Ceux qui arrivent de la montagne : les Gavots

 

 

          A la fin du XIXème siècle et au début du XXème, de nombreux habitants des Cévennes et de plus loin dans le Massif Central, viennent chercher du travail dans les zones viticoles, plus prospères. Ils sont regardés avec une certaine condescendance. On les appelle les "Gavots". Dans d’autres régions du Midi, on dit les Gavachs.

 

 

As laborat  com’un Gavòt !

 

         Vivant en altitude, les Gavots n’ont pas l’habitude de travailler avec un cheval, ni de tailler la vigne, il leur faut appendre. Cela donne le temps de se moquer d’eux. (...) « Li Gavòts, son pas gaire finassièrs », les Gavots, ils sont guère méticuleux. « As laborat  com’un Gavòt ! » Tu as labouré comme un Gavot ! Au lieu de tirer des raies bien droites, tu fais des virons, des sinuosités, avec la charrue. « Diriás un Gavòt qu’a podat ! », tu dirais que la vigne a été taillée par un Gavot.

         Les Gavots se remarquaient aussi par leur tenue. « Ils étaient habillés à la façon d’avant, avec des vestes étriquées, des robes plus longues que les gens d’ici. Les Gavotes qui voulaient s’endimancher mettaient des robes avec des rubans aux manches. Pour nous c’était de mauvais goût, ils étaient des attardés... » (Bertrand). « Les Gavots portaient un costume noir. Ici tu voyais seulement quelques vieux avec un costume comme ça. Les filles portaient de gros bas en laine, ici elles avaient des bas fins. Les Gavots portaient des bretelles, à une époque où chez les jeunes ça se faisait plus » (Jules).

– On remarquait tant que ça les différences ?

– « A l’époque, tout le monde s’habillait pareil, les différences se voyaient. Maintenant tu en as qui ont des brailles courtes, d’autres des brailles longues. Un jour tu vois une femme avec une robe qui lui descend à la cheville, le lendemain avec une jupe si courte, que tu lui vois les gaoutes ! » Les brailles, les pantalons. Les gaoutes, les joues.

         « Semblas un Gavòt », « Siás coma un Gavòt », dit-on de celui qui est mal habillé, « pas trop moderne ». Expressions qu’on entend encore, francisées, dans les années 60 : tu sembles un Gavot, tu es comme un Gavot.

 

Source : R. Domergue, La parole de l'estranger, éd. L'Harmattan, pp. 26 et 37

(Etude de l'intégration des étrangers dans les villages du pays de Nîmes, Gard)

 

 

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