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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11175 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Saturday 27 Apr 13, 12:06 |
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Nicéphore voudrait donc dire "victorieux"... C'est sûr ? Et Véronique / Bérénice, alors ?
Cette différence sémantique importante serait-elle traduite par la position respective des constituants ? L'un remporterait la victoire, et les deux autres permettraient de la remporter ?
Merci pour des éclaircissements.
En les attendant, la simple consultation du Bailly (abrégé) donne ceci :
- Un exemple de Sophocle où pherô nikên est traduit par "procurer une victoire".
- Un exemple de l'Iliade où pherô mega kratos est traduit par "remporter une grande victoire".
Rien ne prouve, pour l'instant, que nous ayons affaire à des syntagmes figés, mais s'ils l'étaient, leurs sens respectifs aussi seraient figés, et le premier ne pourrait pas avoir le sens du second, et inversement. Mais deux exemples de dictionnaire ne font pas une règle...
Dernière édition par Papou JC le Thursday 07 Mar 19, 22:59; édité 2 fois |
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Glossophile Animateur
Inscrit le: 21 May 2005 Messages: 2281
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écrit le Saturday 27 Apr 13, 15:23 |
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Aucune différence : le dictionnaire donne pour νικηφόρος (nikêphoros) :
1 apportant la victoire, cause de victoire, victorieux, vainqueur.
2 apporté par la victoire, de victoire, consistant dans la victoire.
Pour Φερένικος (Phérénikos) :
Phérénikos (le victorieux), nom d'un cheval de roi.
Aucune étymologie pour Bérénice, juste la liste des femmes ayant porté ce nom. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11175 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Saturday 27 Apr 13, 15:47 |
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Glossophile a écrit: | Nicéphore ne donne pas la victoire aux autres, il l'a remportée pour lui. |
Disais-tu imprudemment dans ton précédent post.
Dans le dernier, je lis qu'il pouvait signifier aussi bien victoriant (apportant la victoire, cause de victoire) que victorieux, vainqueur. Ce n'est pas la même chose, comme on le voit clairement en arabe, et comme on le verrait mieux en français si le mot victoriant existait. |
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Glossophile Animateur
Inscrit le: 21 May 2005 Messages: 2281
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écrit le Saturday 27 Apr 13, 17:52 |
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En effet, j'ai été imprudent, car j'avais vérifié les sens de φέρω (phéro) (deux pages et demie chez Maurice Lacroix), sans vérifier νικηφόρος (nikêphoros). Je répondais à l'objection selon laquelle φέρω ne signifie pas apporter sur un plateau alors que apporter sur un plateau est l'un des premiers sens donnés par Lacroix.
Résultat des courses, que je maintiens :
νικηφόρος (nikêphoros) : signifie tout autant vainqueur qu'artisan de la victoire. Hors de tout contexte il est délicat de choisir un sens plutôt que l'autre. |
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Jacques
Inscrit le: 25 Oct 2005 Messages: 6525 Lieu: Etats-Unis et France
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écrit le Saturday 27 Apr 13, 18:15 |
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angl. vernicle : (milieu du 14e. s.) image du visage du Christ < anc. fr. veronicle, variante de véronique
(etymonline) |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11175 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Saturday 27 Apr 13, 20:01 |
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Glossophile a écrit: | Je répondais à l'objection selon laquelle φέρω ne signifie pas apporter sur un plateau alors que apporter sur un plateau est l'un des premiers sens donnés par Lacroix. |
Ce que je voulais dire - j'aurais dû être plus explicite - c'est qu'on ne dit, en français, ni "porter la victoire" ni "apporter la victoire", mais "donner la victoire".
Jacques avait raison sur le plan sémantique (apporter plutôt que porter) mais pas sur celui de l'usage (donner plutôt qu'apporter).
Chez moi, apporter fait surgir immédiatement l'image du plateau, et le mot qui le désigne.
Je suppose que pas seulement chez moi si j'en juge par le figement "apporter qqch à qqn sur un plateau", avec un sens abstrait. |
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Glossophile Animateur
Inscrit le: 21 May 2005 Messages: 2281
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écrit le Sunday 28 Apr 13, 14:55 |
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... on dit aussi remporter la victoire. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11175 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 28 Apr 13, 15:42 |
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Me serais-je mal fait comprendre ?
Oui, ça, ça ne pose pas de problème, tout le monde le sait, le victorieux remporte la victoire, tu l'as déjà dit et personne ne l'a contesté.
Le seul petit problème est de préciser ce que fait le "victoriant" : il porte, apporte, ou donne la victoire (au futur victorieux) ? |
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Glossophile Animateur
Inscrit le: 21 May 2005 Messages: 2281
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écrit le Sunday 28 Apr 13, 16:34 |
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Pas de manoeuvre de diversion : nous discutons du sens des mots qui existent, pas de ceux que tu viens d'inventer.
La question porte sur le sens de φέρω.
Je relis l'article φέρω de Maurice Lacroix, et j'y trouve un exemple de Sophocle ainsi traduit par l'auteur :
car j'affirme que cette conduite apporte la victoire et le succès de l'action. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11175 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Sunday 28 Apr 13, 17:44 |
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Je me retire de ce vain dialogue de sourds en laissant le lecteur curieux vérifier avec un moteur de recherche si "apporter la victoire" est, en français, plus ou moins usuel que "donner la victoire". |
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Glossophile Animateur
Inscrit le: 21 May 2005 Messages: 2281
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écrit le Sunday 28 Apr 13, 18:19 |
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Ce qui est totalement hors sujet... |
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Moutik Animateur
Inscrit le: 06 Apr 2008 Messages: 1236
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écrit le Sunday 28 Apr 13, 18:59 |
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Voici un emploi au pluriel, dans le sens de linge sacré.
À propos d’un cas de possession, à Toulon, en 1730.
« Et enfin au Vendredi Saint, pour l’achèvement de sa cruelle comédie, il lui fit porter une couronne de fil de fer, qui, lui entrant dans le front, lui faisait couler sur le visage des gouttes de sang. Tout cela sans trop de mystère. Il lui coupa d’abord ses longs cheveux, les emporta. Il commanda la couronne chez un certain Bitard, marchand du port, qui faisait des cages. Elle n’apparaissait pas aux visiteurs avec cette couronne ; on n’en voyait que les effets, les gouttes de sang, la face sanglante. On y imprimait des serviettes, on en tirait des Véroniques, que Girard emportait pour les donner, sans doute à des personnes de piété. La mère se trouva malgré elle complice de la jonglerie. »
Jules Michelet, La Sorcière, X, Hetzel, Paris, 1862. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3510 Lieu: Nissa
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écrit le Tuesday 26 Feb 19, 19:39 |
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Je me propose de mettre un peu d'ordre dans l'avalanche des Phérénikos, Nicéphore, Bérénice et Véronique qui semblent sans l'être être les mêmes noms.
Pas de doute sur le composant nice/nique, du grec νίκη [níkē] (avec ī long) « victoire », un mot qui traverse toute la littérature grecque ancienne et qui est même une épiclèse d'Athéna dans un petit temple sur l'Acropole d'Athènes. Le mot n'a pas d'étymologie connue, Chantraine rejetant avec raison un rapprochement ave νεῖκος [neîkos] « dispute, querelle, bataille ».
L'autre composant appartient tout aussi clairement au thème du verbe φέρω [férō] « je porte » issu de l'eurindien *bʰer- (cp. skr. bharati « il porte »). Il n'y a pas lieu de faire ici une différence entre porter et apporter, le verbe simple pouvant avoir le sens du préfixé (la nuit porte conseil, porte ça à ta mère, etc.).
Il s'agit donc bien dans tous les cas de donner la victoire, de l'apporter, d'y contribuer. Maintenant, la langue grecque avait plusieurs recettes pour fabriquer des composés. Je m'étais lancé il y a longtemps dans un essai de classification de ces choses eurindiennes pour Babel, c'est ICI et on pourra s'y reporter. Ici, les choses sont assez simples :
• φερένικος, Phérénikos, est un composé progressif, je me cite : Citation: | Ces composés existent aussi en grec et leurs premiers membres affectent éventuellement cette forme ressemblant à un impératif (cp. fr. porte-manteau, garde-fou, etc.) :
— gr. anc. φερέ-οικος « qui porte (φέρω) sa maison (οἲκος) » dit des nomades et des escargots | Le cheval de Hiéron apporte donc la victoire mais on peut comprendre aussi qu'il porte en lui la victoire.
• ce nom a aussi un féminin, Φερενίκη Phérénikè qui est attesté sous sa forme macédonienne Βερενίκη (eur. *bʰer- > mac. ber-) et qui fut porté par de nombreuses reines de Macédoine, puis d'Égypte sous les Ptolémée (cf. Bérénice Ire, la troisième épouse de Ptolémée Ier Sôter).
• Mais, chez Plutarque, on rencontre une forme thématique Βερονίκη Βéronikè: Plutarque, Questions grecques, 9, a écrit: | Μακεδόνες ‘Βίλιππον’ καὶ ‘βαλακρὸν’ καὶ ‘Βερονίκην’ λέγοντες |
Citation: | les Macédoniens disent: Bilippe, Balacrus, Béronice, [pour Philippe, Phalacrus, Phéronice]. | Difficile d'en savoir plus qu'un état de ce nom au début de notre ère (dialectal ? analogie avec les composés à 1er membre thématique ?). Dans les Actes de Pilate (IVe siècle, non consulté) on trouverait Berenikè et Beronikè pour la sainte à la serviette et la 2nde leçon est confirmée par l'emprunt latin Veronica, le B grec étant alors devenu spirant. C'est de lui que nous tenons notre Véronique.
• Enfin, Nικήφορος, Nicéphore, est lui un simple tatpuruṣa ou composé déterminatif (endocentrique et régressif) : « porteur de la victoire » comme Citation: | πτολί-πορθος « destructeur (nom d'agent thématique sur πέρθω « dévaster, ravager ») de ville (πτόλις = πόλις) » (dit d'Arès) |
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