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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 8:52 |
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taf (avoir son taf = avoir son content), dont le TLF ignore l'origine, me semble venir en droite ligne de طفّ [ṯaff], "bord d’un verre ; trop-plein, excédent de la mesure, d’un vase". |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 10:42 |
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Le sens originel de ce taf, attesté seulement à l'extrême fin du XIXe siècle, est la part (du butin), la ration.
On ne voit pas trop le lien sémantique avec l'arabe طفّ [ṯaff], "bord d’un verre ; trop-plein, excédent de la mesure, d’un vase", qui n'est d'ailleurs pas attesté en arabe maghrébin par Beaussier, ce qui rend peu crédible son emploi en français à cette période. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 12:03 |
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embatérienne a écrit: | On ne voit pas trop le lien sémantique avec l'arabe طفّ [ṯaff], "bord d’un verre ; trop-plein, excédent de la mesure, d’un vase" |
Moi je vois très bien le lien avec le sens dans lequel j'ai toujours compris l'expression "avoir son taf".
embatérienne a écrit: | ... qui n'est d'ailleurs pas attesté en arabe maghrébin par Beaussier, ce qui rend peu crédible son emploi en français à cette période. |
La présence française dans le monde arabe ne s'est pas limitée au Maghreb. Notre langue doit bien avoir hérité aussi de quelques mots rapportés d'Egypte et du Levant. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 12:25 |
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1) Peut-être mais ce n'est pas le premier sens relevé, de très loin dans les dates relevées, et ce second sens s'explique bien par le premier.
2) Très improbable à la fin du XIXe. Tu as des exemples (autres que ceux qui concerneraient une réalité locale) ? |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 14:00 |
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Non je n'ai pas d'exemple, mais ce qui m'étonne c'est que la racine طفّ [ṯ-f] ne soit pas attestée en arabe maghrébin. Pas le moindre mot - nom ou verbe - reposant sur cette base ? |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 14:46 |
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Si, le verbe rare (absent de Ben Sedira) de la 2e forme, ṯaffaf dépasser la mesure ou ne pas remplir entièrement la mesure. La rareté du mot et sa signification particulière ne plaident pas pour une introduction de ce mot arabe dans les populations francophones sous la forme et au sens de taf. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 16:53 |
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C'est un verbe classique et un cas intéressant, relevé par Lane, de ces mots qui peuvent signifier une chose et son contraire, et qu'on appelle en arabe les أضداد [aḍdād].
Bon, ben, voilà. C'était une hypothèse. En attentant d'avoir la révélation sur la véritable origine de taf. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 17:34 |
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Papou JC a écrit: | C'est un verbe classique et un cas intéressant, relevé par Lane, de ces mots qui peuvent signifier une chose et son contraire, et qu'on appelle en arabe les أضداد [aḍdād]. |
Ces cas sont parfois de simples illusions dues à la traduction. Par exemple, il se peut que le sens du verbe arabe soit simplement "ne pas être exactement à la mesure". C'est un seul sens, mais des fois, ça dépasse, des fois, ça manque ! |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 17:49 |
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Peut-être dans ce cas-ci mais sinon, c'est un phénomène bien connu relevé par les grammairiens arabes depuis longtemps. On pourrait d'ailleurs ouvrir un fil sur ce sujet, si ça intéresse. Il y a notamment des cas de tabous, un peu comme en grec avec les Bienveillantes que l'on appelait ainsi pour conjurer leur malveillance caractéristique. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10945 Lieu: Lyon
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écrit le Friday 22 Mar 13, 17:58 |
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La définition de taf donnée par le TLFi est assez surprenante :
A. − Peur
B. − Part de butin
C. − Loc. Prendre son taf. Synon. (arg.) prendre son pied
Quid de taf = travail/emploi ?
aller au taf : aller au boulot
avoir du taf : avoir un job |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 18:04 |
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José a écrit: | Quid de taf = travail/emploi ?
aller au taf : aller au boulot
avoir du taf : avoir un job |
C'est, j'ai l'impression, une extension de sens très récente mais très populaire, et d'ailleurs la seule que j'entends très régulièrement. D'après Bob, c'est une extension du sens plus ancien de "part du butin" dont on a discuté. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 18:22 |
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Avant de clore (en ce qui me concerne) sur le verbe arabe cité plus haut, je voudrais simplement citer un dicton qui le contient :
خذ ما طفّ لك [ẖuḏ mā ṭaffa laka] (= prends ce qui est à ta portée) qui correspond au français "Contente-toi de ce que tu as".
Il existe une variante avec la forme IV.
Le TLF donne avoir son fade comme synonyme de avoir son taf. Qui a une idée sur l'origine de ce fade ? (Autre que celle du TLF, bien entendu...) |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 18:35 |
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Papou JC a écrit: | Peut-être dans ce cas-ci mais sinon, c'est un phénomène bien connu relevé par les grammairiens arabes depuis longtemps. On pourrait d'ailleurs ouvrir un fil sur ce sujet, si ça intéresse. Il y a notamment des cas de tabous, un peu comme en grec avec les Bienveillantes que l'on appelait ainsi pour conjurer leur malveillance caractéristique. |
Oui, j'ai souvent entendu parler de ça. Je ne suis pas sûr qu'on ait la compétence pour en dire beaucoup plus que ce qui se trouve déjà dans les bouquins.
En français, on a des cas souvent cités comme louer, apprendre ou hôte où l'on a l'impression d'avoir des sens contraires. On peut cependant dire que "louer" signifie une seule chose : être dans une relation de louage, et que cette relation peut se voir par un bout ou par l'autre.
Il y a en arabe des cas semblables, avec par exemple des verbes qu'on peut traduire par "acheter" ou "vendre", mais dont le sens unique peut être "établir un transfert de propriété".
Mais il doit aussi y avoir des cas qui ne sont pas réductibles à un seul sens de la même manière. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11192 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Friday 22 Mar 13, 20:02 |
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Papou JC a écrit: | Le TLF donne avoir son fade comme synonyme de avoir son taf. Qui a une idée sur l'origine de ce fade ? (Autre que celle du TLF, bien entendu...) |
Moi, j'ai une idée. (On n'est jamais si bien servi que par soi-même...)
Petit constat : le verbe فاض [fāḍa] a curieusement, lui aussi, le sens de "déborder, dépasser la mesure", comme طفّ [ṭaffa].
Mais c'est une pure coïncidence, bien entendu...et je me garde bien d'en tirer la moindre conclusion. Surtout si ce deuxième verbe n'est pas non plus utilisé au Maghreb. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3875 Lieu: Paris
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écrit le Friday 22 Mar 13, 21:23 |
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La forme simple n'est pas dans Beaussier et les formes dérivées n'ont aucun rapport :
2° fawwaḍ : confier une affaire à quelqu'un, s'en remettre à lui de son exécution;
6° tfāwaḍ : vivre, être sur le pied de parfaite égalité || Causer avec quelqu'un, entretenir longuement, discuter.
Aucune chance.
Cela dit, le problème se pose différemment de taf, parce que les attestations remontent à avant la conquête de l'Algérie, comme le montre Bob.
Je me satisfais donc de l'hypothèse provençale soutenue par Dauzat et reprise dans le TLFi : Du prov. fada=faire un don de fado=fée d'où fader=partager (MCC) / De fader (du provençal mod. fadar, fada «ensorceler; doter», d'où «donner, avantager», selon Dauzat).
Par contre, pour le taf, venu après, je pourrais penser à une déformation du verlan de fade, puisque les deux ont exactement le même sens. Mais les autorités n'ont pas l'air d'avoir considéré cette piste. |
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