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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10941 Lieu: Lyon
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 14:10 |
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- Ghoulish on Wall St.
- (Spectacle) macabre / morbide sur Wall Street
Titre d'un article du New York Post - 04.10.2011
Ce titre fait référence aux manifestants du mouvement contestataire Occupy Wall Street, déguisés en zombies, censés représenter les financiers et traders de la Bourse de N.Y.
ghoulish (1840) : macabre - morbide
ghoul : goule
Etymologie :
ghoul + -ish (suffixe formant des adjectifs)
- ghoul (1786) : dans la traduction anglaise de Vathek, conte arabe écrit en français par l'écrivain anglais William Beckford en 1782
de l'arabe الغول al ghûl [ gh : r "parisien", non roulé - ou long ]
esprit malfaisant qui pille les tombes et se nourrit des cadavres
de ghala : saisir - s'emparer de (= he seized : en arabe, c'est la forme de l'accompli -passé- qui fait fonction d'infinitif)
(etymonline)
Dans le folklore arabe, les ghouls peuvent changer de forme mais gardent toujours des sabots d'âne à la place des pieds (merriam-webster.com). |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10941 Lieu: Lyon
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 14:10 |
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Voir le lien vers le conte Vathek.
Extrait de l'article goule de Wikipedia :
Citation: | La goule (de l'arabe الغول al-ghûl, le « démon », la « créature », la « calamité » ) est une créature monstrueuse du folklore arabe et perse qui apparaît dans les contes des Mille et Une Nuits. Elles forment une classe de Jinn, comme les Éfrits par exemple, et sont donc à ce titre l'engeance du diable, Iblis. Les goules changent de forme, prenant le plus souvent l'apparence d'une hyène ou celle d'une femme, mais elles sont reconnaissables à leurs pieds fourchus, seul élément constant de leur apparence[1]. La ghula, féminisation du mot arabe, est l'équivalente arabe/perse de Lilith (Lamia).
La goule affectionne les cimetières où elle déterre les cadavres pour s'en nourrir et dans d'autres endroits peu fréquentés. La goule hante aussi le désert sous les traits d'une jeune femme et elle dévore les voyageurs qui succombent à ses appels, non sans rappeler les sirènes du récit de l'Odyssée. De nombreux récits terrifiants destinés aux enfants ont pour acteur principal une goule dans les pays du Maghreb. La goule y joue souvent le rôle du Grand méchant loup.
J. K. Rowling habille une goule en pyjama pour fournir un alibi à Ron Weasley dans Harry Potter et les Reliques de la Mort. |
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Xavier Animateur

Inscrit le: 10 Nov 2004 Messages: 4087 Lieu: Μασσαλία, Prouvènço
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 15:23 |
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On trouve le terme goule dans la traduction des Milles et une nuits d'Antoine Galland (première édition en 1712)
Je fus dans une surprise épouvantable, lorsque je vis ma femme avec cette goule ; elles déterrèrent un mort qu'on avoit enterré le même jour, & la ,goule en coupa des morceaux de chair à plusieurs reprises , qu'elles mangèrent ensemble, assises sur le bord de la fosse. Elles s'entretenoient fort tranquillement, en faisant un repas si cruel & si inhumain ; mais j'étois trop éloigné, & il ne me sut pas possible de rien comprendre de leur entretien, qui devoit être aussi étrange que leur repas, dont le souvenir me fait encore frémir.
Voici une définition, tirée de Arabian Nights Encyclopedia (Ulrich Marzolph et Richard van Leeuwen)
The ghoul is a giant cannibal jinnî and the quintessence of the evil jinn.
Goule : Femme lascive, insatiable. (sens figuré, Robert)
De Pierre Loti (Mon frère Yves)
Alors on entendit au dehors des gongs et des sonnettes, des frôlements de soie, de petits rires aigres de femmes.
Et les danseuses entrèrent. (Les gabiers s'étaient commandé des danseuses.)...
Ils s'arrêtèrent en les voyant paraître, car elles étaient étranges. Peintes comme des images chinoises, couvertes d'or et de pierres brillantes, des yeux à demi fermés, pareils à de petites fentes blanches, elles s'avançaient au milieu de nous avec des sourires de femmes mortes, tenant leurs bras en l'air et écartant leurs doigts grêles, dont les grands ongles étaient enfermés dans des étuis d'or.
En même temps, des odeurs de baume et d'encens ; on brûlait des baguettes dans un réchaud, et une fumée alanguissante se répandait comme un nuage bleu.
Les gongs sonnaient plus fort et ces fantômes dansaient, gardant leurs pieds immobiles, exécutant une espèce de mouvement rythmé du ventre avec des torsions de poignets. Toujours le sourire figé, le regard blanc des cadavres ; il semblait que cela seul eût vie en elles : ces gros reins cambrés de goule qu'agitaient des trémoussements lascifs, et puis, au bout des bras raidis, ces mains écartées, inquiétantes, qui se tordaient. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3887 Lieu: Paris
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 15:43 |
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Il est peut-être regrettable que Galland ait choisi l'orthographe "goule" que nous avons conservée en français et qui avait commencé à s'introduire en anglais, avant d'y être remplacée par "ghoul" plus conforme aux transcriptions fidèles (même lettre "gh" que dans Maghreb). Mais d'Herbelot dans sa Bibliothèque orientale utilisait déjà goul en 1697 pour une sorte de démon.
Malgré ce que disent Etymonline et Chambers, je n'ai pas l'impression que l'orthographe "ghoul" soit celle choisie dans les premières éditions en anglais de Vathek ; celles qui sont accessibles sur Google Livres (pas la toute première malheureusement) ont "goul" jusqu’à la moitié du XIXe siècle.
On trouve cependant la transcription ghul, dans un contexte arabisant, dans A dissertation on the languages, literature, and manners of eastern nations de John Richardson, en 1777.
Il y a un lien à faire avec l'étoile Algol.
Dernière édition par embatérienne le Tuesday 04 Oct 11, 23:14; édité 1 fois |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11235 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 19:04 |
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José a écrit: | de ghala : saisir - s'emparer de (= he seized : en arabe, c'est la forme de l'accompli -passé- qui fait fonction d'infinitif) |
Cette forme est inusitée en arabe moderne, et, de toutes façons, je pencherais plutôt pour une relation d'homonymie entre les deux racines غول [ġwl]. A moins que le verbe ne soit dérivé du nom, ce qui est une autre possibilité.
A propos du ghoul (masculin en arabe), Kazimirski précise drôlement :"sorte de démon, ogre qui déroute les voyageurs, et les dévore ensuite en commençant par les pieds" ! |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3887 Lieu: Paris
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 19:35 |
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Papou JC a écrit: | A propos du ghoul (masculin en arabe) |
mais les contes arabes sont remplis de ghoula, la goule, bien féminin ! |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11235 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 21:11 |
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Bien, alors je précise, pour qu'il n'y ait ni confusion ni ambiguïté :
- غول [ġūl] : masculin.
- غولة [ġūla] : féminin du précédent.
C'est probablement la forme masculine qui est à l'origine du mot français, qui est lui, féminin. C'est tout ce que je voulais dire.
Et je regrette par ailleurs de ne pouvoir faire une étude statistique sur les fréquences des deux formes, car je pense que la forme masculine doit l'emporter de très loin sur la féminine. Mais bon... |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3887 Lieu: Paris
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écrit le Tuesday 04 Oct 11, 23:01 |
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Il faudrait entreprendre un travail assez fastidieux pour le savoir. Dans les versions arabes des 1001 nuits, on trouve ghoul et ghoula (le premier plus souvent que le second, semble-t-il). Mais dans Galland, il faudrait savoir à quoi correspondent l'emploi de goule, ogre, ogresse par rapport à l'original.
Dans les contes maghrébins, la figure de la ghoula me semble plus fréquente que celle du ghoul, même si les deux sont connus. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11235 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 2:16 |
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J'ai oublié de dire que la forme féminine غولة n'est donnée ni par Reig ni par Kazimirski. Ce qui, pour ce dernier au moins, me semble assez significatif.
Et puis, allons plus loin : comme pour les djinns, جنّ , plus qu'un "masculin singulier", la forme غول est celle d'un collectif, d'un nom d'espèce, si l'on préfère. Quant à la forme غولة que nous appelons "féminin singulier" par commodité, il s'agit en l'occurrence du nom d'unité. Quand l'arabe dit namla, il ne désigne pas une fourmi femelle, il désigne UNE fourmi au sein de l'espèce naml, et ne va pas vérifier si elle est mâle ou femelle. Il en va de même pour ces troupes d'êtres imaginaires et asexués que sont les ghouls et les djinns, qui se manifestent rarement seuls. On s'est donc trompé en traduisant indifféremment غول et غولة par "une goule", il aurait fallu les traduire respectivement par "DES ghouls et "UN ghoul". Maintenant, il est un peu tard pour revenir en arrière, le ghoul arabe asexué est devenu à jamais la goule française sexy, lascive, et goulue...
EDIT : je révise plus bas cette hypothèse.
Dernière édition par Papou JC le Wednesday 05 Oct 11, 12:42; édité 1 fois |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3887 Lieu: Paris
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 8:25 |
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Kazimirski a des omissions. Que le mot ne soit pas dans Reig ou Wehr est normal, ça ne fait pas partie du vocabulaire le plus courant dans l'arabe moderne, puisque c'est essentiellement lié à la tradition orale. Cela dit, il y a bien des dictionnaires qui l'accueillent, par exemple mon Elias' Modern Dictionary Arabic-English, 9e edition, Cairo.
Peut-être de l'oubli de Kazimirski vient que Pihan, dans la première édition de son dictionnaire étymologique des mots dérivé de l'arabe, du turc et du persan, ne parle pas du féminin, mais qu'il se ravise dans l'édition de 1866. On trouve ce féminin dans le vieux dictionnaire de Marcel ou là. Le dictionnaire de Beaussier, qui est une référence pour l'arabe maghrébin, n'a garde de l'oublier, et après غول qu'il traduit par ogre, colosse, géant, il donne غولة qu'il traduit par goule, lamie, vampire. Il s'agit bien d'un féminin et non d'un nom d'unité comme tu veux le croire. Voir aussi ce lexique moderne relatif au Maroc ou celui-là à l'Algérie.
Je pense, cher Papou, que tu ignores le folklore maghrébin, sinon tu ne montrerais pas une telle obstination. Les "contes de fées" du Maghreb sont remplis de la ghoula, qu'on traduit généralement par ogresse, ce qui colle assez bien car la ghoula est très semblable à l'ogresse du Petit Poucet ; c'est une femelle, épouse d'un ghoul, qui partage avec lui ses appétits cannibales mais qui parfois se montre plus compatissante pour les enfants. Néanmoins, la ghoula est (était ?) la menace n°1 pour les enfants qui ne sont pas sages !
Peut-être ce livre pourrait-il te guider, l'ogre entre le réel et l'imaginaire dans le conte populaire du Maroc. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11235 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 9:09 |
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Tu penses bien : j'ignore effectivement le folklore maghrébin, et tu es là pour remettre les pendules à l'heure et c'est très bien. C'est tout l'intérêt d'un forum.
Ne me prends pas pour un obstiné, je n'affirme rien, la plupart du temps, je fais des hypothèses. Je pose simplement des cartes sur la table et demande qu'on les observe ensemble. Comme nous n'avions pas encore parlé de la possibilité que ghoula soit le nom d'unité de ghoul, je l'ai fait, et je persiste à penser que c'est probablement vrai dans certains cas sinon dans tous. Et je pense aussi que l'acception "féminin" est probablement postérieure à l'acception "nom d'unité", première et ancienne. Il serait intéressant, effectivement, d'étudier l'évolution de ghoula au fil de ses occurrences littéraires, du Moyen Age jusqu'à nos jours. Et de comparer les dates de première apparition des deux formes, la "masculine" et la "féminine". |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3887 Lieu: Paris
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 9:21 |
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Tu peux facilement télécharger une version arabe des 1001 nuits et déjà étudier les différences entre l'utilisation de ghoul et de ghoula. Ce sera un premier pas.
Il est possible que la prédominance d’ogresses au Maghreb soit liée à une influence berbère. Voilà des titres qui suggèrent qu’on pourrait en savoir plus sur ce point :
Au pays des ogres et des horreurs: contes du Maroc Par Najima Thay Thay Rhozali
L'ogresse dans la littérature orale berbère Par Nabile Farès
Contes de femmes et d'ogresses en Kabylie Par Camille Lacoste-Dujardin
mais je ne les ai pas lus ! |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11235 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 9:43 |
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Ah, si j'étais un jeune étudiant à la recherche d'un sujet de maîtrise...
Influences berbères ... et gréco-latines, non ?
A part ça, en lisant et relisant divers articles sur le sujet, y compris la citation de Wikipedia rapporté plus haut par José, j'en viens à me demander si ghoul n'était pas à l'origine un nom féminin par nature qui n'avait donc pas besoin d'une marque spéciale, comme c'est le cas pour un certain nombre de noms arabes relatifs aux femmes et uniquement à elles ("celle qui est enceinte, celle qui allaite"). La forme ghoula a dû être créée tardivement lorsque ghoul a cessé d'être perçu comme féminin par nature.
Auquel cas - et contrairement à ce que j'ai dit plus haut - les traducteurs auraient donc été bien inspirés de traduire par LA goule.
Dernière édition par Papou JC le Wednesday 05 Oct 11, 12:38; édité 1 fois |
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Azwaw
Inscrit le: 30 Aug 2010 Messages: 975 Lieu: Le Havre
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 11:55 |
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Au sujet des contes de Kabylie, c'est bien la figure de l'ogresse (féminine donc) qui revient le plus souvent et que l'on nomme "teryel". |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3887 Lieu: Paris
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écrit le Wednesday 05 Oct 11, 22:53 |
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Je me suis amusée à rechercher la première occurrence de غولة dans le texte arabe des 1001 nuits. C'est assez tôt, dans la cinquième nuit.
Citation: | فدخل خلفها وهي لا تعلم به، فإذا هي غولة وهي تقول لأولادها يا أولادي قد أتيتكم اليوم بغلام سمين فقالوا لها أتينا به يا أمنا نأكله في بطوننا.
فلما سمع ابن الملك كلامهم أيقن بالهلاك وارتعد فرائضه وخشي على نفسه ورجع |
Mais comme je l'ai dit hier, Galland ne la traduit pas à ce moment par goule.
Galland parle alors d'ogresse (Histoire du Vizir puni): Jugez quelle fut sa surprise, lorsqu’il entendit la dame en dedans prononcer ces paroles : « Réjouissez- vous, mes enfants, je vous amène un garçon bien fait et fort gras, » et d’autres voix lui répondirent aussitôt : « Maman, où est-il, que nous le mangions tout à l’heure ? car nous avons bon appétit. » Le prince n’eut pas besoin d’en entendre davantage, pour concevoir le danger où il se trouvait. Il vit bien que la dame qui se disait fille d’un roi des Indes était une ogresse, femme de ces démons sauvages, appelés ogres, qui se retirent dans des lieux abandonnés, et se servent de mille ruses pour surprendre et dévorer les passants. Il fut saisi de frayeur et se jeta au plus vite sur son cheval.
Mardrus, plus fidèle, écrit (Histoire du Prince et de la Goule) : il entra derrière elle sans qu'elle s'en aperçût : or c'était une goule ! Et elle disait à ses enfants : « mes enfants, aujourd'hui je vous ai amené un jeune garçon bien gras ! » Et ils lui dirent : « Oh ! porte-le-nous, ô notre mère, pour que nous le mangions dans nos ventres ! » Lorsque le prince entendit leurs paroles, il ne douta plus de sa mort, et ses muscles frémirent, et il fut plein de terreur pour lui-même, et il revint.
Pour le plaisir de la comparaison, voici Edward William Lane dans sa traduction de 1839 (the Envious Weezer, the Prince, and the female Ghool): and entering after her, without her knowledge, perceived that she was a Ghooleh, and heard her say, My children, I have brought you to-day a fat young man :—on which they exclaimed, Bring him in to us, O mother! that we may fill our stomachs with his flesh. When the Prince heard their words, he felt assured of destruction; the muscles of his side quivered, and fear overcame him, and he retreated.
Lane consacre une longue note aux jinns et aux ghouls qu'on pourra lire ici, où il précise d'ailleurs, parmi plusieurs opinions, que It appears that "Ghool" is, properly speaking, a name only given to a _female_ demon of the kind above described: the male is called "Kutrub."[/quote] |
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