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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 21 Apr 14, 8:56 |
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En attendant la réponse à ma question ci-dessus, j'ai fait une trouvaille intéressante, à savoir qu'en persan māt signifie "il est étonné, confus, perplexe". Autrement dit, le roi ne sait plus quoi faire, il ne peut plus jouer.
C'est quand même extraordinaire que personne ne se soit encore soucié de savoir ce que voulait dire cette phrase šāh māt en persan, et que tout le monde se soit focalisé sur l'arabe māt, "il est mort", alors qu'il y a un autre mot en arabe pour dire "roi" et un autre mot en persan pour dire "il est mort". Les étymologistes empruntent parfois des voies curieuses... |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 21 Apr 14, 9:45 |
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Bon, j'ai une réponse : en arabe, échec au roi se dit kesh malek كش ملك
On remarquera que c'est le mot arabe malek qui est utilisé pour traduire "roi", et non le mot persan...
Il reste à voir d'où sort ce kesh et ses rapports avec échec, jaque, etc.
À suivre. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Monday 21 Apr 14, 10:18 |
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Papou JC a écrit: | C'est quand même extraordinaire que personne ne se soit encore soucié de savoir ce que voulait dire cette phrase šāh māt en persan, et que tout le monde se soit focalisé sur l'arabe māt, "il est mort", alors qu'il y a un autre mot en arabe pour dire "roi" et un autre mot en persan pour dire "il est mort". Les étymologistes empruntent parfois des voies curieuses... |
Néanmoins, j'avais vu hier lors de ma petite recherche que cette étymologie persane est bel et bien donnée par les étymologues anglais (Oxford, Chambers) au mot checkmate, comme aussi dans Etymonline :
Citation: | mid-14c., from Old French eschec mat (Modern French échec et mat), which (with Spanish jaque y mate, Italian scacco-matto) is from Arabic shah mat "the king died" (see check (n.1)), which according to Barnhart is a misinterpretation of Persian mat "be astonished" as mata "to die," mat "he is dead." Hence Persian shah mat, if it is the ultimate source of the word, would be literally "the king is left helpless, the king is stumped." |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 21 Apr 14, 10:22 |
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Tu me rassures ! Les étymologues anglais sauvent l'honneur des Occidentaux !
Bien, j'ai trouvé le sens de keš : le mot est persan, comme il fallait s'y attendre. C'est l'exclamation utilisée seule ou redoublée
1. pour annoncer le passage d'un roi ou d'un personnage important, pour que les gens se rangent de côté, se taisent, une sorte de "attention ! place !"
2. aux échecs, pour prévenir le roi adverse qu'il est en danger, donc toujours le sens de "attention ! prenez garde !".
Une "mise en échec" se dit kešt.
Ces mots semblent être apparentés au verbe kešīdan, "tirer, retirer, se retirer", ce qui expliquerait aussi un impératif du genre "retirez-vous", "déplacez-vous".
Quant au rapport entre keš et (é)chec ... Métathèse ? Peut-être... Quid de l'espagnol jaque ? C'est moins évident. Sauf si l'on se souvient que jaque s'est longtemps prononcé /šake/ (Cf. Quijote = Quichotte).
Bref, l'origine germanique de échec dans échec au roi ne me semble plus aussi acquise. Une influence probable sur la forme du mot, mais guère plus.
Restons prudents sur tous ces mots persans : il est aussi possible que nombre d'entre eux soient des altérations de mots sanskrits. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Sunday 27 Apr 14, 11:35 |
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De chatranj, mentionné plus haut, dérive l'ourdou shatrangi, qui a donné son nom à un tapis à carreaux, le shatranji, (on a aussi vu plus haut le sens de "checkered, checked"), écrit en anglais sitringee ou sittringee.
(Arabic Contributions to the English Language)
(Persian Contributions to the English Language)
Ces tapis qu'on trouve aussi sous les orthographes satranji, shatranji, ont depuis longtemps des motifs de bandes, mais leur nom indique clairement qu'ils ont dû être en damier. On peut se demander s'il n'y a pas dans l'orthographe officielle sit(t)ringee un rapprochement avec to sit, dans la mesure où justement ces tapis sont faits pour s'asseoir dessus. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 27 Apr 14, 14:08 |
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Je ne crois pas. Quel tapis n'est pas fait pour qu'on s'assoie dessus ?
À propos de la traduction "four limbs", il est peut-être utile de rappeler que ces "quatre membres" sont en fait quatre "corps" (d'armée). Pour s'en convaincre, si nécessaire, prière de relire tout le fil. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Sunday 27 Apr 14, 15:55 |
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Papou JC a écrit: | Je ne crois pas. Quel tapis n'est pas fait pour qu'on s'assoie dessus ? |
C'est entendu, mais faut-il encore que le nom original du tapis se prête à l'étymologie populaire : difficile de caser "sit" dans Dozar, Sedjadeh, Ghalitcheh ou Zaronim. C'était plus facile dans shatranji, surtout dans une prononciation indienne dont on sait qu'elle confond souvent les sons /ʃ/ et [s]. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 27 Apr 14, 16:07 |
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Deux choses :
1. la variante arabe shitranj a dû faciliter le passage vocalique de sa- à si-.
2. je pense que dans l'esprit des locaux, le rapport était plus clair avec un mot de leur propre langue désignant le jeu d'échecs qu'avec un mot anglais, aussi fréquent soit-il. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Sunday 27 Apr 14, 16:45 |
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Il ne s'agit pas de l'écriture d'un mot par les locaux mais par les Anglais, par les voyageurs notamment ! Ils ont entendu un mot que les locaux écrivaient dans leur langue et eux se sont efforcés de le retranscrire comme ils pouvaient en anglais. Il y a eu bien sûr d'autres transcriptions comme chitrenga, siturngees, citterengees, ...
De toute façon, je n'émettais qu'une simple hypothèse personnelle sur une possible attraction paronymique que rien ni personne ne pourra prouver ou invalider. C'est au demeurant un mot assez rare. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 27 Apr 14, 16:47 |
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Ok, compris, c'est plus clair ! |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11201 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Saturday 15 Nov 14, 9:46 |
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À la réflexion, je pense qu'on a survalorisé le mot shah et occulté le mot kesh. Je me demande si ce n'est pas le mot kesh qui, métathésé, est sous-jacent dans les trois formules jeu d'échecs, échec au roi, échec et mat. Ce qui expliquerait le /k/ final d'échec. Du persan kesh mat à l'anglais checkmate, il n'y a qu'un pas que je franchirais volontiers.
Jouer aux "échecs", c'est probablement jouer à dire "kesh" plusieurs fois, jusqu'à la fin : kesh mat.
Par ailleurs mat n'est pas l'arabe "est mort" mais son homonyme persan "conquis, vaincu, réduit à la dernière extrémité", ce qui n'est pas tout à fait la même chose. |
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dawance
Inscrit le: 06 Nov 2007 Messages: 1897 Lieu: Ardenne (belge)
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écrit le Sunday 23 Nov 14, 20:34 |
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En effet, le roi ne meurt pas aux échecs. On ne le prend pas non plus comme toutes les autres pièces peuvent l'être.
Être mat est en effet, on peut le résumer ainsi, "réduit à la dernière extrémité", c'est à dire abandonner la partie. Explicitement, :
- premièrement, il est en échec (soumis à ce ce qui signifierait être en prise pour toute autre pièce que le roi).
- deuxièmement, il n'y a aucune possibilité d'empêcher cet échec ou de déplacer le roi sans le mettre en échec.
Être pat (partie nulle !) signifie que le roi n'étant pas en échec, il n'existe pas d'autre coup possible que de jouer le roi en le mettant en échec.
Ici non plus, il n'est pas question de mort du roi. |
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