauvegarde des boucholeurs d'Yves et de Châtelaillon-Plage (Charente-Maritime)
http://www.sauvegarde-lesboucholeurs.net/revue-presse/la-temp%C3%AAte/
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le Berton
Inscrit le: 11 Jan 2008 Messages: 133 Lieu: Bretagne
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écrit le Tuesday 14 Dec 10, 14:45 |
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Moutik a écrit: |
En Loire, une jaille est aussi une mare, une flache, un boire [bwεr], c’est-à-dire une dépression dans le lit de la rivière qui demeure en eau même en période d’étiage. Certaine de ces jailles servaient au rouissage du chanvre. Les mêmes jailles ou d’autres ont pu servir de décharges. De là viendrait l’expression. Cette hypothèse pourrait être confortée par une expression synonyme et usitée dans le Finistère : mettre aux joncs, c’est-à-dire jeter sur une rive marécageuse de la rivière, où poussent les joncs, et qui sert de décharge. |
Merci pour ces pistes détaillées...
L'explication de ces jailles me vont parfaitement. J'entends aussi "mettre aux brousses" qui signifie la même chose. |
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flo
Inscrit le: 03 Oct 2010 Messages: 302 Lieu: La Rochelle
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écrit le Monday 20 Dec 10, 10:30 |
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En Charentes, on utilisait aussi l'expression mettre à la jaille, de même que mettre aux gadoues.
L'expression me parait plus claire, la boue étant au bord des cours d'eau permanente.
Peut-être qu'initialement seuls les liquides étaient jetés là et les solides recyclés par exemple... simple hypothèse |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6533 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Tuesday 21 Dec 10, 1:09 |
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Moutik a écrit: | Jacques a écrit: | Comment prononces-tu jaille ? | jaille se prononce [ʒɑj], comme paille, maille, taille, vaille... |
Je parlais de la prononciation charentaise. |
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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Tuesday 28 Dec 10, 8:23 |
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Moutik a écrit: | Un site québécois note l’expression comme un québécisme | Le site en question est plutôt français, et l'explication donne une origine française. Un québécisme est un fait de langue qui est propre au français parlé au Québec. Comme on ne dit jamais jeter à la jaille au Québec, on peut difficilement qualifier l'expression de québécisme.
Je me demande s'il y aurait un lien avec jeter à la baille. |
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Moutik Animateur
Inscrit le: 06 Apr 2008 Messages: 1236
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écrit le Tuesday 28 Dec 10, 23:19 |
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Zwielicht, je ne comprends pas ton objection : le blog en question est bien tenu par une Québécoise et dans son message celle-ci se propose bien de donner des expressions qu’elle considère, à tort ou à raison, comme typiquement québécoises. Et à l’en croire, l’expression mettre/jeter à la jaille en est une, et est bien employée au Québec.
D’évidence ce n’est pas un « pur » québécisme puisque jaille est connu aussi à Nantes, en Vendée et ailleurs. L’intérêt de la citation était, à mon sens, de montrer que l’expression est connue au Québec aussi*. Comme l’intérêt de la dernière était de montrer qu’elle l’est jusqu’en Charente-Maritime.
Au-delà, l’affirmation de cette blogueuse québécoise me semble représentative d’un autre phénomène, plus culturel que linguistique. À propos de mots ou d’expressions n’appartenant pas au français standard, de nombreux locuteurs ont souvent l’impression que ces particularismes sont propres à leur ville, à leur région, à leur dialecte, quand ils sont en fait d’un usage beaucoup plus étendu. Un Nantais pensera que jaille est typiquement nantais, un Vendéen que c’est du patois vendéen, un Breton que c’est un bretonisme, etc. Même des ouvrages plus ou moins savants consacrés à tel ou tel parler ne sont pas exempts de ces travers. L’un va donner par exemple comme brestoise une expression argotique usitée un peu partout en France, etc.
* Et de conforter l’hypothèse comme quoi jaille viendrait des bords de Loire. Quoique le nombre d’occurrences d’une sottise sur le ouaibe n’en fasse pas une vérité… |
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dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1897 Lieu: Ardenne (belge)
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écrit le Thursday 30 Dec 10, 11:30 |
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En wallon namurois, l'expression "taper à gaille" signifie frapper au hasard, sens figuré de gauler des noix.
gaille correspond au wallon liégeois djèye , noix; selon Haust, du latin galli(c)a, dérivé de galla, noix de galle.
De la même origine que jaille? |
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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Friday 31 Dec 10, 15:12 |
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Moutik a écrit: | Zwielicht, je ne comprends pas ton objection : le blog en question est bien tenu par une Québécoise et dans son message celle-ci se propose bien de donner des expressions qu’elle considère, à tort ou à raison, comme typiquement québécoises. Et à l’en croire, l’expression mettre/jeter à la jaille en est une, et est bien employée au Québec. | Non, au contraire, l'expression mettre/jeter à la jaille est identifiée sur le blog comme une expression en français de France:
http://club.doctissimo.fr/pixelleluciole/blog/dictionnaire-francais-quebecois-4039834.html
L'expression dont on parle n'a rien ou très peu à voir avec le Québec. Je n'arrive pas à en trouver une attestation écrite ni une trace dans mes souvenirs. |
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Moutik Animateur
Inscrit le: 06 Apr 2008 Messages: 1236
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écrit le Monday 03 Jan 11, 16:11 |
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Pardon Zwielicht, tu avais raison, cette blogueuse établit bien deux listes, l’une d’expressions québécoises, l’autre d’expressions du français de France. Le discret intertitre « Français de France » m’avait échappé ! Merci pour l’utile correction. |
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le Berton
Inscrit le: 11 Jan 2008 Messages: 133 Lieu: Bretagne
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écrit le Tuesday 04 Jan 11, 7:16 |
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Moutik a écrit: | Pardon Zwielicht, tu avais raison, cette blogueuse établit bien deux listes, l’une d’expressions québécoises, l’autre d’expressions du français de France. Le discret intertitre « Français de France » m’avait échappé ! Merci pour l’utile correction. |
Cela dit, il y a beaucoup de mots rangés dans la partie "français du Québec" et qui sont également connu en France:
Pour ma part, voici ce que je reconnais:
Accouche
Asteure (à c't'heure)
Bavette
Bedaine
Brailler
Chialer
Chicane
Envoye
un minou
se grouiller
un pitou |
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Zwielicht
Inscrit le: 30 Jan 2007 Messages: 1227 Lieu: la rencontre des eaux
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écrit le Thursday 06 Jan 11, 21:43 |
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Oui et c'est inévitable. J'ai quelques dictionnaires de parlers régionaux français (Haute- Bretagne, etc) et j'y vois bonne quantité de mots familiers (en tant que Québécois) qui ne sont pas du français international ou parisien.
Il y a souvent malentendu.. une personne sur ce forum écrivait que le verbe maganer n'était pas québécois. C'est bien entendu qu'il n'est pas exclusivement québécois, car il est français d'origine et encore utilisé en France (bien que peu).
C'est probablement la différence dans l'usage qui fait qu'on dit qu'un mot est québécois ou non. Si par exemple 80% des Québécois disent astheure contre environ 10% des Français, le mot risque d'être plus souvent entendu au Québec qu'en France. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11202 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 19 Feb 17, 16:20 |
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le Berton a écrit: | D'après wiktionnaire: http://fr.wiktionary.org/wiki/jaille
Deux étymologies possibles:
- une abréviation de l'ancien français "jetaille" même si ce mot est introuvable dans des dictionnaires d'ancien français ;
- du jargon des marins travaillant sur les navires sabliers en Loire, le mot désigne du sable de mauvaise qualité. |
J'en ai une troisième - et meilleure, je crois, - grâce à Pierre Gastal (Nos origines celtiques) : le gaulois galir "lancer, jeter violemment", d'où est issu le français jaillir via l'ancien français jalir. |
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