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semensat
Inscrit le: 20 Aug 2005 Messages: 863 Lieu: vers Toulouse
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écrit le Sunday 03 Dec 06, 15:44 |
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La table
O- On remarque qu'il y a deux groupes de cognats : un en m-s-, l'autre en t-b-, qu'on étudiera donc séparément.
I- Les mots en t-b-
1- Toute la liste de cognat commence par t, On a donc *t-.
2- Preque tous les cognats ont ensuite plus loin dans le mot un l ou rarement un r. On conclut donc à un *t-l-.
3- La voyelle après le t- est uniformément un a. D'où : *ta-l-.
4- La voyelle finale est également bien souvent un a, rarement un e. On en déduit *ta-la-.
5- Ce qu'il y a entre le ta- et l -l- pose plus du problème : vo, ou b, ou v, ou u. Si de plus, on prend en compte d'autres cognats de sens proches (et dans la branche romane, cette fois ), on peut rajouter tábua et tabla tavula . On émet donc l'hypothès d'un *-bu- originel, qui a pu soit : perdre son b, en faire un v, et/ou perdre le u (partiellement dans le cas du vo). On en conclut *tábula- "table". (La place de l'accent justifiant la faiblesse du *-bu-)
II- Les mots en m-s-
1- Tous ces mots partagent les consonnes m initiale et s médiale. On en conclut *m-s-.
2- Elle partagent également le a final. *m-sa-.
3- La voyelle médiale peut être un a, un e (le plus souvent), ou un ai (autre écriture de -e- ¿?). J'en conclus à *mesa-.
4- En cherchant bien, on découvre également mensa mesa mensa. on peut donc supposer l'existence d'un *-n- qui s'intercale entre *-e- et *-s-. On conclut *mé(n)sa- "table".
III- Sens de *tabula-
Dans les cognats, tabla, et tábua, et taulo signifient planche, quand tauladou signifie planche à pain (et la plupart des mots provençaux de racine taul- ont un rapport avec une planche). D'où l'on conclut à l'existence en PEM de deux mots :
- *mé(n)sa- "table", le mot PEM pour table.
- *tábula- "planche, dont le sens a varié dans un certain nombre de langues vers celui de table, par méthonymie.
Dernière édition par semensat le Sunday 03 Dec 06, 17:50; édité 1 fois |
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meuuh
Inscrit le: 12 Jun 2006 Messages: 982 Lieu: Mie en ole opaštuja Karjalašša
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écrit le Sunday 03 Dec 06, 16:24 |
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1e pers. du sing.
1-On remarque que la consonne initiale est dans chaque langue fille /p/. On conclut donc un PEM en *p-.
2-La deuxième consonne est sans doute en /t/ ou /d/, en donnant /ss/ en portugais et italien sûrement avec une évolution semblable au bas-allemand: t/d > ts/ds > ss. On conclut donc la forme PEM *p-T-, T signifiant "soit /t/ soit /d/".
3-La première voyelle est dans la majorité des langues fille, un /o/ qui sans doute a donné /ue/ en espagnol, /eu/ en français et /u/ en catalan. (on remarque par ailleurs que ces 3 évolutions sont liées géographiquement dans l'est.). On peut donc supposer que la forme ancienne était *poT-.
4-Enfin on remarque que les seules langues à ne pas avoir de voyelle finale sont le francais, le catalan et le roumain. On peut donc supposer que la forme PEM avait une voyelle finale. On peut observer que la majorite se termine en /o/ et de plus que cela se retrouve dans des langues aussi éloignées que l'italien et le portugais. Ainsi, on suppose une forme PEM en *poTo-.
5-On peut aussi supposer un affaiblissemnet de la consonne /t/ en /d/ et même sa disparition très nette en Alpin pòio. En effet, en occitan par exemple, on retrouve le /t/ à la 3e personne du singulier ainsi que dans l'ancienne forme de l'italien può (puote). On peut donc supposer mais de manière plus hypothétique, un PEM en *poto-.
Donc, *poTo-/poto- = je peux
2e pers. du sing.
1-Le radical reste identique dans la majorité des langues filles et laisse donc supposer un un radical en *poT-/pot-.
2-Une majeure partie des langues filles ont un consonne finale /s/ qui laisse penser qu'elle est tombée dans les autres langues et que la forme du PEM est *poT-s-/pot-s.
3-La voyelle du suffixe est présente en occitan et en castillan. Il est difficile de penser qu'une voyelle /e/ soit apparu dans deux langues englobant le catalan sans que celui-ci soit touché. On peut donc penser que c'est le catalan qui s'en est démarqué en perdant sa voyelle et que donc la forme PEM comporte une voyelle, que l'on suppose être la même que dans ses langues filles. Ainsi on peut pensezr que la forme PEM est *poTes-/potes-.
Donc *poTes-/potes- = tu peux
3e pers. du sing.
1- Le radical reste identique, donc *poT-/pot-.
2-On remarque qu'il existe une voyelle finale en castillan, portugais et roumain pourtant éloignés géographiquement, ce qui laisse supposer qu'elle a disparue dans les autres langues romanes. La forme PEM supposée est donc *poTe-/pote-.
donc *poTe-/pote- = il peut |
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semensat
Inscrit le: 20 Aug 2005 Messages: 863 Lieu: vers Toulouse
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écrit le Sunday 03 Dec 06, 18:46 |
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Note : je reviens sur ma reconstitution de "eau" -> *ákwa- serait plus correct, l'accent étant à cette place dans la majorité des langues filles, et cette place expliquant la diphtonguaison en ai ou ja.
Première personne singulier
Je suis globalement d'accord avec meuuh, cependant, il reste quelques imperfections. Je ne pense pas que le ss puisse simplement s'expliquer par assibilation, car celle-ci se produit plutôt au contact de voyelles d'avant (e/i) et de plus, comment alors expliquer que podes ne soit pas devenu *posses, lui aussi ? Je penche plutôt pour une forme *pótso-, peut-être déjà assimilée en *pósso-, et régularisée dans certaines langues en *póto- selon le radical des autres personnes.
Deuxième personne singulier
D'accord avec meuuh : *pótes-
Troisième personne singulier
En alpin, toutes les formes ont amui le -t- radical, sauf la 3ème sg. Pourquoi ? sûrement parce que le PEM avait un *-t comme terminaison (cf. la conjugaison du français, t est une marque de 3ème sg. De plus, le sarde a podet. Je reconstruirais plutôt *pótet-.
Première personne pluriel
L'accent change de place, entrainant la changement de radical en français, wallon, espagnol, et roumain. Les terminaisons sont : imus, ons, ans, èm, emos, plus l'italien qui fait possiamo (comme à la 1ère sg. ¿?). Le e se retrouve majoritairement au début, mais dans certaines langues, il y a une voyelle différente de la 3ème pl. qui elle semble réunire un e dans presque toutes les langues, donc il y a dû y avoir assimilation. Le français, le wallon, et la 1ère sg. suggèrent un *-o-. Ensuite, il y a un m ou un n, qui semble être une assimilation partielle par le s. Après, u ou o ; le sarde étant le plus proche de ce que nous avons reconstruit jusqu'à présent, je penche pour *-u-. Pour finir, on a un s ou rien. D'où la reconstitution *pot(s)ómus-.
Deuxième personne pluriel
L'accent est à nouveau déplacé. La terminaison se compose d'un t, suivi parfois d'un e ou d'un i, et fini souvent par un s (le z désignant à l'origine le son /ts/). Il semble cette fois encore y avoir un *-e- entre la terminaison et le radical. D'où : *potétis-.
Troisième personne pluriel
Cette fois, la terminaison semble être un n, éventuellement suivi d'un t, notemment en sarde. L'italien présente à nouveau une forme en poss-. La voyelle intercalaire est manifestement un e. On obtient : *pót(s)ent-.
Infinitif
podère polu poder poudé poder poder potere putere
Le changement de radical en et le sarde montrent que l'accent est sur la deuxième syllabe. Les langues s'ccordent à peu près toutes pour une terminaison *-er-, et ont un e encore après. Donc on conclut : *potére-.
Conclusion
Infinitif : *potére-
1 sg : *pót(s)o-
2 sg : *pótes-
3 sg : *pótet-
1 pl : *pot(s)ómus-
2 pl : *potétis-
3 pl : *pót(s)ent- |
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Jean-Charles
Inscrit le: 15 Mar 2005 Messages: 3124 Lieu: Helvétie
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écrit le Monday 04 Dec 06, 1:26 |
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meuuh a écrit: | ... une évolution semblable au bas-allemand: ... | C'est pas permis ! |
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meuuh
Inscrit le: 12 Jun 2006 Messages: 982 Lieu: Mie en ole opaštuja Karjalašša
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écrit le Monday 04 Dec 06, 2:17 |
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à jean charles: bah, de toute façon, j'avais faux...
à semensat: Es-tu sûr que l'on peut s'avancer à dire que la consonne centrale est un /t/ et non un /d/?... Même si cela parraît être le plus vraissemblable, je pense qu'il faut se méfier... |
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Jean-Charles
Inscrit le: 15 Mar 2005 Messages: 3124 Lieu: Helvétie
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écrit le Monday 04 Dec 06, 5:12 |
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Il me semble que les consonnes qu'on devine sont parfois un choix qui demande à être étayé plus. En fait, je me demande parfois si on peut vraiment discriminer entre des choix multiples. Évidemment, comme je ne connais pas la réponse, je ne peux ni confirmer, ni infirmer la pertinence de ces choix. Je peux juste noter que je n'arriverais pas à décider une chose plutôt que l'autre avec les éléments à disposition dans le premier message (ou, alors, il faut le compléter avec des éléments que Nikura n'a pas cités, histoire de tous avancer sur les mêmes bases).
Par exemple, je me satisfais parfaitement de savoir si c'est V-U-W-GU, sans devoir obligatoirement discriminer au stade où nous sommes. |
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semensat
Inscrit le: 20 Aug 2005 Messages: 863 Lieu: vers Toulouse
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écrit le Tuesday 05 Dec 06, 16:44 |
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@meuuh : non, on ne peut pas encore. Il faudrait par de nombreuses comparaisons montrer que l'italien ou le roumain sont plus conservatrices sur les consonnes pour le démontrer. |
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Blisco
Inscrit le: 10 Dec 2006 Messages: 10 Lieu: Bruxelles
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écrit le Saturday 16 Dec 06, 20:01 |
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Sans être linguiste, il me semble utile d'apporter encore quelques mots la dessus.
Exemple le Noz du polonais qui a plus de mots latins que l'on ne croit et
le Gnot du frioulan ainsi que la taule et podê, podin, podeis, pós, podi, ecc. |
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Viking
Inscrit le: 16 Dec 2006 Messages: 103 Lieu: Forchies-la-Marche
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écrit le Saturday 16 Dec 06, 20:10 |
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Quand on voit qu'il y a des rapports entre l'allemand et le polonais et que l'allemand découle du latin... Exemple: au revoir en allemand: aufwiedersehen et en polonais: dowidzenia et la particule "zenia" fait évidemment penser un peu au néerlandais en même temps "zien". De plus, pour ce qui est des points communs entre le latin et le polonais, ben je dirais aussi qu'il y a les déclinaisons comme en allemand d'ailleurs. |
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Lou caga-blea
Inscrit le: 05 Sep 2006 Messages: 513 Lieu: Nissa
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écrit le Saturday 16 Dec 06, 20:54 |
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Intéressant ce petit jeu, mais on voit avec le problème de "pouvoir" qu'on arrive vite à une impasse si l'on ne fait pas l'hypothèse 1) que le latin lui-même était un diasystème soumis au temps, bref que selon le lieu, les époques et les locuteurs plusieurs formes, ayant pu donner des rejetons romans, ont coexisté (opp. it. posso vs. oc. pòdi; doublet tabula/mensa) 2) que les langues romanes a leur tour n'ont pas tout hérité en bloc, mais ont remodelé cet héritage: par ex. le -i de occ. pòdi provient d'une réfection analogique.
On remarque aussi que la reconstitution formelle est plus aisée que la reconstruction sémantique: la répartition sémantique proposée par Semensat n'est pas bonne; mensa est la table à manger, tabula a le sens de objet de surface plane, et qu'il a donc autant le sens de planche que de table, pour des usages différents de celui de la prise de nourriture; ce n'est donc pas une évolution romane ou proto-romane, mais une sélection qui date du latin.
Pour en finir avec mensa, il y a quand même un problème: comment expliquer la forme it. mensa avec -n-, quand toutes les autres langues ont une forme avec -s-, et qu'on a vu qu'en italien avec le nom de la nuit, l'assimilation est la norme en italien? En théorie, il faut d'abord expliquer cette anomalie avant de poser un étymon. Qu'en dites-vous ???
Enfin, une question: vous ignoriez vraiment les étymons latins de ces formes, ou vous en aviez quand même une petite idée ? |
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Lucas
Inscrit le: 29 Sep 2006 Messages: 113 Lieu: Lausanne
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écrit le Tuesday 19 Dec 06, 15:41 |
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Blisco a écrit: | Sans être linguiste, il me semble utile d'apporter encore quelques mots la dessus.
Exemple le Noz du polonais qui a plus de mots latins que l'on ne croit |
Merci de préciser que t´es pas linguiste: "noz", c´est un mot indo-européen, pas latin... |
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Josika
Inscrit le: 05 Mar 2007 Messages: 5
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écrit le Monday 05 Mar 07, 15:32 |
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Le roumain "masa" vient de turc. Pour connaître mieux le roumain il est necessaire de parler le turc et une langue slave. Mais...aussi beaucoup de problemes: par exemple pour le roumain pisica nous n'avons pas un equivalent en turc, où il est disparu. Il y a en azeri, une langue plus conservatoire que le turc: pisic /pichic/. |
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András Animateur
Inscrit le: 20 Nov 2006 Messages: 1488 Lieu: Timişoara, Roumanie
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écrit le Monday 05 Mar 07, 19:31 |
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Selon http://dexonline.ro, masă ne vient pas du turc, mais du latin mensa, et pisică ne vient pas du turc non plus, mais de l'interjection pis avec laquelle on appelle le chat en roumain + le suffixe diminutif -ică. Peut-être qu'en azéri il y a eu un processus semblable.
Par ailleurs, il n'est pas nécessaire de parler le turc pour mieux connaître le roumain. L'influence du turc n'est pas si importante que ça. Les emprunts lexicaux du turc ne représentent que 0,73% du vocabulaire roumain. Quant aux langues slaves, en effet, ce n'est pas inutile de les connaître, puisqu'il y au total 14,17% de mots d'origine slave en roumain, dont
* 9,18% du slave ancien
* 2,6% du bulgare
* 1,12% du russe
* 0,85% du serbe
* 0,23% de l'ukrainien
* 0,19% du polonais.
Ces chiffres, je les ai pris dans la Wikipédia roumaine, article "Limba română" (http://ro.wikipedia.org/wiki/Limba_rom%C3%A2n%C4%83#Alte_influen.C5.A3e). |
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Josika
Inscrit le: 05 Mar 2007 Messages: 5
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écrit le Wednesday 07 Mar 07, 20:03 |
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L'ethimologie de DEX c'est une faute. Cf Cioranescu. C'est pas un bon instrument de ling. hist., mais il offre beaucoup d'exemples et on peut demarrer la rechèrche comparative. |
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Nikura
Inscrit le: 08 Nov 2005 Messages: 2035 Lieu: Barcino / Brigantio
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écrit le Thursday 08 Mar 07, 2:25 |
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Du joli travail !
Seul hic la reconstitution du verbe "pouvoir" en latin. Il y a un piège car ce verbe êtait dormé sur le verbe "esse", être, donc:
possum, potes, potest, possumus, potestis, possunt
L'italien donnait de bonnes pistes avec les formes "possiamo" et "possono" par exemple.
Autre point, le -kt- latin de NOCTE peut être retrouvé grâce au -pt- roumain, mais le -p- ne peut être considéré comme original puisqu'on a dans les autres langues, des évolutions clairement exempte de la présence d'un -p-. |
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