L'intégration maghrébine

 

 

 

 

L’effet village

             (...) Comment se déroule la socialisation des personnes d’origine ‘maghrébine’ dans un contexte villageois ? La mise au jour de ses caractéristiques peut-elle modifier le regard souvent porté sur les difficultés d’intégration des ‘Maghrébins’ ?

            Pour mener à bien cette recherche il faut d’abord savoir quand et pourquoi, les pères d’origine ‘maghrébine’, ainsi que leurs familles, sont arrivés dans les villages (partie I). On peut alors étudier les relations sociales entre les premiers arrivés et les villageois ce qui, concrètement, revient à examiner l’état des relations sociales dans les villages à faible présence ‘maghrébine’, comme celui où Amel a vécu (II-IV).

            Ces relations évoluent nécessairement au fil du temps. Dans les villages où la présence ‘maghrébine’ se renforce, le changement est très palpable et la question de l’intégration se pose différemment (V-VII).

            Au sujet du mot intégration, la préoccupation ici n’est pas d’en proposer une énième définition, mais plutôt de rendre compte du niveau d’exigence implicite de la part de nombreux ‘Français’ qui l’emploient, ainsi que  des réactions des ‘Maghrébins’ lorsque le mot est prononcé (VIII).

            Le fait de mener des investigations dans le contexte des villages fournit l’occasion de procéder à diverses comparaisons. D’une part la comparaison des conceptions et des pratiques traditionnelles maghrébines au regard de la culture villageoise d’il y a quelques décennies. D’autre part la comparaison de l’arrivée des ‘Maghrébins’ dans les villages avec celle d’autres vagues migratoires. Cela permet de comprendre dans quelle mesure des conceptions et des comportements fréquemment associés aux ‘Maghrébins’ leur sont réellement spécifiques, au point que leur cas est souvent considéré comme radicalement différent de celui des vagues migratoires antérieures. (IX)

                    Enfin, pour une large partie de l’opinion française, un des critères de l’intégration est la mixité dans la formation des couples. On discerne une fissuration dans les principes des parents d’Amel. Il est important de savoir s’il s’agit d’un cas particulier ou d’une évolution plus générale. Tout comme de savoir si d’autres indices de changements sont perceptibles. (X et XI).

 

Caractéristiques de l’enquête

            Le terrain de l’enquête est constitué par les villages du pays nîmois, soit une centaine de villages. Ce terme est entendu au sens de regroupement d’une population de moins de 3000 habitants environ au moment des faits sur lesquels portent les investigations. Seuil en deçà duquel on peut faire l’hypothèse d’un bon niveau d’interconnaissance entre les habitants. À noter que le seuil retenu par l’administration pour désigner les communes pour lesquelles les listes peuvent être panachées à l’occasion des élections municipales est de 3500 habitants.

            L’enquête s’appuie sur le recueil de la parole des gens. Les faits rapportés ainsi que le vocabulaire employé témoignent donc avant tout de leur façon de voir les choses, de leurs représentations. D’où des formulations qui pourront parfois choquer certains lecteurs.

            Ce recueil d’informations a été réalisé en interrogeant des personnes ‘d’origine maghrébine’ mais aussi des gens ‘d’ici’, pour employer des expressions récurrentes, et le principal moteur de l’ouvrage réside dans la confrontation de leurs points de vue.

            Concernant la population dite ‘d’origine maghrébine’, l’enquête a duré quatre années, de 2006 à 2010. Elle a été menée auprès d’environ 200 personnes de tous âges, femmes et hommes, nées au Maroc, en Algérie ou en Tunisie ou ayant un ancêtre connu originaire de cette région du monde. Les entretiens ont généralement duré plusieurs heures, mais certains ont été plus courts (échange de brefs propos avec des jeunes, un soir de fête votive) ou infiniment plus longs. Les conversations avec quelques informateurs particulièrement pertinents se sont poursuivies au moment de la rédaction finale et des dernières vérifications. Ces mêmes informateurs ont aussi facilité l’approche de la population des ‘anciens’ (les chibanis), d’autant que l’assistance d’un traducteur se révélait souvent nécessaire.

            La population ‘harkie’ n’est quasiment pas prise en compte dans cette étude. Elle constitue un cas très particulier qu’il est préférable d’étudier séparément.

            Le nombre de villageois ‘d’ici’ interrogés - membres des ‘vieilles familles’ ou membres de la population d’origine italienne, espagnole ou autres - excède sans doute le millier, du fait de la multitude des entretiens effectués au cours d’enquêtes antérieures.

 

 

Source : L’intégration des Maghrébins dans les villages du Midi, René Domergue,  Autoédition 2011, p.15-17.

 

 

 

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