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Outis Animateur
Inscrit le: 07 Feb 2007 Messages: 3509 Lieu: Nissa
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écrit le Wednesday 15 Nov 17, 16:01 |
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Même en cours d'automne (il fait assez beau à Nice), le dernier aïoli de la saison justifie une petite sieste post-prandiale.
Le petit somme de la sixième heure canonique comme le précise le latin hora sexta que les Espagnols ont simplifié en siesta. Fort à tort, un gougnafier de Villeneuve-Loubet a d'ailleurs nommé Siesta la boite de nuit (oui, de nuit !) qu'il a fait bâtir sur la plage …
J'aurais volontiers ajouté à ce fil le mot pénéqué, en français du midi, qui désigne une courte sieste au chant des cigales, et toujours après ce redoutable aïoli. Hélas, rien à faire pour en trouver une origine ! J'espère que de distingués Babéliens sauront me tirer d'affaire … |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Wednesday 15 Nov 17, 17:08 |
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Ce mot s'écrit penequet en orthographe mistralienne. L'étymon semble être le latin poena "peine". |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11198 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 16 Nov 17, 12:02 |
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Je ne crois pas, si je lis bien Mistral Peneca de la som. Plutôt pencher (la tête, de sommeil). Grande famille PENDRE. |
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José Animateur
Inscrit le: 16 Oct 2006 Messages: 10944 Lieu: Lyon
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écrit le Thursday 16 Nov 17, 13:16 |
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Lire le Fil sieste (Dictionnaire Babel).
Outis a écrit: | Le petit somme de la sixième heure canonique comme le précise le latin hora sexta que les Espagnols ont simplifié en siesta. |
Dit autrement :
- Empr. à l'esp. siesta « sieste » (dep. ca 1220-50, Berceo), issu p. ell. du lat. hora sexta « la sixième heure du jour », c'est-à-dire la sixième des heures canoniales qui correspondait à l'heure de midi, donc l'heure la plus chaude. [ TLFi ]
Le TLFi indique :
- sieste : [ par méton., rare. ] personne qui fait la sieste
Avec l'accablante chaleur, les hommes se sont mis à dormir (...), partout, des siestes lourdes qui s'écroulent au fond de la tranchée et qu'il faut enjamber [ Vercel, Cap. Conan, 1934, p. 225 ]
- siester : [ verbe intrans.,rare. ] faire la sieste
J'attends patiemment deux heures, résistant de mon mieux à une forte envie de siester. [ Colette, Claudine à l'école, 1900, p. 301 ]
Outis a écrit: | Même en cours d'automne (il fait assez beau à Nice), le dernier aïoli de la saison justifie une petite sieste post-prandiale. |
C'est l'occasion de lire le MDJ ailloli & aïoli. |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Thursday 16 Nov 17, 17:37 |
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L'étymon de pencher est *pĕndĭcare. Dans cette position, un ĭ atone subi la syncope dans tous les dialecte gallo-roman. Donc, *pĕndĭcare n'a pas pu donner peneca. L'expression peneca de la som doit s'expliquer par le sens "souffir", quelque chose comme "souffrir du sommeil". Ce peut aussi être une métaphore, à partir du sens "se flétrir, se faner" ; les végétaux fanés ont souvent l'apex qui s'incline, comme la tête de quelqu'un qui sommeille. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11198 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Thursday 16 Nov 17, 23:11 |
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Alors voici une autre piste. (J'ai du mal à associer la peine à la sieste).
On part de petit somme ou petite sieste. Le mot somme ou sieste serait sous-entendu, il resterait l'équivalent niçois de petit, provençal pechin, pichin, esp. pequeño, du latin pisinnus, même sens, mais avec métathèse. Résultat : penequet.
Je vois aussi qu'existe en provençal le mot pinquet ou pinguet, variante de piquet, rapproché par Mistral de l'espagnol pequeño. Répété, c'est l'équivalent du français petit à petit.
Sous toutes réserves, bien entendu. Mais la disparition du nom dans les locutions nominales de type {adj, nom} est un phénomène assez courant, à la source de la nominalisation de nombreux adjectifs. C'est, sans aller plus loin, le cas de sexta, reste de la locution hora sexta.
Remarque : on parle plus souvent d'une petite sieste que d'une sieste tout court. (Voir le post initial d'Outis : petite sieste, petit somme). Idem en espagnol : una pequeña siesta ou una siestecita. En arabe la forme du mot est celle d'un diminutif. Comme si la caractéristique principale d'une sieste était sa brièveté, ce qui est souvent le cas. Mais comme c'est un moment très agréable, même si elle dure un peu longtemps, on dira toujours qu'on a fait une petite sieste en donnant alors à petit une valeur affective.
Curieusement, on dit piquer un somme ou un roupillon mais piquer une sieste me semble plus rare. D'ailleurs, pourquoi piquer ? L'italien piccolo signifie "petit" et on vient de voir que le provençal piquet aussi...
Le problème, c'est que rien de tout ça n'explique vraiment la locution provençale peneca de la som... À moins que ...
Se pourrait-il que penequet soit issu du latin pungere "piquer" ? Y a-t-il un obstacle phonétique majeur ? On devrait plutôt avoir quelque chose comme *poun(e)quet, mais sait-on jamais... |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Monday 20 Nov 17, 22:10 |
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Le latin pŭngĕre donne pougne "poindre, piquer" en bon provençal.
Ton rapprochement avec les cognats provençaux de l'espagnol pequeño est très astucieux, d'autant que pequin existe à côté de pechin. Le FEW range cette famille de mots sous trois racines proches : *pitš-, *pīkk- et *pekk- (où l'on trouve pequin). Phonétiquement, ton hypothèse a l'air de fonctionner et le FEW liste des glissements de sens semblables à celui que tu invoques, comme pekẽn "cenelle" en Val d'Aoste. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11198 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 8:33 |
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En supposant que j'ai vu juste pour penequet, comment expliques-tu peneca de la som ? Il me semble difficile que peneca soit un dénominal de penequet...
À moins que le mot ne soit très ancien et que son origine soit oubliée. Il semble bien que ce soit le cas de Mistral lui-même qui, selon toi, se trompe en faisant venir peneca de *pĕndĭcare. C'est d'autant plus tentant quand on pense à l'expression française tomber de sommeil. De pencher à tomber, il n'y a pas loin... |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 13:00 |
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J'ai fini par trouver dans le FEW, sous l'étymon pĭnna, l'ancien provençal penecar "sommeiller" et ses descendants dans les langues d'oc modernes. La note 6), développée à la fin de l'article, discute de l'étymon, donne des cognats en italo-roman et réfute le lien qui est généralement fait avec *pĕndĭcare. En effet, le provençal ne connaît pas l'évolution -nd- > -n- et un -c- intervocalique en latin ne donne pas un -c- en provençal (pensons à prègo-diéu "mante religieuse" < lat. prĕcari, cité par Pagnol). Le FEW explique finalement peneca par pĭnna avec un suffixe -ĕccare, où le c géminé explique le c du provençal. J'espère qu'un meilleur germaniste que moi pourra confirmer que je n'ai pas fait de contre-sens.
Ton scepticisme sur le lien avec poena "peine" était tout à fait justifié ; sans tes remarques, j'aurais arrêté de chercher.
Dernière édition par Jeannotin le Tuesday 21 Nov 17, 13:08; édité 1 fois |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11198 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 13:07 |
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Du coup, mon hypothèse "petit" pour penequet est invalidée. Mais je me réjouis quand même d'avoir servi à qqch !
Penequet serait donc un déverbal de penecar. Bien, mais comment le FEW fait-il pour passer du latin pinna "plume, aile" à penecar "sommeiller" ? J'ai lu mais n'ai pas vu de lien sémantique. |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 17:58 |
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Le FEW écrit :
Wie die schwanzfeder gewisser vögel oder wie eine auf den hut gesteckte feder bei jeder bewegung des trägers sich neigen und schwanken, so auch der kopf des im sitzen schlummernden.
Je n'ai pas les compétences pour proposer une traduction, mais je crois que cela signifie que le mouvement des plumes de la queue de certains oiseaux, ou de la plume d'un chapeau, rappelle le dodelinement de tête d'une personne qui s’endort en position assise. Cela signifierait que peneca serait le parallèle sémantique du breton pouesañ-butun "piquer un somme", litt. "peser du tabac". Les mouvements de la balance à tabac rappellent les hochements de tête d'un dormeur. |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11198 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 18:15 |
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Ouais... Tu es convaincu ? |
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Jeannotin Animateur
Inscrit le: 09 Mar 2014 Messages: 879 Lieu: Cléden-Poher
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 18:49 |
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La démonstration est peut-être plus convaincante en VO ... |
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AdM Animateur
Inscrit le: 13 Dec 2006 Messages: 898 Lieu: L-l-N (Belgique)
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 19:25 |
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Jeannotin a écrit: | […] le mouvement des plumes […] rappelle le dodelinement de tête d'une personne qui s’endort en position assise. […] | Ce qui peut être rapproché de l'expression québécoise cogner des clous (qui signifie plutôt résister tant bien que mal à l'endormissement, piquer du nez). |
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Papou JC
Inscrit le: 01 Nov 2008 Messages: 11198 Lieu: Meaux (F)
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écrit le Tuesday 21 Nov 17, 19:58 |
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"rapproché", c'est vite dit ... Les plumes, les clous ... Franchement, je ne suis convaincu par rien de tout ça. Il a pourtant bien une origine, ce penequet, et ça ne doit pas être du ligure, tout de même ! |
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