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Invidia
Inscrit le: 24 Jul 2008 Messages: 441 Lieu: Gasconha (França)
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écrit le Saturday 13 Feb 10, 16:49 |
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Comment prononcez-vous "amor" ? En gascon, c'est immuablement "a'mou". Dans les chansons béarnaises, la rime est toujours en -ou. Il semble cependant que certaines langues gallo-romanes méridionales (lisez "langue d'oc") prononcent le r final. Ainsi, dans le dictionnaire de Vayssier du Rouergue, conformément à la notation de l'auteur, amor est écrit avec un -r final. C'est également la prononciation néo-occitane de la "Dictada" :
http://www.laportadoc.eu/pages_cirdoc/dictada-porta-adultes_2010.php
En limousin, amor, madur, flour, ... sont prononcés avec r final bien distinct. Pas en gascon ni dans les dialectes languedociens les plus méridionaux.
En gascon de l'ouest, l'amuïssement de r final touche même les étymons en -rru(m) : ainsi ferrum, qui devient hèr en gascon, prononcé "hèrr" en est-gascon, est "hè" dans l'Ouest. Il semble cependant qu'à date récente, le terme de "mar" (mer) était prononcé /marr/ : il s'agit d'un francisme ainsi que le prouve la commune de Moliets-et-Maa pour laquelle le r final est muet. Les textes béarnais anciens écrivent aussi tous Maa. Francisme donc que de prononcer le r final. La distinction est importante car en gascon, le terme de "marr" existe et signifie bélier (toujours orthographié maar dans les textes anciens).
Remarquons que le gascon est en adéquation avec l'aragonais et le catalan, ce qui est tout sauf rare. En aragonais, on dit bien cantà, matà, comè, ... pour cantar, matar, comer. En catalan mais également mais les néo-locuteurs castillanisés de Barcelone ne le savent pas.
Comment expliquer le maintien de -r final en français et dans les dialectes d'oc septentrionaux dans certains mots ? On peut faire des hypothèses dont celle de francismes. Dans "pescador" -ador est un suffixe senti comme tel, et le terme français équivalent est bien différent. "flor" est refait sur "fleur". Ou alors inversement, on a là un résidu de l'ancienne prononciation provençale qui se maintient en gavot.
Il semble qu'en français, l'influence des grammairiens pédants à partir du XVIème a été très forte en effet, notamment en matière de rétablissement des consonnes finales. Le français standard est une langue totalement artificielle du point de vue de la prononciation qui n'a plus grand chose en commun avec les parlers d'oïl : c'est de l'oïlitan. Mais in fine, il semble bien que ce soit une question de monosyllabes ou de mots assez courts.
http://monsu.desiderio.free.fr/curiosites/r-phono.html
Citation: | "Le r final
Stable à l'initiale et après consonne, le r a eu tendance à s'amuïr du
XIIe s. au XVIIe s. en position finale, absolue ou non. Des rimes
comme armes-dames, sage-large sont fréquentes. Toutes les consonnes
finales s'amuïssent durant cette période et la langue populaire unifie
la prononciation en généralisant des terminaisons par voyelle,
toutefois les grammairiens de la fin du XVIIe s. réintroduisent r dans
la plupart des terminaisons anciennes, en s'appuyant sur l'analogie
des formes paronymiques
Sauf liaison (comme aujourd'hui dans le premier homme), l'effacement a
gagné des séries entières de suffixes : -er, -ier, -eur, -ir, -oir,
soit chanter (chanté), premier (premié), menteur (menteu), dormir
(dormi), plaisir (plaisi), miroir (miroi), mouchoir (mouchoi) voir
(voi). Les dérivations qui se forment alors ignorent le r : on tire
miroiter de miroi(r). L'r s'est maintenu dans les monosyllabes comme
cher, mer, cœur. Ce fait entraînera la rime normande.
On forme à partir de chanteu(r), menteu(r) des féminins remaniés en -
euse : chanteuse, menteuse, sur le modèle heureux, -euse ; ils
supplantent les formes primitives : (en)chanteresse, menteresse. La
prononciation ancienne des masculins survit dans certaines expressions
contextuelles : menteux et taiseux comme régional, piqueur prononcé
piqueux en vénerie, monsieur opposé à seigneur et monseigneur.
À partir de dire ou lire, de boire ou croire, on prononce de nouveau à
partir de 1750 dormir et voir en faisant entendre l'r. La finale des
noms d'origine savante en -eur (rigueur, valeur) s'est beaucoup mieux
conservée, elle revivifie la terminaison des noms comme chanteur.
Toutefois, à cause de l'absence de modèle proche en -ere pour les
verbes, les infinitifs du premier groupe demeurent inchangés : les
verbes des deuxième et troisième groupes s'opposent aujourd'hui aux
verbes du premier groupe. De même, boulanger, épicier vont s'opposer
à chanteur, miroir.
On peut retrouver la prononciation classique dans les noms : Allier,
Béranger, Oger, Roger, Suger, Tanger, Alger, Boucher, Foucher. La
prononciation ancienne est présente dans : Antifer, Locmaraquier,
Saint-Omer, Cher. " |
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pep2
Inscrit le: 08 Feb 2007 Messages: 131 Lieu: Barcelona
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 0:05 |
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en catalan on prononce l´r finale du mot amor.
je ne suis pas sûr si on le fait aussi a Mallorca (ou ils "avalent" l´r finale dans des situations très étranges -pour un catalan-, comme le mot "cor"
j´en sais pas le motif. Ce que je sais c´est que il y a 15 ans je ne prononçais jamais les r dans des mots comme anterior, posterior, interior.. mais par l´influence des medias catalans j´ai fini par les prononcer dans des contextes formels |
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Invidia
Inscrit le: 24 Jul 2008 Messages: 441 Lieu: Gasconha (França)
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 4:14 |
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En gascon du moins, r final dans còr n'est pas prononcé non plus : c'est bien /lou kò/.
Je trouve tout de même que la graphie alibertine est bien cavalière de faire l'économie d'un graphème supplémentaire -rr pour noter un r final prononcé. Comme je l'indique précédemment, en gascon par exemple, la distinction entre mar (=mer) et marr (=bélier) est opérante. Cela rejoint au fond la question de la notation de n final entre pan (prononcé pang/pã(n)=pain) et pann (=pêne).
L'orthographe alibertine, qui se permet d'écrire autant de lettres dans tostemps qui est quelque chose que tout le monde prononce "toustém", fait de drôles de choix par ailleurs. Autre doléance : écrire "quan" quand cela est prononcé "couann". Le castillan ne se déshonore pas en écrivant cuando, je ne vois pas pourquoi le gascon ne pourrait pas écrire "coann". Idem "guarda" pour "goarda". |
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giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 13:00 |
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Moi je peux te dire ce qui passe du côté italien.
Autrefois, se prononçait sans "r" finale, en patois occitan et aussi en piémontais, dans la zone grise. Maintenant, pour faire les "fins", les gents prononçent la "r" finale. |
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pep2
Inscrit le: 08 Feb 2007 Messages: 131 Lieu: Barcelona
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 13:26 |
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giòrss a écrit: | Maintenant, pour faire les "fins", |
oui, c´est un peu comme ça aussi chez nous |
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pep2
Inscrit le: 08 Feb 2007 Messages: 131 Lieu: Barcelona
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 14:02 |
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Invidia a écrit: | Je trouve tout de même que la graphie alibertine est bien cavalière de faire l'économie d'un graphème supplémentaire -rr pour noter un r final prononcé. Comme je l'indique précédemment, en gascon par exemple, la distinction entre mar (=mer) et marr (=bélier) est opérante. Cela rejoint au fond la question de la notation de n final entre pan (prononcé pang/pã(n)=pain) et pann (=pêne).. |
dans le cas du català/valencià/balear on écrit les r et puis chacun en fait son usage (p.e. à València on prononce toutes les r finales).
pour ce qui est du gascon.. je comprens le problème, et j´ai lit plusieurs textes de Halip Lartiga ou il se plaint que ses éleves ne font pas la diferènce n velar/n dental, mais à mon avis s´ils maitrissent pas la langue ce n´est pas à cause de la manque d´une orthographe "à la carte". |
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Geremi
Inscrit le: 12 Jan 2006 Messages: 181 Lieu: Nissa
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 14:07 |
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A Nice (sur la côte):
-les r de l'infinitif ont disparu, on ne trouve plus que l'accent tonique sur la dernière syllabe comme trace de leur existence: cantà, finì, calà...
-pescadou, flou ont également perdu leur r
-par contre madur, amour l'ont gardé ainsi que mar
Si on regarde plus à l'est, vers la Ligurie, on trouve un mot similaire au Gascon pour désigner la mer: mä (avec un a long) comme dans la chanson de Fabrizio de André Crêuza de mä"sentier marin".
http://www.youtube.com/watch?v=Mq1wJcQlDZY&feature=related |
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giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 14:14 |
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En pièmontais mar est masculin et a toujours conservée la r.
Le même on pourrait dire de matur/mur = madur
En ligurien, Crêuza de mä" ne signifie pas "sentier marin", mais une route "creusée" entre deux mur et qui va en direction de la mer |
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Invidia
Inscrit le: 24 Jul 2008 Messages: 441 Lieu: Gasconha (França)
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 15:12 |
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Le gascon est donc dans la Romanie une exception à savoir que dans amor, madur, mar, ... -r final est tombé (il tombe même dans les parlers médoquins : on dit aussi "la ma" pour "la mar"). Et je surenchéris avec les formes ouest-gasconnes (de Bordeaux à Bayonne) pour les étymons en -rru(m) : carru(m) > cà (noté car, "charrette"), ferru(m) > hè (noté hèr, "fer").
Il ne semble pas qu'à date récente, il y ait eu tendance à rétablir ces r finaux : on peut attribuer ce fait en partie à l'orthographe félibréenne qui ne les rétablissait pas à l'écriture, même si la raison la plus probable est l'absence de tradition écrite et savante, mêlée à un certain atavisme gascon. |
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Geremi
Inscrit le: 12 Jan 2006 Messages: 181 Lieu: Nissa
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 15:30 |
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giòrss a écrit: | En pièmontais mar est masculin et a toujours conservée la r.
Le même on pourrait dire de matur/mur = madur
En ligurien, Crêuza de mä" ne signifie pas "sentier marin", mais une route "creusée" entre deux mur et qui va en direction de la mer |
Ok, la traduction littérale de crêuza de mä n'est pas "sentier marin" mais "creusement vers la mer". Sentier marin semble tout de même une bonne traduction.
De toutes façons, mä (que j'ai vu écrit mâ également) veut bien dire mer. |
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giòrss
Inscrit le: 02 Aug 2007 Messages: 2778 Lieu: Barge - Piemont
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écrit le Sunday 14 Feb 10, 18:15 |
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Oui tu as raison. Le ligurien fais tomber la r finale.
P.S. Au Piémont il y a beaucoup de rues appellées "via creuza" et aussi un toponyme Crisseul/Crissolo...un lieu creuzé dans la vallée du Po. |
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