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parare (latin) / *per- (indoeuropéen) - Le mot du jour - Forum Babel
parare (latin) / *per- (indoeuropéen)
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 9:02 Répondre en citant ce message   

Il existe une racine indoeuropéenne *per- "devant, contre, placer devant (notamment pour se protéger). (Voir la grande famille PREMIER).

De cette racine très prolifique est issu le verbe latin paro, -are qui a ce sens fondamental de "mettre, placer quelque chose devant ou avant", d'où les sens dérivés "préparer, orner, et disposer les choses pour éviter que, se prémunir contre, se protéger contre". Notons le participe passé paratus "bien pourvu de tout, bien équipé et armé contre".

Commençons par ce dernier sens, le sémantisme de la protection.

On le retrouve en français dans les locutions parer un coup et parer au plus pressé, et comme premier élément de noms empruntés à l’italien, comme parasol et paravent, ou adaptés de cette langue, comme parapet ou parachute. (Ne pas confondre ce para- avec celui qui est issu du grec et qui entre dans la composition de nombreux autres mots en para-).

On le retrouve dans quelques dérivés de parer :
emparer (s'... de), qui est un emprunt à l'ancien provençal emparar « protéger, défendre ». (TLF)
désemparé (antonyme du précédent, au participe passé)
remparer : « entourer de fortifications ». D'où
rempart : déverbal de remparer, avec influence graphique de boulevart, forme ancienne de boulevard. « tout ce qui fortifie, défense » (TLF)

Et on le retrouve en espagnol dans parar, parada, amparar, amparo, desamparado, mots sur lesquels nos amis hispanophones auront peut-être des choses à dire. Je leur en laisse le soin.

Dans mon prochain post, j'en viendrai aux autres sens du latin paro, -are.

À suivre donc.


Dernière édition par Papou JC le Wednesday 05 Oct 16, 3:01; édité 3 fois
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 11:41 Répondre en citant ce message   

Le sémantisme de l’ornementation :

On retrouve paro, -are « orner » dans certaines acceptions du verbe français parer et dans quelques-uns de ses dérivés, avec les acceptions les plus anciennes :
parer : Voir parer 1 dans le TLF. Notamment la forme pronominale se parer de (cf. la locution se parer des plumes du paon).
parure (de mariée, de lit, etc.)
parement (d’autel, habillement, maçonnerie)
parage : autrefois, « action de parer, d'orner, terme technique (viticulture, boucherie) » (TLF)
déparer : Vieux. « Dégarnir de ce qui pare, ôter une parure ». (TLF)
appareil : Vieux, littér., rare : « Ensemble des apprêts (en particulier la tenue, la toilette, etc.) qui contribuent à donner à une personne une apparence extérieure généralement très favorable ». D’où l’expression « dans le plus simple appareil » (= nu).

(À suivre)
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Jacques



Inscrit le: 25 Oct 2005
Messages: 6525
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Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 12:27 Répondre en citant ce message   

angl. paring knife : petit couteau de cuisine, surtout utilisé pour éplucher et couper les légumes < to pare


angl. to pare : v.1300 couper pour éliminer les bords, peler. < anc. fr. parer
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 16:01 Répondre en citant ce message   

Le sémantisme de la préparation.

On ne retrouve plus guère parer avec le sens du latin paro, -are « préparer » que dans la locution parer à toute éventualité.
En effet, pour ce sens, parer a passé le relais à son dérivé préparer, du latin praeparare « ménager d'avance, apprêter d'avance », dérivé de paro, -are avec le préfixe prae- « devant, en avant ».
La création de ce dérivé dès le latin prouve que la présence dans la forme nue de la racine indo-européenne *per- n’était déjà plus sentie.
Dérivés : préparation, préparatifs.

Je crois avoir fait à peu près le tour des sens admis et reconnus des deux verbes, le latin et le français, et de leurs dérivés respectifs.

Dans un prochain post, je me permettrai de faire quelques hypothèses sur le rattachement à ce couple de quelques mots latins et français dont l'origine est pour le moment considérée comme obscure.

Mais avant, je remercie quiconque voudra bien commenter ou compléter ce qui a déjà été dit.
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 16:47 Répondre en citant ce message   

Hypothèses quant au rattachement éventuel à paro, -are « se protéger contre » de quelques mots latins :

- parada « tente dressée sur une barque ». Ernout et Meillet : rare et tardif. Peut-être celtique. Semble sans rapport avec l’iranien *partaka- « rideau », persan parda, emprunté par l’arménien (partak) et le syriaque, dans lequel le sens de « rideau » doit être le résultat d’une spécialisation secondaire, le sens premier devant être « division ».
On voit que les auteurs inclinent à rattacher parada à pars, partis.
Sauf le respect que j’ai pour eux, je crois qu’ils font fausse route, que le mot n’est pas d’origine celtique et que le détour par l’orient ne s’impose pas. Pour moi, ce parada latin se rattache sans problème, ni morphologique ni sémantique, à paro, -are « se protéger contre ».

- parma « bouclier ». Diminutif : parmula. Ernout et Meillet : Sans doute emprunté, comme maint nom d’armes. Mais l’hypothèse d’un emprunt au celtique ne repose sur rien.
J’avance l’hypothèse que parma est issu d’un *parama qu’il ne serait pas absurde de rapprocher également de paro, -are « se protéger contre ».
Problèmes : Il faudrait expliquer la fonction du suffixe -ma (Le retrouve-t-on dans d’autres termes désignant des armes ou des instruments) et la disparition du deuxième a de *parama (A-t-on d’autres exemples similaires ?)

J’ai deux autres mots latins à proposer mais j’aimerais avoir d’abord des réactions à ce post. Et si possible des réponses a mes questions. Merci d'avance.
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Gaspard



Inscrit le: 06 Aug 2008
Messages: 215
Lieu: France

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 18:11 Répondre en citant ce message   

En espagnol on peut aussi citer paro qui désigne le chômage en Espagne et la grève en amérique latine.
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Horatius
Animateur


Inscrit le: 11 Apr 2008
Messages: 695

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 18:37 Répondre en citant ce message   

Papou JC a écrit:
On ne retrouve plus guère parer avec le sens du latin paro, -are « préparer » que dans la locution parer à toute éventualité.
L'emploi de "parer" dans le vocabulaire de la cuisine relève bien, me semble-t-il, de l'idée de "préparation", non ?

Papou JC a écrit:
Pour moi, ce parada latin se rattache sans problème, ni morphologique ni sémantique, à paro, -are « se protéger contre ».
Une suffixation en -da ? ça ne me dit rien !

Pour "parma", j'y réfléchis.
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 18:49 Répondre en citant ce message   

Gaspard a écrit:
En espagnol on peut aussi citer paro qui désigne le chômage en Espagne et la grève en amérique latine

Oui, c'est un sens de "arrêt" - le verbe est parar - que le français parer n'a que dans le vocabulaire très technique de l'équitation.
C'est un sens dérivé de "placer devant" (s.e. "pour arrêter ce qui avance" et donc pas (forcément) pour se protéger.
C'est donc un quatrième sémantisme, dont je ne comptais pas parler car il est absent du verbe latin.
D'après le TLF, c'est un emprunt à l'espagnol :

A. − Empl. intrans. [En parlant d'un cheval] Synon. de s'arrêter.Ce cheval pare sur les hanches (Ac.1935).
− En empl. subst. masc. Arrêt relevé du cheval. Un beau parer. (Ds Littré, DG).
B. − Empl. trans. Arrêter, retenir un cheval. (Dict.xixeet xxes.).
Étymol. et Hist. 1575 parer «arrêter court (un cheval)» (L'Ecuirie du Sr Federic Grison [trad. de l'ital.], fo16 ro); id. se parer «s'arrêter court (d'un cheval)» (ibid., fo15 vo). Empr., d'abord par l'intermédiaire d'un texte ital., à l'esp. parar «arrêter, s'arrêter» (dep. 1330-43, J. Ruiz), sens issu de celui de «placer, se placer» (ces deux sens étant propres aux lang. ibéro-romanes), propr. «préparer, disposer» (parer1*). Voir Cor.-Pasc.


L'espagnol a aussi développé le verbe comprar "acheter", à partir d'un des verbes comparo ... à ne pas confondre avec comparar "comparer", issu de l'autre verbe comparo, homonyme du précédent, et sans rapport avec notre paro, -are.
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José
Animateur


Inscrit le: 16 Oct 2006
Messages: 10946
Lieu: Lyon

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 18:55 Répondre en citant ce message   

Papou JC a écrit:
Oui, c'est un sens de "arrêt" - le verbe est parar - que le français parer n'a que dans le vocabulaire très technique de l'équitation.

Pour moi, le verbe parer est plus associé à l'escrime qu'à l'équitation.
Mais je ne connais rien à l'équitation (et pas grand-chose à l'escrime...).
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Papou JC



Inscrit le: 01 Nov 2008
Messages: 11169
Lieu: Meaux (F)

Messageécrit le Saturday 01 Oct 16, 19:46 Répondre en citant ce message   

En escrime, une parade (que j'ai oubliée dans ma petite liste) relève du sémantisme de la protection. Mais on voit voit que les deux sémantismes sont très liés : arrêter un coup dirigé vers soi, c'est bien s'en protéger.
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Jacques



Inscrit le: 25 Oct 2005
Messages: 6525
Lieu: Etats-Unis et France

Messageécrit le Sunday 02 Oct 16, 3:35 Répondre en citant ce message   

angl. to rain on (someone's) parade : 1941 démolir l'enthousiame de quelqu'un. Lit. " pleuvoir sur la parade de quelqu'un" (ici, parade a, dans les 2 langues, le sens de défilé joyeux)

angl. hit parade : liste des succès ou des personnes à succès
Il s'agit sans doute d'une allusion à la parade du cirque, un défilé permettant de présenter en ville les éléments les plus attrayants du spectacle.

angl. hit : 1811, succès, dér. de " to hit the mark " lit. " atteindre la marque (le niveau) "
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Papou JC



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Messageécrit le Sunday 02 Oct 16, 5:31 Répondre en citant ce message   

Horatius a écrit:
L'emploi de "parer" dans le vocabulaire de la cuisine relève bien, me semble-t-il, de l'idée de "préparation", non ?

Je viens de relire attentivement le parer 1 du TLF.
Oui, il y a une deuxième partie qui relève de la préparation, mais toujours avec l'objectif de donner à la chose préparée un aspect plus agréable. Pour moi, cet objectif d'ornementation est plus important que l'acte même de préparer qui reste très vague tant qu'on ne dit pas ce qu'on prépare ou ce à quoi on se prépare et pourquoi.
Remarquons que c'est tout de même par le sémantisme de l'ornementation que le TLF commence à nous parler de ce verbe. Il me semble que c'est un indice de son importance, de sa fréquence d'usage.
J'apprends à cette occasion le dérivé technique paraison dont j'ignorais l'existence. (Verrerie).
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Papou JC



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Messageécrit le Sunday 02 Oct 16, 5:48 Répondre en citant ce message   

Horatius a écrit:
Une suffixation en -da ? ça ne me dit rien !

Moi, non plus. Sauf en castillan, mais je doute que le -da castillan (issu du -ta latin) ait pu rebondir sur le latin avant la première attestation du mot, toute tardive qu'elle soit.
Au fait, à quelle époque commence-t-on à voir apparaître ce suffixe -da en Espagne ?
Il faudrait en savoir plus sur les textes dans lesquels on trouve ce mot (dates, lieux) ...
Et aussi pourquoi Ernout et Meillet n'excluent pas une origine celtique. Sur quoi se fondent-ils ? Sur le brittonique parawd (p. 484, en bas de la page) dont ils disent qu'il a le sens de parātus ?
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Papou JC



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Messageécrit le Sunday 02 Oct 16, 5:52 Répondre en citant ce message   

Jacques a écrit:
angl. to rain on (someone's) parade : 1941 démolir l'enthousiame de quelqu'un. Lit. " pleuvoir sur la parade de quelqu'un" (ici, parade a, dans les 2 langues, le sens de défilé joyeux), etc.

Ce parade-là relève clairement de l'ornementation (Voir TLF, parade 1)

Je reviens au latin parada.
Une origine iranienne n'est pas impossible, mais une autre que celle mentionnée par Ernout et Meillet.
Je veux parler du vieux perse pairi-daēza dont est issu le mot paradis.
Les composants IE sont *per-, “en avant, contre, autour” + *dʰeigʰ-, “former, construire”.
Cela peut donner tout aussi bien un jardin clos de murs qu'une tente.
Auquel cas, parada et paradisus auraient le même étymon vieux perse.
Ils seraient bien apparentés à paro, -are mais en remontant à l'indoeuropéen. Et seulement par leur première syllabe.
Il resterait à savoir par où serait passé ce mot entre le vieux perse et son apparition tardive en latin...


Dernière édition par Papou JC le Sunday 02 Oct 16, 10:51; édité 1 fois
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Papou JC



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Messageécrit le Sunday 02 Oct 16, 10:35 Répondre en citant ce message   

Parlons de pauper (> fr. pauvre).
Ernout et Meillet le rattachent à pario, -ire "enfanter, produire" dont nous reparlerons.
Pour eux, le pauper est donc "celui qui produit peu". La société romaine était-elle à ce point productiviste ?

Pour ma part, le pauvre, c'est plutôt "celui qui est dé-muni, dés-emparé", sans ressources devant lui, pas ou peu d'argent de côté, qui est peu protégé (cf. esp. un desamparado), ce qui me ferait rattacher pauper plutôt à paro, -are "se protéger contre". (Cf. le concept de protection sociale)
(Je signale quand même qu'Ernout et Meillet voient un lien de parenté entre pario et paro.)


Dernière édition par Papou JC le Monday 03 Oct 16, 9:57; édité 1 fois
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