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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3511 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 27 Nov 17, 9:11 |
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Tu fais mal tes recherches, j'avais répondu ici (7e post) à max-azerty (mais, il est vrai, par lassitude, sans le citer). |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3511 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 27 Nov 17, 9:15 |
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Papou JC a écrit: | Tu me sembles bien sûr de toi. Qu'un simple terme de musique ait connu cette extension sémantique à contre-sens... permets-moi d'en douter. |
Je ne m'attendais pas à ce que tu sois d'accord avec une quelconque de mes suggestions … |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11076 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 27 Nov 17, 9:28 |
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1. Tu me fais un mauvais procès. Un de ces jours je vais aller à la pêche de toutes les nombreuses fois où, au cours de ces années, j'ai apprécié tes interventions savantes et claires, et l'ai dit. Ces appréciations seraient sans valeur si je ne me permettais pas aussi de te critiquer, parfois à tort, probablement, et parfois à raison, probablement.
2. Je ne vois pas le rapport entre ton renvoi ci-dessus et le sujet du jour, à savoir si le français fougue vient du latin focus ou du latin fuga. Pour le moment, tu penses fuga, comme tous les dictionnaires, et je pense focus. C'est vrai que je suis encore bien seul... Quelqu'un va-t-il oser me donner raison ?
Voir aussi fugue. |
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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3511 Lieu: Nissa
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écrit le Monday 27 Nov 17, 10:14 |
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Alors, reprenons les choses simplement. Une fugue (fr.), que ce soit la fuite d'un jeune ou un mode de composition musicale, se dit en italien fuga. Qui se prononce /fouga/ avec l'accent d'intensité sur le /ou/.
Or, depuis un bon moment, l'habitude en France (et probablement ailleurs) est d'utiliser la langue italienne dans le vocabulaire des styles musicaux. Des mots comme maestoso, vivace, forte, pianissimo, grazioso, sont compris par tous les amateurs de musique classique et ils sont toujours prononcés à l'italienne (vivatche, gratsiozo, …), même si l'accent n'est pas toujours parfait. Ce qui fait que, un a atone étant vite amui, l'italien fuga se prononce à peu près comme le français fougue. Bon.
Passons à cette fugue des musiciens. Le TLFi dit simplement : Forme de composition contrapuntique fondée sur l'entrée et le développement successifs de voix selon un principe strict d'imitation qui donne à l'auditeur l'impression que chaque voix fuit ou en poursuit une autre. (c'est moi qui emphatise)
Eh oui, dans une poursuite, il y a toujours un poursuivant et un poursuivi. Et, soit on s'intéresse à l'un, soit on s'intéresse à l'autre ! Sans aucune contradiction, on a en même temps la fuite du fuyard et la vivacité du poursuivant ! C'est l'ensemble des deux qui porte les sèmes de la vitesse et de l'énergie …
Je pensais que tout ceci allait de soi dans ma première formulation. Mais, bon, quand c'est la critique qui prime … |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11076 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 27 Nov 17, 10:46 |
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Bon, admettons.
Et donc, par le plus grand des hasards,
- le français fougueux vient de fougue qui vient de fuga et
- l'espagnol fogoso vient de fuego qui vient de focus.
Le hasard fait bien les choses !
Je n'ironise pas, je me demande si c'est soutenable.
Ou alors c'est le DRAE qui se trompe et fogoso vient lui aussi de fuga. Ce qui n'interdirait pas une influence sémantique de fuego. Mais je ne me risquerais pas à proposer cette étymologie devant l'Académie Royale !
Est-on sûr que les italiens fuga et foga sont des doublets ? Je crois que c'est le point clé.
D'après Treccani, oui...
Il faut reconnaître que fuga, foga et fougue sont féminins, alors que focus est masculin. C'est un argument. Et ça n'en est pas un car du latin au français, ce ne sont pas les mots transgenres qui manquent, arbre (m) < arbos (f), par exemple, pour ne citer que le cas le plus connu.
En provençal, fogo (= fougue) aussi est féminin malgré sa terminaison masculine et le Félibrige donne son étymon l'italien foga comme issu de focus.
Il donne aussi le gascon afougamen qui a le sens de "phosphorescence de la mer".
Je me sens soudain moins seul... |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Monday 27 Nov 17, 11:24 |
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Je pense que le DRAE se trompe, le f- initial de fogoso montre que ce mot ne s'est pas formé en castillan. Les vrais dérivés de fuego, hogar "foyer" par exemple, ont un h- initial. Dans fuego, l'accent a entrainé une diphtongaison -o- > -ue- et cette diphtongue a permis de conserver le [ɸ] initial, devenu [f] en castillan moderne. Dans les dérivés de fuego, l'accent n'est pas à la même place, la voyelle n'est pas diphtonguée et le f- initial du latin est régulièrement devenu h-. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11076 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 27 Nov 17, 11:39 |
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Et donc le Félibrige aussi se trompe ? Je note qu'en provençal il y a des variantes avec h initial... |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Monday 27 Nov 17, 13:21 |
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Mistral se trompe quand il dit que l'italien foga vient de focus car l'italien conserve le -c- simple intervocalique (lat. ŭrtīca > it. ortica).
Le gascon connaît le phénomène f > h comme le castillan, et sans doute pour les mêmes raisons substratiques, mais de façon bien plus solide. D'après ce qu'écrit Pierre Bec dans Les Interférences linguistiques entre gascon et languedocien dans les parlers du Comminges et du Couserans : Essai d'aréologie systématique, même un xénisme comme café est touché, alors pourquoi pas fougue :
h est donc un phonème très solide dans un idiome où f est encore senti comme étranger, du moins en haut-gascon. On comprend dans ces conditions, qu'un mot d'emprunt comme café, emprunt pourtant relativement récent (XVIIème au plus tôt), ait été adapté pendant longtemps au système phonique des parlers montagnards. Les vieux Castillonnais disaient encore : ek kahè : kafè n'est qu'un gallicisme phonétique récent (Ce fait nous a été signalé par M. l'Abbé Castet d'Argein).
Le FEW donne fŭga comme étymon de fougue et suppose un emprunt à l'italien, mais il propose une autre voie d'emprunt que le vocabulaire musical. |
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embatérienne Animateur
Inscrit le: 11 Mar 2011 Messages: 3811 Lieu: Paris
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écrit le Monday 27 Nov 17, 14:03 |
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Le phénomène f>h s'entend aussi dans l'anglais parlé par les Japonais où "coffee" sonne plutôt comme kohhi. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11076 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 27 Nov 17, 16:24 |
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J'avais négligé de vérifier si fougue était traité par Guiraud. Il l'est. C'est bref, je recopie ce qu'il en dit :
Le provençal fougasse, dérivé indubitable de focus, montre que c'est aussi le cas de toute cette famille : la fougue n'est pas une fuite mais un feu "ardeur de l'âme, enthousiasme, vivacité, etc."
Le féminin fougue est le déverbal du verbe fouga "faire feu et flammes, fulminer, s'emporter" qui postule un roman *focare "faire du feu". D'où l'italianisme foucade. |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Monday 27 Nov 17, 18:46 |
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Cette explication est phonétiquement cohérente et, du point de vue sémantique, elle explique très bien certaines expressions donnée par Mistral, comme fogo de la fèbre "feu de la fièvre". |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11076 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 27 Nov 17, 19:58 |
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Quid du fogoso espagnol ? Une origine provençale ? |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Monday 27 Nov 17, 20:05 |
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Pourquoi pas, je crois qu'il y a d'autres exemples de provençalismes apportés en castillan par les Francos. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11076 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Monday 27 Nov 17, 20:15 |
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Sans parler de l'italien foga qui doit, lui aussi, être d'origine provençale.
Je crois que la voie est enfin éclaircie. On va dire merci à Pierre Guiraud et à Frédéric Mistral. |
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Pascal Tréguer
Inscrit le: 16 Dec 2012 Messages: 694 Lieu: Lancashire - Angleterre
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écrit le Tuesday 28 Nov 17, 18:47 |
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loco-foco: 1835, membre ou sympathisant d’une faction radicale du Parti Démocrate, plus tard du Parti Démocrate dans son ensemble
origine : loco-foco, le nom d’allumettes auto-inflammables (par frottement sur une surface rugueuse) – apparemment des mots latins locus, endroit, et focus, foyer, feu, la signification du mot composé étant peut-être feu qui n’a pas besoin d’être introduit de l’extérieur, qui se trouve déjà à l’endroit
Le terme a été appliqué à cette faction radicale du Parti Démocrate parce que lors d’un meeting de ce parti en novembre 1835, à Tammany Hall, New York, les opposants à cette faction éteignirent les lumières, ce à quoi les membres de cette faction réagirent en allumant des bougies avec des allumettes loco-foco, dont ils s’étaient munis en prévision de cette opposition.
publicité parue dans le Democratic Free Press (Detroit) le 8 juillet 1835 :
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