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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3833 Lieu: Paris
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écrit le Tuesday 14 Aug 12, 16:30 |
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Andrew a écrit: | Bien que j'eus l'occasion de partager avec ces solitaires des cabines de conduite, |
Votre plume a retenu les deux dernières gouttes d'encre qui aurait permis d'achever "bien que j'eusse". Il n'est pas d'usage ici de signaler les fautes et coquilles de ses petits camarades, mais je fais une exception amicale pour vous simplement parce vous semblez aimer les jolies tournures et le beau langage et qu'il ne faut pas le gâter par une vilaine conjugaison. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11119 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 14 Aug 12, 18:07 |
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Personnellement, je comprends cet indicatif, mode du réel plus approprié à la situation qu'un subjonctif de pure forme. Ce subjonctif exigé dans nos écoles après bien que est ce que j'ai jadis et ailleurs appelé une "règle de grammairien". Il ne pèse pas lourd face à la narration d'une histoire bien réelle racontée au passé simple de l'indicatif.
Bref, les grammairiens ont leurs règles mais la langue a les siennes, et elles ne concordent pas toujours. Moi aussi j'aurais écrit "j'eus". Bien que est certes une conjonction mais il n'y a aucune raison pour qu'il ait sur la forme verbale qui le suit une influence autre que celle - nulle - des adverbes pourtant ou néanmoins, dont il a ici très exactement le sens. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3833 Lieu: Paris
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écrit le Tuesday 14 Aug 12, 18:42 |
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Subjonctif de pure forme, certes, mais subjonctif obligé dans la langue classique et correcte dont nous nous éloignons naturellement d'autant plus vite que les formes du subjonctif imparfait sont généralement mal maîtrisées. Les confusions entre "eus" et "eusse" sont monnaie courante.
Cette histoire de subjonctif/indicatif, mode de l'imaginaire ou du virtuel par rapport au mode du réel, n'est pas absolue. Pourquoi dit-on je souhaite qu'il vienne et j'espère qu'il viendra ? Pourquoi la plupart des gens préfèrent-ils dire "après qu'il soit sorti" plutôt que l'indicatif ? L'usage correct de la langue ne se contente pas de dichotomies si simples, et le fait que "bien que" suivi du subjonctif ait su contenter tout le monde jusqu'au XIXe montre qu'on peut très bien exprimer un fait du réel avec le subjonctif. En dehors de deux ou trois exceptions qu'on peut justifier autrement (éloignement du verbe et de la conjonction par exemple), il n'y a que depuis le XXe siècle qu'un mouvement se dessine en faveur de l'indicatif dans ces cas-là. C'était considéré comme une faute de grammaire dans ma jeunesse. Si l'usage s'en répand suffisamment, ce ne le sera plus.
Mais notre nouvel ami Andrew a montré son attachement aux règles classiques de la langue. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11119 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 15 Aug 12, 9:39 |
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embatérienne a écrit: | il n'y a que depuis le XXe siècle qu'un mouvement se dessine en faveur de l'indicatif dans ces cas-là. |
Il semble bien que non...
Grévisse a écrit: | Historique — L’hésitation entre l’indic. et le subj. est très ancienne dans la langue. Elle était courante au XVIIe et au XVIIIe s. encore. Malherbe réservait le subj. aux choses douteuses, l’indic. aux choses certaines : cf. Brunot, Hist., t. III, p. 575. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3833 Lieu: Paris
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écrit le Wednesday 15 Aug 12, 10:54 |
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Je n'ai pas le temps d'approfondir aujourd'hui, mais je ne pense pas que le passage que tu cites de Grevisse se rapporte précisément à l'hésitation après "bien que", seul cas que je visais. As-tu des exemples dans la littérature des XVIIe et XVIIIe siècles d'indicatif employé après un "bien que" concessif ? |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11119 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 15 Aug 12, 12:21 |
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embatérienne a écrit: | Pourquoi la plupart des gens préfèrent-ils dire "après qu'il soit sorti" plutôt que l'indicatif ? |
Je propose ICI (page 2) une réponse à cette question. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11119 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Wednesday 15 Aug 12, 12:26 |
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embatérienne a écrit: | As-tu des exemples dans la littérature des XVIIe et XVIIIe siècles d'indicatif employé après un "bien que" concessif ? |
Pour le moment j'ai surtout constaté que nos grands auteurs évitent soigneusement d'employer cette conjonction. J'ai pris Descartes en flagrant délit d'utiliser un indicatif imparfait dans son Discours où il est vrai que le subjonctif est très majoritaire. Certaines formes des verbes du premier groupe sont ambigües mais je t'accorde que Descartes aurait probablement juré qu'il s'agissait de subjonctifs. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3833 Lieu: Paris
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écrit le Wednesday 15 Aug 12, 16:29 |
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Il me semble que le mouvement pour le subjonctif après "bien que" a commencé au XVIIe siècle, et la langue classique, celle des XVIIIe et XIXe siècle, n'a utilisé que lui, à de rares exceptions près (notamment pour des conditionnels).
L'utilisation de l'indicatif était effectivement courante et même normale dans la langue antérieure à la seconde moitié du XVIIe siècle, mais le fait d'utiliser aujourd'hui une syntaxe d'hier ou même d'avant-hier, si ce n'est pas archaïsme délibéré, est ce qu'on appelle une faute de syntaxe. Une fois de plus, la faute passera peut-être dans l'usage, nous ramenant donc à un état antérieur de la langue. Why not ? L'indicatif ne me choque pas dans le principe ; il est juste une infraction à la règle du jeu ; si l'on change la règle du jeu, il n'y a plus d'infraction ! |
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