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Le gascon en Soule - Forum langue d'oc - Forum Babel
Le gascon en Soule

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Invidia



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Messageécrit le Monday 22 Mar 10, 3:17 Répondre en citant ce message   

Dans ce fil de discussions, j'entends parler de la pratique du gascon dans la province basque de Soule et dans l'Oloronais béarnais voisin.


La Soule dans les Pyrénées-Atlantiques



La frontière historique entre Soule et Oloronais en noir, la frontière linguistique en orange(qui n'en est pas vraiment une, il existe des toponymes romans dans des zones bascophones et inversement) : Esquiule, village béarnais, est majoritairement bascophone, alors que Montory village souletin, est gasconophone. Intéressons-nous à Montory.

1. A propos du nom de Montory

Il n'y a pas vraiment de col entre le Barétous et la Soule mais plutôt un défilé.
Cela dit, on ne comprend pas pourquoi Montory parle gascon si l'on ne prend pas en compte qu'il s'agit d'un bourg royal à qui l'on octroya le for d'Oloron : c'est probablement de cette époque que date la romanisation de ce village, appelé peut-être autrefois Beroritz qui en était le nom basque encore au XVIIème siècle, probable composé de bel (de beltz=noir).
Selon Orpustan, la finale ori(tz) aurait pu servir pour former artificiellement par analogie le nom roman Mont (plus déterminant). Mais pourquoi le gascon aurait-il repris ori sans le -tz, alors que généralement il conserve les finales sifflantes ?

Il semble qu'Orpustan tende à croire que le nom soit artificiel, au sens où il aurait été donné lors de la fondation du bourg royal.
Il ne fait que supposer qu'on aurait repris une partie du nom basque à des fins "publicitaires".
Selon lui il ne peut s'agir que du basque hori=jaune, clair en tant qu'allusion au Mont Bégousse, comme dans Larrory ("lande claire"), l'identification au Pic d'Orhy lui semblant difficile car l'aspiration souletine serait maintenue et de toute façon, le Pic est fort loin du territoire communal de Montory.
Dans tous les cas, -tz a toujours été senti comme un suffixe en basque.

Pour ma part, je pense que l'on peut bien envisager un dérivé du latin montorium (promontoire) qui aurait été adapté Montori sans nul doute en basque. Seulement en gascon, le suffixe -orium donne -er et l'on aurait Monter plutôt Monder même en gascon du Barétous.
Il faut donc supposer que le nom gascon aurait été refait sur la prononciation basque d'un terme de latin médiéval.

Notez que des attestations anciennes notent Montoury.
Montori est aussi un hameau disparu d'Anglet : sa localisation pourrait donner la clé même s'il peut s'agir d'un nom d'origine.
Il y a également un sommet dit Montori entre Belfort et Alsace germanophone : quelqu'un sait-il si les parlers germaniques adapteraient le latin montorium ainsi ?

Il s'avère que le Montori angloy était à première vue le lieu d'un couvent dans la dépendance de Saint-Bernard.
On pense aux Montoir de France que certains font venir de monasterium mais c'est impossible, monasterium donne Moutier en langue d'oïl et le basque n'aurait jamais déformé cela en Montory, bien plus en Mohazteri, quelque chose das le genre.
D'ailleurs, Montori d'Anglet n'est qu'un couvent. Le montage mont+hori au sens du roman montclar/clarmont ne me choquerait pas au demeurant.
En fait, je le conçois plus facilement qu'un dérivé savant de montorium surtout du fait que Montory se retrouve en deux exemplaires à chaque fois dans des régions charnégous où l'emprunt momentané du mot roman mont me semble possible.
Dans le même genre on a le patronyme Mercatbide qui va au delà d'un vieil emprunt (et qui se trouve justement en Soule à Barcus). On a d'autres exemples de ces doublets basco-romans :

Lantabat (vallée de Lanta), Ostabat (vallée de Hosta), Moncayolle (mont des kaiolar), Guétary (les dernières hypothèses s'accordent à y voir le nom de "guetteur" adapté au basque, ...

On trouve également un Montoria à Peñacerrada (Urizaharra en basque, ça me semble être la "vieille ville") dans l'Alava méridional, à la frontière avec la Rioja, dans une région castillanisée mais à la toponymie parfois basque.
Egalement Montorio dans la province de Burgos mais comme les Montorio italiens, c'est le latin montorium de toute évidence.

2. Le gascon à Montory

Il semble que dans le gascon local, Montory se dise "Moundory" c'est-à-dire Mondòri, ce qui est conforme au phonétisme "basque" des parlers gascons d'Aspe et Barétous (sonorisation de t après nasale).

Le lien suivant indique quelques caractéristiques du parler gascon de Montory : il est en tout point conforme à ce que l'on sait du gascon de la vallée béarnaise du Barétous.

http://www.commune-montory.fr/Patrimoine%20culturel-Les%20langues%20parlees.htm

Le village se situe au pied du Mont Bégousse (possible déformation du gascon bédousse=bouleau comme La Bégoussère à Sainte-Suzanne).
Sa toponymie était déjà en partie romane au XIVème siècle : Partarrieu, Prat, ...
Elle l'est toujours : Gabastou, Bournau, Dastugues, Pintou, Pacheu, Larrey, Hourcq, ...

Et pourtant, tous les panneaux du village sont bilingues... en basque. De la force de l'identité basque. Au passage, notons que les Souletins appellent "Kaskoinak" ceux qui ne savent pas parler le basque souletin (ceux qui parlent le basque non-souletin sont dits : "Manexak").
"Kaskoin", c'est évidemment "gascon", une preuve de plus que pour les Basques de Soule, les voisins du pays de Béarn étaient des "Gascons", pas seulement des "Béarnais" ("Biarnesak").



Dernière édition par Invidia le Monday 22 Mar 10, 3:44; édité 1 fois
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Invidia



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Messageécrit le Monday 22 Mar 10, 3:34 Répondre en citant ce message   

Nous sommes dans le village de Sauguis. C'est évidemment le basque souletin que l'on parle.

Le nom "français" du village est comme toujours le nom gascon tiré de l'étymon basque Zalgiz (zalge=vesce + suffixe locatif -i(t)z).
Le passage de la forme basque à la forme gasconne s'explique par une banale vocalisation.
Aucune idée sur le fait de savoir si conformément à une certaine tendance des noms d'origine basque, il y avait recul de l'accent tonique en gascon.

En 1347, les textes gascons parlent de "la abadie de sauguis", aujourd'hui Aphate.
Quelques romanismes pour des noms de maison à la même époque : Carrère (Karrera), Miranda. Les autres domaines, nobles, francs, fivatiers ou botoys sont basques évidemment.

La toponymie moderne fait état de quelques termes gascons : Saligat (nom de la saligue au bord du Saison), Puyouénia (Puyou-enea). Autres gasconnismes : un sommet appelé Zerra qui ne peut que provenir du gascon "sèrra", Lacosteborda (la "borda" d'un dénommé Lacoste).

Il est assez probable que cette base basque zalge soit à l'origine du fief béarnais de Sauguette à Montagut (Zalgeta), encore qu'il faille une prononciation sur place pour éviter la confusion avec le gascon saüc (qui aujourd'hui n'est jamais prononcé sauc). Cf La Sauguère à Sault-de-Navailles.

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Invidia



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Messageécrit le Monday 22 Mar 10, 3:41 Répondre en citant ce message   

Nous sommes en Béarn, vallée de Barétous, à Aramits. La prononciation en gascon d'Aramits avec accent tonique sur l'antépénultième ne laisse aucun doute : il s'agit bien d'un toponyme basque. C'est bien Aràmitz (comme Biàrritz). Le recul de l'accent tonique (qui est également typique des zones de contact gasconnes charnégous du Bas-Adour) pose une question : pour quelle raison n'a-t-il pas lieu pour les suffixes en -os qui sont généralement conçus dans une plus vaste famille de suffixes locatifs à sifflantes (-atz/otz/itz) ?
Sachant qu'en basque, il n'y a pas d'accent tonique.

1. Le nom d'Aramits

Beaucoup d'auteurs expliquent le nom de ce village, indubitablement basque, par le terme aran=vallée suffixé en -itz (suffixe locatif avec sifflante).
Sans jamais expliciter phonétiquement l'assemblage : or il me semble très difficile selon les règles du gascon qu'Aranitz donne Aramitz.
On aurait plutôt la conservation de l'étymon (la question de la chute du n intervocalique n'est pas résolue pour les étymons basques).
Par contre, en basque, de tels phénomènes de "bilabialisation" sont fréquents, notamment en Haute-Soule à laquelle le Barétous est lié :
ainsi le terme zunhar pour ormeau peut donner dans les textes médiévaux aussi bien sunarte (hameau béarnais de Sauveterre), suhart, çuguarriaga et çumarraga.
De même la base ancienne inhi=jonc, conservée en souletin, a donné dans des dialectes qui ont perdu les nasales "ihi", mais probablement le hameau médiéval ymizcoyz de Basse-Navarre.

Source : La langue basque au Moyen-Age de Jean-Baptiste Orpustan

Pour résumer, un n intervocalique peut en basque être conservé, passer à h dans des dialectes qui ont perdu les nasales (cf la nasalité en gascon) ou être "bilabialisé" et passer à m.
C'est probablement le cas d'Aramits dont la langue ancienne devait être le souletin qui conserve bien les nasales et parfois même les palatise (cf Larrau qui est le nom gascon de la commune qui se dit en souletin Larrañe, sur-évolution de Larraun, en gascon, dénasalisation de la finale, en souletin palatisation).

Donc, Aramitz peut très bien selon les règles de la phonétique basque, être issu d'Aranitz, tout comme il aurait pu donner Arahitz/Araitz, ou même Arañitz.
En basque, il n'y a pas de règle absolue. Sinon, il faut envisager des assemblages plus complexes sur aran, qui en composition dans les pays souletins donne ara- (pour le coup, dénasalisation finale), et un terme obscur et non-identifiable.

2. Le gascon à Aramits

Le gascon d'Aramits est du gascon pyrénéen aspo-barétounais (donc conservation de sourdes intervocaliques comme en aragonais et en absque). Vous pouvez l'écouter dans le lien suivant :

http://crdo.risc.cnrs.fr/data/thesoc/64-ARETTE.wav

En 1385, la presque totalité des maisons porte un nom gascon : Sarrulhe, Abadie, Domec, Safores, Glere, Carrere, Casebone, Anglate, Arripe, Hondebiele, Labordesse, Pocolo (?), ... Seul semble basque : Achari.

La domonymie médiévale d'Aramits fait peu état de la présence basque.
Remarquons cependant que les noms des maisons sont très classiques, comme en Aspe : on a l'impression que le gascon vient traduire des termes précédents.
Dans l'actualité, on parle encore basque sur le territoire d'Aramits dans la vallée du Joos qui fait frontière avec la Soule aux quartiers Mizpira et Lapeyrère : Oyhenard, Logeberry, Arhancet, Aïtzaguer, Mendioudou, Garay, ...

Dans la vallée du Vert, axe principal du Barétous, on trouve en territoires de langue gasconne des toponymes bien basques : Mousquil, Larrande, Lurbet, Gourroure, Atchouètos (?), Lardieg, Escary, ...

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Invidia



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Messageécrit le Monday 22 Mar 10, 3:43 Répondre en citant ce message   

Le Soum de Berret domine le paysage du Barétous. Ce sommet tire-t-il son nom de la forme de la montagne ? Voit-on un homme avec un béret (qui se dit 'bonet' cependant, je crois, à Arette) ?
Sachant que les pentes du sommet s'appellent "Netchury", nom tout à fait basque, on peut imaginer que le sommet tire en fait son nom du basque Berreta, forme réduite de Berroeta 'lieu de broussailles'.
Ou alors sur le basque "belhar" au sens d'herbe : belharreta avec h aspiré qui donne beharreta (de la même manière que la commune barétounaise d'Ance est en fait le basque souletin Arhantza avec chute de la consonne aspirée).

Les noms des sommets entre Barétous et Aspe sont très bascoïdes : Biscacou, Bigurne, Biscarroules, Bératu, Liorry, Bisarce, Athay, Unars, Bugangue, Urdach, ...

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Invidia



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Messageécrit le Friday 26 Mar 10, 23:31 Répondre en citant ce message   

Hameau souletin des collines de la vallée du Saison, non loin du Béarn. La toponymie de la commune est d'ailleurs par endroits gasconne : Laplume, Bou, Poutou, Béthulard, Abbadie.

Le nom basque est Larrabil ("lande arrondie") qui décrit parfaitement le site.
Larrebieu est évidemment la gasconnisation de l'étymon basque.
En basque, le nom d'habitant est également pris au gascon : on dit "Larrebies" en concurrence avec "Larrebiltar".

Larrabil donne également le patronyme béarnais Larbiou ainsi que les lieux-dits béarnais homonymes.
Il est plus malaisé d'expliquer de la sorte les lieux-dits gersois : Larrebiou à Saint-Lizier-du-Planté, Larrebeou à Scieurac-et-Flourès. Larrebelle (Larrebila) à Léon (40) est plus probable. Mais que signifierait alors en gascon du gers "l'arrebiu" ?

Pas de maisons nobles à Larrebieu. Les maisons fivatières portent en grande majorité des noms basques et existent toujours pour la plupart : "lostau dardoya" (Hardoy), "lostau daccquerbiscay" (Arkabisquey), "cabalaynh" (Sabalain), ...

Deux maisons romanes cependant : "Castelan" et "Bethulard", ce dernier étant peut-être un assemblage bilingue sur le latin pour bouleau - bethulus - et le basque larre=lande.

Une maison de Larrebieu - "behetie juzon" - était fivatière de la maison noble d'Espiute en Béarn dite "lostau de cheverrie domenger" dans le Démembrement béarnais de 1385, autrement dit Etxeberri(a), et dit "cazenave d'espiute" dans le texte gascon souletin du Censier gothique.
Autrement dit, on a la preuve que l'on passait d'une langue à l'autre pour les termes transparents.

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